- *Ombre*Grand sage
Nous sommes d'accord, e-wanderer. En fait, nous réfléchissons ensemble, mais nous n'avons pas à nous convaincre de procéder de telle ou telle manière puisque, toi enseignant à l'université, NLM au lycée et moi au collège, il est normal que nous procédions différemment, avec des objectifs différents.
- e-mietteNiveau 7
*Ombre* a écrit:
Dans le supérieur, je comprends que la nuance doive être faite. Mais dans le secondaire, est-ce réellement problématique si l'on n'entre pas dans le détail du fonctionnement des relatives ? Il me semble que notre difficulté à faire progresser les élèves en grammaire et la tendance que nous avons, dans le secondaire, à nous répéter année après année tient entre autres choses à notre incapacité à penser une réelle progression des apprentissages - et pas seulement en français. En CM, ma fille fait une leçon sur les volcans et la tectonique des plaques qui me paraît bien pointue pour cet âge, et elle refait peu ou prou la même leçon en 5e, puis en 4e.
En grammaire, on se sortirait de sacrées épines du pied si on pensait une meilleure progression dans les apprentissages. On pourrait se contenter, dans le secondaire, d'identifier ad sensum les compléments de lieu, de temps, de manière... - quant à savoir si ces compléments sont circonstanciels ou autres, on entre là dans des débats tellement actuels que cela me semble relever du champ universitaire, une question destinée à des spécialistes capables d'appréhender tous les tenants et aboutissants du débat. Il n'y a qu'à voir à quel point ces débats nous occupent ici même, nous, spécialistes. Je persiste à penser que "complément de l'antécédent" est suffisant dans le secondaire et qu'il faut, pour entrer dans les nuances que tu évoques, e-wanderer, une représentation déjà assez fine de l'organisation de la langue qui ne relève plus de la formation généraliste.
- NLM76Grand Maître
L'affaire c'est qu'on fait une leçon sur les fonctions de l'adjectif (En CE1, on ne dit pas encore épithète et attribut, mais seulement qu'il se rapporte au nom, ce qui est une façon — très rigoureuse, mais adaptée au niveau des élèves — de dire la fonction. Cette leçon arrive, exprès, à un autre moment que la leçon sur les fonctions du nom. Au moment de la leçon sur les fonctions de l'adjectif, on travaille sur la règle d'accord de l'adjectif. Et ces deux leçons sont liées, parce que dire que l'adjectif est épithète de tel nom, ou attribut de tel nom, c'est préparer l'accord. "Épithète de tel nom" et "attribut de tel nom" implique "est relié sémantiquement à tel nom" et "est relié morphologiquement à tel nom", pour dire de façon compliquée "s'accorde en genre et en nombre avec tel nom". Le lien entre le nom et son adjectif a une spécificité : ce lien transmet l'accord. Inscrire dans l'esprit des élèves [adjectif—épithète de—nom] ou [adjectif—attribut de—nom] implique [adjectif—s'accorde avec—nom], faire entendre que sous le lien qu'on nomme épithète, ou le lien qu'on nomme attribut, il y a un phénomène d'accord, c'est essentiel.yranoh a écrit:Mais l'adjectif s'accorde avec le nom quelle que soit sa fonction. Je ne comprends pas ton argument sur l'orthographe pour justifier l'emploi du mot épithète pour l'adjectif.
D'ailleurs tu remarqueras qu'on a tendance à considérer que le nom attribut s'accorde avec le nom auquel il se rapporte, même si en réalité c'est un peu inexact ("Cette femme est mannequin; ces onze individualités sont devenues une équipe") : dans "attribut", en effet on entend "accord". D'ailleurs le fait que ce soit un peu inexact n'est pas bien grave, parce que la règle inexacte permet de penser à bien accorder "ils sont devenus médecins", et personne n'irait faire des accords bizarres dans les phrases que j'ai évoquées ci-dessus.
Il y a d'un côté les fonctions de l'adjectif, qui suscitent l'accord, et de l'autre, les fonctions du nom, qui ne le suscitent pas — sauf pour celle qui rapproche le nom de l'adjectif.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- NLM76Grand Maître
Voilà ce avec quoi je ne suis pas du tout d'accord. Laisser ce boulot aux sciences de l'éducation et aux didacticiens, ce n'est pas une bonne chose. Il faut laisser ce boulot aux instituteurs et professeurs du secondaire, discutant avec ceux du supérieur. Ça, c'est pour la structure. Pour le fond, il faut aussi que les instituteurs et professeurs qui font ce boulot le fassent avec rigueur. Or la rigueur prétendue qui pensent que l'analyse sémantique manque de rigueur n'est pas rigoureuse.
Congédier la grammaire scolaire telle qu'elle fut élaborée au début du XXe siècle, avec cette très pertinente distinction entre "analyse grammaticale" où l'on étudie la proposition de manière plutôt synthétique, du mot vers la proposition, et "analyse logique", où l'on étudie la phrase complexe de façon plus analytique, de la phrase vers la proposition, c'est une catastrophe.
Dire que ces outils — élaborés au contact des élèves du primaire et du secondaire, au contact des étudiants de tous âges qui doivent apprendre les langues étrangères, ou des étrangers qui doivent apprendre notre langue — ne sont pas rigoureux, et ne méritent pas de relever de la grammaire universitaire ou de la linguistique, c'est s'exposer à ce qui nous arrive : être assaillis de faux doctes qui viennent nous expliquer avec morgue que nous n'avons rien compris, parce que la linguistique universitaire a dit que...
Donc, la solution à l'essentiel de nos problèmes : redonner ses lettres de noblesse à l'analyse grammaticale et logique, y compris à l'université. Travailler rigoureusement sur l'articulation entre syntaxe et sémantique — ce que ne fait pas par exemple Le Goffic dans son §44 de sa Grammaire de la phrase française quand il écrit, à propos de "Je dis qu'il faut partir" : "On ne peut donc légitimement parler de proposition subordonnée pour la complétive objet, mais il n'existe pas de proposition principale je dis: le terme inadéquat étant bien plus "proposition" (car il n'y a rien là qui puisse s'appeler de ce nom) que "principale" (car le verbe dis est bien le verbe syntaxiquement principal de la phrase)."
En revanche dire à l'université : "Vous avez vu, fort justement, dans le secondaire, que la relative était complément de l'antécédent ; maintenant on va affiner l'analyse, et on va voir qu'elle a différentes façons de se rapporter à l'antécédent." Pourquoi pas (dans un monde idéal).
Congédier la grammaire scolaire telle qu'elle fut élaborée au début du XXe siècle, avec cette très pertinente distinction entre "analyse grammaticale" où l'on étudie la proposition de manière plutôt synthétique, du mot vers la proposition, et "analyse logique", où l'on étudie la phrase complexe de façon plus analytique, de la phrase vers la proposition, c'est une catastrophe.
Dire que ces outils — élaborés au contact des élèves du primaire et du secondaire, au contact des étudiants de tous âges qui doivent apprendre les langues étrangères, ou des étrangers qui doivent apprendre notre langue — ne sont pas rigoureux, et ne méritent pas de relever de la grammaire universitaire ou de la linguistique, c'est s'exposer à ce qui nous arrive : être assaillis de faux doctes qui viennent nous expliquer avec morgue que nous n'avons rien compris, parce que la linguistique universitaire a dit que...
Donc, la solution à l'essentiel de nos problèmes : redonner ses lettres de noblesse à l'analyse grammaticale et logique, y compris à l'université. Travailler rigoureusement sur l'articulation entre syntaxe et sémantique — ce que ne fait pas par exemple Le Goffic dans son §44 de sa Grammaire de la phrase française quand il écrit, à propos de "Je dis qu'il faut partir" : "On ne peut donc légitimement parler de proposition subordonnée pour la complétive objet, mais il n'existe pas de proposition principale je dis: le terme inadéquat étant bien plus "proposition" (car il n'y a rien là qui puisse s'appeler de ce nom) que "principale" (car le verbe dis est bien le verbe syntaxiquement principal de la phrase)."
En revanche dire à l'université : "Vous avez vu, fort justement, dans le secondaire, que la relative était complément de l'antécédent ; maintenant on va affiner l'analyse, et on va voir qu'elle a différentes façons de se rapporter à l'antécédent." Pourquoi pas (dans un monde idéal).
e-Wanderer a écrit:
J'ai toujours dit également que mon travail à moi n'était pas de concevoir une grammaire de collège : ça, c'est le boulot des sciences de l'éducation et des didacticiens. Je répondais juste à NLM76 parce qu'il me citait dans son message initial, et en disant quelle méthode d'analyse a ma préférence dans l'absolu. J'ai aussi signalé quelles confusions me semblaient les plus fréquentes, j'ai expliqué comment j'y remédie, mais je n'ai pas écrit que cette méthode est forcément universelle et valable au niveau collège (peut-être l'est-elle, peut-être pas : je ne suis pas compétent pour en juger, n'ayant jamais exercé à ce niveau).
- Spoiler:
- Sans doute avec toi cela marche-t-il plutôt bien. Mais ce que je constate avec les étudiants en lettres, depuis au moins les années 1990, c'est qu'ils sont totalement largués. Dans les années 1990, quand je passais mon CAPES, j'ai bien vu que j'étais bien meilleur en grammaire que la plupart des candidats, mais moins bon que les latinistes, et en gros, les normaliens, alors que je sortais d'une licence de sciences économiques, et que mes lacunes étaient nombreuses, que la structuration de ma grammaire (personne ne m'avait appris l'analyse grammaticale et l'analyse logique : dans les années 1970, en primaire, je faisais de l'analyse par groupes; dans les années 1980, au collège, des arbres distributionalistes) m'empêchait d'accéder aux langues à cas.
Ensuite, dans les années 2000, grâce à Cécile Revéret j'ai compris que le complément d'objet direct n'était pas seulement celui qui était lié fortement au verbe, celui qui pouvait se soumettre à tel ou tel test, mais que c'était l'objet de l'action exprimée par le verbe, et j'ai commencé à être bon en latin et en grec. Dans les années 2010-2020, il m'est arrivé d'enseigner à la fac l'ancien français, de corriger les copies de grammaire de CAPES. Et ce que j'ai vu, c'est un délabrement généralisé, où les étudiants de L3 confondent allègrement préposition, conjonction et article, où l'immense majorité des candidats au CAPES confondent absolument tout, mais considèrent tous, sans exception, que pour repérer une circonstancielle, il faut vérifier si elle est déplaçable.
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- SisypheHabitué du forum
Existe t-il un usage juridique de l'imparfait ? J'ai entendu un procureur à la radio expliquer le déroulement d'un acte criminel. El là où j'aurais utilisé le passé simple, le procureur utilisait l'imparfait. Ce qui donnait quelque chose comme : "L'individu frappait un coup sur le crâne d'une des victime, se retournait et s'apprêtait à faire sur une autre quand une première sommation des forces polices l'arrêtait. Il saisissait alors un couteau et prenait en otage un individu..." Ce ne sont pas les phrases exactes mais vous voyez l'idée. Pour parler d'actions soudaines et se déroulant une fois, cette personne utilisait l'imparfait et je me suis demandée si c'était ainsi qu'on devait rédiger des rapports judiciaires et s'il existait un usage spécifique de l'imparfait. Pouvez-vous m'éclairer ?
- EsclarmondeNiveau 5
N'est-ce pas ce que d'aucuns appellent l'imparfait narratif (ou historique) ? "C'est l'indication historique qui rend possible cet emploi de l'imparfait : le fait est envisagé de l'intérieur, dans son déroulement, à la manière d'un arrêt sur image." La Grammaire méthodique du français, que je cite, donne comme exemple "Le 1er septembre 1939, les troupes allemandes envahissaient la Pologne". D'un lointain souvenir de fac, j'ai retenu cet autre exemple : "A 21h32, la bombe explosait."Sisyphe a écrit:Existe t-il un usage juridique de l'imparfait ? J'ai entendu un procureur à la radio expliquer le déroulement d'un acte criminel. El là où j'aurais utilisé le passé simple, le procureur utilisait l'imparfait. Ce qui donnait quelque chose comme : "L'individu frappait un coup sur le crâne d'une des victime, se retournait et s'apprêtait à faire sur une autre quand une première sommation des forces polices l'arrêtait. Il saisissait alors un couteau et prenait en otage un individu..." Ce ne sont pas les phrases exactes mais vous voyez l'idée. Pour parler d'actions soudaines et se déroulant une fois, cette personne utilisait l'imparfait et je me suis demandée si c'était ainsi qu'on devait rédiger des rapports judiciaires et s'il existait un usage spécifique de l'imparfait. Pouvez-vous m'éclairer ?
- SomniumNiveau 5
^ Oui, c'est une sorte d'imparfait de narration, et en effet il est utilisé par les magistrats pour rédiger leurs actes dès qu'il y a des faits à dérouler.
Autre question pour rebondir sur les discussions au sujet des subordonnées relatives : y a-t-il une dénomination particulière pour les PSR séparées de leur antécédent par un verbe? Exemple entendu à la radio : "Des chronomètres sont en place qui permettront de mesurer exactement le temps de parole utilisé par chacun des deux candidats." Il me semble que l'effet produit est particulier, me trompé-je? (ici : sens final de la PSR).
Autre question pour rebondir sur les discussions au sujet des subordonnées relatives : y a-t-il une dénomination particulière pour les PSR séparées de leur antécédent par un verbe? Exemple entendu à la radio : "Des chronomètres sont en place qui permettront de mesurer exactement le temps de parole utilisé par chacun des deux candidats." Il me semble que l'effet produit est particulier, me trompé-je? (ici : sens final de la PSR).
- NLM76Grand Maître
Je pense qu'il y aurait vraiment sens final si la subordonnée était au subjonctif. Dans ta phrase, tu mets point-virgule "il", et c'est quasi pareil.
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- yranohHabitué du forum
J'aime bien ratiociner sur les "quasi pareils" alors voilà ce que j'entends :
- Par rapport à la proposition conjointe (qui serait franchement moche), la relative ne porte plus tant sur les chronomètres que sur leur mise en place (la mise en place de chronometres permettra...).
- Par rapport à la parataxe : la relative fait entendre l'intentionnalité (de ceux qui les ont mis en place), là où la parataxe (ils permettront...) fait entendre le point de vue de l'énonciateur (ce que je dis ne fonctionne que si l'enonciateur et l'agent de la mise en place ne sont pas les mêmes). Donc d'accord avec toi sur le sens final, mais je pense qu'il vient plus de la relative, qui serait une explicative ici, entre virgules, que de sa disjonction.
- Par rapport à la proposition conjointe (qui serait franchement moche), la relative ne porte plus tant sur les chronomètres que sur leur mise en place (la mise en place de chronometres permettra...).
- Par rapport à la parataxe : la relative fait entendre l'intentionnalité (de ceux qui les ont mis en place), là où la parataxe (ils permettront...) fait entendre le point de vue de l'énonciateur (ce que je dis ne fonctionne que si l'enonciateur et l'agent de la mise en place ne sont pas les mêmes). Donc d'accord avec toi sur le sens final, mais je pense qu'il vient plus de la relative, qui serait une explicative ici, entre virgules, que de sa disjonction.
- NLM76Grand Maître
Peut-être. Mais dans ce cas précis, le sens serait plus consécutif que final.
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- NLM76Grand Maître
Je réfléchis à la question de "après que"+ indicatif.
En fait, si on regarde les circonstancielles temporelles, en fonction des conjonctions :
Si c'était l'analogie avec "avant que" qui avait contaminé "après que", pourquoi n'a-t-elle pas contaminé dès que, depuis que ? Peut-être la symétrie "avant/après" est-elle plus grande ? Peu convaincant.
Il me semble qu'il faut considérer aussi autre chose que le mode du verbe : son aspect. Qu'en est-il de l'emploi des temps simples et des temps composés ?
Après que tu partis, partais, partiras, partes, partisses, partirais ne me paraissent pas tellement possibles. Autrement dit, si la langue tend à dire "après que tu sois partie", en concurrence avec "après que tu es partie", alors que même dans la langue relâchée, elle n'envisage pas de dire "après que tu partes" (?), ce serait parce que le temps composé, même au subjonctif, permettrait de marquer l'accompli inhérent à l'idée contenu dans "après que".
D'autre part, on ne peut quand même pas dire "depuis que tu sois partie", même dans une langue relâchée. Ne pourrait-on pas penser que dans "après que", il y a davantage de détachement, dans la mesure où le fait évoqué dans la temporelle est davantage mis en retrait, détaché, écarté par rapport au propos principal de la phrase ? Autrement dit, "après que tu sois/es partie" exclut le moment où elle est partie: la principale concerne ce qui vient après, à l'exclusion du moment précis où elle part ; "depuis que tu es partie" inclut le moment du départ ?
Ou alors il y aurait une nuance supplémentaire dans "après que tu sois partie" : lien de cause à conséquence ?
A creuser. En tout cas, la faute "après que tu sois partie" ne me semble pas être seulement une faute.
Une autre pièce au dossier : "depuis qu'elle était partie" me paraît naturel ; mais "après qu'elle était partie", beaucoup moins. "Après qu'elle fut partie" ou "qu'elle fût partie", si on accepte la tendance au subjonctif, me paraissent beaucoup plus vraisemblables.
En fait, si on regarde les circonstancielles temporelles, en fonction des conjonctions :
- Les pseudo-conjonctions "au moment où", "le jour que"... : + indicatif.
- quand, lorsque, pendant, durant : + indicatif
- avant que, jusqu'à ce que : + subjonctif
- dès que, depuis que : toujours + indicatif, même dans la langue la plus relâchée.
- mais après que + indicatif dans la langue tenue (ou puriste ?), + subjonctif dans la langue courante.
Si c'était l'analogie avec "avant que" qui avait contaminé "après que", pourquoi n'a-t-elle pas contaminé dès que, depuis que ? Peut-être la symétrie "avant/après" est-elle plus grande ? Peu convaincant.
Il me semble qu'il faut considérer aussi autre chose que le mode du verbe : son aspect. Qu'en est-il de l'emploi des temps simples et des temps composés ?
- quand, lorsque, dès que + temps simples ou composés de l'indicatif
- pendant que, durant que + temps simples de l'indicatif
- avant que, jusqu'à ce que + temps simples ou composés du subjonctif
- depuis que + temps composés de l'indicatif (les temps simples sont possibles, mais rarement). Pas de futur.
- après que + temps composés de l'indicatif ou du subjonctif, selon le niveau de langue.
Après que tu partis, partais, partiras, partes, partisses, partirais ne me paraissent pas tellement possibles. Autrement dit, si la langue tend à dire "après que tu sois partie", en concurrence avec "après que tu es partie", alors que même dans la langue relâchée, elle n'envisage pas de dire "après que tu partes" (?), ce serait parce que le temps composé, même au subjonctif, permettrait de marquer l'accompli inhérent à l'idée contenu dans "après que".
D'autre part, on ne peut quand même pas dire "depuis que tu sois partie", même dans une langue relâchée. Ne pourrait-on pas penser que dans "après que", il y a davantage de détachement, dans la mesure où le fait évoqué dans la temporelle est davantage mis en retrait, détaché, écarté par rapport au propos principal de la phrase ? Autrement dit, "après que tu sois/es partie" exclut le moment où elle est partie: la principale concerne ce qui vient après, à l'exclusion du moment précis où elle part ; "depuis que tu es partie" inclut le moment du départ ?
Ou alors il y aurait une nuance supplémentaire dans "après que tu sois partie" : lien de cause à conséquence ?
A creuser. En tout cas, la faute "après que tu sois partie" ne me semble pas être seulement une faute.
Une autre pièce au dossier : "depuis qu'elle était partie" me paraît naturel ; mais "après qu'elle était partie", beaucoup moins. "Après qu'elle fut partie" ou "qu'elle fût partie", si on accepte la tendance au subjonctif, me paraissent beaucoup plus vraisemblables.
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- AsarteLilithBon génie
Me voilà bien embêtée et je me tourne vers Néo: pour la subordonnée relative, la terminologie officielle, le Bescherelle collège, mon manuel parlent de fonction épithète. Mais le manuel TDL 5e ( et son cahier Labo de grammaire) ainsi que mon Hamon et Grammont parlent de complément de l'antécédent.
Jusqu'ici, j'enseignais complément de l'antécédent. Mais vos discussion, ainsi que cette f......e terminologie officielle, me font réfléchir : que dois-je enseigner comme fonction de la relative ?
Jusqu'ici, j'enseignais complément de l'antécédent. Mais vos discussion, ainsi que cette f......e terminologie officielle, me font réfléchir : que dois-je enseigner comme fonction de la relative ?
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- AphrodissiaMonarque
Complément de l'antécédent!AsarteLilith a écrit:Me voilà bien embêtée et je me tourne vers Néo: pour la subordonnée relative, la terminologie officielle, le Bescherelle collège, mon manuel parlent de fonction épithète. Mais le manuel TDL 5e ( et son cahier Labo de grammaire) ainsi que mon Hamon et Grammont parlent de complément de l'antécédent.
Jusqu'ici, j'enseignais complément de l'antécédent. Mais vos discussion, ainsi que cette f......e terminologie officielle, me font réfléchir : que dois-je enseigner comme fonction de la relative ?
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Hominis mens discendo alitur et cogitando. (Cicéron)
Et puis les steaks ? Ça se rate toujours comme la tragédie. Mais à des degrés différents. (M. Duras)
- *Ombre*Grand sage
Comme on le disait plus haut, au collège, complément de l'antécédent, c'est suffisant. Il faut bien laisser un peu de boulot à nos collègues par la suite.
- NLM76Grand Maître
Très drôle.*Ombre* a écrit:Comme on le disait plus haut, au collège, complément de l'antécédent, c'est suffisant. Il faut bien laisser un peu de boulot à nos collègues par la suite.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- stanleymilgramNiveau 9
Même souci qu' AsarteLilith...
Un élève qui veut réviser sans s'appuyer sur mes cours (brevet) sur Youtube, notamment, ne doit rien y comprendre ...
Il peut même considérer que je lui enseigne n'importe quoi...
Epithète (comme fonction de la prop sub rel) sera donc la nouvelle appellation (de fonction) à la mode?
On dit toujours "apposition" pour la fonction de l'adjectif? (J'aimais bien : épithète détachée).
Merci !
Un élève qui veut réviser sans s'appuyer sur mes cours (brevet) sur Youtube, notamment, ne doit rien y comprendre ...
Il peut même considérer que je lui enseigne n'importe quoi...
Epithète (comme fonction de la prop sub rel) sera donc la nouvelle appellation (de fonction) à la mode?
On dit toujours "apposition" pour la fonction de l'adjectif? (J'aimais bien : épithète détachée).
Merci !
- *Ombre*Grand sage
Pour ne pas être mis en difficulté en classe, je pense qu'il faut veiller à un certains nombres de points :
1°) Être très clair avec ses choix pédagogiques - parce que face à ces analyses concurrentes, parfois contradictoires, à un moment, il faut faire des choix - en sachant pourquoi on les a faits. Ce qui suppose d'avoir bien étudié la question, ses tenants et aboutissants. Je serais parfaitement en mesure d'expliquer (aux inspecteurs, ou aux élèves) pourquoi je refuse d'appliquer la nomenclature semi-officielle et de dire que Zoé est "dans sa voiture" est un COI.
2°) Toujours parler vrai aux élèves. Surtout que certains ont peut-être appris différemment de ce que j'enseigne avant de tomber sur moi. Je dis en général qu'ils peuvent continuer à faire comme avant, si cela leur convient, ou adopter l'approche que je leur propose. Par exemple, je ne parle jamais de COS, en classe. Certains élèves en ont pourtant entendu parler. Je leur dis : Pas de problème. En fait, les COS sont toujours des COI. Si tu dis COS, je compterai bon. Mais comme je ne vois pas ce que ça apporte, je dis COI, c'est la même chose en fait. Je n'hésite pas à dire, avec les plus grands (j'évite d'embrouiller les petits) qu'il existe plusieurs analyses, mais que, comme ils ne sont pas des spécialistes, on va faire clair et simple, mais qu'ils trouveront peut-être ailleurs des analyses plus poussées.
Avec "complément de l'antécédent", tu ne dis jamais de bêtise quant à la fonction de la relative. Plus tard, il conviendra d'approfondir, mais chaque chose en son temps. Ça, les élèves peuvent parfaitement l'entendre.
1°) Être très clair avec ses choix pédagogiques - parce que face à ces analyses concurrentes, parfois contradictoires, à un moment, il faut faire des choix - en sachant pourquoi on les a faits. Ce qui suppose d'avoir bien étudié la question, ses tenants et aboutissants. Je serais parfaitement en mesure d'expliquer (aux inspecteurs, ou aux élèves) pourquoi je refuse d'appliquer la nomenclature semi-officielle et de dire que Zoé est "dans sa voiture" est un COI.
2°) Toujours parler vrai aux élèves. Surtout que certains ont peut-être appris différemment de ce que j'enseigne avant de tomber sur moi. Je dis en général qu'ils peuvent continuer à faire comme avant, si cela leur convient, ou adopter l'approche que je leur propose. Par exemple, je ne parle jamais de COS, en classe. Certains élèves en ont pourtant entendu parler. Je leur dis : Pas de problème. En fait, les COS sont toujours des COI. Si tu dis COS, je compterai bon. Mais comme je ne vois pas ce que ça apporte, je dis COI, c'est la même chose en fait. Je n'hésite pas à dire, avec les plus grands (j'évite d'embrouiller les petits) qu'il existe plusieurs analyses, mais que, comme ils ne sont pas des spécialistes, on va faire clair et simple, mais qu'ils trouveront peut-être ailleurs des analyses plus poussées.
Avec "complément de l'antécédent", tu ne dis jamais de bêtise quant à la fonction de la relative. Plus tard, il conviendra d'approfondir, mais chaque chose en son temps. Ça, les élèves peuvent parfaitement l'entendre.
- IllianeExpert
Pour ma part, je dis à mes élèves qu'on peut parler de complément de l'antécédent ou d'épithète liée/détachée... mais ce sont des élèves de lycée. De toute façon, j'ai l'impression que chaque année c'est tabula rasa, ils n'ont aucun souvenir ou presque de ce qu'ils ont fait les années précédentes, donc que j'adopte une terminologie ou une autre cela ne leur fait ni chaud ni froid !
- stanleymilgramNiveau 9
Illiane a écrit:Pour ma part, je dis à mes élèves qu'on peut parler de complément de l'antécédent ou d'épithète liée/détachée... mais ce sont des élèves de lycée. De toute façon, j'ai l'impression que chaque année c'est tabula rasa, ils n'ont aucun souvenir ou presque de ce qu'ils ont fait les années précédentes, donc que j'adopte une terminologie ou une autre cela ne leur fait ni chaud ni froid !
Merci à Ombre et aux autres contributeurs
La terminologie n'engage donc que celui ou celle qui tente de l'enseigner .
Je récidive , svp :
Au lycée ou collège , on dit toujours "apposition" pour la fonction de l'adjectif?
(J'aimais bien : épithète détachée).
- IllianeExpert
Cela fait longtemps que je ne me suis pas penchée sur la question, mais pour ma part j'ai plutôt tendance à utiliser apposition pour un nom ou un groupe nominal ; pour l'adjectif je parle effectivement d'épithète détachée. Il me semble une fois de plus que les grammairiens ne sont pas tous d'accord sur la question...
- *Ombre*Grand sage
J'utilise apposition, là encore, après mûre réflexion.
D'abord parce que toutes les grammaires ne sont pas d'accord pour réserver ce terme aux constructions nominales.
Le point commun entre toutes les analyses, c'est que l'apposition est une construction détachée relevant de la prédication seconde. Elles ont le plus souvent une nuance explicative ou circonstancielle en général. Si on s'en tient à cette définition, qui fait l'unanimité, je ne vois pas de raison d'en exclure l'adjectif.
L'appellation épithète détachée me semble d'autant moins logique que l'apposition est l'équivalent elliptique non pas d'une épithète, mais d'un attribut : Mon père, greffier au tribunal, m'emmenait avec lui à de nombreuses audiences = Première info : Mon père m'emmenait avec lui à de nombreuses audiences + deuxième info (prédication seconde, qui ne prend pas la forme d'une proposition complète) : Mon père [était] greffier au tribunal.
D'abord parce que toutes les grammaires ne sont pas d'accord pour réserver ce terme aux constructions nominales.
Le point commun entre toutes les analyses, c'est que l'apposition est une construction détachée relevant de la prédication seconde. Elles ont le plus souvent une nuance explicative ou circonstancielle en général. Si on s'en tient à cette définition, qui fait l'unanimité, je ne vois pas de raison d'en exclure l'adjectif.
L'appellation épithète détachée me semble d'autant moins logique que l'apposition est l'équivalent elliptique non pas d'une épithète, mais d'un attribut : Mon père, greffier au tribunal, m'emmenait avec lui à de nombreuses audiences = Première info : Mon père m'emmenait avec lui à de nombreuses audiences + deuxième info (prédication seconde, qui ne prend pas la forme d'une proposition complète) : Mon père [était] greffier au tribunal.
- AsarteLilithBon génie
J'utilise les deux. Un peu comme impérative /injonctive pour les types de phrase...
Je rejoins Ombre pour la question de la dénomination: par exemple, j'explique à mes 3e, à qui j'expliquais que exclamative était un type de phrase il y a deux ans, qu'à présent c'est une forme. Par contre, j'explique également que le conditionnel est un temps et un mode, que pour faire plus simple, je dis "mode" et je le distingue de l'indicatif.
C'est assez pénible d'avoir des approches de la grammaire aussi variées (bien qu'intéressant !), et une terminologie qui n'est pas toujours claire (ah le fameux complément essentiel de lieu qui devient un COI !).
Je rejoins Ombre pour la question de la dénomination: par exemple, j'explique à mes 3e, à qui j'expliquais que exclamative était un type de phrase il y a deux ans, qu'à présent c'est une forme. Par contre, j'explique également que le conditionnel est un temps et un mode, que pour faire plus simple, je dis "mode" et je le distingue de l'indicatif.
C'est assez pénible d'avoir des approches de la grammaire aussi variées (bien qu'intéressant !), et une terminologie qui n'est pas toujours claire (ah le fameux complément essentiel de lieu qui devient un COI !).
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- trompettemarineMonarque
Pas toujours, ils peuvent être COD dans mon souvenir. mais bon, COI et COD suffisent bien. La place des mots et des groupes est une question très complexe et passionnante (j'aimerais avoir le temps un jour de m'y pencher très sérieusement).*Ombre* a écrit:Pour ne pas être mis en difficulté en classe, je pense qu'il faut veiller à un certains nombres de points :
1°) Être très clair avec ses choix pédagogiques - parce que face à ces analyses concurrentes, parfois contradictoires, à un moment, il faut faire des choix - en sachant pourquoi on les a faits. Ce qui suppose d'avoir bien étudié la question, ses tenants et aboutissants. Je serais parfaitement en mesure d'expliquer (aux inspecteurs, ou aux élèves) pourquoi je refuse d'appliquer la nomenclature semi-officielle et de dire que Zoé est "dans sa voiture" est un COI.
2°) Toujours parler vrai aux élèves. Surtout que certains ont peut-être appris différemment de ce que j'enseigne avant de tomber sur moi. Je dis en général qu'ils peuvent continuer à faire comme avant, si cela leur convient, ou adopter l'approche que je leur propose. Par exemple, je ne parle jamais de COS, en classe. Certains élèves en ont pourtant entendu parler. Je leur dis : Pas de problème. En fait, les COS sont toujours des COI. Si tu dis COS, je compterai bon. Mais comme je ne vois pas ce que ça apporte, je dis COI, c'est la même chose en fait. Je n'hésite pas à dire, avec les plus grands (j'évite d'embrouiller les petits) qu'il existe plusieurs analyses, mais que, comme ils ne sont pas des spécialistes, on va faire clair et simple, mais qu'ils trouveront peut-être ailleurs des analyses plus poussées.
Avec "complément de l'antécédent", tu ne dis jamais de bêtise quant à la fonction de la relative. Plus tard, il conviendra d'approfondir, mais chaque chose en son temps. Ça, les élèves peuvent parfaitement l'entendre.
- *Ombre*Grand sage
Même dans des constructions comme : obliger qqn à qqch, je ne vois pas pourquoi on considérerait que le COS serait le COD.
Je ne vois pas à quels exemples tu penses.
Je ne vois pas à quels exemples tu penses.
- yranohHabitué du forum
J'avais l'impression que le COS avait presque disparu.
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