- MUTISExpert
Cela me paraît déjà moins étriqué et péremptoire que le texte de Créteil...oceanovox a écrit:Un questionnaire ou pas de questionnaire?
Voici la réponse des IPA-IPR de mon académie : "si l’on donne des questions de préparation, qu’elles soient de stricte observation plutôt que de conduire à une interprétation téléguidée (fuir comme la peste le « montrez que… ») ; si un plan de commentaire doit être fait, que ce soient les élèves qui le fassent, et que l’on travaille sur leurs plans. A cet égard, la question « combien de temps doit-on passer sur un texte ? » est vaine : si une étude requiert plus d’une heure en début d’année parce que la mise en commun des hypothèses de lecture et leur validation avec une classe néophyte prend du temps, le travail ira ensuite beaucoup plus vite quand les élèves seront habitués à lire et à interpréter."
http://lettres.ac-amiens.fr/archives_lettres/Pages/sqce-precisions.htm
La suite est intéressante:
"il s’agit, à la manière de Socrate, de les faire accoucher d’un sens que chacun perçoit mais qu’il faut apprendre à mettre au monde."
J'aime bien mais quelle naïveté dans cette affirmation et dans ce singulier ... "un sens que chacun perçoit" :lol:
La maïeutique socratique ou l'art de questionner...
- NLM76Grand Maître
En tout cas, je vois bien une grave erreur dans certaines recommandation : croire qu'on doit faire la même chose au collège et au lycée. Le coup du cinéma intérieur, je vois bien de quoi il retourne. Je ne cesse d'y travailler quand je fais une explication de texte. Mais j'ai encore beaucoup d'élèves qui lisent "sans rien comprendre", y compris en 1re L, ce que je n'arrive à concevoir. Qu'est-ce qu'ils font dans lector et lectrix ?
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Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- F.LemoineÉrudit
Je n'ai pas tes futurs élèves, ni Véronique. Et je crois que tu n'auras jamais ce genre d'élèves, si tu es au lycée.
Lector et Lectrix : http://www.editions-retz.com/pedagogie/francais/lector-lectrix-fichier-cd-rom-9782725627328.html
Ceci dit , cela me donne l'occasion de réagir à l'un de tes messages :
"D'autre part, je pense vraiment qu'au collège, IL NE FAUT PAS que la leçon qu'on tire de la lecture d'un texte (que je ne saurais désigner par l'abominable périphrase "trace écrite"), celle qui est à apprendre, soit autrement chose que ce que dit le texte. La trace écrite d'un texte, c'est le texte lui-même. Eventuellement son résumé. Enfin, le vocabulaire qu'on y a découvert. Ce qu'il faut que les élèves apprennent, ce n'est pas le baratin sur le texte, mais le texte lui-même."
Je suis d'accord avec ça.
Finalement, que voulons-nous : former de vrais lecteurs ou de mauvais commentateurs ?
Il y a bien longtemps que je pense que la vraie réponse écrite à une œuvre littéraire est une autre œuvre littéraire : c'est ce que font les écrivains depuis toujours.
Les textes analytiques ne concernent qu'une infime partie des lecteurs : les professeurs, les "disséqueurs" comme le suggère Laudet, qui devient bien heureusement une référence salutaire dans notre petit monde.
Lector et Lectrix : http://www.editions-retz.com/pedagogie/francais/lector-lectrix-fichier-cd-rom-9782725627328.html
Ceci dit , cela me donne l'occasion de réagir à l'un de tes messages :
"D'autre part, je pense vraiment qu'au collège, IL NE FAUT PAS que la leçon qu'on tire de la lecture d'un texte (que je ne saurais désigner par l'abominable périphrase "trace écrite"), celle qui est à apprendre, soit autrement chose que ce que dit le texte. La trace écrite d'un texte, c'est le texte lui-même. Eventuellement son résumé. Enfin, le vocabulaire qu'on y a découvert. Ce qu'il faut que les élèves apprennent, ce n'est pas le baratin sur le texte, mais le texte lui-même."
Je suis d'accord avec ça.
Finalement, que voulons-nous : former de vrais lecteurs ou de mauvais commentateurs ?
Il y a bien longtemps que je pense que la vraie réponse écrite à une œuvre littéraire est une autre œuvre littéraire : c'est ce que font les écrivains depuis toujours.
Les textes analytiques ne concernent qu'une infime partie des lecteurs : les professeurs, les "disséqueurs" comme le suggère Laudet, qui devient bien heureusement une référence salutaire dans notre petit monde.
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"La vie est mêlée de traverses. Il est bon de s'y tenir sans cesse préparé." (Molière, Les Fourberies de Scapin).
- User5899Demi-dieu
L'absence d'argument sérieux, en général, débouche sur ce genre de conclusion. J'ai constaté que nous ne parlions pas de la même chose, ce qui était courtois. Vous me traitez d'incapable, ce qui l'est moins. Je vous laisse donc ronronner, puisque vous ne voulez pas nous dire sérieusement comment un élève saura de lui-même et tout seul élaborer vos propres questionnaires le jour où il devra lire seul.. Par ailleurs, ce que vous appelez nouvelle doxa a une bonne quarantaine d'années, si ce n'est cinquante, et ne repose en rien sur je ne sais quelle intuition.MUTIS a écrit:F.Lemoine a écrit:MUTIS a écrit:
Et un texte lu et interrogé (préalablement, à la maison) permet des explications plus pertinentes et plus rapides.
Pour l'apprentissage de la lecture, la vraie, je continue à penser qu'elle passe par une confrontation intime, personnelle, solitaire au texte. Et que la lecture approfondie suppose du temps et du silence.
Nous n'avons pas les mêmes élèves, cela semble évident, et je dois en tenir compte (je n'ai pas l'intention de parler dans le vide).
Un questionnaire (la torture...) préalable ne pourra être renseigné correctement que par deux élèves au maximum par classe.
Au mieux, les autres feront faire le travail par maman, papa, grande sœur, grand frère ou un bon élève (éventuellement sous la menace...).
Pour les textes exigeants que j'utilise dans ma REP (ceux de TDL : Homère, Hésiode, la Chanson de Roland, etc.), je dois passer par une lecture fragmentée (qui prend souvent au moins 30 minutes) avec questionnement oral permanent (sur le sens, le vocabulaire, quelques figures de style, etc.). Sinon, tout cela est vain. Et ma plus belle récompense est, à la fin de la séance, à la sonnerie, les fameux : "Oh ! Non, déjà ! On lit la suite demain, monsieur ("Roland, il va mourir?") A quoi je réponds inévitablement : "Non, demain, c'est "étude de la langue (ou "écriture"). Du coup, il y a même des élèves qui prennent les devants et qui essaient de lire la suite.
Nous n'avons pas les mêmes élèves : quand je donne un questionnaire, 90% le font, sachant que je vérifie bien sûr. Je note rarement en revanche mais je donne des bonus à l'oral quand ils interviennent intelligemment et ça les motive.
Mais :
1) Doit-on passer par un questionnement même affiné ou celui-ci est-il construit par la classe (la nouvelle doxa). Je pense qu'enseigner c'est savoir poser des questions et c'est ce que vous faites comme la plupart des profs. Vous le dites : c'est le questionnement permanent qui permet de sortir les idées.
La nouvelle doxa est : (je cite le document des inspecteurs de Créteil) "le questionnement aura été établi par la classe au départ"...
Eh bien non ! je n'y crois pas une seconde. Comment des élèves pourraient-ils établir un questionnement immédiatement pertinent sans même avoir pris le temps de s'approprier le texte silencieusement et sans avoir un minimum d'informations ???
2) Deuxième divergence : je pense qu'il est préférable de lire un texte chez soi tranquillement et qu'on aura davantage de choses intéressantes à en dire. Découvrir un texte en classe ne permet pas une lecture aussi intime et approfondie. Cela permet tout au plus d'être en position de maîtrise pour le prof. Donner donc le texte à découvrir en 5 mn et demander aux élèves de l'analyser, c'est une bonne blague selon moi. J'ai pratiqué, je dois l'avouer, cette méthode en fac, à une époque où je faisais un cours sur la poésie. J'ai vite abandonné car même en fac, je trouvais que les remarques tournaient vite en rond.
Là encore la nouvelle doxa est l'analyse sans travail préalable et l'intuition. C'est pauvre.
Quant à Cripure, inutile de discuter effectivement. Je me souviens que vous disiez sur un fil que vous n'aviez pas préparé de cours depuis 15 ans. Avec votre méthode, je comprends mieux. Nous ne travaillons pas de la même façon et je m'en félicite.
Je terminerai en faisant observer que passer autant de temps chez soi à préparer des occupations aussi contre-productives, cela confine au génie. Même si je ne suis pas dupe et que je ne crois pas un instant que vous ne refourguez pas, année après année, les mêmes questionnaires moisis sur les mêmes textes. Ah oui, faire répondre les élèves, c'est sûr, c'est plus facile et c'est moins dangereux pour la stature du prof en sa chaire que se mettre en situation de trancher entre des propositions qu'on accepte, d'autres qu'on refuse, le tout en argumentant par le texte lui-même. Là nous sommes d'accord : pérorer, c'est facile.
Je n'ai rien contre çanlm76 a écrit:Le questionnaire m'ennuie aussi pour la raison suivante : il ne montre pas tellement l'exemple. Ce qui rend intelligent, c'est de voir et entendre l'intelligence. C'est donc de voir le professeur réfléchir sur le texte.
Pourquoi "pour ne pas les brimer" ? C'est vraiment n'importe quoi ! Qui parle de brimade ? Et est-ce si grave de passer, en français, une heure à "expliquer les mots et les phrases" ? J'avoue que je ne comprends pas. Ils étudient du La Fontaine ou du MUTIS ?MUTIS a écrit:Si je leur avais demandé de lire le texte en classe, de réagir immédiatement et d'établir eux-mêmes un questionnement en classe pour ne pas les brimer pensez-vous réellement que le cours aurait été plus efficace et la lecture plus riche ? Nous aurions passé une heure à expliquer les mots et les phrases.
Oh, et puis après tout, je m'en cogne
- MUTISExpert
De votre avis aussi, mon cher Cripure. Mais à cette heure-là, vous feriez mieux de dormir !Cripure a écrit:
Oh, et puis après tout, je m'en cogne
Vous avez raison F.Lemoine, la méthode de dissection n'est pas recommandable.
Mais, l'analyse subtile et l'attention aux détails qui permettent de comprendre ou d'interpréter un texte est aussi un vrai bonheur. C'est aussi ce que recommande Laudet.
Quand je me souviens des meilleurs cours de littérature que j'aie eus, je me souviens de joies, d'émotions particulières devant des textes qui étaient aussi révélés ou magnifiquement mis en perspective et éclairés par les commentaires de profs remarquables. Cela compte aussi pour donner le goût de lire. Et davantage à mon avis que la méthode relativiste et subjectiviste-fumiste qui est recommandée ou pratiquée par certains (moins en collège visiblement...)
Personnellement, comme j'étais d'un milieu pauvre et dépourvu de livres, je n'étais pas très à l'aise au lycée pour parler de littérature. Je n'aurais vraiment pas aimé des cours d'échanges et de parlotes. J'ai adoré en revanche découvrir des textes et la littérature grâce à un prof remarquable, un peu fou, qui partait en dérive parfois incontrôlée sur des textes et les illuminait d'éclairs interprétatifs. J'étais fasciné. J'ai retrouvé cette fascination ensuite en khâgne avec le meilleur prof de littérature à Paris dans les années 80 qui lui aussi nous expliquait des textes avec une finesse, des mises en perspective quasi infinies et des subtilités fascinantes. Cela aussi peut donner le goût des beaux textes.
Je me souviens au passage d'une remarque d'une actrice entendue un jour à la radio qui disait (Isabelle Huppert si je me souviens bien) qu'elle avait découvert la littérature grâce à un prof qui expliquait des textes magnifiquement. Et elle regrettait que les nouveaux profs n'expliquent plus les textes justement... et que ce goût se soit perdu. On peut comprendre ce qu'elle dit à la lumière des conseils donnés aujourd'hui aussi...
Tout le contraire des théories constructivistes encore à la mode chez certains qui ont bien appris leur leçon: la parole magistrale c'est mal, c'est à l'apprenant de construire lui-même son savoir etc..
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"Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière" (Audiard)
"Ce n'est pas l'excès d'autorité qui est dangereux, c'est l'excès d'obéissance" (Primo Levi)
"La littérature, quelque passion que nous mettions à le nier, permet de sauver de l'oubli tout ce sur quoi le regard contemporain, de plus en plus immoral, prétend glisser dans l'indifférence absolue" (Enrique Vila-Matas)
" Que les dissemblables soient réunis et de leurs différences jaillira la plus belle harmonie ; rien ne se fait sans lutte." (Héraclite)
"Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie, de n'être pas fou" (Pascal).
- User5899Demi-dieu
C'est surtout qu'elle n'existe pas ailleurs que dans la tête de notre collègue, qui confond "apprendre à une classe à étudier un texte" avec, en même temps, "raconter ce qui passe par la tête sur un texte" (là, pas de problème, on est tous d'accord je pense) et "apprendre à une classe à trouver des éléments de réponse / justifier une réponse" (plus ennuyeux).Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Oui. Du coup je ne comprends pas pourquoi revenir sans cesse sur cette doxa que personne ne semble pratiquer ici.MUTIS a écrit:Doit-on passer par un questionnement même affiné ou celui-ci est-il construit par la classe (la nouvelle doxa). Je pense qu'enseigner c'est savoir poser des questions et c'est ce que vous faites comme la plupart des profs.
- V.MarchaisEmpereur
Je ne sais pas si étudier un texte relève vraiment de quelque méthode.
À mon avis de non théoricienne sur le sujet, apprendre à étudier un texte, c'est d'abord apprendre à lire, lire vraiment, pleinement. C'est-à-dire - et là je suis bien d'accord avec Cripure et ses IPR, mais il me semble que Mutis en est d'accord aussi - lire non pas pour répondre à des questions, mais lire pour comprendre le texte, et le comprendre non seulement avec son intelligence, mais avec sa sensibilité. Lire, c'est accepter de se montrer sensible à l'humour, au pathétique, aux élans lyriques... C'est quelque chose qui se cultive, je crois, à force d'habitude, à force d'une fréquentation des textes et de questionnements qui invitent à s'intéresser d'abord, avec les petits, aux personnages, à leurs émotions, leurs motivations, mais aussi aux sentiments qu'on ressent, nous, lecteur - compassion, indignation, hilarité - et une attention à ce qui cause ces émotions, qu'on va pouvoir peu à peu analyser, nommer, mais dans un second temps seulement.
Quand on a développé cette sensibilité-là, c'est elle qui, conjuguée à l'intelligence du texte, permet de sentir ce qui fait la résonance si particulière de tel texte, son intérêt, et donc de dégager ces fameux axes que nos élèves peinent tant à trouver, et pour lesquels ils cherchent désespérément une "méthode". C'est aussi ce que disait NLM, en parlant de son invitation à recopier une phrase essentielle.
En fait, j'ai l'impression - mais je me trompe peut-être - que nous sommes d'accord en grande partie mais que nous mettons des mots différents sur une démarche largement partagée.
À mon avis de non théoricienne sur le sujet, apprendre à étudier un texte, c'est d'abord apprendre à lire, lire vraiment, pleinement. C'est-à-dire - et là je suis bien d'accord avec Cripure et ses IPR, mais il me semble que Mutis en est d'accord aussi - lire non pas pour répondre à des questions, mais lire pour comprendre le texte, et le comprendre non seulement avec son intelligence, mais avec sa sensibilité. Lire, c'est accepter de se montrer sensible à l'humour, au pathétique, aux élans lyriques... C'est quelque chose qui se cultive, je crois, à force d'habitude, à force d'une fréquentation des textes et de questionnements qui invitent à s'intéresser d'abord, avec les petits, aux personnages, à leurs émotions, leurs motivations, mais aussi aux sentiments qu'on ressent, nous, lecteur - compassion, indignation, hilarité - et une attention à ce qui cause ces émotions, qu'on va pouvoir peu à peu analyser, nommer, mais dans un second temps seulement.
Quand on a développé cette sensibilité-là, c'est elle qui, conjuguée à l'intelligence du texte, permet de sentir ce qui fait la résonance si particulière de tel texte, son intérêt, et donc de dégager ces fameux axes que nos élèves peinent tant à trouver, et pour lesquels ils cherchent désespérément une "méthode". C'est aussi ce que disait NLM, en parlant de son invitation à recopier une phrase essentielle.
En fait, j'ai l'impression - mais je me trompe peut-être - que nous sommes d'accord en grande partie mais que nous mettons des mots différents sur une démarche largement partagée.
- User5899Demi-dieu
Vous êtes bien bon de vous préoccuper de mes heures de sommeil, mais occupez-vous de ce qui vous regarde, ça suffira amplement. Tout le monde ne ressasse pas les mêmes explications sur les mêmes textes chaque année avec dans sa sacoche les infaillibles fiches qu'on va ensuite montrer en frétillant à l'IPR. En d'autres termes, on peut avoir besoin de lire beaucoup pour enseigner un peu. En outre, étant insomniaque, j'aimerais non pas être particulièrement plaint pour mon handicap, mais au moins être laissé tranquille par les beaux dormeurs sous la couette du bon sens.MUTIS a écrit:De votre avis aussi, mon cher Cripure. Mais à cette heure-là, vous feriez mieux de dormir !Cripure a écrit:Oh, et puis après tout, je m'en cogne
Je ne me rappelle pas qu'on vous ait institué juge et arbitre de nos discussions. Il est vrai qu'avec un pseudo qui hurle...MUTIS a écrit:Vous avez raison F.Lemoine,
Contresens complet comme d'habitude. J'aimerais bien savoir où vous avez lu quelqu'un sur Néo recommander ces pratiques. A ce niveau, c'est du trollage pur et simple.MUTIS a écrit:la méthode de dissection n'est pas recommandable.
Mais, l'analyse subtile et l'attention aux détails qui permettent de comprendre ou d'interpréter un texte est aussi un vrai bonheur. C'est aussi ce que recommande Laudet.
Quand je me souviens des meilleurs cours de littérature que j'aie eus, je me souviens de joies, d'émotions particulières devant des textes qui étaient aussi révélés ou magnifiquement mis en perspective et éclairés par les commentaires de profs remarquables. Cela compte aussi pour donner le goût de lire. Et davantage à mon avis que la méthode relativiste et subjectiviste-fumiste qui est recommandée ou pratiquée par certains (moins en collège visiblement...)
Personnellement, comme j'étais d'un milieu pauvre et dépourvu de livres, je n'étais pas très à l'aise au lycée pour parler de littérature. Je n'aurais vraiment pas aimé des cours d'échanges et de parlotes. J'ai adoré en revanche découvrir des textes et la littérature grâce à un prof remarquable, un peu fou, qui partait en dérive parfois incontrôlée sur des textes et les illuminait d'éclairs interprétatifs. J'étais fasciné. J'ai retrouvé cette fascination ensuite en khâgne avec le meilleur prof de littérature à Paris dans les années 80 qui lui aussi nous expliquait des textes avec une finesse, des mises en perspective quasi infinies et des subtilités fascinantes. Cela aussi peut donner le goût des beaux textes.
Je me souviens au passage d'une remarque d'une actrice entendue un jour à la radio qui disait (Isabelle Huppert si je me souviens bien) qu'elle avait découvert la littérature grâce à un prof qui expliquait des textes magnifiquement. Et elle regrettait que les nouveaux profs n'expliquent plus les textes justement... et que ce goût se soit perdu. On peut comprendre ce qu'elle dit à la lumière des conseils donnés aujourd'hui aussi...
Tout le contraire des théories constructivistes encore à la mode chez certains qui ont bien appris leur leçon: la parole magistrale c'est mal, c'est à l'apprenant de construire lui-même son savoir etc..
Mais évidemment, Véronique. Mais MUTIS est prisonnier de sa représentation de l'apprentissage de la lecture, qu'il assimile à une sorte de foutoir où l'on met aux voix les interprétations délirantes régurgitées par des ados déchaînés. C'est sûr que c'est tout à fait mon style, ça...V.Marchais a écrit:Je ne sais pas si étudier un texte relève vraiment de quelque méthode.
À mon avis de non théoricienne sur le sujet, apprendre à étudier un texte, c'est d'abord apprendre à lire, lire vraiment, pleinement. C'est-à-dire - et là je suis bien d'accord avec Cripure et ses IPR, mais il me semble que Mutis en est d'accord aussi - lire non pas pour répondre à des questions, mais lire pour comprendre le texte, et le comprendre non seulement avec son intelligence, mais avec sa sensibilité. Lire, c'est accepter de se montrer sensible à l'humour, au pathétique, aux élans lyriques... C'est quelque chose qui se cultive, je crois, à force d'habitude, à force d'une fréquentation des textes et de questionnements qui invitent à s'intéresser d'abord, avec les petits, aux personnages, à leurs émotions, leurs motivations, mais aussi aux sentiments qu'on ressent, nous, lecteur - compassion, indignation, hilarité - et une attention à ce qui cause ces émotions, qu'on va pouvoir peu à peu analyser, nommer, mais dans un second temps seulement.
Quand on a développé cette sensibilité-là, c'est elle qui, conjuguée à l'intelligence du texte, permet de sentir ce qui fait la résonance si particulière de tel texte, son intérêt, et donc de dégager ces fameux axes que nos élèves peinent tant à trouver, et pour lesquels ils cherchent désespérément une "méthode". C'est aussi ce que disait NLM, en parlant de son invitation à recopier une phrase essentielle.
En fait, j'ai l'impression - mais je me trompe peut-être - que nous sommes d'accord en grande partie mais que nous mettons des mots différents sur une démarche largement partagée.
- V.MarchaisEmpereur
Ce n'est pas ce que j'ai compris à le lire, Cripure.
En fait, je n'ai pas eu l'impression que vous étiez tellement en désaccord. Mais en ce moment, entre les conseils de classe, les réunions, la réflexion sur les programmes et la lutte qui reprend, j'ai certainement moi-même des problèmes de lecture...
En fait, je n'ai pas eu l'impression que vous étiez tellement en désaccord. Mais en ce moment, entre les conseils de classe, les réunions, la réflexion sur les programmes et la lutte qui reprend, j'ai certainement moi-même des problèmes de lecture...
- NylohNiveau 4
Comme Véronique, je n'ai pas compris cela chez Mutis mais plutôt la dénonciation d'un apprentissage de la lecture en se fondant uniquement sur le ressenti informel des élèves en lieu et place d'une étude guidée par l'enseignant, d'un texte éclairé par le professeur, avec une attention aux détails qui l'illumine. Mais bien sûr, on doit d'abord s'assurer de la compréhension des élèves et exploiter leurs préjugés, leur incompréhension et la mise en mots maladroite d'éléments pertinents.
Au fond, comme dit Véronique, j'ai l'impression qu'on est tous un peu d'accord ... la difficulté réside dans le dosage que l'on accorde à l'action du professeur, passeur et éclaireur, et à celle des élèves. Personnellement, c'est ce qui me questionne et m'interroge depuis mes débuts : un cours de lecture n'est pas pour moi une heure de parlotte mais je dois aussi m'interdire d'aller trop loin dans le commentaire analytique au risque de transformer une leçon de lecture en défrichage savant.
Au fond, comme dit Véronique, j'ai l'impression qu'on est tous un peu d'accord ... la difficulté réside dans le dosage que l'on accorde à l'action du professeur, passeur et éclaireur, et à celle des élèves. Personnellement, c'est ce qui me questionne et m'interroge depuis mes débuts : un cours de lecture n'est pas pour moi une heure de parlotte mais je dois aussi m'interdire d'aller trop loin dans le commentaire analytique au risque de transformer une leçon de lecture en défrichage savant.
- doctor whoDoyen
Il me semble qu'il est possible de concilier les deux positions (questionnaire/pas de questionnaire) et de trouver un moyen terme.
Si les questions sont larges et non techniciste, elle peuvent amorcer la discussion.
Si les questions sont larges et non techniciste, elle peuvent amorcer la discussion.
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Mon blog sur Tintin (entre autres) : http://popanalyse.over-blog.com/
Blog pédagogique : http://pedagoj.eklablog.com
- MUTISExpert
Laissons de côté les éructations haineuses de notre Narcisse olympique, parfait sujet pour les théories d'Heinz Kohut sur la "rage narcissique". Aucun argument et aucune référence à retenir si ce n'est la bonne parole des IPR.V.Marchais a écrit:Je ne sais pas si étudier un texte relève vraiment de quelque méthode.
À mon avis de non théoricienne sur le sujet, apprendre à étudier un texte, c'est d'abord apprendre à lire, lire vraiment, pleinement. C'est-à-dire - et là je suis bien d'accord avec Cripure et ses IPR, mais il me semble que Mutis en est d'accord aussi - lire non pas pour répondre à des questions, mais lire pour comprendre le texte, et le comprendre non seulement avec son intelligence, mais avec sa sensibilité. Lire, c'est accepter de se montrer sensible à l'humour, au pathétique, aux élans lyriques... C'est quelque chose qui se cultive, je crois, à force d'habitude, à force d'une fréquentation des textes et de questionnements qui invitent à s'intéresser d'abord, avec les petits, aux personnages, à leurs émotions, leurs motivations, mais aussi aux sentiments qu'on ressent, nous, lecteur - compassion, indignation, hilarité - et une attention à ce qui cause ces émotions, qu'on va pouvoir peu à peu analyser, nommer, mais dans un second temps seulement.
Quand on a développé cette sensibilité-là, c'est elle qui, conjuguée à l'intelligence du texte, permet de sentir ce qui fait la résonance si particulière de tel texte, son intérêt, et donc de dégager ces fameux axes que nos élèves peinent tant à trouver, et pour lesquels ils cherchent désespérément une "méthode". C'est aussi ce que disait NLM, en parlant de son invitation à recopier une phrase essentielle.
En fait, j'ai l'impression - mais je me trompe peut-être - que nous sommes d'accord en grande partie mais que nous mettons des mots différents sur une démarche largement partagée.
:Quel boulet:
Véronique : une petite anecdote pour commencer. J'ai suivi récemment une formation sur la lecture analytique qui m'a profondément dérangé. Je suis d'ailleurs intervenu pur amener une parole "divergente" qui a fort déplu !
Et vous n'auriez pas été très enthousiaste non plus je crois...
Au cours de cette séance eh bien le formateur a dézingué tous les manuels en ridiculisant les questionnaires. Et il a conclu par cette pirouette facile : bon évidemment je ne vous donne pas d'exemple précis. C'est à vous de les construire. Bien sûr. :lol:
Ensuite on nous a expliqué en reprenant les théories de Fish à la mode, que c'est la lecture qui donne un sens à un texte et que c'est aux élèves de construire l'interprétation. Le prof doit écouter. Et ne pas imposer de lecture, d'axes de lecture. Autrement dit tout est interprétation et toute interprétation est légitime (même celles qui sont à contresens du texte puisqu'il n'y a pas de sens originaire ou d'intentionnalité décelable!!!).
Ce que je dis et répète c'est qu'un prof n'est pas uniquement là pour écouter. Il est là pour être écouté et pour expliquer. Et l'intelligence du texte passe aussi par l'écoute d'une explication pas seulement par la formulation d'hypothèses.
Et ce qui manque aujourd'hui c'est souvent une parole forte du prof, celle qui marque, éclaire et donne envie.
Je vous cite au passage deux remarques qui vont dans ce sens... devinez de qui elles sont ???
"La parole du père, comme celle de l'éducateur est une parole qui donne la loi. Et celle-ci n'est ni aliénante ni liberticide, elle est au contraire structurante et émancipatrice."
"Tout le rôle de l'école est d'offrir justement à l'élève ce qu'il ne trouvera jamais ailleurs, à savoir une parole, celle du professeur, qui lui parle d'un livre"...
Amusant car ces deux passages qui vont tout à fait à l'encontre de ce qu'on nous a expliqué (la parole du maître est castratrice, il faut que la problématique vienne de l'élève, il faut laisser la parole à l'élève et ne pas expliquer soi-même)... viennent de...
Patrick Laudet...
Un article remarquable intitulé "moins d'oeil et plus d'oreille" où il recommande au passage de ne pas "se laisser embrigader par tout ce que l'institution, les inspecteurs, les programmes, les dispositifs didactiques ont tendance à faire de nous, c'est-à-dire un exécutant de procédures juste bon à faire cocher des cases dans des livrets de compétence "...
Il défend en fait le principe de l'explication humaniste pour laquelle je milite depuis très longtemps. A une époque, je me suis fait très mal voir en disant que je refusais de passer la poésie à la moulinette des champs lexicaux et les textes narratifs à la broyeuse du schéma narratif. Je passais pour un ringard humaniste. Je disais à mes élèves de mettre tout cela à la poubelle et de lire le texte. Le texte d'abord, sans schéma et sans champs lexicaux... Content de voir qu'aujourd'hui, un IGEN comme Laudet est sur la même longueur d'ondes !!!
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"Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière" (Audiard)
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" Que les dissemblables soient réunis et de leurs différences jaillira la plus belle harmonie ; rien ne se fait sans lutte." (Héraclite)
"Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie, de n'être pas fou" (Pascal).
- V.MarchaisEmpereur
C'est malin, ça y est, je suis amoureuse de Laudet.
J'ai l'air fin, là.
J'ai l'air fin, là.
- doctor whoDoyen
J'ai croisé la route de Laudet en prépa (très copain avec mon prof d'hypo : échanges de classe et cinéclub en commun.)
M'a mis une bonne note à l'explication de texte XXe à l'agrèg.
Il a toute ma sympathie.
M'a mis une bonne note à l'explication de texte XXe à l'agrèg.
Il a toute ma sympathie.
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- MUTISExpert
V.Marchais a écrit:C'est malin, ça y est, je suis amoureuse de Laudet.
J'ai l'air fin, là.
Bon, il ressemble un peu à Michael Lonsdale dans la cinquantaine triomphante si ça peut vous conforter...
Je vous recommande au passage sa conférence (en ligne sur Internet) sur la tragédie. C'est décapant et l'on y voit mieux la pensée humaniste à l'oeuvre...
Tout ce qu'il raconte va totalement à l'encontre de ce qu'on a demandé aux enseignants dans les IUFM pendant longtemps et que nous étions pas mal à critiquer. Il aura fallu attendre Laudet pour avoir enfin quelques échos !
Mais visiblement pas mal d'IPR sont en retard...
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"Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière" (Audiard)
"Ce n'est pas l'excès d'autorité qui est dangereux, c'est l'excès d'obéissance" (Primo Levi)
"La littérature, quelque passion que nous mettions à le nier, permet de sauver de l'oubli tout ce sur quoi le regard contemporain, de plus en plus immoral, prétend glisser dans l'indifférence absolue" (Enrique Vila-Matas)
" Que les dissemblables soient réunis et de leurs différences jaillira la plus belle harmonie ; rien ne se fait sans lutte." (Héraclite)
"Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie, de n'être pas fou" (Pascal).
- V.MarchaisEmpereur
Je ne l'ai jamais rencontré, mais j'ai lu plusieurs de ses textes, conférences, et ils me font un bien fou. C'est une parole comme celle-ci qui me donne la force et la légitimité de poursuivre mon travail, contre les programmes et la hiérarchie même, parfois.
- V.MarchaisEmpereur
MUTIS a écrit:V.Marchais a écrit:C'est malin, ça y est, je suis amoureuse de Laudet.
J'ai l'air fin, là.
Bon, il ressemble un peu à Michael Lonsdale dans la cinquantaine triomphante si ça peut vous conforter...
Bah, à mon âge, ça me convient mieux qu'un petit jeunot dont je ne saurais quoi faire.
Bon, je peux, juste une fois ?
PATRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIICK !
- MUTISExpert
V.Marchais a écrit:Je ne l'ai jamais rencontré, mais j'ai lu plusieurs de ses textes, conférences, et ils me font un bien fou. C'est une parole comme celle-ci qui me donne la force et la légitimité de poursuivre mon travail, contre les programmes et la hiérarchie même, parfois.
idem !
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"Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière" (Audiard)
"Ce n'est pas l'excès d'autorité qui est dangereux, c'est l'excès d'obéissance" (Primo Levi)
"La littérature, quelque passion que nous mettions à le nier, permet de sauver de l'oubli tout ce sur quoi le regard contemporain, de plus en plus immoral, prétend glisser dans l'indifférence absolue" (Enrique Vila-Matas)
" Que les dissemblables soient réunis et de leurs différences jaillira la plus belle harmonie ; rien ne se fait sans lutte." (Héraclite)
"Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie, de n'être pas fou" (Pascal).
- User5899Demi-dieu
Je fais amende honorable et j'ai tout bien recopié avec soin vos arguments non éructants.MUTIS a écrit:Laissons de côté les éructations haineuses de notre Narcisse olympique, parfait sujet pour les théories d'Heinz Kohut sur la "rage narcissique". Aucun argument et aucune référence à retenir si ce n'est la bonne parole des IPR.
:Quel boulet:
Hélas, tel les savants à la fin de Micromégas, me voici devant une pauvre page blanche
Et sinon, toutes ces discussions "officielles" ont été conduites au nom de Laudet, je crois l'avoir déjà rappelé. Son texte est loin d'être celui d'un dissident, aujourd'hui.
Et je crois avoir déjà rappelé que personne n'a repris les âneries dont vous vous faites l'écho sur "toutes les interprétations se valent". Il a simplement été question d'un problème que vous évacuez, parce que vous n'êtes pas concerné et qu'après vous, le déluge : on fait quoi avec les tombereaux de 3e que vous nous envoyez et qui ne savent que répondre à des questions ?
Réponse : on perd du temps.
Heureusement qu'on truque les notes du commentaire, et qu'il y a le sujet d'invention.
C'est simplement dommage pour les lettres.
Moi j'aurais bien aimé que la discussion porte sur ce point, à savoir la continuité entre l'école et le collège, et entre le collège et le lycée. Mais vous avez préféré jouer votre petit Picard des années 2010. Entre ça et votre théorie de Heinz, je trouve votre propos à la fois alimentaire et indigeste.
- User5899Demi-dieu
Puisqu'on cite Monsieur LAUDET, autant le lire un peu, non ?
Voici le début. Les grands lecteurs que j'ai face à moi sauront exploiter la suite...
http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0CCIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fmedia.eduscol.education.fr%2Ffile%2FFrancais%2F09%2F5%2FLyceeGT_Ressources_Francais_Explication_Laudet_182095.pdf&ei=a-AOVdnQEYTP7Qacl4C4Ag&usg=AFQjCNE11ddgEh9Wdm3QWgjIdo1bpUqNbA&sig2=j5HfLyD3F97mS5JEUb7pQw
Oui, finalement, il mérite d'être lu, ce texte. Vraiment lu :lol:
Voici le début. Les grands lecteurs que j'ai face à moi sauront exploiter la suite...
http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0CCIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fmedia.eduscol.education.fr%2Ffile%2FFrancais%2F09%2F5%2FLyceeGT_Ressources_Francais_Explication_Laudet_182095.pdf&ei=a-AOVdnQEYTP7Qacl4C4Ag&usg=AFQjCNE11ddgEh9Wdm3QWgjIdo1bpUqNbA&sig2=j5HfLyD3F97mS5JEUb7pQw
Sur la question de l'explication de texte, Laudet a écrit:
Le « retour du sens » dans les cours de Lettres et la pratique de l’explication de texte, souhaité et souhaitable, ne signifie pas qu’il faille maintenant tourner le dos au meilleur de deux ou trois décennies de recherches universitaires qui ont, rappelons-le, beaucoup fécondé le champ épistémologique des études littéraires. Rénover l’explication de texte ne signifie pas, mécaniquement, revenir à on ne saurait quelle époque bénie du passé, forcément idéalisée par la nostalgie. À une idolâtrie formaliste, substituer maintenant, comme par un brutal retour de balancier, une idolâtrie
inverse des contenus de sens, des idées ou du « message » des textes, soutenue par une approche impressionniste voire effusive des auteurs, serait tout autant dommageable
l’ancienne critique (prompte à refermer la liberté du jeu herméneutique) et par conséquent les anciennes pratiques de l’explication qui lui étaient liées, souffraient souvent d’un certain « malthusianisme interprétatif »5. Ressassement d’évidences, axiologie très marquée, redites souvent plates des textes, objets de relevés (déjà !), mais plutôt celui des idées (les passions chez Corneille ou Racine), ponctuellement complétés par celui des élégances de style pour pimenter l’analyse. Heureusement, Proust vint avec le Contre Sainte-Beuve, et la nouvelle critique à sa suite, qui redonna une autonomie à l’oeuvre, à sa logique propre, à sa structure interne ; qui refusa de considérer que les textes étaient subordonnés au seul vouloir dire de leur auteur et au message clair
qui s’en déduirait pour réévaluer la complexité de ce noyau d’opacité qu’est le texte.
l’apport très fécond de la « nouvelle critique », qui a battu en brèche les deux piédestaux sur lesquels reposait le commentaire de texte (l’esthétisme et l’historicisme) pour redonner primat au texte, a libéré un véritable tonus interprétatif qu’il s’agit aujourd’hui de ne pas perdre.
Éloignés que nous sommes maintenant de la fameuse querelle Barthes/Picard, on peut aujourd’hui sereinement relire l’excellent livre de Serge Doubrovsky, Pourquoi la nouvelle critique (sous titré À quoi sert la littérature ?), qui n’a pas pris une ride, tant il est riche méthodologiquement, en vérité très mesuré dans ses propositions épistémologiques : « Eh quoi, pour prétendre parler de Racine aujourd’hui, il ne suffirait plus de mettre la main sur le coeur en criant : « que c’est beau ! » ? Il ne suffirait plus de connaître les règles de la tragédie au XVIIe siècle, ni de savoir avec qui Racine a couché, quand et comment ? L’histoire de la littérature ne serait plus une suite d’anecdotes attendrissantes ou croustillantes ? Pour comprendre Racine, il faudrait pouvoir confronter toute une conception de l’homme, la nôtre, avec toute une conception de l’homme, la sienne ? » Contre l’idée que l’on a parfois des excès formalistes de la « nouvelle critique », bien des pages suggestives de son ouvrage confirmeraient qu’une certaine approche humaniste n’était pas absente des démarches herméneutiques alors envisagées :
Ricoeur en fait ainsi valoir les vertus herméneutiques et souligne, en s’appuyant sur les travaux des structuralistes, la légitimité de leur méthode, exemples à l’appui. Fort des approfondissements conceptuels venus de ce que l’on nomme souvent « l’esthétique de la réception », il montre en parallèle combien l’art de la "compréhension" de son côté, progressivement dégagé d’une psychologisation excessive et exclusive, plus proche d’un art de l’interprétation au sens musical du mot, est à même désormais de susciter une attention à l’actualisation du sens, à son appropriation fine et authentique par le sujet lecteur, soucieux de se forger, par la bibliothèque intérieure, une compréhension plus riche de soi et du monde : « Par appropriation, j’entends ceci que l’interprétation d’un texte s’achève dans l’interprétation de soi, d’un sujet qui désormais se comprend mieux, se comprend autrement, ou même commence de se comprendre. (…) D’un côté, la compréhension de soi passe par le détour de la compréhension des signes de culture dans lesquels le soi se documente et se forme ; de l’autre, la compréhension du texte n’est pas à elle-même sa fin, elle médiatise le rapport à soi d’un sujet qui ne trouve pas dans le court-circuit de la réflexion immédiate le sens de sa propre vie. Ainsi faut-il dire, avec une force égale, que la
réflexion n’est rien sans la médiation des signes et des oeuvres, et que l’explication n’est rien si elle ne s’incorpore à titre d’intermédiaire dans le procès de la compréhension de soi ; bref, dans la réflexion herméneutique – ou dans l’herméneutique réflexive – , la constitution du soi et celle du sens sont contemporaines. »
On le voit, une didactique rénovée de l’explication de texte trouverait avantageusement dans les analyses subtiles de Paul Ricoeur des appuis théoriques solides, propres à dépasser des querelles qui n’en sont déjà plus.
Tout le postulat de l’ancienne critique reposait sur la foi en une univocité du dire : une oeuvre « veut dire » et ne fait qu’un avec ce qu’elle dit. A quoi Bernard Pingaud répond que « ce qu’un écrivain veut dire ne se confond jamais avec ce qu’il dit ». Serge Doubrovsky réfléchissant à cette question consacre quelques pages lumineuses à expliquer dans Andromaque la scène 3 de l’acte V : « "Qui te l’a dit ?" demande magnifiquement Hermione à Oreste, coupable d’avoir confondu ce qu’elle disait et ce qu’elle voulait dire, en réclamant la mort de Pyrrhus. Le critique peut-il être aussi naïf qu’Oreste, sans être aussi coupable et peut-être aussi fou que lui ? Car ce qu’Oreste découvre à son dam, et ce contre quoi vient, d’entrée de jeu, buter la critique, c’est tout bonnement l’ambiguïté fondamentale du langage. »
Impossible aujourd’hui de parler de littérature et de l’expliquer sans s’être interrogé sur le langage ; impossible de s’interroger sur le langage sans connaître, bien sûr les travaux de la linguistique mais aussi ceux de la psychanalyse. Cette science humaine a ceci de commun avec l’art de l’explication de texte qu’elle se propose d’écouter le signifiant, et par association ou attention à certains mots, d’entendre, du coup, mieux ce qui se dit dans ce qui se dit. Si un train peut en cacher un autre, un mot aussi, et un coupable également : c’est tout le dynamisme interprétatif d’un Pierre Bayard, inspiré de l’enquête policière mais très nourri d’une solide culture psychanalytique : on rêverait d’importer son tonus herméneutique dans les explications de texte !
La lecture littéraire est donc une lecture qui ne veut pas glisser trop vite et trop uniquement sur la surface lisse du texte. Imposer silence au sens évident, c’est ce qu’Edmond Jabès visait par un célèbre jeu de mots : « Commentaire : comment taire. Commenter ; c’est faire taire un sens déjà établi, un sens figé ». Pour cela, il faut donc malmener un peu le texte, le casser, l’éclater (ainsi Rabelais, dans le fameux prologue de son Gargantua invite à « casser » l’os pour atteindre la "substantifique moelle").
Oui, finalement, il mérite d'être lu, ce texte. Vraiment lu :lol:
- V.MarchaisEmpereur
Oui, bien sûr. Il y a dans les vieux classiques Larousse de ma maman des notes à mourir de rire, du style "Appréciez la beauté de cette image !" Oui, d'accord, j'apprécie, et que ça saute ! Ça, c'est du commentaire !
D'accord aussi avec tout ça. Je n'ai pas bien compris où tu voulais en venir, Cripure ?
D'accord aussi avec tout ça. Je n'ai pas bien compris où tu voulais en venir, Cripure ?
- MUTISExpert
Cripure a écrit: on fait quoi avec les tombereaux de 3e que vous nous envoyez et qui ne savent que répondre à des questions ?
Réponse : on perd du temps.
Heureusement qu'on truque les notes du commentaire, et qu'il y a le sujet d'invention.
C'est simplement dommage pour les lettres.
On connaît depuis longtemps votre mépris pour le travail des collègues de collège. Ce sont des incapables bien sûr et ils ne font rien que poser des questions inutiles et vous envoyer des élèves incultes et nuls.
Je me demande d'ailleurs pourquoi vous intervenez autant sur les discussions qui concernent le collège, vous qui êtes un merveilleux prof de lycée. Ah oui, nous avons besoin de vos conseils bien sûr !
C'est amusant, parce qu'il m'arrive de préparer des élèves au bac dans ma ville et je vous avoue que certains profs de lycée ne sont pas des modèles admirables: si, si, j'en vois beaucoup dont les cours sont vraiment indigents et qui ne se foulent pas trop ! Bref, il y a des gens qui font bien (ou mal) leur boulot partout, n'en déplaise à votre suffisance divine.
Véronique : il ne veut en venir nulle part si ce n'est à l'épanchement de sa bile sur le vilain MUTIS qui a égratigné son amour-propre. C'est un symptôme sans grand intérêt de la "rage narcissique"...
Merci pour les belles citations de Laudet au passage ! Au moins vous aurez lu un texte intéressant cette année ! :lol:
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"Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière" (Audiard)
"Ce n'est pas l'excès d'autorité qui est dangereux, c'est l'excès d'obéissance" (Primo Levi)
"La littérature, quelque passion que nous mettions à le nier, permet de sauver de l'oubli tout ce sur quoi le regard contemporain, de plus en plus immoral, prétend glisser dans l'indifférence absolue" (Enrique Vila-Matas)
" Que les dissemblables soient réunis et de leurs différences jaillira la plus belle harmonie ; rien ne se fait sans lutte." (Héraclite)
"Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie, de n'être pas fou" (Pascal).
- VioletEmpereur
Mutis, on ne pourrait pas s'en tenir aux échanges sur la LA ?
Votre sympathie pour Cripure commence à devenir pesante... et ne nous regarde pas...
Votre sympathie pour Cripure commence à devenir pesante... et ne nous regarde pas...
- User5899Demi-dieu
Euh... On discute de façon suivie, là ? Je me fais insulter depuis quatre jours par quelqu'un qui se recommande de ces extraits auxquels il se réfère en leur faisant dire le contraire, alors je les cite. Non, étudier des textes, ce n'est pas répondre à des questionnaires pour gagner du temps. Expliquer des textes, ce n'est pas dire le vrai magistral sur des textes.V.Marchais a écrit:Oui, bien sûr. Il y a dans les vieux classiques Larousse de ma maman des notes à mourir de rire, du style "Appréciez la beauté de cette image !" Oui, d'accord, j'apprécie, et que ça saute ! Ça, c'est du commentaire !
D'accord aussi avec tout ça. Je n'ai pas bien compris où tu voulais en venir, Cripure ?
Ce n'est pas pour vous que je cite, Véronique, je n'ai jamais pensé un seul instant que nous pussions être en désaccord. C'est surtout que je suis heureux que tout le monde affirme être d'accord avec ce monsieur Laudet, qui dit en effet de bien belles choses sur notre travail au quotidien. Bien belles choses qui me semblent totalement niées dans de nombreux messages que je lis ici ou là sur l'étude de texte, ou sur ce qu'on prétend telle. Retour au texte, donc.
- Spoiler:
- MUTIS, j'interviens où je veux, quand je veux. En l'occurrence, ici, je n'ai fait que répondre à votre sollicitation Vous devriez dormir un peu plus, vous avez des trous de mémoire et des disruptions de la progression à thème constant.
Et je vais faire plaisir à Violet, à qui je présente mes excuses pour m'être emporté avec vous bien inutilement. L'âne que je suis va fricare alibi
- VioletEmpereur
La lecture de Laudet est toujours enrichissante.
Point d'excuses à me présenter. Je n'ai pas lu le fil en entier, et juste lu les dernières attaques de Mutis. Mais s'il se défend contre un ours, je m'incline. :lol:
Point d'excuses à me présenter. Je n'ai pas lu le fil en entier, et juste lu les dernières attaques de Mutis. Mais s'il se défend contre un ours, je m'incline. :lol:
- V.MarchaisEmpereur
En fait, je crois que Mutis et toi ne mettez pas les mêmes représentations derrière le mot questionnaire.
Et puis un questionnaire, ça peut être bien fait. je pense qu'il faut aussi en passer par là, surtout avec les petits. Dis-toi bien, Cripure, qu'un élève qui entre en Sixième ne sait même pas répondre à une question simple sur un texte (Qui est le personnage principal ? Où et quand se passe l'histoire ?) Il faut le lui apprendre. Et lui apprendre, petit à petit, à passer de la réponse de simple compréhension, formulée en une phrase (avec une majuscule et un point, Kévin, s'il te plaît. Non, le verbe n'est pas facultatif...) à la réponse argumentée (avec citation inside, dûment intégrée), puis développée, à des questions de plus en plus ouvertes...
Les questions peuvent viser à s'assurer de la bonne compréhension du texte, tout simplement. Elle sont aussi nécessaires quand le texte est un peu subtil, pour accéder à ses enjeux. Sans guidance habile du professeur, par des questions bien choisies, à peu près aucun élève ne percevra spontanément l'ironie à la fois discrète et mordante d'un Flaubert, et l'élève passera complètement à côté du texte. Par exemple.
Bref, un questionnaire, s'il est bien fait, ce n'est pas une succession de champs lexicaux et de figures à relever de façon si automatique qu'on peut quasiment exécuter la tâche en faisant l'économie du sens du texte.
Et puis un questionnaire, ça peut être bien fait. je pense qu'il faut aussi en passer par là, surtout avec les petits. Dis-toi bien, Cripure, qu'un élève qui entre en Sixième ne sait même pas répondre à une question simple sur un texte (Qui est le personnage principal ? Où et quand se passe l'histoire ?) Il faut le lui apprendre. Et lui apprendre, petit à petit, à passer de la réponse de simple compréhension, formulée en une phrase (avec une majuscule et un point, Kévin, s'il te plaît. Non, le verbe n'est pas facultatif...) à la réponse argumentée (avec citation inside, dûment intégrée), puis développée, à des questions de plus en plus ouvertes...
Les questions peuvent viser à s'assurer de la bonne compréhension du texte, tout simplement. Elle sont aussi nécessaires quand le texte est un peu subtil, pour accéder à ses enjeux. Sans guidance habile du professeur, par des questions bien choisies, à peu près aucun élève ne percevra spontanément l'ironie à la fois discrète et mordante d'un Flaubert, et l'élève passera complètement à côté du texte. Par exemple.
Bref, un questionnaire, s'il est bien fait, ce n'est pas une succession de champs lexicaux et de figures à relever de façon si automatique qu'on peut quasiment exécuter la tâche en faisant l'économie du sens du texte.
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