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Boubous
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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par Boubous Lun 11 Nov 2013 - 17:39
Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol: 
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par coindeparadis Lun 11 Nov 2013 - 18:38
Spinoza, je suis d'accord avec toi. Je préfère "répétition" ou mieux "entraînement" à "rabâchage". De récentes études montrent la nécessité de cet entraînement pour acquérir une notion, une technique. Même "La Classe" d'octobre en rend compte.

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par adelaideaugusta Lun 11 Nov 2013 - 19:50
coindeparadis a écrit:Spinoza, je suis d'accord avec toi. Je préfère "répétition" ou mieux "entraînement" à "rabâchage". De récentes études montrent la nécessité de cet entraînement pour acquérir une notion, une technique. Même "La Classe" d'octobre en rend compte.
Sur la "répétition", je trouve intéressante cette interview d'Eric Kandel, prix Nobel de physiologie en 2000.
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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par coindeparadis Lun 11 Nov 2013 - 19:57
Effectivement !

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par Spinoza1670 Mar 12 Nov 2013 - 13:49
Merci pour le texte de Kandel.


Dernière édition par Spinoza1670 le Mar 12 Nov 2013 - 15:07, édité 1 fois

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par Spinoza1670 Mar 12 Nov 2013 - 13:52
Boubous a écrit:
Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol: 
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
Tout à fait d'accord.
Mais j'ai dit : "pas forcément" parce que certains enfants ne font pas cet effort de comparaison et de d'analyse sur les lettres et les sons quand on leur lit des histoires.
en fait je répondais à la proposition de CoindeParadis :
Boubous a écrit:
coindeparadis a écrit:
Lire c'est être capable d'appréhender un mot inconnu (jamais lu, voire jamais rencontré). On est loin du rabâchage, cher aux méthodes telles que Ribambelle, Que d'histoires ou A l'école des albums.
Dans l'exemple que vous donnez, je doute qu'il s'agisse de lecture au sens strict.
C'est au contraire en manipulant les syllabes papi,papa, pipi, api... qu'on amène l'élève à regarder le texte qu'il a sous les yeux et non à le réciter. Je ne crois pas que ce soit le "rabâchage" maison qui fasse avancer les élèves mais davantage le bain de lecture familial qu'ils peuvent connaître.
Concernant la lecture, je suis tout à fait d’accord avec votre définition. Mais on parlait plutôt des vertus de la mémorisation et du rabâchage dans l’apprentissage de la lecture. Dans mon exemple (vous n’avez pas l’air d’apprécier mes premières "lectures" !:lol: ), on voit bien que le rabâchage n’empêche pas de manipuler les syllabes ; et à force de manipuler les syllabes et les mots, on finit par les mémoriser pour mieux lire après. C’est un cercle vertueux !

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par Spinoza1670 Mar 12 Nov 2013 - 13:59
Je suis en train de mettre en forme un article de Leonard Bloomfield, un linguiste américain de la première moitié du XXème siècle qui était horrifié de voir les méthodes par mot entier (= idéovisuelle) qui étaient en usage à l'école publique car recommandées dans toutes les teacher's schools (écoles de maîtres), par tous les guides sur la lecture et qui étaient les seules à être publiées.
Voici les premières lignes de l'article en anglais :
Bloomfield:
traduction : laissez-moi 2 minutes et j'arrive...

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par Spinoza1670 Mar 12 Nov 2013 - 14:27
traduction à la va vite :

Qu'est-ce que lire ?
Literacy (la connaissance des lettres, la lecture ?) est le facteur qui contribue le plus à maintenir notre civilisation, et apprendre aux enfants à lire est la tâche la plus importante de nos écoles. Nous accomplissons cette tâche maladroitement et avec une grande dépense d’efforts et de temps. Même au bout de huit ans beaucoup de nos élèves ne peuvent être dits capables de lire, là où huit mois devraient suffire.

Ce n’est pas dû à un manque de méthodes pédagogiques. La technique d’enseignement la plus excellente ne peut donner que de pauvres résultats tant que l’enseignant ne sait pas quoi enseigner.

On prétend généralement qu’un enseignant, qui sait comment lire, comprend aussi les processus linguistiques qui sont impliqués dans l’acte de lire. Personne ne prétend qu’un cuisinier qui prépare une tasse de café comprend les processus chimiques que son action a exigés. Tout le monde sait qu’’il y a une science de la chimie – que les processus chimiques ont été systématiquement analysés et observés – et quiconque ayant affaire à la science de la chimie, qu’il l’enseigne ou autre, fait usage de cette connaissance qui a été conquise par des générations d’étude scientifique. A peu près de la même manière, bien que tout le monde ne le sache pas, la parole humaine a été observée et analysée systématiquement. On a travaillé pendant des générations sur ce sujet, et beaucoup de faits utiles et intéressants ont été mis en lumière. Personne, pas même l’individu le plus intelligent, ne pourrait espérer, sans aide, retrouver ces résultats. Nos écoles continueront  à dépenser du temps et de l’énergie et à récolter de maigres succès tant que l’enseignant dans les premiers niveaux ne connaîtra pas les principaux faits et principes linguistiques qui jouent un rôle dans l’acte de lire.

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par adelaideaugusta Mar 12 Nov 2013 - 15:15
La définition de wikipedia me semble assez complète.

http://en.wikipedia.org/wiki/Literacy

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par Boubous Mar 12 Nov 2013 - 20:41
Spinoza1670 a écrit:
Boubous a écrit:
Spinoza1670 a écrit:Le bain de lecture familial fait avancer les élèves en compréhension, vocabulaire, culture, mais pas forcément dans l'apprentissage de la lecture proprement dit.
Parce que vous supposez, peut-être, que l’enfant ne regarde pas ce qu’on lui lit ? :lol: 
Quand vous faites régulièrement de la lecture à un enfant, assis à côté de vous ou sur vos genoux, il arrive un moment où il commence à s’intéresser de près à ce qui est écrit. Cela peut déboucher, naturellement, sur un apprentissage formel de la lecture et c’est ainsi que beaucoup de parents décident de se lancer dans l’aventure.
Tout à fait d'accord.
Mais j'ai dit : "pas forcément" parce que certains enfants ne font pas cet effort de comparaison et de d'analyse sur les lettres et les sons quand on leur lit des histoires.
Pardon. J’avais mal compris !
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par InvitéP2 Mer 13 Nov 2013 - 8:24
Pour tenter d'élever un peu le débat : Lire II : Feyerabend et la Lecture Anarchique.
Asha Kraken
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par Asha Kraken Mer 13 Nov 2013 - 8:33
C'est vrai que ce débat était dénué d'argumentaires scientifiques étayés et qu'il était ras les pâquerettes sans votre intervention venue à point nommé. Merci pour la condescendance...
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par Spinoza1670 Mer 13 Nov 2013 - 10:24
D'un certain point de vue, Philippe Jovi a raison. Je ne peux pas répondre à l'article. Il faudrait d'abord que je le lise, mais je peux préciser rapidement et grossièrement je pense le point de vue qui est celui de mes interventions pour l'instant.

D'abord, sur le cas Boscher (et celui de l'apprentissage de la lecture) je restreins la question de la lecture aux premiers mois de l'apprentissage de la lecture.

Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).

L'articulation de la lecture (entendue en ce sens restreint) avec la compréhension doit être pensée, certes, mais le problème de la compréhension n'a pas à être opposé au problème du déchiffrage. Il faut aborder notamment l'implication de tout l'apprentissage de la langue (orale) dont on apprend à lire et écrire le système d'écriture.

Il y a toujours au début d'apprentissage de la lecture un décalage entre ce que l'enfant est capable de comprendre quand il lit et ce qu'il est capable de comprendre quand il écoute, du moins pour les enfants dont c'est la langue maternelle.
Pour le finlandais, l'espagnol, bref les systèmes d'écriture alphabétiques ultra-réguliers, on aboutira très vite à une lecture courante, sinon fluide, et le décalage ne durera que quelques mois. Puisque le système est régulier, il n'y a qu'à saisir les correspondances graphèmes-phonèmes régulières, les seules, puisque la correspondance est ultra-régulière, quasi parfaite : un phonème = une lettre, et ensuite à automatiser cette lecture.

Le but premier de l'apprentissage de lecture pour un enfant est d'être capable de lire (= prononcer à voix haute ou dans sa tête) n'importe quelle phrase :
des phrases inintelligibles pour quiconque (car les mots n'existent pas) du type "Les basoules sibouillaient du caflope dans les radures parce qu'ils avaient des crimons et des sardettes en délite."
ou des phrases inintelligibles pour des enfants ou des non-spécialistes (car ils n'en connaissent pas les termes ou, s'ils les connaissent, parce qu'ils ne connaissent pas les concepts correspondant à ces termes) : n'importe quelle phrase d'un traité de chimie, de biologie, de philosophie, d'histoire.

Ces phrases sont des exemples extrêmes, mais cela montre bien ce que je veux dire. L'essence de l'apprentissage de la lecture, c'est de lire, pas de comprendre. Ce qui ne veut pas dire que la compréhension des textes (avec la rédaction) n'est pas le but ultime de tout l'enseignement.

Et donc l'on ne donnera pas à cet enfant à lire les phrases inintelligibles en soi ou pour lui que j'ai données. Il exercera sa capacité à lire sur des phrases et des textes qu'il peut lire et qu'il peut comprendre. L'effort passé à lire le texte au sens de prononcer les signes écrits donne l'impression de retomber dans l'ânonnement machinal, l'impression que l'on retarde abusivement ses efforts de compréhension des textes, et donc que l'on irait plus vite en donnant à l'enfant des textes plus étoffés au point de vue vocabulaire, références culturelles, syntaxes. Mais ce serait une erreur funeste que de commencer à apprendre à lire sur des textes résistants et comportant toutes les difficultés d'écriture de la langue. Seuls s'en sortiront au prix d'un long travail ceux qui auront réussi à distinguer patiemment les régularités des irrégularités d'écriture et à automatiser cette reconnaissance donc cette lecture.

Dans un système alphabétique comportant des irrégularités comme c'est le cas du français ou de l'anglais, si l'on fonctionne méthodiquement, on est obligé de suivre une progression d'abord des syllabes, des mots et de petites phrases proportionnées à la capacité de lecture (en commençant par les graphèmes réguliers) et progressivement des textes de plus en plus longs et toujours proportionnées à sa capacité de lecture, en ajoutant progressivement les graphèmes complexes et les irrégularités. Ce décalage sera réduit d'autant plus vite qu'on lui enseignera systématiquement les correspondances graphèmes-phonèmes et que son déchiffrage s'automatisera. Mais la lecture totalement courante et sans erreur de tout type de graphèmes mettra un peu plus longtemps que dans les systèmes alphabétiques réguliers.

Parallèlement à ce travail d'apprentissage de la lecture et de compréhension de textes correspondant à sa capacité de lecture, il y a tout un travail sur le langage, le vocabulaire, la compréhension, la culture qui se déroulera en parallèle à un niveau de compréhension plus élevé que ce qui est permis actuellement par les capacités de lecture des textes.

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User17706
Bon génie

Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par User17706 Mer 13 Nov 2013 - 12:54
Près de quarante feuillets, c'est trop long. La lecture d'une quarantaine de feuillets représente un investissement, en temps, que l'on est prêt à consentir si l'on a des garanties, mais pas forcément en l'absence d'icelles.

Pour literacy, «littératie» est laid; «lettrure» (ancien français) n'a aucune chance de passer dans les moeurs; «maîtrise de l'écriture et de la lecture» me paraît, quoique longuet, exact.
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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par doctor who Mer 13 Nov 2013 - 13:16
Pas lu l'article de Philippe Jovi (effectivement un peu long, et puis, tous ces préliminaires pour dézinguer les méthodes "syllabiques", je ne vois pas l'intérêt).

J'ai tout de même relevé cela :
Philippe Jovi a écrit:Alors, bien entendu, agir s'apprend. Mais tout apprentissage ne doit pas nécessairement être méthodique. Il y a aussi des apprentissages mimétiques : on apprend par imitation, on apprend en "faisant comme". Croire le contraire, croire notamment qu'un enfant ne peut apprendre à lire que par et dans une méthode, si possible "syllabique", c'est, au mieux, être victime d'une confusion conceptuelle, au pire, être manipulé idéologiquement.
Naturellement, 1) il y a des apprentissages mimétiques, 2) il y a une part de mimétisme dans des apprentissages non mimétiques, 3) il est même bon de donner à des apprentissages non mimétiques l'allure d'apprentissage mimétiques, dans une certaine mesure, et cela pour les élèves les plus jeunes.

Mais, désolé Philippe, la lecture n'est pas un apprentissage mimétique. Voir les développements de Vygotski : http://skhole.fr/2-de-piaget-%C3%A0-vygotski

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par Spinoza1670 Mer 13 Nov 2013 - 13:32
Télécharger « Bloomfield teaching children to read.doc »
Télécharger « Bloomfield teaching children to read.pdf »

A lire absolument.
Notamment sur les liens entre langue orale et langue écrite, la critique des différentes méthodes de lecture, les illusions qui conduisent à s'opposer à un enseignement systématique du décodage, les liens entre apprendre à lire et apprendre à écrire (Bloomfield critiquerait s'il les connaissait les méthodes d'écriture-lecture), les liens entre lecture et compréhension, la question de savoir s'il faut apprendre toutes les lettres avant d'apprendre à lire (Bloomfield répond oui), etc.

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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par Vudici Mer 13 Nov 2013 - 14:18
Spinoza1670 a écrit:D'un certain point de vue, Philippe Jovi a raison. Je ne peux pas répondre à l'article. Il faudrait d'abord que je le lise, mais je peux préciser rapidement et grossièrement je pense le point de vue qui est celui de mes interventions pour l'instant.

D'abord, sur le cas Boscher (et celui de l'apprentissage de la lecture) je restreins la question de la lecture aux premiers mois de l'apprentissage de la lecture.

Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).

L'articulation de la lecture (entendue en ce sens restreint) avec la compréhension doit être pensée, certes, mais le problème de la compréhension n'a pas à être opposé au problème du déchiffrage. Il faut aborder notamment l'implication de tout l'apprentissage de la langue (orale) dont on apprend à lire et écrire le système d'écriture.

Il y a toujours au début d'apprentissage de la lecture un décalage entre ce que l'enfant est capable de comprendre quand il lit et ce qu'il est capable de comprendre quand il écoute, du moins pour les enfants dont c'est la langue maternelle.
Pour le finlandais, l'espagnol, bref les systèmes d'écriture alphabétiques ultra-réguliers, on aboutira très vite à une lecture courante, sinon fluide, et le décalage ne durera que quelques mois. Puisque le système est régulier, il n'y a qu'à saisir les correspondances graphèmes-phonèmes régulières, les seules, puisque la correspondance est ultra-régulière, quasi parfaite : un phonème = une lettre, et ensuite à automatiser cette lecture.

Le but premier de l'apprentissage de lecture pour un enfant est d'être capable de lire (= prononcer à voix haute ou dans sa tête) n'importe quelle phrase :
des phrases inintelligibles pour quiconque (car les mots n'existent pas) du type "Les basoules sibouillaient du caflope dans les radures parce qu'ils avaient des crimons et des sardettes en délite."
ou des phrases inintelligibles pour des enfants ou des non-spécialistes (car ils n'en connaissent pas les termes ou, s'ils les connaissent, parce qu'ils ne connaissent pas les concepts correspondant à ces termes) : n'importe quelle phrase d'un traité de chimie, de biologie, de philosophie, d'histoire.

Ces phrases sont des exemples extrêmes, mais cela montre bien ce que je veux dire. L'essence de l'apprentissage de la lecture, c'est de lire, pas de comprendre. Ce qui ne veut pas dire que la compréhension des textes (avec la rédaction) n'est pas le but ultime de tout l'enseignement.

Et donc l'on ne donnera pas à cet enfant à lire les phrases inintelligibles en soi ou pour lui que j'ai données. Il exercera sa capacité à lire sur des phrases et des textes qu'il peut lire et qu'il peut comprendre. L'effort passé à lire le texte au sens de prononcer les signes écrits donne l'impression de retomber dans l'ânonnement machinal, l'impression que l'on retarde abusivement ses efforts de compréhension des textes, et donc que l'on irait plus vite en donnant à l'enfant des textes plus étoffés au point de vue vocabulaire, références culturelles, syntaxes. Mais ce serait une erreur funeste que de commencer à apprendre à lire sur des textes résistants et comportant toutes les difficultés d'écriture de la langue. Seuls s'en sortiront au prix d'un long travail ceux qui auront réussi à distinguer patiemment les régularités des irrégularités d'écriture et à automatiser cette reconnaissance donc cette lecture.

Dans un système alphabétique comportant des irrégularités comme c'est le cas du français ou de l'anglais, si l'on fonctionne méthodiquement, on est obligé de suivre une progression d'abord des syllabes, des mots et de petites phrases proportionnées à la capacité de lecture (en commençant par les graphèmes réguliers) et progressivement des textes de plus en plus longs et toujours proportionnées à sa capacité de lecture, en ajoutant progressivement les graphèmes complexes et les irrégularités. Ce décalage sera réduit d'autant plus vite qu'on lui enseignera systématiquement les correspondances graphèmes-phonèmes et que son déchiffrage s'automatisera. Mais la lecture totalement courante et sans erreur de tout type de graphèmes mettra un peu plus longtemps que dans les systèmes alphabétiques réguliers.

Parallèlement à ce travail d'apprentissage de la lecture et de compréhension de textes correspondant à sa capacité de lecture, il y a tout un travail sur le langage, le vocabulaire, la compréhension, la culture qui se déroulera en parallèle à un niveau de compréhension plus élevé que ce qui est permis actuellement par les capacités de lecture des textes.
Très bon résumé, que j'approuve entièrement (comment ça, tu t'en tapes, que j'approuve ou pas?). Razz

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par retraitée Mer 13 Nov 2013 - 14:25
Je ris, car mon mari, pour s'amuser, avait donné du Kant à "lire" à notre fils, qui déchiffrait parfaitement , comme tous ses copains et copines, avant la fin du CP.
Il avait lu à voix haute le passage, avant de déclarer : "Mais ça ne veut rien dire!"

Et moi, je corrige des épreuves d'imprimerie de philo, et, bien que je voie les fautes de syntaxe, d'orthographe, de ponctuation, je déclare humblement que le sens de certains articles m'échappe!
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par Sapotille Mer 13 Nov 2013 - 15:55

J'ai aussi relu le mémoire d'un neveu pour l'obtention de son Doctorat en mécanique de précision ...
J'ai pu lire, corriger le français et un peu d'orthographe ...

Mais je n'ai vraiment pas compris grand chose !!!
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par Spinoza1670 Mer 13 Nov 2013 - 16:15
retraitée a écrit:Je ris, car mon mari, pour s'amuser, avait donné du Kant à "lire" à notre fils, qui déchiffrait parfaitement , comme tous ses copains et copines, avant la fin du CP.
Il avait lu à voix haute le passage, avant de déclarer : "Mais ça ne veut rien dire!"

Et moi, je corrige des épreuves d'imprimerie de philo, et, bien que je voie les fautes de syntaxe, d'orthographe, de ponctuation, je déclare humblement que le sens de certains articles m'échappe!
Tu te rappelles de la méthode de lecture utilisée ? C'était en quelle année ?
As-tu des cahiers à scanner ? j'aimerais bien en mettre sur le blog manuels anciens.

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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par retraitée Mer 13 Nov 2013 - 16:59
C'était Daniel et Valérie, avec une maîtresse chevronnée qui faisait sa dernière année , et je peux te dire qu'ils lisaient presque tous pour Noël.

C'était en 75/76.
Je n'ai quasiment pas de cahiers, sauf mon "cahier" de Gs en maternelle.

En revanche, j'ai de nombreux devoirs de toutes disciplines, de la 6e à la Terminale. C'est intéressant en ce qui concerne, par exemple, le français et l'histoire.
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Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?" - Page 5 Empty Re: Rémi Brissiaud : "Méthode Boscher : quel expert en voudrait ?"

par Spinoza1670 Mer 13 Nov 2013 - 17:35
Merci. Très très très intéressant. Je n'ai pas encore mis cette méthode en ligne. J'ai les livrets 1 et 2. Peut-être bientôt, en tout cas le livret 2, car le 1 est toujours en vente je crois. Il serait intéressant aussi de savoir ce que les enfants avaient comme connaissance à la fin de la maternelle.

Pour les cahiers et devoirs, si tu as le temps de scanner, je mettrai en ligne sans problème. Priorité au cahier de gs. Il faut mettre les boeufs (maternelle) avant la charrue (collège).

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« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)

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par Mama Mer 13 Nov 2013 - 18:41
C'est toujours tellement idiot d'écrire "personne n'a jamais"...
J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur Smile 
Et puis une méthode n'est pas tout, tout dépend de comment l'instituteur / l'institutrice l'utilise, non ?
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par Spinoza1670 Jeu 14 Nov 2013 - 4:20
mamamanette a écrit:C'est toujours tellement idiot d'écrire "personne n'a jamais"...
J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur Smile 
Et puis une méthode n'est pas tout, tout dépend de comment l'instituteur / l'institutrice l'utilise, non ?

La citation complète de Philippe Jovi : Personne n'a jamais appris à lire avec la méthode Boscher.

Voir dans le spoiler les arguments de Philippe Jovi pour justifier cette assertion :
Ph. Jovi:

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par InvitéP2 Jeu 14 Nov 2013 - 7:11
Asha Kraken a écrit:C'est vrai que ce débat était dénué d'argumentaires scientifiques étayés et qu'il était ras les pâquerettes sans votre intervention venue à point nommé. Merci pour la condescendance...
J'ai tenté d'"élever" (tout le contraire de la con-"descendance", donc) le débat en le soustrayant à la vulgate pédagogico-psychologico-experte pour le confier à la critique philosophique. Ma question n'est pas "comment lit-on ?" ("comment apprend-on à lire ?"), qui, sans être dénuée d'intérêt, ne concerne que les thérapeutes, mais "qu'est-ce que lire ?" ("qu'est-ce qu'apprendre à lire ?"), qui est un problème conceptuel qui concerne (ou, en tout cas, devrait concerner) tous ceux qui, une fois dans leur vie, ont fait usage du verbe "lire". J'ai essayé d'attirer l'attention sur l'essence, et plus seulement sur le mécanisme, du "lire".

Spinoza1670 a écrit:Ensuite, et c'est le plus important, l'article de Flesch et celui de Bloomfield (j'ai bientôt fini) permettent de justifier ce qui est entendu en tout cas par moi par savoir lire et apprendre à lire : lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes, les syllabes écrites en syllabes orales, et les mots écrits en mots oraux ; de même que lire une partition, c'est transformer les suites de signes musicaux en suites de notes, et ce n'est que par extension de sens que l'on parle de lire au sens de comprendre (de même qu'on parle d'entendre au sens de comprendre).
Ce que vous dites, pour clair et sincère que cela soit, est extrêmement problématique. D'abord parce que cela confirme, sans ambiguïté, la baisse dramatique des exigences de l'éducation publique (j'insiste sur "publique" : l'éducation "privée", familiale ou institutionnelle est, fort heureusement, beaucoup plus exigeante). Ensuite parce que, à supposer que "lire, dans une langue alphabétique c'est transformer les signes écrits en phonèmes", on ancre chez l'élève, et au stade le plus précoce de son développement intellectuel, qui plus est, l'idée que la réussite scolaire (et, au-delà, sociale) n'est affaire que de mécanismes. Enfin parce que, dans aucune langue au monde (y compris les plus "transparentes" comme le finnois ou les langues romanes), il n'y a de stricte correspondance grapho-phonématique (il n'y a, dans ces dernières langues qu'une correspondance grapho-phonologique, mais la prosodie -par exemple, l'accent local- rend cette correspondance impossible, in fine), de sorte qu'en enseignant de tels principes aux enfants, on les condamne à un échec auquel, seuls, les meilleurs lecteurs (ceux qui saisissent globalement des entités sémantiques et non pas des séquences amorphes de signes) échapperont en faisant le chemin inverse de celui que vous leur inculquez (ils n'iront pas de la syllabe au mot, mais du mot à la syllabe). J'ajouterai que je ne connais pas de professeur de solfège qui confonde "déchiffrer un partition" avec "lire une partition".

PauvreYorick a écrit:Près de quarante feuillets, c'est trop long. La lecture d'une quarantaine de feuillets représente un investissement, en temps, que l'on est prêt à consentir si l'on a des garanties, mais pas forcément en l'absence d'icelles.
Ca me rappelle ce que me disaient certains (mauvais) élèves !

PauvreYorick a écrit:Pour literacy, «littératie» est laid; «lettrure» (ancien français) n'a aucune chance de passer dans les moeurs; «maîtrise de l'écriture et de la lecture» me paraît, quoique longuet, exact.
Literacy désigne la capacité à lire et à écrire, c'est tout.

doctor who a écrit:Pas lu l'article de Philippe Jovi (effectivement un peu long, et puis, tous ces préliminaires pour dézinguer les méthodes "syllabiques", je ne vois pas l'intérêt).
Je ne "dézingue" (sic !) pas les "méthodes syllabiques". Je fais même exactement le contraire, puisque j'explique en quoi elles sont indispensables à l'apprentissage de l'écriture, de l'orthographe, de la grammaire et, d'une manière générale, de l'approche critique de l'écrit. En revanche, je développe l'idée qu'aucune "méthode syllabique", non plus, d'ailleurs, qu'aucune méthode tout court n'a jamais appris à lire à quiconque. Encore une fois, je ne fais là que (tenter de) démêler une confusion conceptuelle, en l'occurrence entre "lire" et "décoder".

doctor who a écrit:Mais, désolé Philippe, la lecture n'est pas un apprentissage mimétique. Voir les développements de Vygotski : http://skhole.fr/2-de-piaget-%C3%A0-vygotski
Bien sûr que si. Aucune mamie, aucun papy, aucune baby sitter ayant, une seule fois, lu une histoire à un enfant, ne peut en douter. Par ailleurs, les arguments de Vygotski ne m'intéressent pas plus que ceux de Piaget pour les raisons indiquées supra.

Sapotille a écrit:J'ai aussi relu le mémoire d'un neveu pour l'obtention de son Doctorat en mécanique de précision ...
J'ai pu lire, corriger le français et un peu d'orthographe ... Mais je n'ai vraiment pas compris grand chose !!!
Vous voulez dire que vous n'avez pas tout compris. Mais justement, j'explique en quoi l'acte de lire est un acte sémantique susceptible de degrés et  non pas un processus mécanique qui fonctionne sur le principe du "tout ou rien". Quand je lis la Recherche de Proust, j'ai l'impression de comprendre. Mais je ne comprends jamais "tout". La preuve, c'est que, chaque fois que je la relis, en tout ou partie, je découvre des aspects du texte que j'ignorais. Lorsqu'on ne comprend réellement rien, on ne lit pas. Et, a fortiori, on ne risque pas de "corriger" les aspects grammaticaux des relations entre sémantèmes, puisque, pour analyser les relations entre deux termes, il faut commencer par comprendre à quels termes on a affaire.

mamamanette a écrit:J'ai appris à lire avec Boscher (rouge) en 2e année de maternelle, je lisais couramment à la fin de l'année, et je ne fréquentais pas tellement l'écrit à la maison, même si on me lisait des histoires à haute voix, je ne regardais pas les pages en même temps. Et j'étais bonne en orthographe aussi, mais comme je faisais une dictée de 5' à chaque goûter avec mamie, soit tous les jours, ce n'est pas très révélateur
Je veux bien admettre que vous avez pas appris à lire avec Boscher. Mais certainement pas grâce à la "méthode" Boscher, je veux dire la méthode syllabique qui y est développée. De toute façon, est possible d'apprendre à lire avec n'importe quel écrit présentant des propositions douées de sens pour celui qui les lit (John Steinbeck, Thomas Mann, Pierre Jakez-Hélias, pour n'en citer que quelques-uns, montrent qu'à une certaine époque, c'est surtout avec la Bible, qu'on apprenait à lire !). Or, la méthode Boscher, malgré tous ses défauts, offre, tout de même, à lire quelques phrases douées de sens. Donc ... Par ailleurs, j'explique dans mon article pourquoi je récuse le témoignage de la mémoire individuelle, en matière d'apprentissage de la lecture.
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par coindeparadis Jeu 14 Nov 2013 - 8:01
Vous semblez faire une confusion entre" lire" et "comprendre le sens de ce qu'on lit". Si cela semble indissociable dans des énoncés " comme "Anne prépare du cacao pour Rémi", cela n'est plus systématique pour des écrits demandant des références culturelles, faisant appel à un lexique plus rare ou à des concepts. Quand vous ne comprenez pas Proust, il ne s'agit pas d'un problème de lecture ! J'ai permis, grâce à ce que vous nommez "mécanismes", à des élèves de 11, 12,15 ans d'accéder enfin à la lecture. Tout simplement avec un apprentissage alphabétique. La politique qui consiste à dire que l'élève va faire émerger seul ce qui régit la langue française (ou les maths, les sciences...) est forcément élitiste car l'Ecole ne donne plus les outils nécessaires à chacun. Ce sont les familles qui vont compenser ... ou pas. Et lorsqu'on regarde de près ce que font les familles, ce n'est pas une approche socio-constructiviste qui les anime. Ce sont bien les mécanismes comme la combinatoire, l'apprentissage des tables de multiplication ou des formulaires de géométrie.

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