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lene75
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par lene75 Mer 4 Oct - 7:15
Et encore en lycée tu as des élèves déjà triés. Je parle d'abord de la difficulté matérielle à réaliser la carte mentale : s'il faut la tracer soi-même, c'est redoutablement difficile pour un enfant d'école primaire, c'est un exercice (difficile) de géométrie à part entière. S'il faut remplir des cases déjà faites, outre le fait qu'on est dans du déjà prémâché qui rend l'exercice à peu près inutile, il faut encore réussir à faire rentrer le mot dans la case, donc à adapter son écriture, ce qui en primaire demande beaucoup de concentration. Il n'y a qu'à voir les cartes mentales d'enfants que les parents s'envoient sur les groupes WhatsApp quand un enfant doit rattraper une leçon pour comprendre le problème... rien que la graphie et l'orthographe par rapport à ce qu'on trouve dans le texte rédigé. Il y a nettement une nette perte entre les deux. C'est un travail utile pour un étudiant autonome du supérieur, pas pour un enfant en début d'apprentissage.

Et oui, on est tous d'accord sur le problème du décalage entre les programmes et exigences et ce que peuvent faire les élèves, surtout quand on arrive en fin de course, mais c'est justement lié aux lacunes qui se cumulent, à l'absence d'effort, etc. Exemple tout bête : l'an dernier j'ai récupéré en THLP des élèves qui avaient été préparés à la méthode en 1re, ça a roulé en terminale pour les préparer au bac. Cette année je récupère des élèves qui ont essentiellement fait des débats l'an dernier, et pas du tout travaillé la méthode. Donc super, on ne leur a pas fait violence, ils adorent HLP, d'ailleurs c'était le meilleur cours de leur vie. Je veux bien, mais moi maintenant je suis coincée et je dois faire deux années en une. Je doute très fort d'arriver au même résultat que l'an dernier, d'autant plus que mes élèves refusent d'essayer parce que évidemment, ça leur paraît très dur, mais ça n'a rien à voir avec leurs capacités, ça a juste à voir avec le fait que des collègues qui savaient qu'ils n'auraient pas à en assumer les conséquences se sont fait plaisir et ont fait plaisir aux élèves l'an dernier, et que le résultat, c'est qu'ils n'ont pas appris grand chose, ni en termes de méthodes, ni en termes de contenus, et que maintenant le moindre effort leur paraît être une montagne. Là où tu as raison, beaverforever, c'est qu'ils refusent aussi de travailler parce qu'ils savent qu'ils n'ont pas fait ce qu'il fallait l'année dernière, et que cette année va être dure pour cette raison, mais justement, si on avait été exigeant avec eux, ils n'en seraient pas là et ils passeraient une bonne année de terminale comme mes élèves de l'an dernier.
Voltaire
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Voltaire Mer 4 Oct - 7:27
J'ai une excellente mémoire et j'ai accumulé pas mal de connaissances (scolaires, professionnelles) mais je suis absolument incapable d'élaborer ou d'utiliser une carte mentale (malgré mes efforts) ou un palais de mémoire. Je fonctionne différemment, et pourtant de façon efficace. Par exemple pour retenir un numéro de téléphone (activité bien désuète mais parfois utile), je me "chante" les numéros un par un ... certains utilisent les départements ou autres moyens mnémotechniques. Pas moi, et pourtant je retiens bien les nombres. Je propose toujours aux élèves différentes méthodes de mémorisation, à eux ensuite de choisir ou d'inventer la leur, peu m'importe du moment que la connaissance est acquise et mobilisable.
En maths, qui est une matière à empilement, si des connaissances antérieures manquent, il n'y a pas moyen de progresser. Sans connaissance des mécanismes de l'addition et de la multiplication, et la pratique des tables, pas moyen de résoudre une équation. De ce point de vue, l'utilisation de calculatrices pour tous les calculs est un naufrage (je parle d'élèves de lycée qui ne savent pas effectuer une division par 2 sans leur machine).
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par Sei Mer 4 Oct - 8:02
lene75 a écrit:Et encore en lycée tu as des élèves déjà triés. Je parle d'abord de la difficulté matérielle à réaliser la carte mentale : s'il faut la tracer soi-même, c'est redoutablement difficile pour un enfant d'école primaire, c'est un exercice (difficile) de géométrie à part entière. S'il faut remplir des cases déjà faites, outre le fait qu'on est dans du déjà prémâché qui rend l'exercice à peu près inutile, il faut encore réussir à faire rentrer le mot dans la case, donc à adapter son écriture, ce qui en primaire demande beaucoup de concentration. Il n'y a qu'à voir les cartes mentales d'enfants que les parents s'envoient sur les groupes WhatsApp quand un enfant doit rattraper une leçon pour comprendre le problème... rien que la graphie et l'orthographe par rapport à ce qu'on trouve dans le texte rédigé. Il y a nettement une nette perte entre les deux. C'est un travail utile pour un étudiant autonome du supérieur, pas pour un enfant en début d'apprentissage.

Et oui, on est tous d'accord sur le problème du décalage entre les programmes et exigences et ce que peuvent faire les élèves, surtout quand on arrive en fin de course, mais c'est justement lié aux lacunes qui se cumulent, à l'absence d'effort, etc. Exemple tout bête : l'an dernier j'ai récupéré en THLP des élèves qui avaient été préparés à la méthode en 1re, ça a roulé en terminale pour les préparer au bac. Cette année je récupère des élèves qui ont essentiellement fait des débats l'an dernier, et pas du tout travaillé la méthode. Donc super, on ne leur a pas fait violence, ils adorent HLP, d'ailleurs c'était le meilleur cours de leur vie. Je veux bien, mais moi maintenant je suis coincée et je dois faire deux années en une. Je doute très fort d'arriver au même résultat que l'an dernier, d'autant plus que mes élèves refusent d'essayer parce que évidemment, ça leur paraît très dur, mais ça n'a rien à voir avec leurs capacités, ça a juste à voir avec le fait que des collègues qui savaient qu'ils n'auraient pas à en assumer les conséquences se sont fait plaisir et ont fait plaisir aux élèves l'an dernier, et que le résultat, c'est qu'ils n'ont pas appris grand chose, ni en termes de méthodes, ni en termes de contenus, et que maintenant le moindre effort leur paraît être une montagne. Là où tu as raison, beaverforever, c'est qu'ils refusent aussi de travailler parce qu'ils savent qu'ils n'ont pas fait ce qu'il fallait l'année dernière, et que cette année va être dure pour cette raison, mais justement, si on avait été exigeant avec eux, ils n'en seraient pas là et ils passeraient une bonne année de terminale comme mes élèves de l'an dernier.

La carte mentale chez les petit-e-s, ça me paraît stupéfiant, en effet.
C'est le danger des méthodes à la mode. On s'en empare sans les questionner, ni vraiment les enseigner, comme des solutions miracles.

Ce que tu dis sur la notion d'effort n'est pas incompatible avec le jugement de beaverforever. Il faut demander des efforts, de manière bien mesurée. Les discours des neurosciences n'évincent pas du tout la nécessité de l'effort pour apprendre, au contraire.

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par Niht Mer 4 Oct - 9:04
Verdurette a écrit:Dans l'analogie avec le sport, il n'est pas question d'en passer par la blessure, mais plutôt par les courbatures ...

Mais les courbatures ne sont-elles pas le signe que l'on a forcé ? C'est douloureux, une courbature, pourquoi serait-ce nécessaire ?

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par Balthazaard Mer 4 Oct - 9:36
Cela surviendra chaque fois que l'on sollicitera un muscle peu entrainé, deux exemples pour moi incontournables parmi d'autres...le tir à l'arc qui générera pas mal de douleurs dans les dorsaux le lendemain d'une initiation sur un "vrai" arc même si on a pas eu l'impression de forcer, car ces muscles sont peu utilisés en compression dans la vie quotidienne....et l'équitation pour les ischios dés les premières séances de trot...
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par valle Mer 4 Oct - 9:45
Niht a écrit:
Verdurette a écrit:Dans l'analogie avec le sport, il n'est pas question d'en passer par la blessure, mais plutôt par les courbatures ...  

Mais les courbatures ne sont-elles pas le signe que l'on a forcé ? C'est douloureux, une courbature, pourquoi serait-ce nécessaire ?
Ce n'est pas "douloureux", ou alors l'extension de la "douleur" devient presque absolue (est-ce que se lever le matin est douloureux ?).
Après, ta question semble partir d'un lien entre la nécessité, la douleur... Ce sont des questions très vastes. On pourra commencer par voir si le critère de la "nécessité" en est un (il y a bien des choses qui ne sont pas nécessaires mais qui sont souhaitables, pratiques ou utiles, par exemple). Après, tu opposes "nécessité" et "douleur" (dans ton propos) ou "confort" (dans le sens, puisque les courbatures sont plus inconfortables que douloureuses). Je ne dis pas que l'inconfort soit indispensable, mais je ne crois pas non plus qu'il soit opposé ou incompatible par nature avec la nécessité.
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Enaeco
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par Enaeco Mer 4 Oct - 11:38
Niht a écrit:
Verdurette a écrit:Dans l'analogie avec le sport, il n'est pas question d'en passer par la blessure, mais plutôt par les courbatures ...  

Mais les courbatures ne sont-elles pas le signe que l'on a forcé ? C'est douloureux, une courbature, pourquoi serait-ce nécessaire ?

Parce que le corps doit passer par une phase d'inconfort et de stress qu'il n'était pas habitué à gérer jusqu'à présent et qui génère ces courbatures.
On pourrait s'en passer si on savait exactement la limite de nos muscles mais parfois ils ne nous envoient pas le signal qu'on en fait trop.

Des courbatures légères sont plutôt positives, elles sont le signe d'un entraînement un peu trop intense mais productif.

Le problème de l'entraînement sans dépassement de soi c'est qu'on ne crée pas des conditions bénéfiques à l'amélioration. Le corps réagit à un stress et se développe de manière à être armé pour faire face à ce stress.
pseudo-intello
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par pseudo-intello Mer 4 Oct - 11:45
La dichotomie souffrance / plaisir, à l'école ou au sport, doivent être dépassées.
Il me semble que le but, c'est que les courbatures /efforts sont inévitables, on va chercher à limiter leur impact (par des étirements / des méthodes qu'on peut imaginer pour faciliter le boulot). Il y en aura, et il faut les accepter, tout en suivant les conseils qui vont les circonscrire autant que faire se peut.

Dans un cas comme dans l'autre, le meilleur moyen de progresser en en bavant le moins possible, c'est de suivre les conseils du coach / du prof !

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par valle Mer 4 Oct - 11:49
Enaeco a écrit:
Niht a écrit:
Verdurette a écrit:Dans l'analogie avec le sport, il n'est pas question d'en passer par la blessure, mais plutôt par les courbatures ...  

Mais les courbatures ne sont-elles pas le signe que l'on a forcé ? C'est douloureux, une courbature, pourquoi serait-ce nécessaire ?

Parce que le corps doit passer par une phase d'inconfort et de stress qu'il n'était pas habitué à gérer jusqu'à présent et qui génère ces courbatures.
On pourrait s'en passer si on savait exactement la limite de nos muscles mais parfois ils ne nous envoient pas le signal qu'on en fait trop.

Des courbatures légères sont plutôt positives, elles sont le signe d'un entraînement un peu trop intense mais productif.

Le problème de l'entraînement sans dépassement de soi c'est qu'on ne crée pas des conditions bénéfiques à l'amélioration. Le corps réagit à un stress et se développe de manière à être armé pour faire face à ce stress.
Plus la connotation des mots. "Stress", "inconfort", ce sont des termes qui semblent exiger une excuse, une justification. Être fatigué, avoir des courbatures, ne pas réussir (même ne vraiment pas réussir et finir par abandonner une activité / sport / loisir)... qu'on m'explique en quoi ce sont des sensations à éviter.

(Ce n'est pas pour critiquer tes choix langagiers, au contraire ! Les mots sont tels qu'ils sont).


Dernière édition par valle le Mer 4 Oct - 11:52, édité 1 fois
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par Niht Mer 4 Oct - 11:50
Pour moi, vous présentez une vision très doloriste de l'apprentissage et de l'enseignement.

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par valle Mer 4 Oct - 11:54
Mais pas du tout ! C'est toi qui sembles penser que la vie est constituée de douleur. Dans ce cas-là, tu vas aussi la retrouver dans l'école, bien entendu.
En quoi travailler, essayer, apprendre, s'améliorer, réussir, s'efforcer, échouer, pratiquer, se tromper, avoir juste, être puni, on-ils un lien avec la douleur ?
A Tuin
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par A Tuin Mer 4 Oct - 12:05
Niht a écrit:
Verdurette a écrit:Dans l'analogie avec le sport, il n'est pas question d'en passer par la blessure, mais plutôt par les courbatures ...  

Mais les courbatures ne sont-elles pas le signe que l'on a forcé ? C'est douloureux, une courbature, pourquoi serait-ce nécessaire ?

Fais preuve de simple logique : si on ne s'habitue pas à une routine de sport, de travail, de réflexion, de ... et tu peux généraliser à Tout, et bien on se décrépit.

Regarde une personne âgée qui a eu un problème de fémur cassé ou autre : la période de convalescence est cruciale pour récupérer la forme et les capacités motrices. Et pas forcément même une personne âgée : prends une personne qui se retrouve en fauteuil roulant suite à un accident, ses muscles des jambes vont s'atrophier, la structure des jambes va s'affaiblir.

Si on ne fait jamais de gymnastique mentale en réfléchissant, on habitue le cerveau à autre chose, et quand il faudra réfléchir subitement, ce sera plus dur et inconfortable.

Si on part se promener et qu'on visite un lieu avec beaucoup de marches à monter, le lendemain on va avoir des courbatures, c'est normal. Sauf si on grimpe tous les jours de nombreuses marches pour monter dans un bâtiment par exemple.

On n'a rien sans rien. Ou  alors après, il y a des biais : assistanat, triche, attentisme, etc.

Comment nier ces évidences ? Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 3795679266

Dame Jouanne a écrit:
Rien n'incite ni dans les décisions du ministère, ni dans la société à faire pour du long terme !

C'est bien là le nœud des problèmes de nos sociétés.
Le Tout, tout de suite, sans effort. L'individualisme, le court-termisme. L'incapacité à se concentrer, à patienter, à attendre, à accepter et tolérer la frustration.


Dernière édition par A Tuin le Mer 4 Oct - 12:10, édité 1 fois
Solovieï
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Solovieï Mer 4 Oct - 12:17
Je suis rassuré de voir que certains collègues ont compris mon analogie avec le sport. En revanche, d'autres persistent à transformer le sens des mots et à voir un sens absolument absent de mon propos. Il faut se rendre à l'évidence : pour certains, y compris des enseignants donc, l'effort est une "souffrance", une "douleur", une "blessure". Voilà, c'est exactement de cela dont je parlais, merci d'en avoir fait la démonstration. Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 1482308650
Moonchild
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par Moonchild Mer 4 Oct - 13:05
lene75 a écrit:
beaverforever a écrit:
Moonchild a écrit:Pour ce qui est plus spécifiquement des maths dans le secondaire, on a de fait quasiment cessé d'enseigner le calcul algébrique au collège puisqu'il y est réduit à l'état d'un traitement homéopathique, mais on continue pourtant au lycée à travailler des notions qui exigeraient un minimum de maîtrise dans ce domaine pour pouvoir être assimilées ; alors l'image du "master de topologie algébrique et de physique quantique en hongrois" employée à la page précédente par Beaverforever est certes exagérée, mais les incohérences institutionnelles provoquent ici une réelle rupture dans la continuité des apprentissages et, même si on peut par ailleurs se questionner sur le rapport à l'effort des plus jeunes générations, il n'est sans doute pas si surprenant que certains élèves cessent alors de travailler cette matière : peu importe l'époque, peut-on raisonnablement attendre d'un élève qu'il fournisse des efforts sans avoir la moindre perspective de progrès ? Lorsque l'obstacle est infranchissable, que le défi est perdu d'avance, alors le renoncement devient effectivement une attitude plutôt rationnelle.
J'ai ressenti cela fortement il y a quelques années quand j'ai compris qu'il y avait entre 10 et 20% des élèves de mes classes de secondes qui étaient en grande difficulté avec les expressions littérales. J'ai eu un élève à qui j'ai demandé de résoudre 3x + 4 = 5 et qui m'a répondu en toute sincérité que cette écriture était impossible parce que x est une lettre et non un nombre. C'est à ce moment là que j'ai mieux saisi les difficultés pédagogiques de mes collègues en mathématiques au lycée.

Le problème de tout ce que tu dis, c'est que ça n'explique en rien la baisse du niveau en fin d'école primaire. Ni la baisse de niveau tout court, mais l'école primaire est plus facile pour la comparaison parce qu'on ne peut pas objecter des questions d'orientation ou d'exclusion qui se fait moins qu'avant : ça fait un bout de temps que tout le monde, sauf cas très marginaux, suit la même scolarité primaire. Si les pratiques pédagogiques traditionnelles étaient inefficaces, elles l'auraient toujours été. Or, ce qu'on constate, c'est que là où on obtenait autrefois des bons résultats avec ces méthodes, ils sont maintenant mauvais.

Je crois qu'il y a une faille dans ton raisonnement car tu sembles partir du principe que les pratiques pédagogiques traditionnelles sont toujours en vigueur dans le primaire, ce qui n'est pas forcément exact.
Bien sûr, si par "pratiques pédagogiques traditionnelles" tu désignes n'importe quelles pratiques autres que celles prônées par Beaverforever alors ton postulat est certainement correct à un taux proche de 100% ; par contre si tu désignes les pratiques qui avaient cours lorsque tu étais toi-même élève au primaire, alors ce postulat a de fortes chances d'être erroné : les méthodes qui conduisaient à de meilleurs résultats il y a plus de 30 ans ont depuis été méthodiquement éradiquées dans beaucoup d'écoles.
Bref, on ne peut pas faire une comparaison chronologique des performances des élèves en raisonnant comme si on travaillait à méthode constante et l'évolution de ce paramètre doit aussi être prise en compte ; donc, même si je suis moi aussi très réservé quant aux vertus des cartes mentales, le constat de Beaverforever sur l'inefficacité d'un bon nombre des dispositifs pédagogiques actuels ne me paraît pas du tout infondé (ce qui, bien sûr, n'exclut pas la possible influence d'autres facteurs).
maikreeeesse
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par maikreeeesse Mer 4 Oct - 14:32
Mais y a-t-il e vraies enquêtes, avec des données fiables sur les méthodes utilisées en élémentaire ? Parce que entre ce que l'on projette, ce que l'on imagine, ce qu''on essaie de faire correspondre à ses conclusions il peut y avoir de sacrés biais. Je tourne sur beaucoup d'école en tant que formatrice et je serais pourtant bien incapable de donner des chiffres sur la prédominance de telle ou telle méthode sur le nationale alors lorsqu'on est dans le secondaire cela me semble encore plus difficile même si on a l'expérience de quelques écoles du secteur, ou de celle(s) de ses enfants.. Je peux constater à échelle locale la prédominance ou la mode de certaines mais il m'est très difficile de l’extrapoler à l'ensemble du primaire.
Il me semble qu'il y a un recensement des manuels utilisés en CP (ce qui encore différent de la méthode utilisée) mais vous connaissez d'autres études ?
galibier
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Niveau 3

Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par galibier Mer 4 Oct - 14:38
Pour les maths je le vois moins, mais en français c'est clairement une catastrophe. Je suis dans un collège plutôt favorisé pourtant.
J'ai environ les 3/4 de mes élèves de fin de collège (4e et 3e) qui ont un niveau qui correspondrait à celui d'un mauvais fin de ce1 des années 90 (je pioche régulièrement des exercices dans de vieux manuels de ce1 ce2) : ils peinent à écrire correctement en graphie (formation des lettres, propreté, écrire sur la ligne), à utiliser une feuille ou un cahier normalement (marge, titre, sens de la page...). Ils sont pour la plupart incapable de repérer un verbe ou un nom dans une phrase. Encore moins un sujet. Ils ignorent que les verbes se nomment par leur infinitif, qu'il y a des groupes de verbes pour la conjugaison. Ils ignorent l'utilisation des majuscules et de la ponctuation. Ils ne savent pas segmenter les mots correctement et écrire des phrases releve de la magie pure et simple. Le vocabulaire est extrêmement pauvre et ils ne comprennent pas ce qu'ils lisent la plupart du temps (les textes, mais aussi les consignes, les papiers du carnets de correspondance... ). Ils ont souvent des difficultés de déchiffrage à la lecture (cf les scores de fluence en 4e...). La plupart n'ont jamais lu un livre en entier à part un manga avec beaucoup d'images (les livres de l'école ne sont pas lus. Meme les livres jeunesse. Au mieux ils les écoutent et trouvent des versions audio. Sinon ils impriment un résumé ou en achètent un sur les sites de devoirs faits ou demandent à un copain de leur raconter l'histoire) .
Ils sont incapables de recopier un texte de quelques lignes sans faute de copie et dans un temps raisonnable.
Ils sont incapables de gérer leur matériel (noter dans un agenda, penser à apporter leur manuel si je le dis).
Je n'aborde que plus rarement les connaissances hors du champ de ma matière, mais il m'arrive de leur montrer sur une carte un pays dont nous rencontrons le nom dans un texte. Ils sont incapables aussi de situer des pays comme l'Italie ou l'Allemagne. Les repères historiques n'en parlons pas. Ne parlons pas non plus des notes et du calcul des moyennes. Si je fais une interro sur 5, ils demandent ce que c'est la moitié de 5 et sortent la calculatrice. Ils ne savent pas lire l'heure et les notions de "moins quart" les plongent dans la perplexité.

Cela concerne entre la moitié et 3/4 de mes élèves.

Nous sommes en train de produire massivement des handicapés. Oui oui, je dis bien handicapés, car cela s'étend en fait à tous les domaines (ils ont du mal à lire un plan, un emploi du temps, à suivre une consigne, à mémoriser, à s'orienter ...) et cela les gêne dans la compréhension du quotidien. C'est effrayant.

Mais c'est un handicap acquis. Ce sont des enfants qui sont allés à l' école 4 jours /semaine depuis le cp. Mes 4e sont dans leur 11e année d'école. C'est incompréhensible. Comment peut-on obtenir aussi peu de résultats en autant de temps ? Et je répète, je suis dans un établissement plutôt favorisé. J'ai peu d'élèves de familles non francophones et la grande majorité de mes élèves sont à peu près coopératifs.

Globalement je vois un énorme effondrement depuis 4 ans. Ce n'était pas fameux avant, mais là il y a vraiment un gouffre (covid ? Autre cause ?).

Quand ils vont arriver sur le marché du travail ça va être compliqué. Et ça commence à arriver... (un ami facteur me disait que les nouveaux embauchés ont du mal à mettre dans les bonnes boîtes aux lettres parce qu'ils lisent les noms de travers).



DesolationRow
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par DesolationRow Mer 4 Oct - 14:42
Mais parce que l'école a très peu à voir avec ce naufrage. Je rigole quand je lis beaverforever dire que la solution au naufrage est pédagogique. Le problème n'est pas l'école, c'est la société, qui fabrique massivement des débiles, à coup d'écrans, de "bienveillance" mal comprise, de refus systématique de l'effort pour n'offrir comme perspective que la consommation forcenée.
zouzou42
zouzou42
Niveau 2

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par zouzou42 Mer 4 Oct - 14:55
Ce que je trouve très significatif, c'est l'absence presque totale de participations de professeurs de mathématiques sur ce fil...
Prezbo
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Prezbo Mer 4 Oct - 15:07
zouzou42 a écrit:Ce que je trouve très significatif, c'est l'absence presque totale de participations de professeurs de mathématiques sur ce fil...

Ce que je trouve très significatif, c'est que plein de professeurs d'autres disciplines viennent donner leur avis sur un peu tout sans avoir beaucoup d'intérêt pour le sujet initial.
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Flo44
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Flo44 Mer 4 Oct - 15:21
Les avis d'autres professeurs peuvent avoir de l'intérêt, mais il est vrai qu'on s'éloigne du sujet depuis un moment.
Sans nier que leur non-maîtrise du français joue un rôle négatif dans leurs apprentissages en mathématiques, la manière dont les mathématiques sont enseignées en primaire joue certainement un rôle, car la baisse du niveau de fin de primaire n'a pas commencé il y a 4 ans, ni même 10, mais plutôt 30 ans (donc bien avant l'arrivée des téléphones).
Nos voisins sont certainement confrontés aux mêmes mutations de la société, mais pas à la même dégringolade en mathématiques. Il doit bien y avoir des raisons.
pseudo-intello
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par pseudo-intello Mer 4 Oct - 16:17
Flo44 a écrit:Les avis d'autres professeurs peuvent avoir de l'intérêt, mais il est vrai qu'on s'éloigne du sujet depuis un moment.
Sans nier que leur non-maîtrise du français joue un rôle négatif dans leurs apprentissages en mathématiques, la manière dont les mathématiques sont enseignées en primaire joue certainement un rôle, car la baisse du niveau de fin de primaire n'a pas commencé il y a 4 ans, ni même 10, mais plutôt 30 ans (donc bien avant l'arrivée des téléphones).
Nos voisins sont certainement confrontés aux mêmes mutations de la société, mais pas à la même dégringolade en mathématiques. Il doit bien y avoir des raisons.
Est-ce que ça correspondrait à l'époque de ce que ma mère nomme, avec un genre de frisson traumatisé, les "maths modernes" ?

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par Prezbo Mer 4 Oct - 16:21
pseudo-intello a écrit:
Est-ce que ça correspondrait à l'époque de ce que ma mère nomme, avec un genre de frisson traumatisé, les "maths modernes" ?

Chronologiquement cela coïncide plutôt avec la fin définitive des maths modernes (il en restait des traces dans les programmes dans les années 80). Elles étaient sans doute une erreur fondée sur un illumination, mais on n'a pas trop su quoi faire après (certains ajouteraient "et au moins c'était des maths").

Cela coïncide aussi comme le rappelle Moonchild à la disparition des EN au profit des IUFM et la prise de contrôle des sciences de l'éducation sur la formation des enseignants (l'opération d'entrisme la plus réussie de la cinquième république).
Mathador
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par Mathador Mer 4 Oct - 16:32
pseudo-intello a écrit:
Flo44 a écrit:Les avis d'autres professeurs peuvent avoir de l'intérêt, mais il est vrai qu'on s'éloigne du sujet depuis un moment.
Sans nier que leur non-maîtrise du français joue un rôle négatif dans leurs apprentissages en mathématiques, la manière dont les mathématiques sont enseignées en primaire joue certainement un rôle, car la baisse du niveau de fin de primaire n'a pas commencé il y a 4 ans, ni même 10, mais plutôt 30 ans (donc bien avant l'arrivée des téléphones).
Nos voisins sont certainement confrontés aux mêmes mutations de la société, mais pas à la même dégringolade en mathématiques. Il doit bien y avoir des raisons.
Est-ce que ça correspondrait à l'époque de ce que ma mère nomme, avec un genre de frisson traumatisé, les "maths modernes" ?
Les « maths modernes » version primaire sont plus anciennes, mais il semble évident qu'un certain nombre des collègues de l'époque avaient continué à utiliser les méthodes classiques dans le dos de l'inspection, et par conséquent à retarder les effets néfastes de cette réforme dont on n'est jamais vraiment revenu en arrière.

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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
Pat B
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Pat B Mer 4 Oct - 16:35
C'est vrai qu'on a un peu laissé parler les autres disciplines : les collègues peuvent aussi avoir un avis et des constats qui rejoignent / éclairent ceux des maths !

Quant à moi, le problème me laisse dubitative depuis longtemps. J'enseigne depuis 25 ans, et j'ai vraiment vu la chute de niveau pendant mes 18 années en collège (aujourd'hui je suis en lycée). Et je suis de la génération post-maths-modernes (ils ont arrêté quand j'étais en 5ème ou 4ème donc j'ai eu les deux, avec une prof expérimentée qui savait en limiter les effets... moi j'ai adoré les maths modernes mais j'étais un peu une extraterrestre, ce n'est pas adapté à un enfant de collège).

La baisse actuelle, je l'ai vécue comme prof, elle n'a rien à voir avec les maths modernes.
Pour la chute de niveau "interne" au collège, j'ai des pistes : je me souviens m'être interrogée sur ce choix impossible : faut-il privilégier les "activités de découvertes" qui donnent du sens, vantées par les inspecteurs, qui semblaient prometteuses à la jeune prof que j'étais ; ou les "exercices d'entraînement" qui permettent de bien ancrer les méthodes ? Impossible de faire les deux, on n'a pas assez de temps, et il faut bien garder un peu de temps pour quelques problèmes un peu plus costauds (problèmes de synthèse pour réactiver régulièrement beaucoup de notions) ! En tant qu'élève, je n'avais pas les activités de découverte et j'étais beaucoup plus entraînée, je maîtrisais mieux les choses, donc j'ai assez rapidement limité les activités de découverte (je les garde dans les cas où elles apportent réellement une plus-value, soit en terme de réactivation d'autres notions, soit en terme de compréhension profonde), pour faire plus d'entraînement... et pourtant j'en ai fait de moins en moins car les élèves étaient de moins en moins efficaces : en prenant mes DS à 10-15 ans d'intervalle, j'ai dû enlever un exercice sur 5, (le plus difficile généralement) pour qu'ils puissent finir l'évaluation. Ils sont devenus très lents, les procédures ne sont pas assez automatisées or c'est indispensable pour avancer par la suite.

Ce qui nous semblait incompréhensible dans mon collège, en tant qu'équipe stable avec des méthodes et programmes stables sur 10-12 ans, c'est de voir le niveau se dégrader alors qu'on n'avait rien changé de notre côté. On a cherché à comprendre pourquoi. On constatait que nos élèves arrivaient en sixième avec des bases moins solides qu'avant, le sens du nombre et des opérations n'était pas acquis, la numération décimale était un mystère (et pourtant à côté ils avaient vu des choses qui ne nous semblaient pas indispensables : introduire du raisonnement sur le parallélogramme en primaire est-il pertinent ?). On en a déduit qu'il devait y avoir du changement dans les méthodes utilisées en primaire. La disparition des devoirs à la maison et l'interdiction du redoublement pour les élèves fragiles ont certainement aussi eu des effets pervers (pas de devoirs = un entraînement régulier de moins, et quand on en introduit en 6ème ça leur parait énorme donc on en donne moins qu'avant ; pas de redoublement = tout le monde passe même sans base :  pourquoi se forcer ? Et pas de seconde chance à un élève qui en aurait eu besoin) ; peut-être aussi l'inclusion systématique, qui peut épuiser l'énergie des enseignants du primaire à venir en aide à des élèves avec de grandes difficultés, ils ont donc moins de temps pour les élèves moyens, ou avancent moins pour ne pas perdre les élèves en grande difficulté ?
Ce sont des pistes. Après, mes collègues de primaire nous disaient que les élèves arrivaient en maternelle avec un langage plus pauvre et de très grandes difficultés de concentration (écrans ? Polluants endocriniens ?)... ça aussi, c'est très certainement une cause... mais comment agir sur celle-ci ?

Bref, clairement, il y a une baisse de niveau à l'entrée en sixième, c'est une évidence qui date d'au moins 25 ans. Donc le rapport a raison de pointer la baisse des compétences en fin de primaire.  Mais pour moi c'est multifactoriel, avec des causes internes et des causes externes. Si on peut agir sur les premières, ce sera déjà bien. Et je présume qu'il y a eu des changements de méthodes d'enseignement aussi, mais je ne les connais pas assez. Enfin, j'en connais une : j'ai découvert la méthode MHM avec ma fille grâce au covid, méthode nouvelle vantée par son enseignant... je suis très dubitative : spiraler c'est bien, en théorie, mais il faut ancrer les connaissances avant de les réactiver ! Là, elle commençait à peine à saisir comment on multipliait par 10 que le prof passait à autre chose, sans aucun entraînement pour ancrer la notion... notion oubliée quand on la réutilisait 2 semaines plus tard.

J'ai beaucoup discuté avec mes collègues très anciens, lorsque j'ai débuté, sur ces histoires de spirale. Ils m'ont bien expliqué que ça s'est toujours fait en maths, mais pas du tout sous la forme excessive qu'on nous vend en formation. Le principe est simplement de toujours réactiver les méthodes antérieures dans d'autres chapitres. Par ex : on a vu les fractions,  donc quand on voit Pythagore on y met des fractions, quand on voit Thalès on y ajoute du Pythagore et des fractions, et quand on fait des équations on y met des fractions et du Thalès un peu plus complexe, puis on revoit Pythagore avec les cosinus (et y mets toujours fractions et équations)... Bref on entraîne, on réentraine, on répète dans d'autres contextes.
J'essaie... mais j'ai du mal parce que je manque de temps. Je souffre du cercle vicieux : pas assez d'entrainement --> pas d'automatisation --> lenteur (et incapacité à utiliser dans des situations complexes) -->  moins d'exercices dans le même temps (et moins de temps pour des exercices de synthèse) --> moins d'entraînement.

Inversement, cette année j'ai une classe de première qui m'arrive avec d'assez bonnes bases de calcul littéral et numérique (bonnes bases selon les critères actuels ; ça aurait été appelé bases fragiles il y a 20 ans!), je sais que je peux m'appuyer dessus et les utiliser dans les chapitres du programme, du coup on les utilise sans cesse, du coup ils les maîtrisent de mieux en mieux... et on avance sans peine. Je savoure ! Comme expliqué par un collègue au-dessus, je les sollicite juste au-delà de leurs compétences actuelles, donc ils progressent sans panique, sans blocage.
S'ils arrivent sans les bases de seconde, le fossé est infranchissable et j'ai le choix entre revoir les bases non acquises ou faire le programme (dans le premier cas je sacrifie la moitié de classe qui a ses bases de seconde mais ne pourra pas acquérir suffisamment celles de première ; dans le second cas je sacrifie les élèves qui n'ont pas leurs bases de seconde), comme tout le monde j'essaie de trouver un juste milieu...



Bon courage aux collègues de primaires qui doivent enseigner de plus en plus de choses mais centrer sur les fondamentaux ; entraîner mais ne rien donner à la maison ; apprendre à écrire mais ne pas trop faire écrire, apprendre l'orthographe mais surtout ne pas trop l'évaluer, apprendre à compter mais ne pas répéter trop... Le tout sans prise en charge solide des élèves en grande difficulté, avec des injonctions contradictoires (faire réussir sans trop faire d'effort) et des parents aux exigences incompatibles...
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Flo44
Érudit

Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par Flo44 Mer 4 Oct - 16:47
Merci de ton éclairage. Le fait que tu aies vu une dégradation en 10 ans au même endroit, avec les mêmes méthodes et les mêmes collègues, est significatif.

Pour bien comprendre ce qui s'est passé, le ministère devrait auditionner des enseignants comme toi et des professeurs des écoles expérimentés...

D'ailleurs en 30 ans, autre chose a changé : le recrutement et la formation des PE. Quand j'étais élève (début années 80) c'était l'École Normale. Et le concours était balèze en mathématiques... quand j'étais à l'Espe (il y a 6 ans), les PE avaient 24h de formation en mathématique, en tout et pour tout. Ça me semble très peu, surtout vu leur niveau en entrée (je précise : à l'Espe il y avait des PE très compétents et motivés, mais tout le monde sait que le minimum requis au concours n'est plus le même, et même avec un niveau correct, 24h pour apprendre à enseigner les mathématiques à des élèves de primaire me semble vraiment très peu)


Dernière édition par Flo44 le Mer 4 Oct - 16:50, édité 1 fois
voyageur
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Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN  - Page 12 Empty Re: Le naufrage sans fin en mathématiques. Note d’alerte du CSEN

par voyageur Mer 4 Oct - 16:49
Je vois plusieurs raisons à ce naufrage :

1) L'idéologie de la théorie du "constructivisme", où l'élève doit découvrir par lui même les lois,
   relations, règles,.... : autant dire qu'il n'apprend et ne retient rien (surtout s'il n'y a pas d'aide
     à  la maison).
2) Le passage automatique dans la classe supérieure, quels que soient les résultats : pourquoi se
    fatiguer ? Il n'y a plus de redoublement et pas d'enseignant supplémentaire dans la classe
    pour remédier aux difficultés
3) Le "zappisme" qui fait que l'on passe d'une notion à une autre, sans se soucier que la notion
   précédente soit assimilée ,via des exercices répétitifs.
4) Une relative indifférence (pour rester poli) des médias envers les matières scientifique.
  La plupart des médias ont une culture scientifique qui ne doit pas dépasser celle d'un élève de
  6ème (voir les commentaires affligeants des sus-nommés sur le récent prix Nobel de Physique,
   où une journaliste se vantait quasiment de ne pas comprendre les termes "électrons" et
   "molécules")
   Par conséquent, la casse des matières scientifiques qui s'est déroulée sur plusieurs années est
   passée comme une lettre à la poste
5) Un niveau faible et un manque d'intérêt de beaucoup de PE envers les Sciences :
   quand on n'a pas fait de Sciences depuis la fin de la seconde (soit 7 ans avant le concours de
   PE !) et qu'on n'aimait pas cela, comment voulez-vous enseigner les Sciences de manière
   satisfaisante, malgré la meilleure bonne volonté du monde ?
6) Une société qui dévalorise le travail, et qui valorise l'esbrouffe et le paraître
   (un influenceur a une "aura" que n'aura jamais un enseignant)
7) La transformation de l'école en vaste garderie, seule une minorité d'élèves devant recevoir une
   bonne éducation, le reste étant destiné à être uniquement des....consommateurs.
   Pour éviter que les élèves trainent dans la rue, l'école est toute désignée (cf point 3), il faut les
   "occuper" par diverses activités plus ou moins ludiques.

Attendons les résultats PISA au début décembre (axés d'ailleurs sur les Maths) pour voir si la France s'enfonce encore (à moins que d'autres pays s'enfoncent plus que nous.....)
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