- BoubousNiveau 6
Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol:Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
- coindeparadisGuide spirituel
Spinoza, je suis d'accord avec toi. Je préfère "répétition" ou mieux "entraînement" à "rabâchage". De récentes études montrent la nécessité de cet entraînement pour acquérir une notion, une technique. Même "La Classe" d'octobre en rend compte.
_________________
Ne t'excuse jamais d'être ce que tu es. Gandhi
- adelaideaugustaFidèle du forum
Sur la "répétition", je trouve intéressante cette interview d'Eric Kandel, prix Nobel de physiologie en 2000.coindeparadis a écrit:Spinoza, je suis d'accord avec toi. Je préfère "répétition" ou mieux "entraînement" à "rabâchage". De récentes études montrent la nécessité de cet entraînement pour acquérir une notion, une technique. Même "La Classe" d'octobre en rend compte.
- Fichiers joints
- coindeparadisGuide spirituel
Effectivement !
_________________
Ne t'excuse jamais d'être ce que tu es. Gandhi
- Spinoza1670Esprit éclairé
Merci pour le texte de Kandel.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- Spinoza1670Esprit éclairé
Tout à fait d'accord.Boubous a écrit:Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol:Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
Mais j'ai dit : "pas forcément" parce que certains enfants ne font pas cet effort de comparaison et de d'analyse sur les lettres et les sons quand on leur lit des histoires.
en fait je répondais à la proposition de CoindeParadis :
Boubous a écrit:Concernant la lecture, je suis tout à fait d’accord avec votre définition. Mais on parlait plutôt des vertus de la mémorisation et du rabâchage dans l’apprentissage de la lecture. Dans mon exemple (vous n’avez pas l’air d’apprécier mes premières "lectures" !:lol: ), on voit bien que le rabâchage n’empêche pas de manipuler les syllabes ; et à force de manipuler les syllabes et les mots, on finit par les mémoriser pour mieux lire après. C’est un cercle vertueux !coindeparadis a écrit:
Lire c'est être capable d'appréhender un mot inconnu (jamais lu, voire jamais rencontré). On est loin du rabâchage, cher aux méthodes telles que Ribambelle, Que d'histoires ou A l'école des albums.
Dans l'exemple que vous donnez, je doute qu'il s'agisse de lecture au sens strict.
C'est au contraire en manipulant les syllabes papi,papa, pipi, api... qu'on amène l'élève à regarder le texte qu'il a sous les yeux et non à le réciter. Je ne crois pas que ce soit le "rabâchage" maison qui fasse avancer les élèves mais davantage le bain de lecture familial qu'ils peuvent connaître.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- Spinoza1670Esprit éclairé
Je suis en train de mettre en forme un article de Leonard Bloomfield, un linguiste américain de la première moitié du XXème siècle qui était horrifié de voir les méthodes par mot entier (= idéovisuelle) qui étaient en usage à l'école publique car recommandées dans toutes les teacher's schools (écoles de maîtres), par tous les guides sur la lecture et qui étaient les seules à être publiées.
Voici les premières lignes de l'article en anglais :
Voici les premières lignes de l'article en anglais :
- Bloomfield:
- 1. What is Reading ?
Literacy is the most important factor in keeping up our civilization, and teaching children to read is the most important task of our schools. We perform this task clumsily and with a great waste of labor and time. Even at the end of eight years many of our pupils cannot be said to read; yet eight months ought to suffice.
This is not due to a lack of pedagogic methods. The most excellent teaching technique is bound to give poor results so long as the teacher does not know what to teach.
It is generally assumed that a teacher, who knows how to read, understands also the linguistic processes that are involved in the act of reading. No one assumes that a cook who prepares a cup of coffee understands the chemical processes which he has called into use. Everybody knows that there is a science of chemistry — that chemical processes have been systematically observed and analyzed — and everyone who deals with chemistry, in the way of teaching or otherwise, makes use of the knowledge that has been gained by generations of scientific study. In quite the same way, though not everyone knows it, human speech has been systematically observed and analyzed. Generations of work have been spent upon this subject, and many useful and interesting facts have been brought to light. No one, not even the cleverest person, could hope, by his unaided efforts, to duplicate these results. Our schools will continue to waste time and energy and to reap meager success unless and until the teacher in the early grades knows the main linguistic facts and principles that play a part in the act of reading.
This essay is planned to present — in a practically useful arrangement - these facts and principles.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- Spinoza1670Esprit éclairé
traduction à la va vite :
Qu'est-ce que lire ?
Literacy (la connaissance des lettres, la lecture ?) est le facteur qui contribue le plus à maintenir notre civilisation, et apprendre aux enfants à lire est la tâche la plus importante de nos écoles. Nous accomplissons cette tâche maladroitement et avec une grande dépense d’efforts et de temps. Même au bout de huit ans beaucoup de nos élèves ne peuvent être dits capables de lire, là où huit mois devraient suffire.
Ce n’est pas dû à un manque de méthodes pédagogiques. La technique d’enseignement la plus excellente ne peut donner que de pauvres résultats tant que l’enseignant ne sait pas quoi enseigner.
On prétend généralement qu’un enseignant, qui sait comment lire, comprend aussi les processus linguistiques qui sont impliqués dans l’acte de lire. Personne ne prétend qu’un cuisinier qui prépare une tasse de café comprend les processus chimiques que son action a exigés. Tout le monde sait qu’’il y a une science de la chimie – que les processus chimiques ont été systématiquement analysés et observés – et quiconque ayant affaire à la science de la chimie, qu’il l’enseigne ou autre, fait usage de cette connaissance qui a été conquise par des générations d’étude scientifique. A peu près de la même manière, bien que tout le monde ne le sache pas, la parole humaine a été observée et analysée systématiquement. On a travaillé pendant des générations sur ce sujet, et beaucoup de faits utiles et intéressants ont été mis en lumière. Personne, pas même l’individu le plus intelligent, ne pourrait espérer, sans aide, retrouver ces résultats. Nos écoles continueront à dépenser du temps et de l’énergie et à récolter de maigres succès tant que l’enseignant dans les premiers niveaux ne connaîtra pas les principaux faits et principes linguistiques qui jouent un rôle dans l’acte de lire.
Qu'est-ce que lire ?
Literacy (la connaissance des lettres, la lecture ?) est le facteur qui contribue le plus à maintenir notre civilisation, et apprendre aux enfants à lire est la tâche la plus importante de nos écoles. Nous accomplissons cette tâche maladroitement et avec une grande dépense d’efforts et de temps. Même au bout de huit ans beaucoup de nos élèves ne peuvent être dits capables de lire, là où huit mois devraient suffire.
Ce n’est pas dû à un manque de méthodes pédagogiques. La technique d’enseignement la plus excellente ne peut donner que de pauvres résultats tant que l’enseignant ne sait pas quoi enseigner.
On prétend généralement qu’un enseignant, qui sait comment lire, comprend aussi les processus linguistiques qui sont impliqués dans l’acte de lire. Personne ne prétend qu’un cuisinier qui prépare une tasse de café comprend les processus chimiques que son action a exigés. Tout le monde sait qu’’il y a une science de la chimie – que les processus chimiques ont été systématiquement analysés et observés – et quiconque ayant affaire à la science de la chimie, qu’il l’enseigne ou autre, fait usage de cette connaissance qui a été conquise par des générations d’étude scientifique. A peu près de la même manière, bien que tout le monde ne le sache pas, la parole humaine a été observée et analysée systématiquement. On a travaillé pendant des générations sur ce sujet, et beaucoup de faits utiles et intéressants ont été mis en lumière. Personne, pas même l’individu le plus intelligent, ne pourrait espérer, sans aide, retrouver ces résultats. Nos écoles continueront à dépenser du temps et de l’énergie et à récolter de maigres succès tant que l’enseignant dans les premiers niveaux ne connaîtra pas les principaux faits et principes linguistiques qui jouent un rôle dans l’acte de lire.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- adelaideaugustaFidèle du forum
La définition de wikipedia me semble assez complète.
http://en.wikipedia.org/wiki/Literacy
http://en.wikipedia.org/wiki/Literacy
_________________
"Instruire une nation, c'est la civiliser.Y éteindre les connaissances, c'est la ramener à l'état primitif de la barbarie." (Diderot)
"Un mensonge peut faire le tour du monde pendant que la vérité se met en route". (Mark Twain)
"Quand les mots perdent leur sens, les hommes perdent leur liberté".(Confucius)
- BoubousNiveau 6
Pardon. J’avais mal compris !Spinoza1670 a écrit:Tout à fait d'accord.Boubous a écrit:Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol:Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
Mais j'ai dit : "pas forcément" parce que certains enfants ne font pas cet effort de comparaison et de d'analyse sur les lettres et les sons quand on leur lit des histoires.
- InvitéP2Niveau 5
Pour tenter d'élever un peu le débat : Lire II : Feyerabend et la Lecture Anarchique.
- Asha KrakenNeoprof expérimenté
C'est vrai que ce débat était dénué d'argumentaires scientifiques étayés et qu'il était ras les pâquerettes sans votre intervention venue à point nommé. Merci pour la condescendance...
- Spinoza1670Esprit éclairé
D'un certain point de vue, Philippe Jovi a raison. Je ne peux pas répondre à l'article. Il faudrait d'abord que je le lise, mais je peux préciser rapidement et grossièrement je pense le point de vue qui est celui de mes interventions pour l'instant.
D'abord, sur le cas Boscher (et celui de l'apprentissage de la lecture) je restreins la question de la lecture aux premiers mois de l'apprentissage de la lecture.
Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).
L'articulation de la lecture (entendue en ce sens restreint) avec la compréhension doit être pensée, certes, mais le problème de la compréhension n'a pas à être opposé au problème du déchiffrage. Il faut aborder notamment l'implication de tout l'apprentissage de la langue (orale) dont on apprend à lire et écrire le système d'écriture.
Il y a toujours au début d'apprentissage de la lecture un décalage entre ce que l'enfant est capable de comprendre quand il lit et ce qu'il est capable de comprendre quand il écoute, du moins pour les enfants dont c'est la langue maternelle.
Pour le finlandais, l'espagnol, bref les systèmes d'écriture alphabétiques ultra-réguliers, on aboutira très vite à une lecture courante, sinon fluide, et le décalage ne durera que quelques mois. Puisque le système est régulier, il n'y a qu'à saisir les correspondances graphèmes-phonèmes régulières, les seules, puisque la correspondance est ultra-régulière, quasi parfaite : un phonème = une lettre, et ensuite à automatiser cette lecture.
Le but premier de l'apprentissage de lecture pour un enfant est d'être capable de lire (= prononcer à voix haute ou dans sa tête) n'importe quelle phrase :
des phrases inintelligibles pour quiconque (car les mots n'existent pas) du type "Les basoules sibouillaient du caflope dans les radures parce qu'ils avaient des crimons et des sardettes en délite."
ou des phrases inintelligibles pour des enfants ou des non-spécialistes (car ils n'en connaissent pas les termes ou, s'ils les connaissent, parce qu'ils ne connaissent pas les concepts correspondant à ces termes) : n'importe quelle phrase d'un traité de chimie, de biologie, de philosophie, d'histoire.
Ces phrases sont des exemples extrêmes, mais cela montre bien ce que je veux dire. L'essence de l'apprentissage de la lecture, c'est de lire, pas de comprendre. Ce qui ne veut pas dire que la compréhension des textes (avec la rédaction) n'est pas le but ultime de tout l'enseignement.
Et donc l'on ne donnera pas à cet enfant à lire les phrases inintelligibles en soi ou pour lui que j'ai données. Il exercera sa capacité à lire sur des phrases et des textes qu'il peut lire et qu'il peut comprendre. L'effort passé à lire le texte au sens de prononcer les signes écrits donne l'impression de retomber dans l'ânonnement machinal, l'impression que l'on retarde abusivement ses efforts de compréhension des textes, et donc que l'on irait plus vite en donnant à l'enfant des textes plus étoffés au point de vue vocabulaire, références culturelles, syntaxes. Mais ce serait une erreur funeste que de commencer à apprendre à lire sur des textes résistants et comportant toutes les difficultés d'écriture de la langue. Seuls s'en sortiront au prix d'un long travail ceux qui auront réussi à distinguer patiemment les régularités des irrégularités d'écriture et à automatiser cette reconnaissance donc cette lecture.
Dans un système alphabétique comportant des irrégularités comme c'est le cas du français ou de l'anglais, si l'on fonctionne méthodiquement, on est obligé de suivre une progression d'abord des syllabes, des mots et de petites phrases proportionnées à la capacité de lecture (en commençant par les graphèmes réguliers) et progressivement des textes de plus en plus longs et toujours proportionnées à sa capacité de lecture, en ajoutant progressivement les graphèmes complexes et les irrégularités. Ce décalage sera réduit d'autant plus vite qu'on lui enseignera systématiquement les correspondances graphèmes-phonèmes et que son déchiffrage s'automatisera. Mais la lecture totalement courante et sans erreur de tout type de graphèmes mettra un peu plus longtemps que dans les systèmes alphabétiques réguliers.
Parallèlement à ce travail d'apprentissage de la lecture et de compréhension de textes correspondant à sa capacité de lecture, il y a tout un travail sur le langage, le vocabulaire, la compréhension, la culture qui se déroulera en parallèle à un niveau de compréhension plus élevé que ce qui est permis actuellement par les capacités de lecture des textes.
D'abord, sur le cas Boscher (et celui de l'apprentissage de la lecture) je restreins la question de la lecture aux premiers mois de l'apprentissage de la lecture.
Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).
L'articulation de la lecture (entendue en ce sens restreint) avec la compréhension doit être pensée, certes, mais le problème de la compréhension n'a pas à être opposé au problème du déchiffrage. Il faut aborder notamment l'implication de tout l'apprentissage de la langue (orale) dont on apprend à lire et écrire le système d'écriture.
Il y a toujours au début d'apprentissage de la lecture un décalage entre ce que l'enfant est capable de comprendre quand il lit et ce qu'il est capable de comprendre quand il écoute, du moins pour les enfants dont c'est la langue maternelle.
Pour le finlandais, l'espagnol, bref les systèmes d'écriture alphabétiques ultra-réguliers, on aboutira très vite à une lecture courante, sinon fluide, et le décalage ne durera que quelques mois. Puisque le système est régulier, il n'y a qu'à saisir les correspondances graphèmes-phonèmes régulières, les seules, puisque la correspondance est ultra-régulière, quasi parfaite : un phonème = une lettre, et ensuite à automatiser cette lecture.
Le but premier de l'apprentissage de lecture pour un enfant est d'être capable de lire (= prononcer à voix haute ou dans sa tête) n'importe quelle phrase :
des phrases inintelligibles pour quiconque (car les mots n'existent pas) du type "Les basoules sibouillaient du caflope dans les radures parce qu'ils avaient des crimons et des sardettes en délite."
ou des phrases inintelligibles pour des enfants ou des non-spécialistes (car ils n'en connaissent pas les termes ou, s'ils les connaissent, parce qu'ils ne connaissent pas les concepts correspondant à ces termes) : n'importe quelle phrase d'un traité de chimie, de biologie, de philosophie, d'histoire.
Ces phrases sont des exemples extrêmes, mais cela montre bien ce que je veux dire. L'essence de l'apprentissage de la lecture, c'est de lire, pas de comprendre. Ce qui ne veut pas dire que la compréhension des textes (avec la rédaction) n'est pas le but ultime de tout l'enseignement.
Et donc l'on ne donnera pas à cet enfant à lire les phrases inintelligibles en soi ou pour lui que j'ai données. Il exercera sa capacité à lire sur des phrases et des textes qu'il peut lire et qu'il peut comprendre. L'effort passé à lire le texte au sens de prononcer les signes écrits donne l'impression de retomber dans l'ânonnement machinal, l'impression que l'on retarde abusivement ses efforts de compréhension des textes, et donc que l'on irait plus vite en donnant à l'enfant des textes plus étoffés au point de vue vocabulaire, références culturelles, syntaxes. Mais ce serait une erreur funeste que de commencer à apprendre à lire sur des textes résistants et comportant toutes les difficultés d'écriture de la langue. Seuls s'en sortiront au prix d'un long travail ceux qui auront réussi à distinguer patiemment les régularités des irrégularités d'écriture et à automatiser cette reconnaissance donc cette lecture.
Dans un système alphabétique comportant des irrégularités comme c'est le cas du français ou de l'anglais, si l'on fonctionne méthodiquement, on est obligé de suivre une progression d'abord des syllabes, des mots et de petites phrases proportionnées à la capacité de lecture (en commençant par les graphèmes réguliers) et progressivement des textes de plus en plus longs et toujours proportionnées à sa capacité de lecture, en ajoutant progressivement les graphèmes complexes et les irrégularités. Ce décalage sera réduit d'autant plus vite qu'on lui enseignera systématiquement les correspondances graphèmes-phonèmes et que son déchiffrage s'automatisera. Mais la lecture totalement courante et sans erreur de tout type de graphèmes mettra un peu plus longtemps que dans les systèmes alphabétiques réguliers.
Parallèlement à ce travail d'apprentissage de la lecture et de compréhension de textes correspondant à sa capacité de lecture, il y a tout un travail sur le langage, le vocabulaire, la compréhension, la culture qui se déroulera en parallèle à un niveau de compréhension plus élevé que ce qui est permis actuellement par les capacités de lecture des textes.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- User17706Bon génie
Près de quarante feuillets, c'est trop long. La lecture d'une quarantaine de feuillets représente un investissement, en temps, que l'on est prêt à consentir si l'on a des garanties, mais pas forcément en l'absence d'icelles.
Pour literacy, «littératie» est laid; «lettrure» (ancien français) n'a aucune chance de passer dans les moeurs; «maîtrise de l'écriture et de la lecture» me paraît, quoique longuet, exact.
Pour literacy, «littératie» est laid; «lettrure» (ancien français) n'a aucune chance de passer dans les moeurs; «maîtrise de l'écriture et de la lecture» me paraît, quoique longuet, exact.
- doctor whoDoyen
Pas lu l'article de Philippe Jovi (effectivement un peu long, et puis, tous ces préliminaires pour dézinguer les méthodes "syllabiques", je ne vois pas l'intérêt).
J'ai tout de même relevé cela :
Mais, désolé Philippe, la lecture n'est pas un apprentissage mimétique. Voir les développements de Vygotski : http://skhole.fr/2-de-piaget-%C3%A0-vygotski
J'ai tout de même relevé cela :
Naturellement, 1) il y a des apprentissages mimétiques, 2) il y a une part de mimétisme dans des apprentissages non mimétiques, 3) il est même bon de donner à des apprentissages non mimétiques l'allure d'apprentissage mimétiques, dans une certaine mesure, et cela pour les élèves les plus jeunes.Philippe Jovi a écrit:Alors, bien entendu, agir s'apprend. Mais tout apprentissage ne doit pas nécessairement être méthodique. Il y a aussi des apprentissages mimétiques : on apprend par imitation, on apprend en "faisant comme". Croire le contraire, croire notamment qu'un enfant ne peut apprendre à lire que par et dans une méthode, si possible "syllabique", c'est, au mieux, être victime d'une confusion conceptuelle, au pire, être manipulé idéologiquement.
Mais, désolé Philippe, la lecture n'est pas un apprentissage mimétique. Voir les développements de Vygotski : http://skhole.fr/2-de-piaget-%C3%A0-vygotski
_________________
Mon blog sur Tintin (entre autres) : http://popanalyse.over-blog.com/
Blog pédagogique : http://pedagoj.eklablog.com
- Spinoza1670Esprit éclairé
Télécharger « Bloomfield teaching children to read.doc »
Télécharger « Bloomfield teaching children to read.pdf »
A lire absolument.
Notamment sur les liens entre langue orale et langue écrite, la critique des différentes méthodes de lecture, les illusions qui conduisent à s'opposer à un enseignement systématique du décodage, les liens entre apprendre à lire et apprendre à écrire (Bloomfield critiquerait s'il les connaissait les méthodes d'écriture-lecture), les liens entre lecture et compréhension, la question de savoir s'il faut apprendre toutes les lettres avant d'apprendre à lire (Bloomfield répond oui), etc.
Télécharger « Bloomfield teaching children to read.pdf »
A lire absolument.
Notamment sur les liens entre langue orale et langue écrite, la critique des différentes méthodes de lecture, les illusions qui conduisent à s'opposer à un enseignement systématique du décodage, les liens entre apprendre à lire et apprendre à écrire (Bloomfield critiquerait s'il les connaissait les méthodes d'écriture-lecture), les liens entre lecture et compréhension, la question de savoir s'il faut apprendre toutes les lettres avant d'apprendre à lire (Bloomfield répond oui), etc.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- VudiciFidèle du forum
Très bon résumé, que j'approuve entièrement (comment ça, tu t'en tapes, que j'approuve ou pas?).Spinoza1670 a écrit:D'un certain point de vue, Philippe Jovi a raison. Je ne peux pas répondre à l'article. Il faudrait d'abord que je le lise, mais je peux préciser rapidement et grossièrement je pense le point de vue qui est celui de mes interventions pour l'instant.
D'abord, sur le cas Boscher (et celui de l'apprentissage de la lecture) je restreins la question de la lecture aux premiers mois de l'apprentissage de la lecture.
Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).
L'articulation de la lecture (entendue en ce sens restreint) avec la compréhension doit être pensée, certes, mais le problème de la compréhension n'a pas à être opposé au problème du déchiffrage. Il faut aborder notamment l'implication de tout l'apprentissage de la langue (orale) dont on apprend à lire et écrire le système d'écriture.
Il y a toujours au début d'apprentissage de la lecture un décalage entre ce que l'enfant est capable de comprendre quand il lit et ce qu'il est capable de comprendre quand il écoute, du moins pour les enfants dont c'est la langue maternelle.
Pour le finlandais, l'espagnol, bref les systèmes d'écriture alphabétiques ultra-réguliers, on aboutira très vite à une lecture courante, sinon fluide, et le décalage ne durera que quelques mois. Puisque le système est régulier, il n'y a qu'à saisir les correspondances graphèmes-phonèmes régulières, les seules, puisque la correspondance est ultra-régulière, quasi parfaite : un phonème = une lettre, et ensuite à automatiser cette lecture.
Le but premier de l'apprentissage de lecture pour un enfant est d'être capable de lire (= prononcer à voix haute ou dans sa tête) n'importe quelle phrase :
des phrases inintelligibles pour quiconque (car les mots n'existent pas) du type "Les basoules sibouillaient du caflope dans les radures parce qu'ils avaient des crimons et des sardettes en délite."
ou des phrases inintelligibles pour des enfants ou des non-spécialistes (car ils n'en connaissent pas les termes ou, s'ils les connaissent, parce qu'ils ne connaissent pas les concepts correspondant à ces termes) : n'importe quelle phrase d'un traité de chimie, de biologie, de philosophie, d'histoire.
Ces phrases sont des exemples extrêmes, mais cela montre bien ce que je veux dire. L'essence de l'apprentissage de la lecture, c'est de lire, pas de comprendre. Ce qui ne veut pas dire que la compréhension des textes (avec la rédaction) n'est pas le but ultime de tout l'enseignement.
Et donc l'on ne donnera pas à cet enfant à lire les phrases inintelligibles en soi ou pour lui que j'ai données. Il exercera sa capacité à lire sur des phrases et des textes qu'il peut lire et qu'il peut comprendre. L'effort passé à lire le texte au sens de prononcer les signes écrits donne l'impression de retomber dans l'ânonnement machinal, l'impression que l'on retarde abusivement ses efforts de compréhension des textes, et donc que l'on irait plus vite en donnant à l'enfant des textes plus étoffés au point de vue vocabulaire, références culturelles, syntaxes. Mais ce serait une erreur funeste que de commencer à apprendre à lire sur des textes résistants et comportant toutes les difficultés d'écriture de la langue. Seuls s'en sortiront au prix d'un long travail ceux qui auront réussi à distinguer patiemment les régularités des irrégularités d'écriture et à automatiser cette reconnaissance donc cette lecture.
Dans un système alphabétique comportant des irrégularités comme c'est le cas du français ou de l'anglais, si l'on fonctionne méthodiquement, on est obligé de suivre une progression d'abord des syllabes, des mots et de petites phrases proportionnées à la capacité de lecture (en commençant par les graphèmes réguliers) et progressivement des textes de plus en plus longs et toujours proportionnées à sa capacité de lecture, en ajoutant progressivement les graphèmes complexes et les irrégularités. Ce décalage sera réduit d'autant plus vite qu'on lui enseignera systématiquement les correspondances graphèmes-phonèmes et que son déchiffrage s'automatisera. Mais la lecture totalement courante et sans erreur de tout type de graphèmes mettra un peu plus longtemps que dans les systèmes alphabétiques réguliers.
Parallèlement à ce travail d'apprentissage de la lecture et de compréhension de textes correspondant à sa capacité de lecture, il y a tout un travail sur le langage, le vocabulaire, la compréhension, la culture qui se déroulera en parallèle à un niveau de compréhension plus élevé que ce qui est permis actuellement par les capacités de lecture des textes.
_________________
Front de Libération des Lichens Injustement Massacrés
- retraitéeDoyen
Je ris, car mon mari, pour s'amuser, avait donné du Kant à "lire" à notre fils, qui déchiffrait parfaitement , comme tous ses copains et copines, avant la fin du CP.
Il avait lu à voix haute le passage, avant de déclarer : "Mais ça ne veut rien dire!"
Et moi, je corrige des épreuves d'imprimerie de philo, et, bien que je voie les fautes de syntaxe, d'orthographe, de ponctuation, je déclare humblement que le sens de certains articles m'échappe!
Il avait lu à voix haute le passage, avant de déclarer : "Mais ça ne veut rien dire!"
Et moi, je corrige des épreuves d'imprimerie de philo, et, bien que je voie les fautes de syntaxe, d'orthographe, de ponctuation, je déclare humblement que le sens de certains articles m'échappe!
- SapotilleEmpereur
J'ai aussi relu le mémoire d'un neveu pour l'obtention de son Doctorat en mécanique de précision ...
J'ai pu lire, corriger le français et un peu d'orthographe ...
Mais je n'ai vraiment pas compris grand chose !!!
- Spinoza1670Esprit éclairé
Tu te rappelles de la méthode de lecture utilisée ? C'était en quelle année ?retraitée a écrit:Je ris, car mon mari, pour s'amuser, avait donné du Kant à "lire" à notre fils, qui déchiffrait parfaitement , comme tous ses copains et copines, avant la fin du CP.
Il avait lu à voix haute le passage, avant de déclarer : "Mais ça ne veut rien dire!"
Et moi, je corrige des épreuves d'imprimerie de philo, et, bien que je voie les fautes de syntaxe, d'orthographe, de ponctuation, je déclare humblement que le sens de certains articles m'échappe!
As-tu des cahiers à scanner ? j'aimerais bien en mettre sur le blog manuels anciens.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- retraitéeDoyen
C'était Daniel et Valérie, avec une maîtresse chevronnée qui faisait sa dernière année , et je peux te dire qu'ils lisaient presque tous pour Noël.
C'était en 75/76.
Je n'ai quasiment pas de cahiers, sauf mon "cahier" de Gs en maternelle.
En revanche, j'ai de nombreux devoirs de toutes disciplines, de la 6e à la Terminale. C'est intéressant en ce qui concerne, par exemple, le français et l'histoire.
C'était en 75/76.
Je n'ai quasiment pas de cahiers, sauf mon "cahier" de Gs en maternelle.
En revanche, j'ai de nombreux devoirs de toutes disciplines, de la 6e à la Terminale. C'est intéressant en ce qui concerne, par exemple, le français et l'histoire.
- Spinoza1670Esprit éclairé
Merci. Très très très intéressant. Je n'ai pas encore mis cette méthode en ligne. J'ai les livrets 1 et 2. Peut-être bientôt, en tout cas le livret 2, car le 1 est toujours en vente je crois. Il serait intéressant aussi de savoir ce que les enfants avaient comme connaissance à la fin de la maternelle.
Pour les cahiers et devoirs, si tu as le temps de scanner, je mettrai en ligne sans problème. Priorité au cahier de gs. Il faut mettre les boeufs (maternelle) avant la charrue (collège).
Pour les cahiers et devoirs, si tu as le temps de scanner, je mettrai en ligne sans problème. Priorité au cahier de gs. Il faut mettre les boeufs (maternelle) avant la charrue (collège).
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- MamaVénérable
C'est toujours tellement idiot d'écrire "personne n'a jamais"...
J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur
Et puis une méthode n'est pas tout, tout dépend de comment l'instituteur / l'institutrice l'utilise, non ?
J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur
Et puis une méthode n'est pas tout, tout dépend de comment l'instituteur / l'institutrice l'utilise, non ?
- Spinoza1670Esprit éclairé
mamamanette a écrit:C'est toujours tellement idiot d'écrire "personne n'a jamais"...
J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur
Et puis une méthode n'est pas tout, tout dépend de comment l'instituteur / l'institutrice l'utilise, non ?
La citation complète de Philippe Jovi : Personne n'a jamais appris à lire avec la méthode Boscher.
Voir dans le spoiler les arguments de Philippe Jovi pour justifier cette assertion :
- Ph. Jovi:
https://www.neoprofs.org/t66350p20-mon-fils-est-en-cp-et-j-ai-peur-help#2204795Philippe Jovi a écrit:Alors, je ne sais pas si je suis une "maîtresse experte" (un "maître expert", en l'occurrence) mais j'ai enseigné dix ans en CP avant de bifurquer complètement. Aussi, je me permets de vous livrer mon point de vue ... à toutes fins utile. Sachez que j'ai toujours enseigné selon la méthode dite "naturelle' mise au point par Célestin Freinet. Cette méthode est une méthode avec départ global qui doit son qualificatif ("naturelle") au fait que, vous et moi, lisons "naturellement" de cette façon : en règle générale, nous ne déchiffrons nullement ce que nous lisons mais nous reconnaissons globalement, non seulement des mots, mais, le plus souvent, des groupes de mots. Donc nous faisons appel, effectivement, à notre mémoire visuelle qui détecte des patterns, c'est-à-dire des structures syntaxiques signifiantes. La différence entre un "bon" et un "mauvais" lecteur se situe ici : le "bon" a mémorisé un beaucoup plus grand nombre de patterns que le "mauvais". Résultat des courses : celui-ci déchiffre laborieusement quand celui-là lit vite et facilement. Pour autant, l'apprentissage du déchiffrage est indispensable lorsqu'il s'agit d'apprendre des termes nouveaux ou d'exercer son esprit critique sur le contenu d'un texte (par exemple lorsqu'on se demande si le verbe est au singulier ou au pluriel parce qu'on a un doute quant au sujet de ce verbe). Bref, lorsqu'on lit, la mémorisation et la restitution globales des formes signifiantes est la règle, le déchiffrage syllabique est l'exception. Et heureusement, car seul le premier processus donne l'accès au sens (ba, li, tou, mo, etc., c'est rigolo, mais ça lasse vite un être intelligent : ça n'a aucun sens !)
Encore une fois, déchiffrer n'est pas lire. Pour un enfant de 4-5 ans, déchiffrer est un jeu comme un autre. Commencer à lire en est un autre, beaucoup plus complexe, celui-là. Donc, il ne "régresse" pas : il passe d'un jeu facile à un jeu plus difficile dans lequel il a, provisoirement, de moins bons résultats. Ce qui est normal.
Cela n'a rien à voir avec la dyslexie. Ou alors, nous sommes tous et toutes dyslexiques. Car nous autres, "bons" lecteurs, faisons tous ce genre d'erreur, lorsque, exceptionnellement, nous nous évertuons à déchiffrer, par exemple les composants d'une molécule sur une boîte de médicament (faites le test, vous verrez).
Personne n'a jamais appris à lire avec la méthode Boscher. Celle-ci est très efficace uniquement avec des lecteurs débutants qui possèdent déjà un capital suffisant de structures signifiantes reconnues globalement. Ce qui est généralement le cas pour une grosse majorité d'enfants entrant au CP : ils sont, à leur insu, baigné dans un univers socio-culturel dans lequel l'écrit est omniprésent. Ils sont donc capables de reconnaître spontanément un assez grand nombre de mots. Cela dit, l'apprentissage trop précoce (par exemple, dès le début du CP, voire plus tôt) du déchiffrage syllabique est très risqué en ce qu'il fait, justement, perdre à l'enfant ses réflexes de bon lecteur potentiel, à savoir reconnaître globalement du sens.
Ben non ! C'est juste le contraire : lire c'est deviner, et même interpréter et anticiper. Dans l'acte de lire, c'est le sens qui compte, pas la combinatoire syllabique. Déchiffrer est utile, indispensable même, mais ce n'est pas lire.
Faux, lamentable et démagogique ! Faux : Champollion savait déjà lire lorsqu'il s'est attaqué au déchiffrage de la pierre de Rosette. Lamentable : faire oublier "la compréhension du message écrit", c'est le meilleur moyen de leur faire perdre le goût et la fonction de la lecture. Démagogique : un enfant de Cours Préparatoire n'est pas un linguiste.
_________________
« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
Littérature au primaire - Rédaction au primaire - Manuels anciens - Dessin au primaire - Apprendre à lire et à écrire - Maths au primaire - école : références - Leçons de choses.
- InvitéP2Niveau 5
J'ai tenté d'"élever" (tout le contraire de la con-"descendance", donc) le débat en le soustrayant à la vulgate pédagogico-psychologico-experte pour le confier à la critique philosophique. Ma question n'est pas "comment lit-on ?" ("comment apprend-on à lire ?"), qui, sans être dénuée d'intérêt, ne concerne que les thérapeutes, mais "qu'est-ce que lire ?" ("qu'est-ce qu'apprendre à lire ?"), qui est un problème conceptuel qui concerne (ou, en tout cas, devrait concerner) tous ceux qui, une fois dans leur vie, ont fait usage du verbe "lire". J'ai essayé d'attirer l'attention sur l'essence, et plus seulement sur le mécanisme, du "lire".Asha Kraken a écrit:C'est vrai que ce débat était dénué d'argumentaires scientifiques étayés et qu'il était ras les pâquerettes sans votre intervention venue à point nommé. Merci pour la condescendance...
Ce que vous dites, pour clair et sincère que cela soit, est extrêmement problématique. D'abord parce que cela confirme, sans ambiguïté, la baisse dramatique des exigences de l'éducation publique (j'insiste sur "publique" : l'éducation "privée", familiale ou institutionnelle est, fort heureusement, beaucoup plus exigeante). Ensuite parce que, à supposer que "lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes", on ancre chez l'élève, et au stade le plus précoce de son développement intellectuel, qui plus est, l'idée que la réussite scolaire (et, au-delà, sociale) n'est affaire que de mécanismes. Enfin parce que, dans aucune langue au monde (y compris les plus "transparentes" comme le finnois ou les langues romanes), il n'y a de stricte correspondance grapho-phonématique (il n'y a, dans ces dernières langues qu'une correspondance grapho-phonologique, mais la prosodie -par exemple, l'accent local- rend cette correspondance impossible, in fine), de sorte qu'en enseignant de tels principes aux enfants, on les condamne à un échec auquel, seuls, les meilleurs lecteurs (ceux qui saisissent globalement des entités sémantiques et non pas des séquences amorphes de signes) échapperont en faisant le chemin inverse de celui que vous leur inculquez (ils n'iront pas de la syllabe au mot, mais du mot à la syllabe). J'ajouterai que je ne connais pas de professeur de solfège qui confonde "déchiffrer un partition" avec "lire une partition".Spinoza1670 a écrit:Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).
Ca me rappelle ce que me disaient certains (mauvais) élèves !PauvreYorick a écrit:Près de quarante feuillets, c'est trop long. La lecture d'une quarantaine de feuillets représente un investissement, en temps, que l'on est prêt à consentir si l'on a des garanties, mais pas forcément en l'absence d'icelles.
Literacy désigne la capacité à lire et à écrire, c'est tout.PauvreYorick a écrit:Pour literacy, «littératie» est laid; «lettrure» (ancien français) n'a aucune chance de passer dans les moeurs; «maîtrise de l'écriture et de la lecture» me paraît, quoique longuet, exact.
Je ne "dézingue" (sic !) pas les "méthodes syllabiques". Je fais même exactement le contraire, puisque j'explique en quoi elles sont indispensables à l'apprentissage de l'écriture, de l'orthographe, de la grammaire et, d'une manière générale, de l'approche critique de l'écrit. En revanche, je développe l'idée qu'aucune "méthode syllabique", non plus, d'ailleurs, qu'aucune méthode tout court n'a jamais appris à lire à quiconque. Encore une fois, je ne fais là que (tenter de) démêler une confusion conceptuelle, en l'occurrence entre "lire" et "décoder".doctor who a écrit:Pas lu l'article de Philippe Jovi (effectivement un peu long, et puis, tous ces préliminaires pour dézinguer les méthodes "syllabiques", je ne vois pas l'intérêt).
Bien sûr que si. Aucune mamie, aucun papy, aucune baby sitter ayant, une seule fois, lu une histoire à un enfant, ne peut en douter. Par ailleurs, les arguments de Vygotski ne m'intéressent pas plus que ceux de Piaget pour les raisons indiquées supra.doctor who a écrit:Mais, désolé Philippe, la lecture n'est pas un apprentissage mimétique. Voir les développements de Vygotski : http://skhole.fr/2-de-piaget-%C3%A0-vygotski
Vous voulez dire que vous n'avez pas tout compris. Mais justement, j'explique en quoi l'acte de lire est un acte sémantique susceptible de degrés et non pas un processus mécanique qui fonctionne sur le principe du "tout ou rien". Quand je lis la Recherche de Proust, j'ai l'impression de comprendre. Mais je ne comprends jamais "tout". La preuve, c'est que, chaque fois que je la relis, en tout ou partie, je découvre des aspects du texte que j'ignorais. Lorsqu'on ne comprend réellement rien, on ne lit pas. Et, a fortiori, on ne risque pas de "corriger" les aspects grammaticaux des relations entre sémantèmes, puisque, pour analyser les relations entre deux termes, il faut commencer par comprendre à quels termes on a affaire.Sapotille a écrit:J'ai aussi relu le mémoire d'un neveu pour l'obtention de son Doctorat en mécanique de précision ...
J'ai pu lire, corriger le français et un peu d'orthographe ... Mais je n'ai vraiment pas compris grand chose !!!
Je veux bien admettre que vous avez pas appris à lire avec Boscher. Mais certainement pas grâce à la "méthode" Boscher, je veux dire la méthode syllabique qui y est développée. De toute façon, est possible d'apprendre à lire avec n'importe quel écrit présentant des propositions douées de sens pour celui qui les lit (John Steinbeck, Thomas Mann, Pierre Jakez-Hélias, pour n'en citer que quelques-uns, montrent qu'à une certaine époque, c'est surtout avec la Bible, qu'on apprenait à lire !). Or, la méthode Boscher, malgré tous ses défauts, offre, tout de même, à lire quelques phrases douées de sens. Donc ... Par ailleurs, j'explique dans mon article pourquoi je récuse le témoignage de la mémoire individuelle, en matière d'apprentissage de la lecture.mamamanette a écrit:J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur
- coindeparadisGuide spirituel
Vous semblez faire une confusion entre" lire" et "comprendre le sens de ce qu'on lit". Si cela semble indissociable dans des énoncés " comme "Anne prépare du cacao pour Rémi", cela n'est plus systématique pour des écrits demandant des références culturelles, faisant appel à un lexique plus rare ou à des concepts. Quand vous ne comprenez pas Proust, il ne s'agit pas d'un problème de lecture ! J'ai permis, grâce à ce que vous nommez "mécanismes", à des élèves de 11, 12,15 ans d'accéder enfin à la lecture. Tout simplement avec un apprentissage alphabétique. La politique qui consiste à dire que l'élève va faire émerger seul ce qui régit la langue française (ou les maths, les sciences...) est forcément élitiste car l'Ecole ne donne plus les outils nécessaires à chacun. Ce sont les familles qui vont compenser ... ou pas. Et lorsqu'on regarde de près ce que font les familles, ce n'est pas une approche socio-constructiviste qui les anime. Ce sont bien les mécanismes comme la combinatoire, l'apprentissage des tables de multiplication ou des formulaires de géométrie.
_________________
Ne t'excuse jamais d'être ce que tu es. Gandhi
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum