- Padre P. LucasNiveau 10
doublecasquette a écrit:
Ces gens-là ne continueront-ils pas l'année prochaine, sauf le jour où l'IEN passera...
En cas de doute, image à glisser dans le questionnaire préalable à l'inspection :Réplublicainement vôtre
- adelaideaugustaFidèle du forum
Pseudo a écrit:Mais c'est une plaisanterie ou bien ?
Déjà, je ne vois pas bien le rapport entre faire baisser la pression et rendre "acteur" l'élève et le baratin qui suit. Outre qu'on peut être d'accord ou pas avec ces deux machins, je ne vois pas le lien. En quoi la solution en est-elle une à ce problème ? Mystère et boule de gomme.
Et ensuite, mais a quel age peut-on attendre qu'un gamin sache lire et écrire alors ? Et comment lui demander le reste tant qu'il ne sait pas ca ? Mais si on estime qu'un humain ne peut pas acquérir la lecture et l'écriture en 10 ou 11 ans de vie, mais c'est qu'il faut arrêter la production et éliminer cette race débile !
Je vous rappelle qu'il y a un précédent célèbre :
Katherine Weinland, Doyenne de l'Inspection générale des Lettres, prône la méthode Zen : "13% des élèves sont illettrés en 6e, ce n'est pas grave, ils n'ont pas fini leurs études".(L'Express du 14 mars 2002).
- NuitsFidèle du forum
:shock: :shock:adelaideaugusta a écrit:Pseudo a écrit:Mais c'est une plaisanterie ou bien ?
Déjà, je ne vois pas bien le rapport entre faire baisser la pression et rendre "acteur" l'élève et le baratin qui suit. Outre qu'on peut être d'accord ou pas avec ces deux machins, je ne vois pas le lien. En quoi la solution en est-elle une à ce problème ? Mystère et boule de gomme.
Et ensuite, mais a quel age peut-on attendre qu'un gamin sache lire et écrire alors ? Et comment lui demander le reste tant qu'il ne sait pas ca ? Mais si on estime qu'un humain ne peut pas acquérir la lecture et l'écriture en 10 ou 11 ans de vie, mais c'est qu'il faut arrêter la production et éliminer cette race débile !
Je vous rappelle qu'il y a un précédent célèbre :
Katherine Weinland, Doyenne de l'Inspection générale des Lettres, prône la méthode Zen : "13% des élèves sont illettrés en 6e, ce n'est pas grave, ils n'ont pas fini leurs études".(L'Express du 14 mars 2002).
- MareuilNeoprof expérimenté
Je crois l'avoir écrit il y a quelques années dans un livre patronné par Laurent Lafforgue, La Débâcle de l'école.Nuits a écrit::shock: :shock:adelaideaugusta a écrit:Pseudo a écrit:Mais c'est une plaisanterie ou bien ?
Déjà, je ne vois pas bien le rapport entre faire baisser la pression et rendre "acteur" l'élève et le baratin qui suit. Outre qu'on peut être d'accord ou pas avec ces deux machins, je ne vois pas le lien. En quoi la solution en est-elle une à ce problème ? Mystère et boule de gomme.
Et ensuite, mais a quel age peut-on attendre qu'un gamin sache lire et écrire alors ? Et comment lui demander le reste tant qu'il ne sait pas ca ? Mais si on estime qu'un humain ne peut pas acquérir la lecture et l'écriture en 10 ou 11 ans de vie, mais c'est qu'il faut arrêter la production et éliminer cette race débile !
Je vous rappelle qu'il y a un précédent célèbre :
Katherine Weinland, Doyenne de l'Inspection générale des Lettres, prône la méthode Zen : "13% des élèves sont illettrés en 6e, ce n'est pas grave, ils n'ont pas fini leurs études".(L'Express du 14 mars 2002).
- Presse-puréeGrand sage
La maman de la séquence didactique en lettres...
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Homines, dum docent, discunt.Sénèque, Epistulae Morales ad Lucilium VII, 8
"La culture est aussi une question de fierté, de rapport de soi à soi, d’esthétique, si l’on veut, en un mot de constitution du sujet humain." (Paul Veyne, La société romaine)
"Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres". La Boétie
"Confondre la culture et son appropriation inégalitaire du fait des conditions sociales : quelle erreur !" H. Pena-Ruiz
"Il vaut mieux qu'un élève sache tenir un balai plutôt qu'il ait été initié à la philosophie: c'est ça le socle commun" un IPR
- DuplayExpert
Mareuil a écrit:Vont avoir du mal à nous museler !Mowgli a écrit:
A supposer qu'il y ait eu une coquille et qu'il faille remplacer "primaire" par "CP", cela ne change rien au caractère scandaleux de cette déclaration.
Exception faite de quelques cas rarissimes d'enfants présentant des handicaps avérés et très lourds, tout élève est capable de quitter le CP en sachant lire et écrire, à condition toutefois que l'on n'interdise pas aux instituteurs d'utiliser des méthodes efficaces.
Et je crains bien que cette déclaration n'annonce un magnifique retour en arrière, avec des programmes encore pires que ceux de 2002 et un muselage pédagogique particulièrement vigoureux.
A suivre...
:diable:
:malmaisbien:
- MorgaredNiveau 9
J'entends ce discours clairement dans la bouche des IEN et IPR depuis 2005. En substance :
- On apprend à lire durant tout le primaire. Variante : on apprend à lire tout au long de sa vie.
- Les professeurs de collège ont une vision différente (et fausse) de ce qu'est lire, d'où une différence d'appréciation entre l'instituteur de cm2 et le professeur de 6e : le professeur de 6e dira que l'élève ne sait pas lire, alors que l'instituteur disait (à raison) le contraire l'année précédente.
Le raisonnement est le suivant : l'activité de lecteur se travaille tout au long de la vie, il est donc stupide de prétendre demander à un enfant de savoir lire en primaire. Bien évidemment, aucune distinction n'est faite, dans ce discours, entre la compréhension du texte et la technique du déchiffrage (dont il faut comprendre qu'elle est donc accessoire et ne pose aucun problème). Si les élèves ont des difficultés de compréhension, c'est parce qu'ils ne sont pas assez matures, et non parce qu'ils ne maîtrisent pas le déchiffrage (qc'est-à-dire ne savent pas lire, donc...).
C'est avec ce type de raisonnement que nous parvenons à avoir des élèves qui lisent à douze ans comme s'ils en étaient à découvrir la combinatoire.
- On apprend à lire durant tout le primaire. Variante : on apprend à lire tout au long de sa vie.
- Les professeurs de collège ont une vision différente (et fausse) de ce qu'est lire, d'où une différence d'appréciation entre l'instituteur de cm2 et le professeur de 6e : le professeur de 6e dira que l'élève ne sait pas lire, alors que l'instituteur disait (à raison) le contraire l'année précédente.
Le raisonnement est le suivant : l'activité de lecteur se travaille tout au long de la vie, il est donc stupide de prétendre demander à un enfant de savoir lire en primaire. Bien évidemment, aucune distinction n'est faite, dans ce discours, entre la compréhension du texte et la technique du déchiffrage (dont il faut comprendre qu'elle est donc accessoire et ne pose aucun problème). Si les élèves ont des difficultés de compréhension, c'est parce qu'ils ne sont pas assez matures, et non parce qu'ils ne maîtrisent pas le déchiffrage (qc'est-à-dire ne savent pas lire, donc...).
C'est avec ce type de raisonnement que nous parvenons à avoir des élèves qui lisent à douze ans comme s'ils en étaient à découvrir la combinatoire.
- NuitsFidèle du forum
Morgared a écrit:
Le raisonnement est le suivant : l'activité de lecteur se travaille tout au long de la vie, il est donc stupide de prétendre demander à un enfant de savoir lire en primaire.
C'est avec ce type de raisonnement que nous parvenons à avoir des élèves qui lisent à douze ans comme s'ils en étaient à découvrir la combinatoire.
Mais c'est idiot ! Comme quelqu'un l'a fait remarquer, c'est valable pour la marche. De fait, pas besoin de savoir marcher avant la fin du primaire ? C'est aussi valable pour la maîtrise des sphincters ... On va mettre des couches jusqu'à la fin du primaire. De telles inepties, c'est, c'est...
- CeladonDemi-dieu
Il faut juste vérifier que les enfants desdits inspecteurs ne savent pas encore lire en fin de CM2. Les paris sont tout verts.
- lene75Prophète
Celadon a écrit:Il faut juste vérifier que les enfants desdits inspecteurs ne savent pas encore lire en fin de CM2. Les paris sont tout verts.
Morgared a écrit:Les professeurs de collège ont une vision différente (et fausse) de ce qu'est lire, d'où une différence d'appréciation entre l'instituteur de cm2 et le professeur de 6e : le professeur de 6e dira que l'élève ne sait pas lire, alors que l'instituteur disait (à raison) le contraire l'année précédente.
Tiens, on me sort un truc du même tonneau pour mes élèves de terminale : j'exagère de dire qu'ils ne savent pas lire juste parce qu'ils ne comprennent rien aux textes que je leur donne, d'accord, ils ne comprennent pas le texte, mais il savent le déchiffrer... d'accord pas à haute voix ("quoi, vous leur demandez de lire à haute voix ? mais vous ne savez pas que c'est humiliant ?"), mais dans leur tête, oui... Ah... j'aimerais bien savoir comment on sait qu'un élève sait déchiffrer dans sa tête s'il ne sait ni lire à haute voix ni restituer le sens du texte... Y en a qui ont des dons de communication avec les esprits
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Une classe, c'est comme une boîte de chocolats, on sait jamais sur quoi on va tomber...
- Padre P. LucasNiveau 10
Infiniment a écrit:Voilà qui me ravit. Cela ne change rien, mais nous ne sommes pas les seuls que la bêtise de ce propos ait choqués.
L'irritation gagne, faudrait-il envisager l'amputation ? Gangrène
- doublecasquetteEnchanteur
lene75 a écrit:Celadon a écrit:Il faut juste vérifier que les enfants desdits inspecteurs ne savent pas encore lire en fin de CM2. Les paris sont tout verts.
Morgared a écrit:Les professeurs de collège ont une vision différente (et fausse) de ce qu'est lire, d'où une différence d'appréciation entre l'instituteur de cm2 et le professeur de 6e : le professeur de 6e dira que l'élève ne sait pas lire, alors que l'instituteur disait (à raison) le contraire l'année précédente.
Tiens, on me sort un truc du même tonneau pour mes élèves de terminale : j'exagère de dire qu'ils ne savent pas lire juste parce qu'ils ne comprennent rien aux textes que je leur donne, d'accord, ils ne comprennent pas le texte, mais il savent le déchiffrer... d'accord pas à haute voix ("quoi, vous leur demandez de lire à haute voix ? mais vous ne savez pas que c'est humiliant ?"), mais dans leur tête, oui... Ah... j'aimerais bien savoir comment on sait qu'un élève sait déchiffrer dans sa tête s'il ne sait ni lire à haute voix ni restituer le sens du texte... Y en a qui ont des dons de communication avec les esprits
Foucambert et Charmeux...
Mais comment deux personnes vraiment totalement insignifiantes au premier abord ont-elles pu autant influencer et si durablement l'inconscient d'autant de membres de notre hiérarchie et d'autant de collègues ?
- CeladonDemi-dieu
Mouais. C'est là qu'on se rend compte quand même que la nature n'a pas forcément horreur du vide...
- JEMSGrand Maître
C'est bon, je suis dorénavant convaincu qu'ils prennent des produits stupéfiants (dans les deux sens) !
Devoirs à la maison inutiles et dangereux,
Lecture et écriture maitrisées en fin de premier cycle inutiles,
Savoirs inutiles,
Profs inutiles,
Moutons utiles.
Devoirs à la maison inutiles et dangereux,
Lecture et écriture maitrisées en fin de premier cycle inutiles,
Savoirs inutiles,
Profs inutiles,
Moutons utiles.
- MorgaredNiveau 9
Celadon a écrit:Il faut juste vérifier que les enfants desdits inspecteurs ne savent pas encore lire en fin de CM2. Les paris sont tout verts.
Ils diront que TOUS les élèves savent lire, parce que comme le dit lene75, l'inaptitude à la lecture à haute voix n'est selon eux certainement pas une preuve du contraire. Ils diront donc que leurs enfants sont juste plus matures, et ont une compréhension plus précoce grâce à leur meilleure origine sociale, différence que les autres combleront avec le temps. Les difficultés techniques n'existent tout simplement pas.
Enfin, quand on entend ce genre de discours proclamé sans honte devant une large assemblée avec une assurance de mystique, on doit quand même se pincer pour y croire. Arriver à ce degré d'irrationalité, il faut quand même le faire.
- roxanneOracle
Ce qui est curieux et contradictoire, c'est que j'ai entendu hier à la radio une femme (je ne sais pas son nom, j'ai pris en cours de route) qui fait partie de cette commission de concertation dire que la priorité c'était le primaire et surtout la maîtrise de la lecture qui est essentielle dans tous les apprentissages futurs.
- RoninMonarque
- lene75Prophète
Ronin a écrit:Ben elle va avoir des ennuis....
:lol:
Cela dit ils disent tous que la priorité est le primaire, c'est juste qu'ils n'ont pas exactement la même conception des priorités que nous...
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- ParatgeNeoprof expérimenté
Un texte de Jacques Barzun qui semble avoir été écrit hier !
« Seul un esprit sophistiqué, c’est-à-dire à moitié instruit et plein d’idées non examinées, pourrait sérieusement préconiser de continuer le travail scolaire sans livres.
D’où vient cette sophistication ? Pourquoi semble-t-il plausible et attirant après trois mille ans pendant lesquels on a enseigné à lire en donnant le son de chaque lettre, de faire juste le contraire et d’encourager à faire des devinettes sur la « forme » des mots ? Et aujourd’hui que cette substitution asinienne a massivement échoué comme elle le méritait, pourquoi semble-t-il avancé et (encore une fois) sophistiqué de suggérer que la lecture est après tout superflue étant donné que nous avons à disposition tellement de touches et de boutons avec lesquels faire circuler des contrefaçons de la réalité visuelle et vocale ?
La raison de la seconde de ces fraudes est composée de deux parties. L’une est le désir de cacher la bourde originelle, comme le domestique maladroit fait disparaitre de la vue les morceaux de la tasse brisée. L’autre est le simple aveuglement devant la vérité selon laquelle la lecture et sa jumelle nécessaire, l’écriture, ne constituent pas qu’une compétence mais aussi un pouvoir. Je veux dire par cette distinction que la lecture n’est pas seulement un procédé (dans le jargon un « outil ») qui nous atteint et permet d’atteindre d’autres à des fins pratiques. C’est aussi un mode d’incarnation et de formation de la pensée…
Ici nous touchons aux causes politiques et sociales de toute la triste odyssée qui a mené les États-Unis dans cette condition d’être un pays de semi-lettrés. Ne vous méprenez pas à ce sujet : les causes n’en sont pas l’ignorance, la pauvreté ou les instincts barbares, ce sont « la pensée de pointe », l’amour de la liberté et l’envie de découvrir et d’innover. C’est d’en haut, c’est à partir de l’action de l’alphabétisé, du cultivé, du philosophe, de l’art que la foi commune en la puissance de la lecture comme centrale dans la civilisation occidentale a été détruite…
Car il est vrai qu’aucun de ces objectifs ne ressemble aux buts rivaux que la pensée sophistiquée a préféré : le libre jeu de l’imagination, la créativité et le plaisir immédiat ; l’expression de soi, la nouveauté et le choix sans entraves. L’élite intellectuelle a appris la valeur de ces plaisirs méritoires dans les écrits des meilleurs philosophes, artistes et penseurs politiques, et avec un mépris impatient de l’école et de l’apprentissage par cœur, résolut d’émanciper l’enfant et de lui « donner » ces joies.
La folie consistait, non pas à vouloir des résultats élevés, mais à penser qu’ils pourraient être atteints directement. J’ai ailleurs défini cette erreur comme du « prépostérisme » – chercher à obtenir d’emblée ce qui ne peut être que le fruit d’un effort, en mettant la fin avant le début. Il aurait dû être évident que l’auto-expression n’est réelle seulement qu’après que ses moyens ont été acquis…
Tout ce prépostérisme plein de noblesse d’âme a trouvé sa parfaite expression dans la doctrine idéo-visuelle pour l’enseignement de la lecture. La vérité selon laquelle les lecteurs entrainés reconnaissent les mots en entier d’un coup d’œil et n’ont pas besoin de vocaliser chaque lettre avec leurs lèvres fut absurdement transformée en point de départ de l’instruction, méthode qui au premier regard est la quintessence de l’anti-méthode. Grâce à elle, l’enfant était laissé libre, imaginatif, créatif ; le texte imprimé quoi qu’il en soit n’exerçait aucune contrainte sur lui : il ne savait pas lire. En même temps, l’enfant n’était pas libre de commencer à lire tant qu’un enseignant n’avait pas décidé qu’il était « prêt » ; il n’était pas libre de lire un livre, encore moins de la littérature mais seulement Dick-and-Jane : il n’était pas libre de relier tout son vocabulaire oral avec ce qu’on lui avait donné à lire mais seulement 400, 500, 600 mots selon ses progrès en devinettes ; il n’était pas libre d’apprendre l’orthographe à un rythme décent, étant donné qu’un espace blanc n’a pas de « forme » et qu’on ne peut deviner comment le remplir sans connaître les sons (interdits) des lettres. À la fin, le « développement de soi » ne semblait pas mener très loin. »
Ce texte date de… 1971. Et dire que les pédagogistes français ont pompé l'essentiel de leurs idées aux États-Unis.
« Seul un esprit sophistiqué, c’est-à-dire à moitié instruit et plein d’idées non examinées, pourrait sérieusement préconiser de continuer le travail scolaire sans livres.
D’où vient cette sophistication ? Pourquoi semble-t-il plausible et attirant après trois mille ans pendant lesquels on a enseigné à lire en donnant le son de chaque lettre, de faire juste le contraire et d’encourager à faire des devinettes sur la « forme » des mots ? Et aujourd’hui que cette substitution asinienne a massivement échoué comme elle le méritait, pourquoi semble-t-il avancé et (encore une fois) sophistiqué de suggérer que la lecture est après tout superflue étant donné que nous avons à disposition tellement de touches et de boutons avec lesquels faire circuler des contrefaçons de la réalité visuelle et vocale ?
La raison de la seconde de ces fraudes est composée de deux parties. L’une est le désir de cacher la bourde originelle, comme le domestique maladroit fait disparaitre de la vue les morceaux de la tasse brisée. L’autre est le simple aveuglement devant la vérité selon laquelle la lecture et sa jumelle nécessaire, l’écriture, ne constituent pas qu’une compétence mais aussi un pouvoir. Je veux dire par cette distinction que la lecture n’est pas seulement un procédé (dans le jargon un « outil ») qui nous atteint et permet d’atteindre d’autres à des fins pratiques. C’est aussi un mode d’incarnation et de formation de la pensée…
Ici nous touchons aux causes politiques et sociales de toute la triste odyssée qui a mené les États-Unis dans cette condition d’être un pays de semi-lettrés. Ne vous méprenez pas à ce sujet : les causes n’en sont pas l’ignorance, la pauvreté ou les instincts barbares, ce sont « la pensée de pointe », l’amour de la liberté et l’envie de découvrir et d’innover. C’est d’en haut, c’est à partir de l’action de l’alphabétisé, du cultivé, du philosophe, de l’art que la foi commune en la puissance de la lecture comme centrale dans la civilisation occidentale a été détruite…
Car il est vrai qu’aucun de ces objectifs ne ressemble aux buts rivaux que la pensée sophistiquée a préféré : le libre jeu de l’imagination, la créativité et le plaisir immédiat ; l’expression de soi, la nouveauté et le choix sans entraves. L’élite intellectuelle a appris la valeur de ces plaisirs méritoires dans les écrits des meilleurs philosophes, artistes et penseurs politiques, et avec un mépris impatient de l’école et de l’apprentissage par cœur, résolut d’émanciper l’enfant et de lui « donner » ces joies.
La folie consistait, non pas à vouloir des résultats élevés, mais à penser qu’ils pourraient être atteints directement. J’ai ailleurs défini cette erreur comme du « prépostérisme » – chercher à obtenir d’emblée ce qui ne peut être que le fruit d’un effort, en mettant la fin avant le début. Il aurait dû être évident que l’auto-expression n’est réelle seulement qu’après que ses moyens ont été acquis…
Tout ce prépostérisme plein de noblesse d’âme a trouvé sa parfaite expression dans la doctrine idéo-visuelle pour l’enseignement de la lecture. La vérité selon laquelle les lecteurs entrainés reconnaissent les mots en entier d’un coup d’œil et n’ont pas besoin de vocaliser chaque lettre avec leurs lèvres fut absurdement transformée en point de départ de l’instruction, méthode qui au premier regard est la quintessence de l’anti-méthode. Grâce à elle, l’enfant était laissé libre, imaginatif, créatif ; le texte imprimé quoi qu’il en soit n’exerçait aucune contrainte sur lui : il ne savait pas lire. En même temps, l’enfant n’était pas libre de commencer à lire tant qu’un enseignant n’avait pas décidé qu’il était « prêt » ; il n’était pas libre de lire un livre, encore moins de la littérature mais seulement Dick-and-Jane : il n’était pas libre de relier tout son vocabulaire oral avec ce qu’on lui avait donné à lire mais seulement 400, 500, 600 mots selon ses progrès en devinettes ; il n’était pas libre d’apprendre l’orthographe à un rythme décent, étant donné qu’un espace blanc n’a pas de « forme » et qu’on ne peut deviner comment le remplir sans connaître les sons (interdits) des lettres. À la fin, le « développement de soi » ne semblait pas mener très loin. »
Ce texte date de… 1971. Et dire que les pédagogistes français ont pompé l'essentiel de leurs idées aux États-Unis.
- JohnMédiateur
Nathalie Mons.roxanne a écrit:Ce qui est curieux et contradictoire, c'est que j'ai entendu hier à la radio une femme (je ne sais pas son nom, j'ai pris en cours de route) qui fait partie de cette commission de concertation dire que la priorité c'était le primaire et surtout la maîtrise de la lecture qui est essentielle dans tous les apprentissages futurs.
Elle a fait plus de médias en deux jours qu'Eric Debarbieux sur la même période : le record est à battre.
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- MareuilNeoprof expérimenté
John a écrit:Nathalie Mons.roxanne a écrit:Ce qui est curieux et contradictoire, c'est que j'ai entendu hier à la radio une femme (je ne sais pas son nom, j'ai pris en cours de route) qui fait partie de cette commission de concertation dire que la priorité c'était le primaire et surtout la maîtrise de la lecture qui est essentielle dans tous les apprentissages futurs.
Elle a fait plus de médias en deux jours qu'Eric Debarbieux sur la même période : le record est à battre.
Du blabla. Par ailleurs, elle profère un lieu commun qui montre son ignorance de l'enseignement en maternelle et au CP : " la maîtrise de la lecture ... est essentielle dans tous les apprentissages futurs."
Eh bien non ! la lecture certes est importante, mais son apprentissage n'est mené à bien que s'il est lié aux premiers apprentissages du calcul, aux premières observations scientifiques, aux premières notions géographiques, au dessin etc.
À défaut, on en revient au vieil enseignement que la charité des classes privilégiées réservait aux enfants du peuple, selon l'expression de Ferdinand Buisson.
- OsmieSage
J'ai un paquet d'élèves quasi-illettrés en sixième : j'aimerais bien que Nicole m'explique comment on fait pour étudier l'Odyssée et Les métamorphoses (on va rire avec La Fontaine).
Ah mais oui, je suis bête ! Je n'ai qu'à passer un film sur le vidéoprojecteur et monter des zolies zimages ! :censure:
Ah mais oui, je suis bête ! Je n'ai qu'à passer un film sur le vidéoprojecteur et monter des zolies zimages ! :censure:
- CeladonDemi-dieu
Il faut cesser de s'inquiéter. Le primaire va aller jusqu'en 3ème, ce qui mettra fin de facto au collège u(i)nique, et l'Odyssée ne sera plus au programme dieu merci vu que la lecture de Martine à la plage relèvera déjà de l'exploit.
- lene75Prophète
Janne a écrit:comment on fait pour étudier l'Odyssée et Les métamorphoses (on va rire avec La Fontaine).
Décidément, il y en a à qui il va falloir faire une greffe de cerveau ! M'enfin, puisqu'on te dit que savoir lire ne sert à rien, c'est pas pour aller faire lire des bouquins (compliqués, en plus) à tes élèves !!!
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Une classe, c'est comme une boîte de chocolats, on sait jamais sur quoi on va tomber...
- MinaNiveau 10
J'ai entendu également ce type de discours de la part d'une IPR de lettres, à une variante près puisque cela concernait l'orthographe. En substance, vu que les objectifs du ministère sont que 50 % d'une classe d'âge accèdent au niveau licence (cela inclut les licences professionnelles, accessibles après un BTS ou un IUT, donc accessibles aux bacheliers ayant obtenu leur Bac Pro), cela laisse encore 6 ans à un élève qui sort de 3e pour améliorer son orthographe et son expression écrite. Pas besoin de se formaliser sur le niveau des élèves pour les autoriser à passer en seconde dans ces cas-là! (c'était justement une réunion sur la liaison 3e/2nde où nous étions supposés nous interroger sur les causes de l'échec des élèves en arrivant au lycée...) Quand on entend ça, on se demande à quoi on sert.Morgared a écrit:J'entends ce discours clairement dans la bouche des IEN et IPR depuis 2005. En substance :
- On apprend à lire durant tout le primaire. Variante : on apprend à lire tout au long de sa vie.
- Les professeurs de collège ont une vision différente (et fausse) de ce qu'est lire, d'où une différence d'appréciation entre l'instituteur de cm2 et le professeur de 6e : le professeur de 6e dira que l'élève ne sait pas lire, alors que l'instituteur disait (à raison) le contraire l'année précédente.
Le raisonnement est le suivant : l'activité de lecteur se travaille tout au long de la vie, il est donc stupide de prétendre demander à un enfant de savoir lire en primaire. Bien évidemment, aucune distinction n'est faite, dans ce discours, entre la compréhension du texte et la technique du déchiffrage (dont il faut comprendre qu'elle est donc accessoire et ne pose aucun problème). Si les élèves ont des difficultés de compréhension, c'est parce qu'ils ne sont pas assez matures, et non parce qu'ils ne maîtrisent pas le déchiffrage (qc'est-à-dire ne savent pas lire, donc...).
C'est avec ce type de raisonnement que nous parvenons à avoir des élèves qui lisent à douze ans comme s'ils en étaient à découvrir la combinatoire.
- OsmieSage
C'est pourtant vrai, merci Celadon et Lene75 : grâce à vous, la lumière ! Je suis une cruche consternante.
Allez, on va lire Gudule !
Allez, on va lire Gudule !
- Le rapport annuel sur la loi de refondation : plein de choses amusantes à lire !
- Rapport "Lire et écrire" (Roland Goigoux dir., sept. 2015)
- Réforme du collège : interview de Nicole Ferroni par le SNES
- Nicole Belloubet, notre nouvelle (nouvelle) ministre
- Faut-il absolument étudier une pièce du XVIIe en 5e ?
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