- User17706Bon génie
Enfin, que diantre, on peut faire beaucoup plus simple, en parlant simplement de ce que le texte dit en toutes lettres et sans présenter des références extérieures comme indispensables (un individu qui n'aurait jamais entendu ne serait-ce que prononcer le nom de Spinoza pourrait comprendre ce texte à la perfection). Gardons-nous d'alimenter une névrose du « manque de connaissances » qui a probablement une sorte d'utilité tant qu'on s'intéresse à la dissertation, mais qui n'en a guère sitôt qu'on parle de l'explication de texte, où, presque toujours, l'essentiel de ce qui est à comprendre est écrit noir sur blanc sous les yeux du lecteur ; n'introduisons pas de complexité additionnelle dans un passage déjà délicat.
Kant dit qu'attribuer le caractère organisé des corps organisés à une « âme », c'est le soustraire à la nature. Et il présente cette attribution comme une des manières de faire de cette propriété qu'a la nature, dans ces corps, de s'organiser, un « analogon de la vie ». Compte tenu de cela, la conclusion s'impose : la « vie » est comprise dans cette phrase comme un propre de l'âme conçue en tant qu'extérieure à la nature (ce qui contribue à expliquer pourquoi, deux lignes plus haut, l'hylozoïsme est caractérisé comme contradictoire : le propre de la matière, c'est justement d'être inerte).
Donc, et sans référence à trop de connaissances extérieures :
Et rien n'indique que le mot de « vie » traduirait (bizarrement !) ψυχή plutôt que ζωή (qui est présent directement dans « hylozoïsme » et que, par conséquent, « vie » traduit). En revanche présenter l'âme comme principe de vie ou comme chose qui vit va bien (c'est d'ailleurs on ne peut plus traditionnel).
Là, je ne suis allé chercher nulle part ailleurs que dans le texte une définition de la « vie » (même remarque pour « nature ») ; je n'ai pas introduit dans le texte des distinctions qui n'y figurent pas textuellement (et qui appartiennent à un autre auteur). Je me suis contenté de paraphraser et de déplier une phrase de Kant. ((La difficulté, très réelle, qui subsisterait, ce serait de dire dans quelle mesure c'est à proprement parler encore le rôle d'analogon que joue alors ici la « vie ». Peu importe.))
Si l'on est à la recherche de ce qui se rapproche le plus d'une définition de la « vie » chez Kant, il faut regarder la Préface à la seconde Critique (texte allemand http://korpora.org/Kant/aa05/009.html dans la note) ou l'Introduction à la Métaphysique des mœurs (texte allemand http://korpora.org/Kant/aa06/211.html ).
Leben ist das Vermögen eines Wesens, nach Gesetzen des Begehrungsvermögens zu handeln : la vie est le pouvoir qu'a un être d'agir d'après les lois de la faculté de désirer.
Das Vermögen eines Wesens, seinen Vorstellungen gemäß zu handeln, heißt das Leben : le pouvoir qu'a un être d'agir conformément à ses représentations s'appelle vie.
Kant dit qu'attribuer le caractère organisé des corps organisés à une « âme », c'est le soustraire à la nature. Et il présente cette attribution comme une des manières de faire de cette propriété qu'a la nature, dans ces corps, de s'organiser, un « analogon de la vie ». Compte tenu de cela, la conclusion s'impose : la « vie » est comprise dans cette phrase comme un propre de l'âme conçue en tant qu'extérieure à la nature (ce qui contribue à expliquer pourquoi, deux lignes plus haut, l'hylozoïsme est caractérisé comme contradictoire : le propre de la matière, c'est justement d'être inerte).
Donc, et sans référence à trop de connaissances extérieures :
- Si, pour expliquer le caractère organisé des corps organisés, j'attribue la « vie » à la matière en tant que telle, j'en contredis le concept ;
- Si, pour expliquer le caractère organisé des corps organisés, j'introduis une « âme » (donc, comprend-on [sans quoi cette suggestion n'a pas de sens], quelque chose qui par définition est principe de vie ou est vivant),
- soit on admet que le corps est déjà organisé par lui-même, n'attendant que l'âme pour s'en servir, mais ça n'avance à rien, puisqu'on voulait expliquer qu'il le fût, et non ce qui peut bien lui arriver une fois qu'il l'est ;
- soit on postule que c'est l'âme qui l'organise, mais ce faisant, nous dit Kant, le corps organisé n'est plus un produit de la nature (et on comprend qu'il n'est plus un produit de la nature dans la mesure où il devient un produit de cette chose qu'est l'âme : le modèle de la vie ou du principe de vie est quasi-explicitement placé hors de la nature dans la mesure où [a] il est ici nommé une âme et [b] l'âme est présentée comme quelque chose qui par définition est hors nature).
Et rien n'indique que le mot de « vie » traduirait (bizarrement !) ψυχή plutôt que ζωή (qui est présent directement dans « hylozoïsme » et que, par conséquent, « vie » traduit). En revanche présenter l'âme comme principe de vie ou comme chose qui vit va bien (c'est d'ailleurs on ne peut plus traditionnel).
Là, je ne suis allé chercher nulle part ailleurs que dans le texte une définition de la « vie » (même remarque pour « nature ») ; je n'ai pas introduit dans le texte des distinctions qui n'y figurent pas textuellement (et qui appartiennent à un autre auteur). Je me suis contenté de paraphraser et de déplier une phrase de Kant. ((La difficulté, très réelle, qui subsisterait, ce serait de dire dans quelle mesure c'est à proprement parler encore le rôle d'analogon que joue alors ici la « vie ». Peu importe.))
Si l'on est à la recherche de ce qui se rapproche le plus d'une définition de la « vie » chez Kant, il faut regarder la Préface à la seconde Critique (texte allemand http://korpora.org/Kant/aa05/009.html dans la note) ou l'Introduction à la Métaphysique des mœurs (texte allemand http://korpora.org/Kant/aa06/211.html ).
Leben ist das Vermögen eines Wesens, nach Gesetzen des Begehrungsvermögens zu handeln : la vie est le pouvoir qu'a un être d'agir d'après les lois de la faculté de désirer.
Das Vermögen eines Wesens, seinen Vorstellungen gemäß zu handeln, heißt das Leben : le pouvoir qu'a un être d'agir conformément à ses représentations s'appelle vie.
- ParménideNeoprof expérimenté
J'étais à 10 000 lieues, évidemment, lors de mon travail sur le texte de me douter, que la définition de la vie ici mise en jeu était un point archidifficile. Difficulté localisée et que je ne repère même pas en tant que difficulté. Parce que pour repérer ça il faut une bonne connaissance de l'histoire de la philosophie.
Mais comme j'avais dit, pour moi, c'est à partir du moment où est abordée la beauté de la nature que le texte devient vraiment très dur. D'ailleurs , je ne sais pas si j'ai bien fait mais j'ai cru utile de parler du jugement esthétique réfléchissant, qui m'a semblé nécessaire lorsque Kant justement, parle de ce retour de la matérialité de l'objet sur l'intuition externe. Enfin j'ai évoqué ça en trois lignes avec mes fragiles souvenirs, de pourtant... ce sur quoi j'ai partiellement fait mon mémoire...
Je n'ai pas eu la sensation de problèmes de compréhension réels (enfin ce que j'appelle compréhension selon mes critères et qui visiblement n'ont rien à voir avec la compréhension théoriquement attendue de moi par le jury) jusqu'au moment où la beauté arrive dans le raisonnement.
A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
Mais comme j'avais dit, pour moi, c'est à partir du moment où est abordée la beauté de la nature que le texte devient vraiment très dur. D'ailleurs , je ne sais pas si j'ai bien fait mais j'ai cru utile de parler du jugement esthétique réfléchissant, qui m'a semblé nécessaire lorsque Kant justement, parle de ce retour de la matérialité de l'objet sur l'intuition externe. Enfin j'ai évoqué ça en trois lignes avec mes fragiles souvenirs, de pourtant... ce sur quoi j'ai partiellement fait mon mémoire...
Je n'ai pas eu la sensation de problèmes de compréhension réels (enfin ce que j'appelle compréhension selon mes critères et qui visiblement n'ont rien à voir avec la compréhension théoriquement attendue de moi par le jury) jusqu'au moment où la beauté arrive dans le raisonnement.
A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)
"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)
"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)
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https://www.babelio.com/monprofil.php
- RobinFidèle du forum
@ Pauvre Yorick
"Le vie est le pouvoir qu'à un être d'agir d'après les lois de la faculté de désirer."
"Le pouvoir qu'a un être d'agir conformément à ses représentations s'appelle la vie."
C'est très intéressant ce lien qu'établit Kant entre la vie et le désir. Jean Beaufret rapproche le mot "Dasein" (l'Etre là, Le "là" de l'Etre) chez Heidegger du mot Psuché dans le sens où Aristote emploie ce terme dans le Péri Psuché (Traité de l'âme).
"On peut donc hésiter entre deux facultés de l'âme, l'intelligence et l'appétit, pour savoir à laquelle des deux il faut attribuer la locomotion, en admettant toutefois que l'imagination est aussi une sorte de pensée intellectuelle qui meut les animaux autres que l'homme, et n'ayant point comme lui l'intelligence et le raisonnement. L'intelligence qui peut produire le mouvement est. du reste, l'intelligence pratique et non l'intelligence spéculative. L'intelligence pratique se propose toujours un but, une fin que n'a jamais l'autre. Mais tout appétit tend nécessairement à quelque chose ; et c'est alors cette chose dont il y a appétit qui devient pour l'intelligence pratique le principe du mouvement. L'objet désiré meut la pensée et l'intelligence, qui à son tour communique le mouvement au corps; mais, au fond, c'est l'objet désiré qui est la cause première de la locomotion. L'imagination même, quand elle meut l'animal, ne peut le mouvoir sans l'appétit. Donc on peut dire, en résumé, que c'est l'objet de l'appétit, du désir, qui est le seul et vrai principe du mouvement." (Aristote, Péri Psuché)
Parménide : la lecture d'Aristote est PRIMORDIALE !!!!!!!!
Donc, ce qui est vrai pour les élèves de terminale (la connaissance de la doctrine de l'auteur et des auteurs auxquels il se réfère, explicitement ou implicitement, n'est pas requise) ne l'est évidemment plus pour les étudiants qui passent le CAPES ou l'AGREG. C'est évident, mais ça va mieux en le disant.
Parménide écrit :
"A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
Va pour Darwin, mais il faut prendre des précautions (horizon de savoir, anachronisme).
Vous vous demandez, si j'ai bien compris, ce que vient faire la beauté dans le raisonnement de Kant.
La principale difficulté du texte de Kant réside dans le renversement (apparent) de sa position de thèse : thèse : on ne peut pas (vraiment) penser l'art par analogie avec la nature // antithèse : la nature, en tant que "dunamis", puissance créatrice, se manifeste dans les (certaines) œuvres d'art.
Il faut sans doute comprendre ce paradoxe à la lumière de la définition de la beauté : "le Beau est ce qui plaît universellement sans concept". La beauté relève d'un jugement "réfléchissant" et non "déterminant". Je dis : "C'est beau !", mais je ne peux pas expliquer pourquoi.
Contrairement à Aristote, Kant opère une distinction qui est propre au siècle des Lumières entre l'artiste et l'artisan. Pour Kant, on peut "expliquer" comment procède l'artisan, mais on ne peut pas expliquer comment procède l'artiste. Si on peut l'expliquer, alors son œuvre n'est pas une véritable œuvre d'art.
Pour Kant, le raisonnement par analogie n'est pas satisfaisant car il y a de l'inconnaissable : "J'ai limité le savoir pour laisser une place à la Foi." : la Nature comme dunamis, puissance productrice, le génie de l'artiste qui n'est pas la simple habileté ou le talent, ainsi que l’œuvre d'art.
Kant distingue deux types de facultés de juger :
- réfléchissante quand seul le particulier est donné [placé devant un objet singulier, le sujet ne dispose que de sa propre réflexion pour généraliser. La faculté de juger doit alors se donner à elle-même un principe, une idée d'universalisation : Kant l'appelle finalité naturelle, non parce qu'on la trouve dans la nature (ce qui serait le cas d'une finalité pratique), mais parce que son unité est présupposée a priori de manière transcendantale par le sujet. C'est le cas du jugement esthétique relatif à la beauté. Le jugement esthétique relatif au sublime fonctionne selon le même principe, mais hors de toute finalité.
- déterminante quand le particulier est donné, et qu'en outre l'universel comme règle, principe ou loi est lui aussi donné empiriquement : placé devant un objet singulier, le sujet dispose d'une règle empirique dont il peut se servir, ce qui donne un moyen de "subsumer" le particulier sous l'universel. C'est le cas du jugement pratique.
"Le vie est le pouvoir qu'à un être d'agir d'après les lois de la faculté de désirer."
"Le pouvoir qu'a un être d'agir conformément à ses représentations s'appelle la vie."
C'est très intéressant ce lien qu'établit Kant entre la vie et le désir. Jean Beaufret rapproche le mot "Dasein" (l'Etre là, Le "là" de l'Etre) chez Heidegger du mot Psuché dans le sens où Aristote emploie ce terme dans le Péri Psuché (Traité de l'âme).
"On peut donc hésiter entre deux facultés de l'âme, l'intelligence et l'appétit, pour savoir à laquelle des deux il faut attribuer la locomotion, en admettant toutefois que l'imagination est aussi une sorte de pensée intellectuelle qui meut les animaux autres que l'homme, et n'ayant point comme lui l'intelligence et le raisonnement. L'intelligence qui peut produire le mouvement est. du reste, l'intelligence pratique et non l'intelligence spéculative. L'intelligence pratique se propose toujours un but, une fin que n'a jamais l'autre. Mais tout appétit tend nécessairement à quelque chose ; et c'est alors cette chose dont il y a appétit qui devient pour l'intelligence pratique le principe du mouvement. L'objet désiré meut la pensée et l'intelligence, qui à son tour communique le mouvement au corps; mais, au fond, c'est l'objet désiré qui est la cause première de la locomotion. L'imagination même, quand elle meut l'animal, ne peut le mouvoir sans l'appétit. Donc on peut dire, en résumé, que c'est l'objet de l'appétit, du désir, qui est le seul et vrai principe du mouvement." (Aristote, Péri Psuché)
Parménide : la lecture d'Aristote est PRIMORDIALE !!!!!!!!
Donc, ce qui est vrai pour les élèves de terminale (la connaissance de la doctrine de l'auteur et des auteurs auxquels il se réfère, explicitement ou implicitement, n'est pas requise) ne l'est évidemment plus pour les étudiants qui passent le CAPES ou l'AGREG. C'est évident, mais ça va mieux en le disant.
Parménide écrit :
"A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
Va pour Darwin, mais il faut prendre des précautions (horizon de savoir, anachronisme).
Vous vous demandez, si j'ai bien compris, ce que vient faire la beauté dans le raisonnement de Kant.
La principale difficulté du texte de Kant réside dans le renversement (apparent) de sa position de thèse : thèse : on ne peut pas (vraiment) penser l'art par analogie avec la nature // antithèse : la nature, en tant que "dunamis", puissance créatrice, se manifeste dans les (certaines) œuvres d'art.
Il faut sans doute comprendre ce paradoxe à la lumière de la définition de la beauté : "le Beau est ce qui plaît universellement sans concept". La beauté relève d'un jugement "réfléchissant" et non "déterminant". Je dis : "C'est beau !", mais je ne peux pas expliquer pourquoi.
Contrairement à Aristote, Kant opère une distinction qui est propre au siècle des Lumières entre l'artiste et l'artisan. Pour Kant, on peut "expliquer" comment procède l'artisan, mais on ne peut pas expliquer comment procède l'artiste. Si on peut l'expliquer, alors son œuvre n'est pas une véritable œuvre d'art.
Pour Kant, le raisonnement par analogie n'est pas satisfaisant car il y a de l'inconnaissable : "J'ai limité le savoir pour laisser une place à la Foi." : la Nature comme dunamis, puissance productrice, le génie de l'artiste qui n'est pas la simple habileté ou le talent, ainsi que l’œuvre d'art.
Kant distingue deux types de facultés de juger :
- réfléchissante quand seul le particulier est donné [placé devant un objet singulier, le sujet ne dispose que de sa propre réflexion pour généraliser. La faculté de juger doit alors se donner à elle-même un principe, une idée d'universalisation : Kant l'appelle finalité naturelle, non parce qu'on la trouve dans la nature (ce qui serait le cas d'une finalité pratique), mais parce que son unité est présupposée a priori de manière transcendantale par le sujet. C'est le cas du jugement esthétique relatif à la beauté. Le jugement esthétique relatif au sublime fonctionne selon le même principe, mais hors de toute finalité.
- déterminante quand le particulier est donné, et qu'en outre l'universel comme règle, principe ou loi est lui aussi donné empiriquement : placé devant un objet singulier, le sujet dispose d'une règle empirique dont il peut se servir, ce qui donne un moyen de "subsumer" le particulier sous l'universel. C'est le cas du jugement pratique.
- User17706Bon génie
Non : des connaissances historiques ne sont pas tellement en jeu ici. Que le degré de la difficulté n'ait pas été repéré, surtout en temps limité, est normal. En revanche il est normal de voir qu'il y en a une, dès lors que Kant écrit « on s’approche peut-être davantage de cette qualité insondable quand on la nomme un analogon de la vie ». En effet, si la « qualité insondable » dont on parle est le propre de la vie au sens biologique, quel sens cela aurait-il de parler d'un « analogon de la vie » à moins justement de donner à ce terme un autre sens ? Encore une fois, compare-t-on une chose avec elle-même pour mieux la comprendre ? C'est cela qui doit mettre la puce à l'oreille.Parménide a écrit:J'étais à 10 000 lieues, évidemment, lors de mon travail sur le texte de me douter, que la définition de la vie ici mise en jeu était un point archidifficile. Difficulté localisée et que je ne repère même pas en tant que difficulté. Parce que pour repérer ça il faut une bonne connaissance de l'histoire de la philosophie.
Ça n'a rien à voir avec un manque de connaissances en histoire de la philosophie. On n'exige pas d'un candidat au CAPES qu'il puisse dire dans quel sens chaque auteur emploie chaque mot, l'auteur fût-il Kant. (Évidemment, si c'était le mot « impératif », ce serait différent.)
Risqué. Un emm***eur dans mon genre risque d'y voir de l'imprécision (sur Darwin au moins). Or, vu que c'est Kant qui est à commenter, c'est dommage de prendre des risques en essayant de faire quelque chose qui n'est nullement exigé... très probablement les écarts vis-à-vis de la norme spécifique dont il est ici question désignent-ils par exemple les formes inattendues que peut prendre un tronc d'arbre : la phrase montre que Kant raisonne au niveau de l'individu et non, comme Darwin, au niveau de l'espèce, en ce qui concerne la « conservation ».Parménide a écrit: A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
(De façon générale, bien des choses dans Kant auraient été écrites différemment si Kant avait vécu après Darwin.)
- RobinFidèle du forum
"Parménide a écrit: A un moment aussi : j'ai cru nécessaire de faire un anachronisme en parlant de Darwin. ça me semblait difficilement évitable :"Elle (la nature)s’organise bien plutôt elle-même et dans chaque espèce de ses produits organisés, en suivant certes dans toute l’espèce un seul et même modèle, mais pourtant aussi avec des écarts appropriés qu’exige, en fonction des circonstances, la conservation de soi-même."
Risqué. Un emm***eur dans mon genre risque d'y voir de l'imprécision (sur Darwin au moins). Or, vu que c'est Kant qui est à commenter, c'est dommage de prendre des risques en essayant de faire quelque chose qui n'est nullement exigé... très probablement les écarts vis-à-vis de la norme spécifique dont il est ici question désignent-ils par exemple les formes inattendues que peut prendre un tronc d'arbre : la phrase montre que Kant raisonne au niveau de l'individu et non, comme Darwin, au niveau de l'espèce, en ce qui concerne la « conservation ».
(De façon générale, bien des choses dans Kant auraient été écrites différemment si Kant avait vécu après Darwin.). La notion "d'évolution des espèces" n'existe pas du temps de Kant, mais la notion d'espèce, oui.
La phrase de Kant peut faire penser à Darwin, mais je pense également que c'est trompeur.
Kant évoque dans la phrase citée la notion "d'invariance reproductive" (les individus se reproduisent à l'identique... Les chiens ne font pas de chats...) et explique les changements par "les circonstances et la conservation de soi-même", par exemple la coloration de la peau. Il faudrait allez voir des exemples dans "Sur l'emploi des principes téléologiques en philosophie" (Kant et la Philosophie de l'Histoire, Denoël/Gonthier, 1947, p. 128)
Risqué. Un emm***eur dans mon genre risque d'y voir de l'imprécision (sur Darwin au moins). Or, vu que c'est Kant qui est à commenter, c'est dommage de prendre des risques en essayant de faire quelque chose qui n'est nullement exigé... très probablement les écarts vis-à-vis de la norme spécifique dont il est ici question désignent-ils par exemple les formes inattendues que peut prendre un tronc d'arbre : la phrase montre que Kant raisonne au niveau de l'individu et non, comme Darwin, au niveau de l'espèce, en ce qui concerne la « conservation ».
(De façon générale, bien des choses dans Kant auraient été écrites différemment si Kant avait vécu après Darwin.). La notion "d'évolution des espèces" n'existe pas du temps de Kant, mais la notion d'espèce, oui.
La phrase de Kant peut faire penser à Darwin, mais je pense également que c'est trompeur.
Kant évoque dans la phrase citée la notion "d'invariance reproductive" (les individus se reproduisent à l'identique... Les chiens ne font pas de chats...) et explique les changements par "les circonstances et la conservation de soi-même", par exemple la coloration de la peau. Il faudrait allez voir des exemples dans "Sur l'emploi des principes téléologiques en philosophie" (Kant et la Philosophie de l'Histoire, Denoël/Gonthier, 1947, p. 128)
- ParménideNeoprof expérimenté
Pauvre Yorick :
Même si on met à part l'aspect connaissances extérieures, il reste que je suis passé à coté du texte aux trois quarts parce que je suis encore bien trop faible en "méthode".
Après, que tout l'aspect érudition soit relativement secondaire, je veux bien le croire (je pense qu'il va vraiment falloir que, tant pour la dissertation que le commentaire, je me fasse à cette idée, sinon j'y suis encore dans 10 000 ans !). Mais ce ne sera pas le cas sur tous les textes ! Et de ce point de vue c'est la loterie ! Je pense que ça ne peut pas arriver mais tu imagines si on tombe sur Wittgenstein ! J'ai souvent pensé que sur un auteur comme ça, pas forcément très "touristique", le jury est pour ainsi dire condamné à choisir un passage qui n'exige pas de candidats des connaissances sur le-dit auteur.
Je me rappelle le texte de 2008, celui de ma première "tentative" : texte de Leibniz sur la conception cartésienne de l'erreur. A moins que je me trompe là aussi, mais sans une bonne connaissance de Descartes sur la question ce doit être bien plus malcommode de commenter.
Quand j'étais en master je me rappelle j'ai eu une fois un texte de Kant à commenter comme "entrainement". Géographiquement juste en amont de celui-ci, juste avant, c'était le fameux passage où Kant dénonce la position mécaniste (ça aussi j'en ai parlé dans ce récent devoir, d'ailleurs) et dit qu'une horloge ne saurait en engendrer d'autres contrairement à la nature qui se reproduit, etc... Et par rapport à ça j'avais évoqué l'élan vital de Bergson. ça avait outré le correcteur sans même qu'il m'explique pourquoi...
Même si on met à part l'aspect connaissances extérieures, il reste que je suis passé à coté du texte aux trois quarts parce que je suis encore bien trop faible en "méthode".
Après, que tout l'aspect érudition soit relativement secondaire, je veux bien le croire (je pense qu'il va vraiment falloir que, tant pour la dissertation que le commentaire, je me fasse à cette idée, sinon j'y suis encore dans 10 000 ans !). Mais ce ne sera pas le cas sur tous les textes ! Et de ce point de vue c'est la loterie ! Je pense que ça ne peut pas arriver mais tu imagines si on tombe sur Wittgenstein ! J'ai souvent pensé que sur un auteur comme ça, pas forcément très "touristique", le jury est pour ainsi dire condamné à choisir un passage qui n'exige pas de candidats des connaissances sur le-dit auteur.
Je me rappelle le texte de 2008, celui de ma première "tentative" : texte de Leibniz sur la conception cartésienne de l'erreur. A moins que je me trompe là aussi, mais sans une bonne connaissance de Descartes sur la question ce doit être bien plus malcommode de commenter.
Quand j'étais en master je me rappelle j'ai eu une fois un texte de Kant à commenter comme "entrainement". Géographiquement juste en amont de celui-ci, juste avant, c'était le fameux passage où Kant dénonce la position mécaniste (ça aussi j'en ai parlé dans ce récent devoir, d'ailleurs) et dit qu'une horloge ne saurait en engendrer d'autres contrairement à la nature qui se reproduit, etc... Et par rapport à ça j'avais évoqué l'élan vital de Bergson. ça avait outré le correcteur sans même qu'il m'explique pourquoi...
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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)
"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)
"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)
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- User17706Bon génie
Alors pour le coup, il y a une règle assez simple : pas de référence plus récente que le texte sans une excellente raison. Il y a très peu de cas où on est amené à la laisser de côté, celle-là.
Mais je maintiens que le repérage de la difficulté attachée au mot « vie » n'est ni un problème de « méthode » au sens strict, ni un problème de connaissances ; c'est un « bête » (quoique délicat) problème de lecture, c'est-à-dire que la phrase nous pose objectivement une difficulté de compréhension à cet endroit, à cause de ce mot. Une lecture suffisamment lente, suffisamment attentive et suffisamment soucieuse de donner de la cohérence à ce qu'elle a sous les yeux, va buter ici. Lire c'est identifier les points où l'effort de comprendre rencontre des résistances.
Pour 2008, oui, il fallait connaître au moins dans ses grandes lignes la théorie de l'erreur qu'on rencontre dans la IVe Méditation. Mais ça, pour le coup, c'est difficile de dire que c'est une exigence exorbitante !
Mais je maintiens que le repérage de la difficulté attachée au mot « vie » n'est ni un problème de « méthode » au sens strict, ni un problème de connaissances ; c'est un « bête » (quoique délicat) problème de lecture, c'est-à-dire que la phrase nous pose objectivement une difficulté de compréhension à cet endroit, à cause de ce mot. Une lecture suffisamment lente, suffisamment attentive et suffisamment soucieuse de donner de la cohérence à ce qu'elle a sous les yeux, va buter ici. Lire c'est identifier les points où l'effort de comprendre rencontre des résistances.
Pour 2008, oui, il fallait connaître au moins dans ses grandes lignes la théorie de l'erreur qu'on rencontre dans la IVe Méditation. Mais ça, pour le coup, c'est difficile de dire que c'est une exigence exorbitante !
- RendashBon génie
Parménide a écrit:Pauvre Yorick :
Je me rappelle le texte de 2008, celui de ma première "tentative" : texte de Leibniz sur la conception cartésienne de l'erreur. A moins que je me trompe là aussi, mais sans une bonne connaissance de Descartes sur la question ce doit être bien plus malcommode de commenter.
Je pense que Descartes fait partie des auteurs dont on s'attend à ce qu'un candidat au CAPES de philosophie les maîtrise un minimum.
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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
- ParménideNeoprof expérimenté
PauvreYorick a écrit:Alors pour le coup, il y a une règle assez simple : pas de référence plus récente que le texte sans une excellente raison. Il y a très peu de cas où on est amené à la laisser de côté, celle-là.
Ce serait le rêve s'il existait un certain nombre d'autres règles du même genre pour me guider dans cette méthodologie ! Mais il semblerait que ce ne soit pas le cas.
Oui donc, l'histoire de Darwin ne peut avoir sa place ici.
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Mon problème est un problème de fond. Ce n'est pas seulement le problème de ne pas maîtriser une méthode de commentaire dans un contexte académique et institutionnel correspondant à une stratégie de recrutement, et du même coup, d'enseignement. Mais plus fondamentalement il s'agit du problème de ne pas maîtriser le pain quotidien de la pratique philosophique à savoir le travail sur les textes.
Ce que je dis là aurait sans doute davantage sa place dans le fil que tu as créé mais je me demande si s'atteler à la méthode de l'épreuve du concours n'est pas secondaire par rapport à la compréhension des textes dans le cadre de lectures personnelles. Et là maîtrise des exercices formels viendrait comme une conséquence logique, une sorte de valeur ajoutée
C'est une question essentielle
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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)
"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)
"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)
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- User17706Bon génie
Où est le smiley « feu d'artifice » ?Parménide a écrit: je me demande si s'atteler à la méthode de l'épreuve du concours n'est pas secondaire par rapport à la compréhension des textes dans le cadre de lectures personnelles. Et la maîtrise des exercices formels viendrait comme une conséquence logique
Je ne saurais qu'approuver ça.
- sur darwin:
- On peut expliquer rapidement pourquoi la référence paraît risquée ici. Kant fait, je pense, avant tout référence au fait que l'organisme individuel s'adapte, au cours de sa vie, et en fonction des nécessités de sa conservation, à son milieu. (Pas nécessairement à l'idée de « variétés » subspécifiques ; mais ça se discute.)
L'adaptation individuelle ne joue pas de rôle dans la théorie darwinienne standard. Ce sont les variations interindividuelles innées qui sont ensuite sélectionnées par la pression du milieu, de sorte que la notion d'« adaptation » prise en charge par la théorie darwinienne n'a de sens qu'au niveau de l'espèce (les « non-adaptés », non-adaptés au changement contingent de milieu par exemple, ne s'adaptent pas, ils meurent ; ceux qui ont, par pur hasard, les caractéristiques innées leur permettant de survivre, deviennent majoritaires au niveau de l'espèce, avant de se faire laminer, d'ailleurs, par le prochain changement contingent de circonstances).
L'opuscule proposé par Robin (Usage des principes téléologiques...) concerne surtout l'idée de « races humaines » ; il peut être pertinent vis-à-vis du problème qui nous occupe, mais il est aussi d'un usage délicat.
- RobinFidèle du forum
PauvreYorick a écrit:Où est le smiley « feu d'artifice » ?Parménide a écrit: je me demande si s'atteler à la méthode de l'épreuve du concours n'est pas secondaire par rapport à la compréhension des textes dans le cadre de lectures personnelles. Et la maîtrise des exercices formels viendrait comme une conséquence logique
Je ne saurais qu'approuver ça.
- sur darwin:
On peut expliquer rapidement pourquoi la référence paraît risquée ici. Kant fait, je pense, avant tout référence au fait que l'organisme individuel s'adapte, au cours de sa vie, et en fonction des nécessités de sa conservation, à son milieu. (Pas nécessairement à l'idée de « variétés » subspécifiques ; mais ça se discute.)
L'adaptation individuelle ne joue pas de rôle dans la théorie darwinienne standard. Ce sont les variations interindividuelles innées qui sont ensuite sélectionnées par la pression du milieu, de sorte que la notion d'« adaptation » prise en charge par la théorie darwinienne n'a de sens qu'au niveau de l'espèce (les « non-adaptés », non-adaptés au changement contingent de milieu par exemple, ne s'adaptent pas, ils meurent ; ceux qui ont, par pur hasard, les caractéristiques innées leur permettant de survivre, deviennent majoritaires au niveau de l'espèce, avant de se faire laminer, d'ailleurs, par le prochain changement contingent de circonstances).
L'opuscule proposé par Robin (Usage des principes téléologiques...) concerne surtout l'idée de « races humaines » ; il peut être pertinent vis-à-vis du problème qui nous occupe, mais il est aussi d'un usage délicat.
Oui, effectivement. CF également : "Définition du concept de race humaine", p. 88.
Il y a quelque chose de pré-darwinien chez Kant (et de pré-hégélien, au point qu'on a pu voir dans certains écrits l'origine de la pensée de Hegel) dans son intuition d'une "histoire de la nature". Sinon, la référence de Kant est Linné et non Darwin. Encore une fois, la science maîtresse en son temps est la Physique (et l'astronomie, avec l'application du concept de "gravitation" aux corps célestes par Newton). La grande interrogation de Kant est la suivante : comment se fait-il que la Physique "réussisse", qu'un consensus se fasse autour des Lois de la Physique, alors que rien de tel ne s'est produit dans le domaine de la métaphysique ? C'est toute la problématique de la Critique de la Raison Pure. Vous connaissez la réponse : il y a de l’inconnaissable, il y a de l'insondable et donc un usage légitime de la raison (la science) et un usage illégitime (la métaphysique). Mais une conciliation est possible au niveau de la Raison Pratique (le Royaume des fins) et au niveau du jugement esthétique (le concept du Beau et du Sublime).
- Nom d'utilisateurNiveau 10
ah, y avait cette question mise en stand-by :
Voilà donc, enfin le temps de relire le texte :
(...) innere Naturvollkommenheit (...) ist nach keiner Analogie irgend eines uns bekannten physischen, d. i. Naturvermögens, ja, da wir selbst zur Natur im weitesten Verstande gehören, selbst nicht einmal durch eine genau angemessene Analogie mit menschlicher Kunst denkbar und erklärlich. (sources : cf. mon post où ce texte est cité)
ja fonctionne ici en couple avec nicht einmal : "et+..." => "...même" ; il s'ensuit que ja ne peut en aucune manière introduire seulement la circonstancielle "Da P..." qui suit, le deuxième temps du système de renchérissement ("même") est placé dans la principale Q. Ainsi s'explique la lecture M, ja, (da P, nicht einmal Q).
Cette valeur de renchérissement du ja coordonnant est bien attestée aussi bien avec des parties de propositions (tel déterminant, tel verbe) qu'entre propositions. Le coordonnant est soit seul, soit dans un système à 2 voire 3 termes (nicht einmal est aux contextes négatifs ce que sogar ou eigentlich sont en contexte positif : ja sogar, ja eigentlich).
C'est pourquoi la traduction de l'édition Vrin est à cet égard adéquate :
"une perfection naturelle interne (...) ne se peut penser ni expliquer par aucune analogie avec un quelconque pouvoir physique, c’est à-dire naturel, qui soit connu de nous - et dans la mesure où nous appartenons nous-mêmes à la nature au sens large, elle ne peut même pas être pensée et expliquée par l’intermédiaire d’une analogie où la conformité avec l’art humain serait précise."
PS.
Bien lire : "si ce fil tarde à se dérouler" - or, quand j'ai regardé, c'était reparti de soi-même.
Bon, pas de réponse à ma question réitérée. Eh quoi ! Chacun a ses dadas, et le (=ce) mien est de surcroît peu partagé, ce qui n'est pas pour me déplaire. Alors, je vais juste leecher.
mézigue a écrit:ArmerYorick a écrit:
Justement, à la première occasion je serai ravi de savoir quel argument technique tu avais en tête pour », ja, da [...] →→→«.
Ça peut resservir. Non que je lise beaucoup d'allemand, mais j'ouvre souvent Kant dans sa langue.
D'ac, après vendredi parce que pause. (du coup, Gorgias : fin de week-end au mieux) :
[...]
Voilà donc, enfin le temps de relire le texte :
(...) innere Naturvollkommenheit (...) ist nach keiner Analogie irgend eines uns bekannten physischen, d. i. Naturvermögens, ja, da wir selbst zur Natur im weitesten Verstande gehören, selbst nicht einmal durch eine genau angemessene Analogie mit menschlicher Kunst denkbar und erklärlich. (sources : cf. mon post où ce texte est cité)
ja fonctionne ici en couple avec nicht einmal : "et+..." => "...même" ; il s'ensuit que ja ne peut en aucune manière introduire seulement la circonstancielle "Da P..." qui suit, le deuxième temps du système de renchérissement ("même") est placé dans la principale Q. Ainsi s'explique la lecture M, ja, (da P, nicht einmal Q).
Cette valeur de renchérissement du ja coordonnant est bien attestée aussi bien avec des parties de propositions (tel déterminant, tel verbe) qu'entre propositions. Le coordonnant est soit seul, soit dans un système à 2 voire 3 termes (nicht einmal est aux contextes négatifs ce que sogar ou eigentlich sont en contexte positif : ja sogar, ja eigentlich).
C'est pourquoi la traduction de l'édition Vrin est à cet égard adéquate :
"une perfection naturelle interne (...) ne se peut penser ni expliquer par aucune analogie avec un quelconque pouvoir physique, c’est à-dire naturel, qui soit connu de nous - et dans la mesure où nous appartenons nous-mêmes à la nature au sens large, elle ne peut même pas être pensée et expliquée par l’intermédiaire d’une analogie où la conformité avec l’art humain serait précise."
PS.
Dalathée2 a écrit:
C'est moi, ou ça fait quinze jours que tu doisnous en parlernous rejoindre pour que nous en parlions tous ensemble "en fin de semaine" ?Source : https://www.neoprofs.org/t82189p60-mes-lectures-d-oeuvres-integrales-le-gorgias#2762290Ta pomme, le lundi 20 octobre a écrit:PS. Gorgias : fin de semaine prochaine si ce fil tarde à se dérouler malgré l'amorce appétissante de PoorYorick
Bien lire : "si ce fil tarde à se dérouler" - or, quand j'ai regardé, c'était reparti de soi-même.
Bon, pas de réponse à ma question réitérée. Eh quoi ! Chacun a ses dadas, et le (=ce) mien est de surcroît peu partagé, ce qui n'est pas pour me déplaire. Alors, je vais juste leecher.
- User17706Bon génie
OK, (et merci !), je comprends beaucoup mieux maintenant. Cela dit, en ce qui concerne la question réitérée, il y a au moins une pomme (la mienne pour le coup) dont ça avait piqué la curiosité.
- klaus2Habitué du forum
C'est pourquoi la traduction de l'édition Vrin est à cet égard adéquate :
"une perfection naturelle interne (...) ne se peut penser ni expliquer par aucune analogie avec un quelconque pouvoir physique, c’est à-dire naturel, qui soit connu de nous - et dans la mesure où nous appartenons nous-mêmes à la nature au sens large, elle ne peut même pas être pensée et expliquée par l’intermédiaire d’une analogie où la conformité avec l’art humain serait précise.
Cette "conformité", c'est du charabia ; pourtant l'allemand n'est pas ici très compliqué :
selbst nicht einmal durch eine genau angemessene Analogie mit menschlicher Kunst denkbar und erklärlich.
et ne peut être même pas pensable ni explicable au moyen d’une analogie avec l’art humain qui serait tout à fait appropriée. (ma traduction). Que disent les germanistes du forum ?
- User17706Bon génie
« Conformité » glose, si l'on veut. Mais je ne vois pas ce que vous voyez à redire à cette glose : s'agissant d'une analogie (et donc, répétons-le, d'une identité de rapports, ici entre deux couples de termes), qu'est-ce qui, selon vous, convient dans le terme « approprié » qui ne convient pas dans le terme « conforme » ?
- klaus2Habitué du forum
Déjà, une "conformité précise à une analogie" c'est (me semble-t-il) du "français de cuisine" : Vous diriez ça, vous, spontanément ? Secundo, angemessen est dans le champ sémantique d'approprié, convenable ; conforme, c'est une autre direction. Un licencié d'allemand sait cela, même si cela fait problème à un professeur de philosophie.PauvreYorick a écrit:« Conformité » glose, si l'on veut. Mais je ne vois pas ce que vous voyez à redire à cette glose : s'agissant d'une analogie (et donc, répétons-le, d'une identité de rapports, ici entre deux couples de termes), qu'est-ce qui, selon vous, convient dans le terme « approprié » qui ne convient pas dans le terme « conforme » ?
- User17706Bon génie
Non, bien entendu : mais vous inventez « à », et toute la construction qu'ensuite vous dites fautive.klaus2 a écrit: Déjà, une "conformité précise à une analogie" c'est (me semble-t-il) du "français de cuisine" : Vous diriez ça, vous, spontanément ?
- klaus2Habitué du forum
C'est vrai, j'ai cité de mémoire ; Vrin dit : "par l’intermédiaire d’une analogie où la conformité avec l’art humain serait précise.". Là aussi, pourquoi traduire durch "par l'intermédiaire" ? durch indique le moyen direct, le complément d'agent. l'idée d'intermédiaire est rendue par "über" ou "auf dem Wege", voire "mittels".
Je ne viens pas pour critiquer, mais c'est quand même très déconcertant qu'au niveau académique on ne peut pas avoir une traduction précise.
Je ne viens pas pour critiquer, mais c'est quand même très déconcertant qu'au niveau académique on ne peut pas avoir une traduction précise.
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Eine andere Sprache zu können, ist wie eine zweite Seele zu besitzen.“ – Karl der Große. "Parler une autre langue, c'est comme posséder une seconde âme" (Charlemagne)
- AspasieNiveau 10
"Eine genau angemessene Analogie mit menschlicher Kunst" je ne suis pas certaine qu'on dirait cela spontanément en allemand non plus. C'est déjà une expression technique que celle de l'évaluation d'une analogie... Et à cet égard, "exactement en conformité avec" ne pose pas plus de problème que l'allemand. En revanche, côté traduction, je suis d'accord pour dire qu'il y a une légère et peut-être dommageable inflexion.
Sans doute la "conformité" ajoute-t-elle une légère difficulté parce qu'elle suggère l'idée d'une norme, d'un idéal, ce qui, dans le champ kantien, complique un problème déjà cadré dans ce type d'enjeu par ailleurs.
"Angemessen" est plus du côté du "à la mesure de", permettant de considérer qu'il s'agit plutôt de juger de l'analogie elle-même que d'une éventuelle conformité à ce qu'elle devrait être...
Sans doute la "conformité" ajoute-t-elle une légère difficulté parce qu'elle suggère l'idée d'une norme, d'un idéal, ce qui, dans le champ kantien, complique un problème déjà cadré dans ce type d'enjeu par ailleurs.
"Angemessen" est plus du côté du "à la mesure de", permettant de considérer qu'il s'agit plutôt de juger de l'analogie elle-même que d'une éventuelle conformité à ce qu'elle devrait être...
- User17706Bon génie
Disons que (je crois) le fait de savoir de quoi ça cause dans le texte permet de remettre à leur place certaines intuitions sémantiques évidemment précieuses, mais qui, suivant les cas, peuvent être décisives ou relativement négligeables. Ce n'est absolument pas pour dire qu'une licence d'allemand ne suffit pas pour comprendre Kant, c'est une autre question et elle ne m'intéresse pas ici.
Je ne trouve pas (dans la traduction ici examinée) de suggestion d'une conformité de l'analogie à une autre analogie ou une meilleure analogie ou un idéal de l'analogie. J'ai l'impression que vous lisez l'un et l'autre bien le texte allemand et mal le texte français (parce que, justement, vous avez l'allemand en tête).
Ce que le texte français essaie d'expliciter, ce n'est pas du tout l'idée d'une conformité de l'analogie à quelque chose, mais l'idée d'une analogie au sein de laquelle (« où ») le rapport entre art et produit de l'art est conforme au rapport entre nature et produit de la nature. Ce qui pose exactement zéro problème, me semble-t-il, parce que ce concept de la « conformité » fonctionne naturellement comme définition même du caractère correct ou approprié d'une analogie. Comme traduction ce n'est peut-être pas idéal, mais comme glose ça me paraît difficilement attaquable.
Je ne trouve pas (dans la traduction ici examinée) de suggestion d'une conformité de l'analogie à une autre analogie ou une meilleure analogie ou un idéal de l'analogie. J'ai l'impression que vous lisez l'un et l'autre bien le texte allemand et mal le texte français (parce que, justement, vous avez l'allemand en tête).
Ce que le texte français essaie d'expliciter, ce n'est pas du tout l'idée d'une conformité de l'analogie à quelque chose, mais l'idée d'une analogie au sein de laquelle (« où ») le rapport entre art et produit de l'art est conforme au rapport entre nature et produit de la nature. Ce qui pose exactement zéro problème, me semble-t-il, parce que ce concept de la « conformité » fonctionne naturellement comme définition même du caractère correct ou approprié d'une analogie. Comme traduction ce n'est peut-être pas idéal, mais comme glose ça me paraît difficilement attaquable.
- Nom d'utilisateurNiveau 10
Ah, PauvreYorick vient de dire - en vachement mieux ! - ce que j'étais en train d'essayer de formuler lourdement pendant ce temps. Je coupe, en ne gardant que la deuxième partie :
"angemessene Analogie" se google pas mal, "genau angemessene" itou ailleurs que chez Kant.
PS. méta -- C'est vrai qu'on peut s'arrêter à chaque mot de la traduction, et que cela aide fortement à réfléchir sur le texte. Heureusement, dans les facs de philo et classes prépa, c'est un exercice fréquent. En revanche, klaus2, cette critique de l'édition Vrin et des travaux académiques est en l'occurrence, je trouve, un chouïa injuste, tant on sait qu'aucune traduction ne saurait jamais prétendre être définitive. Elle est forcément réalisée de bric et de broc, instable, "barbarisante". Et pour des textes de philosophie s'adressant à des lecteurs qui ont plus ou moins accès à l'original ((qui ont été en tout cas préparés à cela), peut-être vaut-il la peine d'interpréter "traduction" non au sens de résultat, mais de processus ?
Aspasie a écrit:"Eine genau angemessene Analogie mit menschlicher Kunst" je ne suis pas certaine qu'on dirait cela spontanément en allemand non plus.
"angemessene Analogie" se google pas mal, "genau angemessene" itou ailleurs que chez Kant.
PS. méta -- C'est vrai qu'on peut s'arrêter à chaque mot de la traduction, et que cela aide fortement à réfléchir sur le texte. Heureusement, dans les facs de philo et classes prépa, c'est un exercice fréquent. En revanche, klaus2, cette critique de l'édition Vrin et des travaux académiques est en l'occurrence, je trouve, un chouïa injuste, tant on sait qu'aucune traduction ne saurait jamais prétendre être définitive. Elle est forcément réalisée de bric et de broc, instable, "barbarisante". Et pour des textes de philosophie s'adressant à des lecteurs qui ont plus ou moins accès à l'original ((qui ont été en tout cas préparés à cela), peut-être vaut-il la peine d'interpréter "traduction" non au sens de résultat, mais de processus ?
- klaus2Habitué du forum
Il va de soi qu'on n'est pas philosophe avec une licence d'allemand. Mais quand on nous demande pour les concours de traduire de l'allemand avec une tonalité philosophique ou littéraire, on est obligé de fournir un meilleur travail que celui de Vrin, sinon on échoue.
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Eine andere Sprache zu können, ist wie eine zweite Seele zu besitzen.“ – Karl der Große. "Parler une autre langue, c'est comme posséder une seconde âme" (Charlemagne)
- User17706Bon génie
Pour juger de la qualité de ce travail, il faut d'abord, par exemple, comprendre en quoi consistent les choix réalisés, et par exemple comprendre que « conforme » n'est pas et n'a pas du tout vocation à être une traduction directe d'angemessen. Mais je ne doute nullement qu'il soit possible de mieux faire ; c'est quasi une possibilité de principe, me semble-t-il.
- Nom d'utilisateurNiveau 10
klaus2 a écrit:Il va de soi qu'on n'est pas philosophe avec une licence d'allemand. Mais quand on nous demande pour les concours de traduire de l'allemand avec une tonalité philosophique ou littéraire, on est obligé de fournir un meilleur travail que celui de Vrin, sinon on échoue.
Oui, mais vous oubliez la leçon imparable des Théorèmes pour la traduction de Ladmiral (lequel réfléchit justement à partir des traductions philosophiques) : distinction fondamentale entre le fragment de concours et l'oeuvre ; et leurs traductions respectives.
(EDIT - argh, encore deux posts qui se croisent, et le mien est oiseux : pardon pour le bruit !)
- klaus2Habitué du forum
je ne connais pas cet admirable admiral. Mais j'ai lu Ricoeur (faible), Walter Benjamin et Antoine Berman. Vous m'aurez excusé d'avoir osé critiquer la crème de la crème philosophique...
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