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- ArlequineNiveau 3
Provence a écrit:Je pense qu'il faudra agir en son âme et conscience:
- continuer de faire lire de vraies œuvres.
- poursuivre l'enseignement progressif et rigoureux de la grammaire.
Entièrement d'accord!!!
- MmmandarineNiveau 2
Franchement, pour les programmes de lecture on pourra faire à peu près ce qu'on veut et je pense que les profs un minimum consciencieux et qui aiment leur matière feront toujours une progression annuelle qui permette aux élèves de voir les différents genres - y compris en 6e.
Pour la grammaire, au vu du niveau actuel, ça pourra pas être pire. Au contraire, je trouve que recentrer cet apprentissage sur l'écriture est plutôt intéressant, ça a le mérite de rendre concret le truc parce que savoir dénommer les natures / fonctions juste pour le fun ça n'aide pas ...
En plus, les élèves connaissent la terminologie mais ne savent pas à quoi ça réfère du coup, le cours de grammaire ressemble à pyramide - pour les miens en tout cas.
Pour moi les nouveaux programmes invitent juste à changer l'angle d'attaque. On part du "comment on dit/écrit ça ? Quel(s) mot(s) on peut mettre devant un verbe ? Après ?", on travaille des paradigmes et des modèles, on montre que la langue peut faire système (un peu comme en latin en gros). Du coup, on crée des réflexes langagiers chez les élèves.
Après je ne dis pas qu'il faut bannir complètement la terminologie - il faut savoir de quoi on parle - mais, à mon sens elle peut n'arriver que dans un second temps. L'objectif n'est pas d'en faire des linguistes mais bien qu'ils sachent écrire.
Et puis partir de leurs travaux d'écriture permet d'avoir une réelle progression et ne plus en perdre la moitié dès qu'on parle de complément du nom par exemple alors même que cette moitié ne fait pas l'accord sujet-verbe ou déterminant-nom.
Pour la grammaire, au vu du niveau actuel, ça pourra pas être pire. Au contraire, je trouve que recentrer cet apprentissage sur l'écriture est plutôt intéressant, ça a le mérite de rendre concret le truc parce que savoir dénommer les natures / fonctions juste pour le fun ça n'aide pas ...
En plus, les élèves connaissent la terminologie mais ne savent pas à quoi ça réfère du coup, le cours de grammaire ressemble à pyramide - pour les miens en tout cas.
Pour moi les nouveaux programmes invitent juste à changer l'angle d'attaque. On part du "comment on dit/écrit ça ? Quel(s) mot(s) on peut mettre devant un verbe ? Après ?", on travaille des paradigmes et des modèles, on montre que la langue peut faire système (un peu comme en latin en gros). Du coup, on crée des réflexes langagiers chez les élèves.
Après je ne dis pas qu'il faut bannir complètement la terminologie - il faut savoir de quoi on parle - mais, à mon sens elle peut n'arriver que dans un second temps. L'objectif n'est pas d'en faire des linguistes mais bien qu'ils sachent écrire.
Et puis partir de leurs travaux d'écriture permet d'avoir une réelle progression et ne plus en perdre la moitié dès qu'on parle de complément du nom par exemple alors même que cette moitié ne fait pas l'accord sujet-verbe ou déterminant-nom.
- VolubilysGrand sage
Certes la terminologie c'est barbant mais quand j'enseigne la grammaire et la conjugaison, le but n'est pas que les élèves sachent que "ça, tu vois, c'est un verbe au passé simple et ça un complément d'objet direct", mais qu'ils sachent à quoi ça sert, ce que ça apporte dans ma phrase. Et sans mot pour le dire, c'est quand même embêtant à enseigner, à retenir, à utiliser.
Une chose sans nom n'existe pas, c'est un truc, un machin, un bidule...
La terminologie ne suffit certes pas, mais c'est nécessaire.
Un pronom personnel sujet est un pronom personnel sujet, pas le truc que l'on met devant le verbe (et qui n'est pas forcément devant le verbe en plus).
Après, je ne suis qu'une PE, pas une prof de lettres.
Une chose sans nom n'existe pas, c'est un truc, un machin, un bidule...
La terminologie ne suffit certes pas, mais c'est nécessaire.
Un pronom personnel sujet est un pronom personnel sujet, pas le truc que l'on met devant le verbe (et qui n'est pas forcément devant le verbe en plus).
Après, je ne suis qu'une PE, pas une prof de lettres.
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Je vous prie de m'excuser si mes messages contiennent des coquilles, je remercie les personnes qui me les signaleront par mp pour que je puisse les corriger.
- CeladonDemi-dieu
Il faut des mots pour appréhender le monde.
En déposséder les élèves est scandaleux. De quel droit le font-ils ? C'était déjà comme ça avec l'orl et toutes leurs théories de grammaire implicite. Je ne l'ai jamais appliqué.
Il faut mettre des mots sur les faits de langue.
En déposséder les élèves est scandaleux. De quel droit le font-ils ? C'était déjà comme ça avec l'orl et toutes leurs théories de grammaire implicite. Je ne l'ai jamais appliqué.
Il faut mettre des mots sur les faits de langue.
- ProvenceEnchanteur
Si, si.Mmmandarine a écrit:
Pour la grammaire, au vue du niveau actuel, ça pourra pas être pire.
L'apprentissage de la grammaire ne doit pas être dirigé que vers l'écriture (ce qui serait réducteur). Je suis assez sidérée par ce mépris de la grammaire chez un professeur de lettres que je lis ici. "pour le fun". :shock: Il est certain que si le professeur n'est pas lui-même convaincu des vertus de ce qu'il enseigne, on n'est pas sorti de l'auberge.Au contraire, je trouve que recentrer cette apprentissage sur l'écriture est plutôt intéressant, ça a le mérite de rendre concret le truc parce que savoir dénommer les natures / fonctions juste pour le fun ça n'aide pas ...
Ce n'est pas le cas lorsqu'on prend le temps de bien construire les choses.En plus, les élèves connaissent la terminologie mais ne savent pas à quoi ça réfère du coup, le cours de grammaire ressemble à pyramide - pour les miens en tout cas.
On fait du FLE, en fait...Pour moi les nouveaux programmes invitent juste à changer l'angle d'attaque. On part du "comment on dit/écrit ça ? Quel(s) mot(s) on peut mettre devant un verbe ? Après ?", on travaille des paradigmes et des modèles, on montre que la langue peut faire système (un peu comme en latin en gros). Du coup, on crée des réflexes langagiers chez les élèves.
Quelle tristesse de se limiter à un seul objectif, et quelle illusion aussi. Ce n'est, à mon sens, que la compréhension d'une certaine abstraction qui permet à l'élève de prendre du recul, mieux analyser et de mieux comprendre ce qu'on écrit mais aussi ce qu'on lit... Les programmes ne proposent rien d'autre qu'un objectif de communication.Après je ne dit pas qu'il faut bannir complétement la terminologie - il faut savoir de quoi on parle - mais, à mon sens elle peut n'arriver que dans un second temps. L'objectif n'est pas d'en faire des linguistes mais bien qu'ils sachent écrire.
:shock: :shock: :shock:Et puis partir de leur travaux d'écriture permet d'avoir une réelle progression
et ne plus en perdre la moitié dès qu'on parle de complément du nom par exemple alors même que cette moitié ne fait pas l'accord sujet-verbe ou déterminant-nom.
Peut-être parce qu'ils n'ont pas fait assez de grammaire, justement...
- V.MarchaisEmpereur
Mmmandarine a écrit: Pour la grammaire, au vue du niveau actuel, ça pourra pas être pire. Au contraire, je trouve que recentrer cette apprentissage sur l'écriture est plutôt intéressant, ça a le mérite de rendre concret le truc parce que savoir dénommer les natures / fonctions juste pour le fun ça n'aide pas ...
En plus, les élèves connaissent la terminologie mais ne savent pas à quoi ça réfère du coup, le cours de grammaire ressemble à pyramide - pour les miens en tout cas.
Mandarine, on ne pense pas sans mots. Pour maîtriser réellement la grammaire, il faut nommer les concepts qu'elle emploie. On n'a encore rien trouvé de mieux pour penser clairement. Toutes les contorsions destinées à éviter de nommer les choses ne peuvent aboutir qu'à davantage de désarroi chez les élèves - c'est d'ailleurs ce que l'on constate avec l'effondrement en grammaire depuis l'introduction de l'ORL en Primaire. Et ces exercices d'analyse que tu sembles trouver ridicules ou inintéressants sont les plus à même de créer des automatismes dans la reconnaissance des natures de mots qui, tu en conviendras, sont indispensables au moins pour l'orthographe.
Faire des liens perpétuels entre grammaire et écriture, c'est nécessaire. Mais réduire la grammaire à un outil pour écrire, c'est ne pas saisir ses enjeux. La grammaire n'est pas juste une boîte à outil. Elle est maniement de concepts (à condition évidemment d'oser manier ces concepts, c'est-à-dire les mots qui les nomment, les définir clairement, sans se contenter de décrire leurs propriétés) qui permet une entrée dans l'abstraction et le raisonnement d'autant plus aisée que cette abstraction prend appui sur la matière concrète de la langue. C'est cette conceptualisation et elle seule qui permet vraiment de "faire système", comme tu dis. Comment veux-tu autrement penser un système sans représentation claire (donc clairement énoncée dirait Boileau) de ses éléments ? C'est aussi parce qu'on travaille de façon méthodique sur les "éléments de la proposition", comme on disait autrefois pour nommer les fonctions, que la syntaxe se structure et s'enrichit.
L'enseignement de la grammaire vit aujourd'hui un triple drame :
- le mépris de cette discipline, jugée archaïque, voire vaine, et qui ne se justifierait, à te lire et à lire bien des formateurs, qu'en tant qu'outil visant d'autres fins qu'elle-même ;
- la manque de maîtrise de la grammaire par nombre de professeurs qui n'en comprennent même plus les enjeux et sont, par conséquent, réceptifs au discours ci-dessus ;
- un refus de nommer les concepts qui sème la confusion dans l'esprit des élèves et remplace des définitions claires par des manipulations aussi complexes qu'inefficaces. Les critères de distribution sont sans doute des éléments intéressants à considérer pour qui maîtrise déjà parfaitement la grammaire, mais ils sont impropres à permettre la reconnaissance des catégories. J'ai déjà écrits de longs messages pour dénoncer la fausseté d'assertions comme : les compléments essentiels ne sont ni déplaçables ni supprimables, le CC l'est. Mais c'est aujourd'hui souvent ces seuls critères inefficaces qu'on donne aux élèves pour comprendre les notions. Et on s'étonne qu'ils ne les maîtrisent pas...
- henrietteMédiateur
Volubilys, Celadon, Provence, Véro : vous parlez d'or.
Et cela me sidère qu'on puisse ne pas comprendre, à l'heure où il faut faire du code au collège, que l'analyse grammaticale est fondamentale et pour la maîtrise de la langue et pour la structuration de la pensée.
Et je suis désolée, mais les séances de grammaire peuvent être des moments très intéressants et très appréciés des élèves (les miens adorent) et pas nécessairement des pensums rébarbatifs et peu ''glamour'' : elles sont ce que le prof en fait.
Et cela me sidère qu'on puisse ne pas comprendre, à l'heure où il faut faire du code au collège, que l'analyse grammaticale est fondamentale et pour la maîtrise de la langue et pour la structuration de la pensée.
Et je suis désolée, mais les séances de grammaire peuvent être des moments très intéressants et très appréciés des élèves (les miens adorent) et pas nécessairement des pensums rébarbatifs et peu ''glamour'' : elles sont ce que le prof en fait.
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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- IphigénieProphète
+10
Je crains que le désastre de la grammaire soit quand même très largement le désastre des profs chargés d'enseigner la grammaire et qui ne le font pas, ou mal. Depuis déjà pas mal de temps.
J'ai eu des secondes qui,( comme Jacques le fataliste) me disaient que leur prof leur disait qu'ils ne feraient pas de grammaire parce que c'est un truc pénible et qui ne sert à rien (ils utilisaient d'autres adjectifs): comme ils étaient nombreux à me le dire, je suppose que c'était vrai.
Je crains que le désastre de la grammaire soit quand même très largement le désastre des profs chargés d'enseigner la grammaire et qui ne le font pas, ou mal. Depuis déjà pas mal de temps.
J'ai eu des secondes qui,( comme Jacques le fataliste) me disaient que leur prof leur disait qu'ils ne feraient pas de grammaire parce que c'est un truc pénible et qui ne sert à rien (ils utilisaient d'autres adjectifs): comme ils étaient nombreux à me le dire, je suppose que c'était vrai.
- egometDoyen
V.Marchais a écrit:Mmmandarine a écrit: Pour la grammaire, au vue du niveau actuel, ça pourra pas être pire. Au contraire, je trouve que recentrer cette apprentissage sur l'écriture est plutôt intéressant, ça a le mérite de rendre concret le truc parce que savoir dénommer les natures / fonctions juste pour le fun ça n'aide pas ...
En plus, les élèves connaissent la terminologie mais ne savent pas à quoi ça réfère du coup, le cours de grammaire ressemble à pyramide - pour les miens en tout cas.
Mandarine, on ne pense pas sans mots. Pour maîtriser réellement la grammaire, il faut nommer les concepts qu'elle emploie. On n'a encore rien trouvé de mieux pour penser clairement. Toutes les contorsions destinées à éviter de nommer les choses ne peuvent aboutir qu'à davantage de désarroi chez les élèves - c'est d'ailleurs ce que l'on constate avec l'effondrement en grammaire depuis l'introduction de l'ORL en Primaire. Et ces exercices d'analyse que tu sembles trouver ridicules ou inintéressants sont les plus à même de créer des automatismes dans la reconnaissance des natures de mots qui, tu en conviendras, sont indispensables au moins pour l'orthographe.
Faire des liens perpétuels entre grammaire et écriture, c'est nécessaire. Mais réduire la grammaire à un outil pour écrire, c'est ne pas saisir ses enjeux. La grammaire n'est pas juste une boîte à outil. Elle est maniement de concepts (à condition évidemment d'oser manier ces concepts, c'est-à-dire les mots qui les nomment, les définir clairement, sans se contenter de décrire leurs propriétés) qui permet une entrée dans l'abstraction et le raisonnement d'autant plus aisée que cette abstraction prend appui sur la matière concrète de la langue. C'est cette conceptualisation et elle seule qui permet vraiment de "faire système", comme tu dis. Comment veux-tu autrement penser un système sans représentation claire (donc clairement énoncée dirait Boileau) de ses éléments ? C'est aussi parce qu'on travaille de façon méthodique sur les "éléments de la proposition", comme on disait autrefois pour nommer les fonctions, que la syntaxe se structure et s'enrichit.
L'enseignement de la grammaire vit aujourd'hui un triple drame :
- le mépris de cette discipline, jugée archaïque, voire vaine, et qui ne se justifierait, à te lire et à lire bien des formateurs, qu'en tant qu'outil visant d'autres fins qu'elle-même ;
- la manque de maîtrise de la grammaire par nombre de professeurs qui n'en comprennent même plus les enjeux et sont, par conséquent, réceptifs au discours ci-dessus ;
- un refus de nommer les concepts qui sème la confusion dans l'esprit des élèves et remplace des définitions claires par des manipulations aussi complexes qu'inefficaces. Les critères de distribution sont sans doute des éléments intéressants à considérer pour qui maîtrise déjà parfaitement la grammaire, mais ils sont impropres à permettre la reconnaissance des catégories. J'ai déjà écrits de longs messages pour dénoncer la fausseté d'assertions comme : les compléments essentiels ne sont ni déplaçables ni supprimables, le CC l'est. Mais c'est aujourd'hui souvent ces seuls critères inefficaces qu'on donne aux élèves pour comprendre les notions. Et on s'étonne qu'ils ne les maîtrisent pas...
J'ajoute le fait que la grammaire est une matière très conceptuelle, où il est possible de décrocher totalement. Si les bases sont trop incertaines ou, pire, si de mauvais réflexes ont été pris, il devient pratiquement impossible de construire une progression pour une classe. On se retrouve à choisir quels élèves on va perdre. On ne peut pas ennuyer les bons (ceux qui ont eu la chance d'avoir un bon enseignement) au-delà du ridicule. Et les élèves perdus le sont parfois à un tel point que leurs structures mentales sont déroutantes. Quand une élève me demande sérieusement si "fera" est du passé, j'ai un peu de mal à la maintenir dans le même cours que les autres, sur la valeur temporelle du conditionnel.
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Primum non nocere.
Ubi bene, ibi patria.
Mes livres, mes poèmes, réflexions pédagogiques: http://egomet.sanqualis.com/
- CeladonDemi-dieu
Pour les décideurs, je crains hélas qu'ils ne comprennent parfaitement ce que penser veut dire et que ce ne soit sciemment qu'ils privent les élèves d'un outil de structuration de pensée. Ca fait peur. Il n'y a pas que la langue, qui soit fasciste, en l'occurrence.henriette a écrit:Volubilys, Celadon, Provence, Véro : vous parlez d'or.
Et cela me sidère qu'on puisse ne pas comprendre, à l'heure où il faut faire du code au collège, que l'analyse grammaticale est fondamentale et pour la maîtrise de la langue et pour la structuration de la pensée.
Et je suis désolée, mais les séances de grammaire peuvent être des moments très intéressants et très appréciés des élèves (les miens adorent) et pas nécessairement des pensums rébarbatifs et peu ''glamour'' : elles sont ce que le prof en fait.
- barègesÉrudit
De mon vieux temps, en fac de lettres, je n'ai fait qu'un peu de linguistique bien universitaire.Iphigénie a écrit:+10
Je crains que le désastre de la grammaire soit quand même très largement le désastre des profs chargés d'enseigner la grammaire et qui ne le font pas, ou mal. Depuis déjà pas mal de temps.
J'ai eu des secondes qui,( comme Jacques le fataliste) me disaient que leur prof leur disait qu'ils ne feraient pas de grammaire parce que c'est un truc pénible et qui ne sert à rien (ils utilisaient d'autres adjectifs): comme ils étaient nombreux à me le dire, je suppose que c'était vrai.
La grammaire de phrase, la grammaire scolaire, c'était au collège en français, au collège en latin, au lycée en latin, en fac en latin et en ancien français.
Depuis il y a eu les programmes depuis 1995 qui ont pas mal enlevé la grammaire du français en collège, et le début de la disparition du latin et de l'ancien français dans les facs.
Il doit bien y avoir dix ou quinze ans que les professeurs de lettres arrivent en poste sans "vécu grammatical" et se forment à moitié en faisant cours.
Là on achève le processus de manière... radicale.
- Cha33Fidèle du forum
La grammaire est une gymnastique de l'esprit. Lorsque mes élèves me parlent de "torture" en évoquant la grammaire, je leur réponds qu'au contraire, c'est amusant, c'est comme un jeu de construction. C'est sidérant de lire qu'un professeur de lettres puisse réduire cette noble discipline à une vulgaire boîte à outils qui se propose non comme une fin mais un moyen. Rien de pire que ces visions utilitaristes des enseignements. Nouveau programme ou pas, mes cours de langue resteront inchangés. Je refuse la compromission avec la médiocrité.
- Cha33Fidèle du forum
barèges a écrit:De mon vieux temps, en fac de lettres, je n'ai fait qu'un peu de linguistique bien universitaire.Iphigénie a écrit:+10
Je crains que le désastre de la grammaire soit quand même très largement le désastre des profs chargés d'enseigner la grammaire et qui ne le font pas, ou mal. Depuis déjà pas mal de temps.
J'ai eu des secondes qui,( comme Jacques le fataliste) me disaient que leur prof leur disait qu'ils ne feraient pas de grammaire parce que c'est un truc pénible et qui ne sert à rien (ils utilisaient d'autres adjectifs): comme ils étaient nombreux à me le dire, je suppose que c'était vrai.
La grammaire de phrase, la grammaire scolaire, c'était au collège en français, au collège en latin, au lycée en latin, en fac en latin et en ancien français.
Depuis il y a eu les programmes depuis 1995 qui ont pas mal enlevé la grammaire du français en collège, et le début de la disparition du latin et de l'ancien français dans les facs.
Il doit bien y avoir dix ou quinze ans que les professeurs de lettres arrivent en poste sans "vécu grammatical" et se forment à moitié en faisant cours.
Là on achève le processus de manière... radicale.
En effet, durant les deux premières années de licence, je n'ai eu droit qu'à une bouillie mal digérée de linguistique. Fort heureusement, je suivais les cours de latin et d'ancien français. En troisième année, j'ai changé d'université et j'ai fait à nouveau de l'analyse logique et grammaticale, travail poursuivi en préparation aux concours. Cela a été salvateur et a éclairé grand nombre de mes lanternes. Cet enseignement a décuplé mon plaisir à faire de la grammaire, plaisir que j'avais perdu avec les pseudo cours de linguistique.
- AdriGrand Maître
Ah pitié, laissez-nous la grammaire !
J'en ai besoin pour enseigner correctement une LV aux élèves : il faut bien, effectivement, nommer les choses, les mots, les concepts pour rendre visible l'architecture, les mécanismes de fonctionnement de la langue. C'est en regardant sous les jupes des phrases qu'on comprend : "Ah, ben c'est logique en fait, c'est simple, c'est toujours pareil !" On ne peut pas comprendre, a fortiori concevoir si on ne sait pas comment ça marche. Et pour ça, il faut pouvoir nommer les composants. Ou bien on imite comme on peut un gloubiboulga, comme un singe savant. Ca marche parfois, mais on arrive vite aux limites. En comprenant les fonctionnements, on gagne en liberté, d'expression, de conception.
Et puis en français, la grammaire, ça n'est pas ennuyeux. C'est structurant, rassurant. J'ai vu bien des élèves enthousiastes au contraire, heureux de comprendre comment ça marche. Evidemment, si l'enseignant considère ça comme un pensum...
J'en ai besoin pour enseigner correctement une LV aux élèves : il faut bien, effectivement, nommer les choses, les mots, les concepts pour rendre visible l'architecture, les mécanismes de fonctionnement de la langue. C'est en regardant sous les jupes des phrases qu'on comprend : "Ah, ben c'est logique en fait, c'est simple, c'est toujours pareil !" On ne peut pas comprendre, a fortiori concevoir si on ne sait pas comment ça marche. Et pour ça, il faut pouvoir nommer les composants. Ou bien on imite comme on peut un gloubiboulga, comme un singe savant. Ca marche parfois, mais on arrive vite aux limites. En comprenant les fonctionnements, on gagne en liberté, d'expression, de conception.
Et puis en français, la grammaire, ça n'est pas ennuyeux. C'est structurant, rassurant. J'ai vu bien des élèves enthousiastes au contraire, heureux de comprendre comment ça marche. Evidemment, si l'enseignant considère ça comme un pensum...
- LoraNeoprof expérimenté
Ça m'est arrivé lors de la préparation du CAPES à l'IUFM. On nous préparait à l'épreuve sur dossier. Ça portait sur les manuels en cours au collège et là, nous découvrons avec stupeur... le thème et le propos ! Nous n'avions jamais entendu parler de ça, ni au collège, ni à la fac. La formatrice a donc dû nous faire un cours !barèges a écrit:Il doit bien y avoir dix ou quinze ans que les professeurs de lettres arrivent en poste sans "vécu grammatical" et se forment à moitié en faisant cours.
- MmmandarineNiveau 2
Visiblement je me suis mal fait comprendre ... ou du moins mon discours a peut-être été compris comme un calque des programmes - ce qu'il n'est pas.
Je n'ai pas peur d'enseigner la grammaire - au contraire j'adore ça. Je dis simplement qu'il faut peut être changer la perspective. Pour moi il faut refaire de l'architecture de la phrase, apprendre aux élèves à penser en terme de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures.
De l'expérience que j'ai des chantiers grammaticaux, les élève sont hyper performants dans la phase de recherche et dès qu'on passe au métalangage, y'a plus personne. Pourquoi ?
Mais parce que - de ce que j'ai pu constater - quand ils analysent une phrase ils repèrent des petits mots et c'est comme ça qu'un complément du nom devient un COI du nom.
Par ailleurs, partir de leurs écrits est un point de départ nécessaire pour aller ensuite vers un métalangage et une étude de la langue comme objet.
Et à celles et ceux qui font les gros yeux quand j'ose dire qu'on peut penser une progression en faisant un diagnostique des difficultés des élèves je réponds :
Le but de l'enseignement est-il de faire les item du programme en grammaire ou bien de faire en sorte que nos élèves - ceux que nous avons pendant un an - puissent utiliser correctement et en toute conscience la langue qui est la nôtre ?
(surtout qu'en réalité on est obligé de revenir sur les acquis des élèves)
Je n'ai pas peur d'enseigner la grammaire - au contraire j'adore ça. Je dis simplement qu'il faut peut être changer la perspective. Pour moi il faut refaire de l'architecture de la phrase, apprendre aux élèves à penser en terme de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures.
De l'expérience que j'ai des chantiers grammaticaux, les élève sont hyper performants dans la phase de recherche et dès qu'on passe au métalangage, y'a plus personne. Pourquoi ?
Mais parce que - de ce que j'ai pu constater - quand ils analysent une phrase ils repèrent des petits mots et c'est comme ça qu'un complément du nom devient un COI du nom.
Par ailleurs, partir de leurs écrits est un point de départ nécessaire pour aller ensuite vers un métalangage et une étude de la langue comme objet.
Et à celles et ceux qui font les gros yeux quand j'ose dire qu'on peut penser une progression en faisant un diagnostique des difficultés des élèves je réponds :
Le but de l'enseignement est-il de faire les item du programme en grammaire ou bien de faire en sorte que nos élèves - ceux que nous avons pendant un an - puissent utiliser correctement et en toute conscience la langue qui est la nôtre ?
(surtout qu'en réalité on est obligé de revenir sur les acquis des élèves)
- V.MarchaisEmpereur
Mmmandarine a écrit:Visiblement je me suis mal fait comprendre ... ou du moins mon discours a peut-être été compris comme un calque des programmes - ce qu'il n'est pas.
Je n'ai pas peur d'enseigner la grammaire - au contraire j'adore ça. Je dis simplement qu'il faut peut être changer la perspective. Pour moi il faut refaire de l'architecture de la phrase, apprendre aux élèves à penser en terme de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures.
Pour analyser les fonctions, tu as besoin de repérer au minimum les verbes, les noms, les pronoms et les prépositions. Il faut bien que tu les aies étudié d'abord pour pouvoir parler de complément direct ou indirect, du nom, du verbe, etc. Et à mon humble avis, une fois que tu as fait ça, tu peux finir le tour des natures, ce n'est pas bien compliqué. Bon, rien n'empêche d'alterner (dans les faits, pour des raisons évidentes, je ne traîne guère avant d'évoquer le sujet) mais de là à affirmer qu'il faudrait "apprendre à penser en termes de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures", non.
Parce que ce métalangage est mal enseigné, tout simplement.De l'expérience que j'ai des chantiers grammaticaux, les élève sont hyper performants dans la phase de recherche et dès qu'on passe au métalangage, y'a plus personne. Pourquoi ?
Et aussi en partie par défaut d'apprentissage des définitions, qui fait qu'à un moment, même si on a compris, on mélange tout, parce que la compréhension ne suffit pas. (Oilà un axiome qui nous change un peu du : "Apprendre ne suffit pas." La réciproque est vraie.)
Ah bon ? Et sur quoi fondes-tu cette affirmation ?Par ailleurs, partir de leurs écrits est un point de départ nécessaire.
Pour ma part, j'ai presque 20 ans d'expérience qui témoignent du contraire. Des élèves en grande difficulté avec l'écrit reprennent haleine avec des cours de grammaire débarrassés de cette difficulté-là, et vont justement reprendre progressivement pied dans l'écrit par la grammaire, parce qu'on a d'abord fait des cours "cloisonnés", qui permettaient à des élèves rationnels mais nuls à l'écrit de se voir enfin réussir dans un domaine du Français sans être sans cesse empêchés par le lexique ou la syntaxe. D'après mon expérience toujours, bien des élèves faibles aiment beaucoup la grammaire.
Et à celles et ceux qui font les gros yeux quand j'ose dire qu'on peut penser une progression en faisant un diagnostique des difficultés des élèves je réponds :
Le but de l'enseignement est-il de faire les item du programme en grammaire ou bien de faire en sorte que nos élèves - ceux que nous avons pendant un an - puissent utiliser correctement et en toute conscience la langue qui est la nôtre ?
Je ne comprends pas ton opposition. Le meilleur moyen de permettre aux élèves de comprendre et d'écrire avec finesse, c'est encore une progression grammaticale rigoureuse qui va justement opérer peu à peu dans leur esprit ce modèle de construction de phrase que tu appelles de tes voeux.
- MmmandarineNiveau 2
Tu as besoin du verbe, oui comme pilier de la phrase. Les fonctions s'articulent autour, le sujet (avant de manière générale) et les compléments (obligatoire ou non). Comprendre comment fonctionne une phrase permet aux élèves de l'appréhender comme série de groupes et non plus de mots. Du coup, on développe l'empan visuel des élèves au lieu de voir 7 mots, ils voient 7 groupes.Pour analyser les fonctions, tu as besoin de repérer au minimum les verbes, les noms, les pronoms et les prépositions. Il faut bien que tu les aies étudié d'abord pour pouvoir parler de complément direct ou indirect, du nom, du verbe, etc. Et à mon humble avis, une fois que tu as fait ça, tu peux finir le tour des natures, ce n'est pas bien compliqué. Bon, rien n'empêche d'alterner (dans les faits, pour des raisons évidentes, je ne traîne guère avant d'évoquer le sujet) mais de là à affirmer qu'il faudrait "apprendre à penser en termes de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures", non.
Si tu pars de ces fonctions de base, tu peux ensuite travailler en paradigme sur ce qui peut être sujet, et ensuite les nommer. Je dis bien que c'est une possibilité dans laquelle je me retrouve plus que dans les natures d'emblée.
Ou pas ... Je ne me permets pas de juger de la qualité ou non des cours de grammaire auxquels je n'ai pu assister.Parce que ce métalangage est mal enseigné, tout simplement.
Et aussi en partie par défaut d'apprentissage des définitions, qui fait qu'à un moment, même si on a compris, on mélange tout, parce que la compréhension ne suffit pas. (Oilà un axiome qui nous change un peu du : "Apprendre ne suffit pas." La réciproque est vraie.)
Mais je suis d'accord, la compréhension ne suffit pas, il faut ensuite que les élèves réemploient ce qu'ils ont appris - et c'est souvent là que ça coince - ils faut que ces notions deviennent des automatismes. Et il me semble que la production d'énoncé est un bon moyen pour travailler les automatismes et les diagnostiquer. D'où l'importance que j'accorde à leurs écrits
Mais je n'ai jamais dis qu'ils n'aimaient pas ça et je pense également qu'il faut cloisonner l'enseignement.
Pour ma part, j'ai presque 20 ans d'expérience qui témoignent du contraire. Des élèves en grande difficulté avec l'écrit reprennent haleine avec des cours de grammaire débarrassés de cette difficulté-là, et vont justement reprendre progressivement pied dans l'écrit par la grammaire, parce qu'on a d'abord fait des cours "cloisonnés", qui permettaient à des élèves rationnels mais nuls à l'écrit de se voir enfin réussir dans un domaine du Français sans être sans cesse empêchés par le lexique ou la syntaxe. D'après mon expérience toujours, bien des élèves faibles aiment beaucoup la grammaire.
Comment débarrasses-tu les élèves de l'écrit ? Je suis curieuse ... Peux-tu expliciter un de tes cours de grammaire ?
Oui, une progression rigoureuse sur l'année. Alors, biensûr en un an, on ne peut pas tout voir, mais on peut s'appuyer sur leurs acquis, pour aller plus vite en fonction des niveaux.Je ne comprends pas ton opposition. Le meilleur moyen de permettre aux élèves de comprendre et d'écrire avec finesse, c'est encore une progression grammaticale rigoureuse qui va justement opérer peu à peu dans leur esprit ce modèle de construction de phrase que tu appelles de tes voeux.
- LoraNeoprof expérimenté
Peut-on trouver quelque part les " vieux " programmes ? Je veux dire ceux d'avant, je ne sais pas... 1995, je crois. Ceux de quand j'étais au collège (je suis rentrée en 6e en 1987) ou dans ces eaux-là. Je suis curieuse de voir comment on devait enseigner la grammaire et la littérature à cette époque.
- CeladonDemi-dieu
Les programmes antérieurs à Jospin, quoi.
- AsarteLilithEsprit sacré
A vous lire tous, j'ai honte de mes cours et du niveau de mes 4ème... je précise que je ne suis pas la seule a me plaindre de leur niveau....
Au fait j'ai cru voir un smiley qui se pend sur un message.... Mais infichue de le retrouver... Mon humour noir aurait-il été entendu ? :lol!:
Au fait j'ai cru voir un smiley qui se pend sur un message.... Mais infichue de le retrouver... Mon humour noir aurait-il été entendu ? :lol!:
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- ysabelDevin
Lora a écrit:Peut-on trouver quelque part les " vieux " programmes ? Je veux dire ceux d'avant, je ne sais pas... 1995, je crois. Ceux de quand j'étais au collège (je suis rentrée en 6e en 1987) ou dans ces eaux-là. Je suis curieuse de voir comment on devait enseigner la grammaire et la littérature à cette époque.
J'étais au collège dans la première moitié des années 80. Après avoir fait beaucoup, beaucoup de grammaire en primaire (et appris tous les temps de l'indicatif dès le CE1), j'avais une heure de grammaire par semaine avec un programme très progressif de la 6ème à la 3ème.
La littérature, c'était durant les autres heures.
La séquence n'existait pas encore (ou s'il elle existait, je n'ai eu aucun professeur de collège qui la pratiquait).
Après j'ai eu la chance d'avoir un agrégé de grammaire en 4e et 3e (et avec 2 classes en français et latin, il avait une HSA ; serait-ce possible aujourd'hui ?)
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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante
« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
- BussyNiveau 10
Iphigénie a écrit:+10
Je crains que le désastre de la grammaire soit quand même très largement le désastre des profs chargés d'enseigner la grammaire et qui ne le font pas, ou mal. Depuis déjà pas mal de temps.
J'ai eu des secondes qui,( comme Jacques le fataliste) me disaient que leur prof leur disait qu'ils ne feraient pas de grammaire parce que c'est un truc pénible et qui ne sert à rien (ils utilisaient d'autres adjectifs): comme ils étaient nombreux à me le dire, je suppose que c'était vrai.
Déjà entendu. Une collègue présentait sa séquence à sa classe de 4e : "Alors on va faire beaucoup d'oral. Vous viendrez tous présenter un livre emprunté au CDI. On va étudier 2 ou 3 nouvelles de Maupassant, faire un peu de vocabulaire et on finira avec une rédaction. Pas de grammaire parce que c'est ennuyeux et qu'on ne va pas avoir le temps."
J'étais dans la salle d'à côté en train de corriger des copies pendant un creux. Je me suis retenue pour ne pas hurler.
- V.MarchaisEmpereur
Mmmandarine a écrit:Tu as besoin du verbe, oui comme pilier de la phrase. Les fonctions s'articulent autour, le sujet (avant de manière générale) et les compléments (obligatoire ou non). Comprendre comment fonctionne une phrase permet aux élèves de l'appréhender comme série de groupes et non plus de mots. Du coup, on développe l'empan visuel des élèves au lieu de voir 7 mots, ils voient 7 groupes.Pour analyser les fonctions, tu as besoin de repérer au minimum les verbes, les noms, les pronoms et les prépositions. Il faut bien que tu les aies étudié d'abord pour pouvoir parler de complément direct ou indirect, du nom, du verbe, etc. Et à mon humble avis, une fois que tu as fait ça, tu peux finir le tour des natures, ce n'est pas bien compliqué. Bon, rien n'empêche d'alterner (dans les faits, pour des raisons évidentes, je ne traîne guère avant d'évoquer le sujet) mais de là à affirmer qu'il faudrait "apprendre à penser en termes de groupes fonctionnels avant d'injecter les natures", non.
Si tu pars de ces fonctions de base, tu peux ensuite travailler en paradigme sur ce qui peut être sujet, et ensuite les nommer. Je dis bien que c'est une possibilité dans laquelle je me retrouve plus que dans les natures d'emblée.
Bien sûr que tu peux faire comme ça. Ce n'est absolument pas idiot. Tu peux partir des fonctions et voir les natures (même si tu as tout de suite besoin de repérer verbe et nom, et assez vite préposition pour les COI, c'est ma seule réserve, mais bon, pourquoi pas. Il y a d'excellentes grammaires qui procèdent ainsi. C'est juste sur le "il faut" que je tique. Non, il ne faut pas partir des fonctions. On peut. Nuance.
Par ailleurs, je suis d'accord avec toi sur la nécessité de faire comprendre la notion de groupe. Nous en avions parlé ici.
Ou pas ... Je ne me permets pas de juger de la qualité ou non des cours de grammaire auxquels je n'ai pu assister.Parce que ce métalangage est mal enseigné, tout simplement.
Et aussi en partie par défaut d'apprentissage des définitions, qui fait qu'à un moment, même si on a compris, on mélange tout, parce que la compréhension ne suffit pas. (Oilà un axiome qui nous change un peu du : "Apprendre ne suffit pas." La réciproque est vraie.)
Mais je suis d'accord, la compréhension ne suffit pas, il faut ensuite que les élèves réemploient ce qu'ils ont appris - et c'est souvent là que ça coince - ils faut que ces notions deviennent des automatismes. Et il me semble que la production d'énoncé est un bon moyen pour travailler les automatismes et les diagnostiquer. D'où l'importance que j'accorde à leurs écrits
Je ne juge pas des cours, je juge une doxa et ses résultats. Doxa de la séquence et de la nécessité de partir des textes pour étudier la grammaire (si les remarques trop souvent sporadiques faites à partir des textes méritent encore le nom d'étude...), doxa de l'ORL et de l'approche par manipulations, déplacements, suppressions, aux dépens de définitions claires des concepts.
À mon avis, les automatismes, à part pour les conjugaisons, et encore, ce serait à nuancer, bref, les automatismes, ce n'est pas via l'écriture que tu vas les créer. Les automatismes naissent de la répétition de tâches simples et l'écriture est une tâche très complexe qui mobilise des tonnes de capacités, comme on dit aujourd'hui. Pour créer des automatismes dans la reconnaissance des natures et des fonctions, rien de vaut l'analyse fréquente.
Par contre, là où je te rejoins, c'est que je trouve l'écriture idéale pour s'approprier une notion, c'est-à-dire non pour en automatiser la reconnaissance, mais pour la com-prendre au sens quasi étymologique. Comme si, via l'écriture, ça descendait dans le corps de l'élève - ou dans sa tête au moins. On observe rapidement, on analyse, on déduit, on définit, et ensuite, le mieux, pour s'approprier vraiment la notion, c'est d'écrire. Mais chez moi l'écriture vient après la découverte de la notion. On ne part pas des écrits des élèves.
Ce que je crains, avec les évaluations diagnostiques par l'écriture pour déterminer les points de grammaire à aborder, c'est qu'on aboutisse à une juxtaposition de leçons un peu décousues, au fil des urgences à régler, plutôt qu'une progression au sens plein du terme, qui permette de poser des concepts un à un, dans un ordre choisi de façon à ce que chaque concept nouvellement introduit éclaire les précédents et les remobilise.
Mais je n'ai jamais dis qu'ils n'aimaient pas ça et je pense également qu'il faut cloisonner l'enseignement.
Pour ma part, j'ai presque 20 ans d'expérience qui témoignent du contraire. Des élèves en grande difficulté avec l'écrit reprennent haleine avec des cours de grammaire débarrassés de cette difficulté-là, et vont justement reprendre progressivement pied dans l'écrit par la grammaire, parce qu'on a d'abord fait des cours "cloisonnés", qui permettaient à des élèves rationnels mais nuls à l'écrit de se voir enfin réussir dans un domaine du Français sans être sans cesse empêchés par le lexique ou la syntaxe. D'après mon expérience toujours, bien des élèves faibles aiment beaucoup la grammaire.
Comment débarrasses-tu les élèves de l'écrit ? Je suis curieuse ... Peux-tu expliciter un de tes cours de grammaire ?
Je fais ici allusion au dogme de la séquence : il faut partir des textes, et encore des textes, toujours des textes. Pour des élèves qui ont du mal en compréhension, ajouter la difficulté du texte à la nécessité d'étudier des concepts grammaticaux, c'est alourdir inutilement la tâche et lui donner dès le départ le sentiment de son incapacité. Il est perdu d'avance, non à cause d'une impossibilité pour lui de comprendre la notion, mais à cause de la complexité des phrases, du désarroi qu'il ressent déjà face à un texte qu'il ne comprend que très superficiellement. Alors le temps de poser les notions, je débarrasse mes élèves de cette difficulté-là en passant par un corpus de phrases aussi simples et éclairantes que possible. Je ne pars que rarement de textes.
Je ramène ensuite très vite les élèves à l'écrit par la rédaction, en leur demandant de mobiliser la notion pour montrer qu'ils l'ont comprise (cela permet en outre de discuter des erreurs qui peuvent se produire alors) mais seulement une fois que tout le monde pense avoir compris ce qu'était un COD / un attribut / un CC de lieu, de temps...
Oui, une progression rigoureuse sur l'année. Alors, biensûr en un an, on ne peut pas tout voir, mais on peut s'appuyer sur leurs acquis, pour aller plus vite en fonction des niveaux.Je ne comprends pas ton opposition. Le meilleur moyen de permettre aux élèves de comprendre et d'écrire avec finesse, c'est encore une progression grammaticale rigoureuse qui va justement opérer peu à peu dans leur esprit ce modèle de construction de phrase que tu appelles de tes voeux.
Oui, bien sûr.
Pour le cours, je poste ça et j'explique, mais dans un autre message, car celui-ci est déjà long.
- V.MarchaisEmpereur
À quoi ressemble mon cours ?
Hm. D'abord, je vais dire à quoi il ne ressemble pas. Je me bats contre l'utilisation des critères de distribution comme seul critère de reconnaissance des fonctions à l'école. C'est totalement inopérant.
Essaie un peu de discriminer CC et COD dans deux phrases comme : Il mange des frites et Il mange rapidement.
Dans les deux cas, la suppression donne un résultat parfaitement acceptable (et voilà pour tordre le cou au complément essentiel soi-disant pas supprimable). Et dans les deux cas, le déplacement donne des choses complètement saugrenues, dignes de Maître Yoda :
* Des frites il mange.
* Salement il mange.
Et pourtant, c'est ça qu'on nous donne comme modèle indépassable depuis le CE2. Et ainsi, on éviter d'expliquer clairement les concepts.
Je développe par copier-coller d'anciens messages, désolée, je suis paresseuse. J'arrive.
Hm. D'abord, je vais dire à quoi il ne ressemble pas. Je me bats contre l'utilisation des critères de distribution comme seul critère de reconnaissance des fonctions à l'école. C'est totalement inopérant.
Essaie un peu de discriminer CC et COD dans deux phrases comme : Il mange des frites et Il mange rapidement.
Dans les deux cas, la suppression donne un résultat parfaitement acceptable (et voilà pour tordre le cou au complément essentiel soi-disant pas supprimable). Et dans les deux cas, le déplacement donne des choses complètement saugrenues, dignes de Maître Yoda :
* Des frites il mange.
* Salement il mange.
Et pourtant, c'est ça qu'on nous donne comme modèle indépassable depuis le CE2. Et ainsi, on éviter d'expliquer clairement les concepts.
Je développe par copier-coller d'anciens messages, désolée, je suis paresseuse. J'arrive.
- V.MarchaisEmpereur
Dis-moi si tu ne peux pas supprimer les CO, dans ces phrases :
Il mange des carottes.
Je comprends ce que tu dis.
Es-tu sûre de ne pas pouvoir déplacer ces attributs ?
Grande fut ma surprise à la vue de cet individu.
Je trouve étrange cette déclaration.
Mais essaie un peu de me déplacer ces CC :
Il travaille sérieusement.
Il se meurt d'amour.
Nous avons terminé les travaux entrepris hier.
Ce ne sont pas des contre-exemples. Ce sont des exemples tout court dont la littérature abonde. Ils te montrent que ces critères ne sont pas pertinents. En plus, à force de torturer la phrase dans tous les sens, les élèves ne savent plus ce qui est correct ou non. Les résultats sont désastreux. Rares sont les collégiens capables d'identifier un simple COD (tiens, encore un complément essentiel déplaçable...). Les manipulations, à force, les embrouillent. Et elles ont fini par se substituer à une véritable explication des notions (que veut dire complément ? que signifie objet ? qu'est-ce qu'un verbe transitif ?). Dans leur tête, c'est la confusion la plus totale. Une catastrophe.
Le débat étant relancé sur une autre liste, comme j'ai pris mon courage à deux mains pour refaire l'argumentaire, je vous le copie ici. Bonne lecture à ceux que cela intéresse.
D'abord, la notion de complément essentiel a à voir avec celle de groupe verbal, lequel se définit précisément par l'ensemble formé par le verbe plus ses compléments essentiels. Or, rien que ça, c'est foireux.
La notion de groupe, décriée par certains, probablement à cause de l'usage qu'on en a fait, est intéressante. Elle permet de repérer des unités syntaxiques occupant une fonction en tant que telle (Si je dis : Je suis caché derrière l'arbre au fond du jardin, le CC de lieu, ce n'est ni "derrière", ni "arbre", ni "jardin", c'est le groupe "derrière l'arbre au fond du jardin"). Un groupe est repérable par sa cohérence logique, logique que les élèves apprennent à percevoir peu à peu par l'analyse (comprendre à quoi se rattache tel complément, c'est important, et quand ça c'est fait, c'est quasiment gagné, pour l'analyse) mais aussi par le fait qu'il se pronominalise en un seul élément.
Ex :
J'adore les tartines généreusement beurrées et plongées dans le café au lait. > Je les adore.
J'ai envie de tout quitter et d'aller vivre dans les îles sous le vent. > J'en ai envie.
Noémie, elle est bien plus belle que Mauricette. > Ça, pour sûr, elle l'est, cré vindiou !
Mais avec le verbe, ça ne marche pas. Le verbe, c'est le noyau, le Centre, le dieu de la phrase, pas le genre à se pronominaliser comme ça, avec ou sans compléments.
Ensuite, tu vas expliquer aux élèves que les compléments essentiels sont essentiels, ça veut dire nécessaires, impossibles à supprimer, et tu vas ranger dedans les COD, les COI, les attributs (qui ne sont même pas des compléments, c'est un peu comme cette histoire de complétive qui ne complète pas forcément - mais je ferai mon caca nerveux sur la complétive une autre fois), certains compléments de lieu, de temps, et expliquer aussi qu'ils s'opposent aux compléments facultatifs que eux on peut les supprimer, les déplacer et leur faire subir encore maints outrages.
Le problème, c'est que ce n'est pas vrai.
Je rappelle qu'un verbe transitif est un verbe qui PEUT se construire avec un CO mais que ce CO n'est pas toujours obligatoire, loin de là.
Ex :
Je lis un livre. > Je lis.
Je réfléchis à ce que tu m'as dit. > Je réfléchis.
Un complément essentiel peut parfois être déplacé.
Ex : Nombreux sont les exemples qui pourraient étayer ce propos. > Les exemples qui pourraient étayer ce propos sont nombreux.
Même le COD se balade volontiers dans la langue soutenue, comme nous l'allons monter. > Même le COD se balade volontiers dans la langue soutenue, comme nous allons le monter.
Ne me dites pas que c'est rarissime, Molière le fait tout le temps, La Fontaine itou, et ils sont au programme des collèges dès la 6e. Après tout, nous prétendons enseigner une grammaire qui permette de mieux lire, mieux comprendre...
Posons un insant l'hypothèse un peu folle que "aller" se construirait avec un complément essentiel (hi ! hi !).
"Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien, / Par la Nature, heureux - comme avec une femme."
Pardon Arthur, on peut tout aussi bien dire : Et j'irai, comme un bohémien, par la nature, loin, bien loin, heureux...
Ou : Et j'irai, par la nature, comme un bohémien, loin, bien loin...
Ou : Et belle Marquise, j'irai loin, bien loin, comme un bohémien, heureux avec vos beaux yeux...
Hm.
Mais c'est absurde, cette hypothèse. Aller est intransitif. S'il est presque toujours accompagné d'un complément CIRCONSTANCIEL de lieu, c'est parce qu'en général, quand on décrit son déplacement, c'est pour apporter cette information, justement, mais syntaxiquement, cela n'a rien d'obligatoire. Vous en avez marre du Cid ? Autres exemples :
"Quand je relis les pages précédentes de mon récit, je me rends compte que je vais dans les mots comme un gibier traqué, qui file vite, zig-zague, essaie de dérouter les chiens et les chasseurs lancés à sa poursuite." (Ph. Claudel). > "Quand je relis les pages précédentes de mon récit, je me rends compte que je vais comme un gibier traqué, qui file vite, zig-zague, essaie de dérouter les chiens et les chasseurs lancés à sa poursuite." Cette dernière phrase est parfaitement correcte. De même que : "Prenez alors le petit sentier qui va longeant le ruisseau." Ou "Je suis une force qui va" (Totor, et non pas Mitterrand).
Première conclusion : le complément essentiel n'est ni suppressible ni déplaçable sauf lorsqu'il est suppressible et déplaçable.
Bien.
Et le complément facultatif, maintenant.
Il y a plein de compléments circonstanciels impossibles à déplacer.
Ex :
Il réagit normalement.
Il est mort de peur.
"Il était fou de faim." (London)
De même qu'il est des compléments soi-disant facultatifs que tu ne peux pas supprimer.
Rendez-vous demain.
Je me porte comme un charme.
Et encore, je t'épargne les exemples de phrases complexes où tout ça ne tient plus du tout la route tant il est vrai que les éléments syntaxiques sont avant tout, comme on disait avant, "termes de la proposition".
Deuxième conclusion : le complément facultatif est suppressible et déplaçable sauf lorsqu'il n'est ni suppressible ni déplaçable.
D'où il apparaît que le complément essentiel est essentiel sauf s'il ne l'est pas et que le complément facultatif est facultatif sauf quand il ne l'est pas.
Et c'est ça que nous enseignons aux élèves. Et nous nous étonnons qu'en 3e, ils ne sachent toujours pas reconnaître un COD, mais qu'ils pataugent dans les manipulations les plus hasardeuses.
Parce que les dinosaures qui enseignent encore les notions de complément d'objet autrement qu'avec ces critères des plus discutables, en lien avec celle transitivité, ces dinosaures sont en voie de disparition. C'est pourtant la seule manière d'expliquer les choses de façon à peu près limpide, applicable à tous les textes, sans multiplier les exceptions ni obliger les élèves à de perpétuelles triturations de la phrase dans lesquelles ils perdent leur peu de syntaxe. C'est surtout le seul moyen de reconnaître à coup sûr CO et autres dans un texte littéraire où la place des éléments est régie autant par le style, voire les contraintes liées à la versification, que par les règles de distribution de la langue.
Mes autres arguments seront moins purement grammaticaux, davantage fondés sur une certaine conception de l'enseignement de la grammaire.
Selon moi, l'enseignement de la grammaire a (au moins) deux objectifs essentiels :
- faire prendre conscience des règles de construction de la phrase à la fois pour que cette conscience soit, tout simplement (ahi ! un verbe être sans complément essentiel...) - n'oublions pas que la grammaire est une première entrée dans l'abstraction et le raisonnement logique, au point que les Grecs en faisaient une propédeutique à la philosophie - éventuellement transposable à d'autres apprentissages, notamment ceux des langues étrangères, mais aussi pour permettre à l'élève, grâce à la dimension normative de la grammaire, de corriger son expression et de comprendre pourquoi Un dragon qui vivait là, point, ou Je sais pas c'est quoi sont incorrects.
- permettre de prendre conscience de tout écart par rapport à cette norme, c'est-à-dire rendre capable de repérer les effets de style et d'en jouer soi-même.
Or, poser comme postulat de départ que la place des complément est soit figée, soit complètement aléatoire, c'est brouiller la règle et l'écart. C'est surtout complètement faux.
Du point de vue de la construction syntaxique, en gros, dans la phrase verbale, il y a un thème et un prédicat, c'est-à-dire un sujet et un verbe au moins, ce qu'on peut affiner :
S + v. intr.
S + v. intr + attribut
S + v. tr. + CO
À cette structure minimale, on pourra ajouter tout un tas d'enrichissements. Mais c'est cette structure qui reste fondamentale, constitutive du prédicat. Elle impose un ordre canonique. Mais cet ordre est sans cesse bousculé par des considérations stylistiques. J'affirme haut et fort que n'importe quel groupe fonctionnel peut être placé, à des fins stylistiques, à une place non canonique par rapport à cette structure de base, en début ou en fin de phrase :
- sujet : Au commencement était le verbe.
- complément d'objet : A toi, mon fils, je donnerai mon royaume. / De ce choix dépendrait tout le reste de son existence.
- attribut du sujet : Grande était la douleur de Roland.
- complément circonstanciel : Dans cette maison vivait une sorcière.
Il y a deux exceptions.
La première, c'est le COD, qui ne peut pas être placé en début de phrase, pour cette seule raison que, comme rien, syntaxiquement, ne le distingue du sujet, cela créerait des confusions. La souris mange le chat a peu de chance de passer pour une figure de style, mais plus vraisemblablement pour une cocasserie. Mais je vais jusqu'à hasarder que dans un contexte poétique, par exemple dans La Chanson de Roland, où nous lisons communément Fol était Roland, Nombreux sont les ennemis, nous pourrions peut-être lire sans broncher : Son épée brandit Roland. C'est un peu audacieux de ma part, mais je veux juste insister sur le caractère purement stylistique de la place des GN (il n'en va pas de même pour les pronoms dont l'emploi très peu souple suffit à foutre par terre cette histoire de compléments mobiles, systématiquement fausse quand les compléments en question sont des pronoms, soit dit en passant, parce que ça non plus, c'est pas rare, et cela ne peut qu'ajouter à la confusion des élèves à qui on serine qu'un CC, c'est déplaçable. D'où ils peuvent conclure à juste titre que y et en ne sauraient être CC). Pardon, je m'égare. Revenons à notre syntaxe et à nos effets de style.
Par contre, un COD peut parfaitement être rejeté loin du verbe. C'est ce que fait Perrault dans La Belle au bois dormant, en substance : Le prince découvrit, dans une chambre tout en haut de la plus haute tour, sur un lit d'ivoire et d'or encadré de voiles diaprés, une éblouissante princesse. Vous me direz que c'est les CC qu'on a intercalés, mais on s'en fout : ce qui fait style, ici, c'est pas les CC en milieu de phrase, c'est bien le COD rejeté en fin de phrase pour créer un effet d'attente. Si je remets le COD juste après le verbe, c'est quoi, que je déplace, le COD ou les CC ? Franchement, on s'en tape et, surtout, on joue sur les mots.
La deuxième fonction qui n'a aucune mobilité, c'est le complément d'agent. Les thuriféraires des critères de distribution le poussent commodément sous le tapis celui-là. L'est chiant. Il est parfaitement suppressible - c'est même un des grands intérêts du recours à la voix passive que de faire opportunément disparaître l'agent du procès - et pas du tout déplaçable. On en fait quoi ?
Il a été tué par Mlle Rose.
*Par Mlle Rose il a été tué.
*Il a par Mlle Rose été tué.
Et s'il n'est pas déplaçable, ce n'est pas, comme le COD, à cause de risques de confusion, puisque le complément d'agent est introduit par une préposition qui permet de le repérer aisément. C'est justement à cause de ces histoires de style, de thème et de prédicat. La voix passive met le CO à la place du sujet : ce qui se passe, c'est qu'on change de sujet, communément parlant, ou de thème, pour parler le grammairien. On parle parfois de diathèse pour signifier que, par rapport à la voix active, on opère un déplacement du thème et du prédicat. Et c'est une chose à laquelle je tiens à sensibiliser les élèves. Regardez dans TDL 5e : dès ce niveau, je leur fais comparer deux phrases comme : Sherlock Holmes a été créé en 1881 par A. C. Doyle et A. C. Doyle a créé Sherlock Holmes en 1881, en leur demandant laquelle de ces phrases on pourrait trouver dans une biographie de Doyle, laquelle dans un article sur Sherlock Holmes. Et les élèves ne s'y trompent pas, ils sentent bien que ça n'a pas le même sens. Pour moi, enseigner la grammaire, c'est enseigner cette finesse de compréhension, permettre de s'approprier ces nuances subtiles de la langue. Et c'est cette subtilité que la grammaire distributionnelle fait voler en éclats quand elle prétend que : Dans cette maison vivait une sorcière et Une sorcière vivait dans cette maison, c'est pareil, ou pire encore, que Dans le living-room il a été tué pourrait être une phrase correcte, alors que, pour des raisons de style qui n'ont rien d'abscons dès qu'on les explicite, en réalité, on ne peut pas dire une phrase pareille.
Je défends une grammaire structurante par la clarté qu'elle fait de la description des structures de base de la phrase, de leur caractère normé, qui se garde bien de fiche la phrase sens dessus dessous.
Je défends une grammaire créatrice par la mise en évidence, dès la Sixième, de tous les effets possibles qui naissent de l'écart avec cette norme.
Parce que selon moi, une grammaire qui apprend à bien lire et bien écrire, c'est ça, pas un tripatouillage de la phrase qui revient à dire que la place des mots, finalement, n'a pas beaucoup d'importance.
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