- uneodysséeNeoprof expérimenté
Et moi qui menace mes élèves des pires supplices quand ils trouvent un complément d’objet après être !
- trompettemarineMonarque
Ah si seulement le locatif existait en français.
- slynopHabitué du forum
Bonsoir à tous,
Petite question: dans le livre de François Chamoux La civilisation hellénistique, l'auteur emploie la formulation suivante à propos d'Aristarque de Samothrace "le nom de ce dernier a passé dans notre langue pour désigner un critique particulièrement rigoureux".
Pourquoi "a passé " et non "est passé " ?
Merci à vous d'avance pour l'éclairage
Slynop
Petite question: dans le livre de François Chamoux La civilisation hellénistique, l'auteur emploie la formulation suivante à propos d'Aristarque de Samothrace "le nom de ce dernier a passé dans notre langue pour désigner un critique particulièrement rigoureux".
Pourquoi "a passé " et non "est passé " ?
Merci à vous d'avance pour l'éclairage
Slynop
_________________
"C'est pas moi qu'explique mal, c'est les autres qui sont cons !", Perceval dans Kaamelot.
- LavidalocaNiveau 3
slynop a écrit:Bonsoir à tous,
Petite question: dans le livre de François Chamoux La civilisation hellénistique, l'auteur emploie la formulation suivante à propos d'Aristarque de Samothrace "le nom de ce dernier a passé dans notre langue pour désigner un critique particulièrement rigoureux".
Pourquoi "a passé " et non "est passé " ?
Merci à vous d'avance pour l'éclairage
Slynop
Si c'est comme en italien, il y a une petite nuance possible selon la capacité d'action symbolique dont on veut pourvoir le sujet.... Je me souviens de mes multiples exercices où selon la situation, on devait dire "è cominciato" ou "ha cominciato" (un peu comme chez nous, on peut dire que le film est commencé ou a commencé, mais pour expliquer la nuance à un non-natif, bonjour )... Et en plus il ne fallait pas confondre avec "iniziato", qui veut dire commencer également. Bref. Une poignée de verbes que j'ai appris à soigneusement contourner et qui ont au moins eu le mérite de me faire cultiver la périphrase.
Je crois qu'il y avait la même subtilité en portugais, mais j'ai pris soin de ne pas arriver jusqu'à ce chapitre.
Sauf grosse bêtise (très possible) de ma part, je pense donc que des nuances de sens existent encore selon l'auxiliaire qui précède certains participes , pour y ajouter ou non une dimension active. Dans la phrase citée, cela donne l'idée que des gens ont fait la démarche volontaire d'utiliser le nom mentionné, en le personnifiant, et que ce n'est pas juste une évolution passive de la langue au fil des générations.
Je paye l'apéro si je suis hors sujet.
- LavidalocaNiveau 3
(mon copain roumain me dit que c'est pareil chez lui... Ça ne t'avance pas mais je me.coucherai moins bête)
- IphigénieProphète
Je dirais plus simplement que « avoir » marque l’acte de passer, alors que « être » signale un état .
« Le mot a passé dans notre langue »: c’est le fait accompli.
« le mot est passé en français » c’est l’état constaté .
« Le mot a passé dans notre langue »: c’est le fait accompli.
« le mot est passé en français » c’est l’état constaté .
- yranohHabitué du forum
Je ne suis pas sûr de moi, mais je crois que c'est à la fois le niveau de langue et l'appel de "pour" qui a fait préférer cette solution. J'aurais naturellement fait pareil, je crois. L'explication de Lavidaloca est sans doute juste dans certains cas mais pas ici, il me semble.
- Hervé HervéFidèle du forum
On considère traditionnellement que, lorsqu’il est conjugué avec l’auxiliaire Avoir, le verbe Passer exprime l’action, et que, avec l’auxiliaire Être, il exprime son résultat : l’hiver a passé bien vite, l’hiver est maintenant passé. Cependant, l’usage actuel tend à faire prévaloir l’auxiliaire Être dans les deux cas.
https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9P0853
_________________
« Et je demande aux économistes politiques, aux moralistes, s’ils ont déjà calculé le nombre d’individus qu’il est nécessaire de condamner à la misère, à un travail disproportionné, au découragement, à l’infantilisation, à une ignorance crapuleuse, à une détresse invincible, à la pénurie absolue, pour produire un riche ? » (Almeida Garrett cité parJosé Saramago).
- IphigénieProphète
Et donc selon l’académie nous jouons les aristarques en voulant les distinguer…Hervé Hervé a écrit:On considère traditionnellement que, lorsqu’il est conjugué avec l’auxiliaire Avoir, le verbe Passer exprime l’action, et que, avec l’auxiliaire Être, il exprime son résultat : l’hiver a passé bien vite, l’hiver est maintenant passé. Cependant, l’usage actuel tend à faire prévaloir l’auxiliaire Être dans les deux cas.
https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9P0853
( jamais entendu auparavant pour ma part: c’est surtout cela qui me marque dans la remarque de Chamoux à vrai dire!)
- RogerMartinBon génie
Bref, formulation pédante d'une remarque improbable, car je n'ai jamais entendu mes potes hellénistes parler d'un aristarque des temps modernes... Ou alors c'était en français du XVIIe siècle ?
(Pardon mais je suis en train de relire pour une revue un article ampoulé complètement creux et je n'en peux plus des préciosités. Du fond, du fond à la fin !!!)
(Pardon mais je suis en train de relire pour une revue un article ampoulé complètement creux et je n'en peux plus des préciosités. Du fond, du fond à la fin !!!)
_________________
Yo, salut ma bande ! disait toujours le Samouraï.
I User5899.
User 17706 s'est retiré à Helsingør.
Strange how paranoia can link up with reality now and then.
- NLM76Grand Maître
Ah, en fait, cela existait bel et bien au XIXe. Vois l'article du TLF que donne le CNRTL.
- LavidalocaNiveau 3
RogerMartin a écrit:Bref, formulation pédante d'une remarque improbable, car je n'ai jamais entendu mes potes hellénistes parler d'un aristarque des temps modernes... Ou alors c'était en français du XVIIe siècle ?
(Pardon mais je suis en train de relire pour une revue un article ampoulé complètement creux et je n'en peux plus des préciosités. Du fond, du fond à la fin !!!)
Ah si, cette expression je l'ai déjà entendue !!
(Mais ceux qui l'employaient sont depuis décédés. Ou bien ont décédé, c'est comme tu veux !)
- LogonautaNiveau 4
Bonjour à tous,
Comment justifier auprès des élèves qu’une proposition coordonnée ne peut pas avoir de fonction ?
J’essaie d’enseigner la grammaire en utilisant une approche sémantique. Mes élèves sont donc habitués à identifier des fonctions en posant des questions à partir d’un verbe conjugué.
Dans l’exemple «Irène m’a rappelé, car j’avais oublié de répondre à sa demande.», beaucoup de mes élèves ont analysé la proposition en gras comme un CC de cause de la première proposition. Analyse que j’ai contredite en avançant que seule une proposition subordonnée pouvait avoir une fonction dans sa principale. J’ai pourtant senti que mon argumentation leur a semblé quelque peu arbitraire, d’autant qu’il suffirait de substituer un «parce que» au «car» pour leur donner raison.
Y aurait-il d’autres arguments à avancer pour les convaincre ?
Merci
Comment justifier auprès des élèves qu’une proposition coordonnée ne peut pas avoir de fonction ?
J’essaie d’enseigner la grammaire en utilisant une approche sémantique. Mes élèves sont donc habitués à identifier des fonctions en posant des questions à partir d’un verbe conjugué.
Dans l’exemple «Irène m’a rappelé, car j’avais oublié de répondre à sa demande.», beaucoup de mes élèves ont analysé la proposition en gras comme un CC de cause de la première proposition. Analyse que j’ai contredite en avançant que seule une proposition subordonnée pouvait avoir une fonction dans sa principale. J’ai pourtant senti que mon argumentation leur a semblé quelque peu arbitraire, d’autant qu’il suffirait de substituer un «parce que» au «car» pour leur donner raison.
Y aurait-il d’autres arguments à avancer pour les convaincre ?
Merci
_________________
Adore ici l’écho qu’adorait Pythagore
- henrietteMédiateur
Je ne sais pas si ça répond à ta question mais voilà comment je procède.
Je commence par bien expliquer ce que veut dire être indépendante pour une proposition. Une proposition indépendante se suffit à elle-même : elle ne dépend de personne et personne ne dépend d'elle. Elle n'a donc pas de fonction car elle ne complète rien et n'est complétée par rien.
Une proposition indépendante forme une phrase simple : un seul verbe conjugué donc une seule proposition.
Il est possible toutefois de mettre deux propositions indépendantes dans une seule phrase quand on veut exprimer un lien logique entre deux propos sans pour autant en subordonner l'une à l'autre.
Pour faire cela, il y a deux façons de procéder :
- soit on les juxtapose et le lien logique est alors implicite : je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu
- soit on les coordonne et le lien logique est explicité par la conjonction de coordination : je suis venu et j'ai vu donc j'ai vaincu.
Mais dans un cas comme dans l'autre, elles resteront toujours indépendantes grammaticalement parlant, et n'auront donc pas de fonction grammaticale l'une par rapport à l'autre.
Je commence par bien expliquer ce que veut dire être indépendante pour une proposition. Une proposition indépendante se suffit à elle-même : elle ne dépend de personne et personne ne dépend d'elle. Elle n'a donc pas de fonction car elle ne complète rien et n'est complétée par rien.
Une proposition indépendante forme une phrase simple : un seul verbe conjugué donc une seule proposition.
Il est possible toutefois de mettre deux propositions indépendantes dans une seule phrase quand on veut exprimer un lien logique entre deux propos sans pour autant en subordonner l'une à l'autre.
Pour faire cela, il y a deux façons de procéder :
- soit on les juxtapose et le lien logique est alors implicite : je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu
- soit on les coordonne et le lien logique est explicité par la conjonction de coordination : je suis venu et j'ai vu donc j'ai vaincu.
Mais dans un cas comme dans l'autre, elles resteront toujours indépendantes grammaticalement parlant, et n'auront donc pas de fonction grammaticale l'une par rapport à l'autre.
_________________
"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- LogonautaNiveau 4
Merci Henriette pour ta réponse. J’explique déjà cela à mes élèves, mais ça ne me satisfait pas vraiment, et eux non plus. Quelle différence fondamentale entre :
_ Irène m’a rappelé, car j’avais oublié de répondre à sa demande.
_ Irène m’a rappelé, parce que j’avais oublié de répondre à sa demande.
Dans les deux cas si je supprime le terme introducteur «car» ou «parce que», on obtient une proposition indépendante.
_ Irène m’a rappelé, car j’avais oublié de répondre à sa demande.
_ Irène m’a rappelé, parce que j’avais oublié de répondre à sa demande.
Dans les deux cas si je supprime le terme introducteur «car» ou «parce que», on obtient une proposition indépendante.
_________________
Adore ici l’écho qu’adorait Pythagore
- ProvenceEnchanteur
Logonauta a écrit:Merci Henriette pour ta réponse. J’explique déjà cela à mes élèves, mais ça ne me satisfait pas vraiment, et eux non plus. Quelle différence fondamentale entre :
_ Irène m’a rappelé, car j’avais oublié de répondre à sa demande.
_ Irène m’a rappelé, parce que j’avais oublié de répondre à sa demande.
Dans les deux cas si je supprime le terme introducteur «car» ou «parce que», on obtient une proposition indépendante.
Si on modifie la phrase, on obtient une phrase différente effectivement.
La subordonnée est liée à la principale, d’où sa fonction. Deux indépendantes sont indépendantes, elles n’ont donc pas de fonction l’une par rapport à l’autre (un lien logique mais pas de fonction). La conjonction de coordination « car » vient expliciter le lien logique qui serait implicite si les deux propositions indépendantes étaient juxtaposées.
- IphigénieProphète
C’est pareil ( indépendantes coordonnées) si on dit:
Irène m’a rappelé et je n’ai pas répondu
……………………………mais je n’ai pas répondu
……………………………car je n’ai pas répondu
Et c’est différent ( subordinations) si on dit:
Irène m’a rappelé quoique je n’aie pas répondu
Irène m’a rappelé parce que je n’ai pas répondu
Ce sont des constructions différentes tout simplement comme le dit Provence . Faut pas chercher plus loin !
C’est bien aussi les automatismes « bêtes »en grammaire plutôt que les raisonnements confus
Irène m’a rappelé et je n’ai pas répondu
……………………………mais je n’ai pas répondu
……………………………car je n’ai pas répondu
Et c’est différent ( subordinations) si on dit:
Irène m’a rappelé quoique je n’aie pas répondu
Irène m’a rappelé parce que je n’ai pas répondu
Ce sont des constructions différentes tout simplement comme le dit Provence . Faut pas chercher plus loin !
C’est bien aussi les automatismes « bêtes »en grammaire plutôt que les raisonnements confus
- LogonautaNiveau 4
Oui, je comprends. Merci à tous pour vos réponses.
Je tiens ça comme une limite d’une approche purement sémantique de la grammaire, car ici, l’obstacle — la nature du lien entre les propositions —est de nature syntaxique. Je mettrai davantage l’accent sur ces limites syntaxiques lors de mes cours.
Je tiens ça comme une limite d’une approche purement sémantique de la grammaire, car ici, l’obstacle — la nature du lien entre les propositions —est de nature syntaxique. Je mettrai davantage l’accent sur ces limites syntaxiques lors de mes cours.
_________________
Adore ici l’écho qu’adorait Pythagore
- henrietteMédiateur
Il faut vraiment partir de la notion de proposition indépendante : j'ai l'impression que le blocage vient de ce qu'ils ne comprennent pas ce qu'implique coordonner deux indépendantes par rapport à en subordonner l'une à l'autre.
Je leur montre que pour pour exprimer le même lien logique entre deux propositions indépendantes, ici la causalité, on a deux moyens :
- on peut choisir de les "laisser libres" en les coordonnant avec une conjonction de coordination, et alors elles sont à égalité, aucune ne prend le pouvoir sur l'autre, et donc elles continuent à vivre leurs vies d'indépendantes, elles n'ont pas de fonction l'une par rapport à l'autre ;
- ou bien on décide de soumettre l'une des deux à l'autre, ce qui s'appelle la subordination. Dans ce cas on change leur "nature" : l'une devient la principale et l'autre sa subordonnée. On le fait au moyen d'une conjonction de subordination. Celle qui sera soumise sera forcée de prendre une fonction dans l'autre proposition.
On exprime donc le même lien logique mais on le construit syntaxiquement de deux façons très différentes.
Je leur montre que pour pour exprimer le même lien logique entre deux propositions indépendantes, ici la causalité, on a deux moyens :
- on peut choisir de les "laisser libres" en les coordonnant avec une conjonction de coordination, et alors elles sont à égalité, aucune ne prend le pouvoir sur l'autre, et donc elles continuent à vivre leurs vies d'indépendantes, elles n'ont pas de fonction l'une par rapport à l'autre ;
- ou bien on décide de soumettre l'une des deux à l'autre, ce qui s'appelle la subordination. Dans ce cas on change leur "nature" : l'une devient la principale et l'autre sa subordonnée. On le fait au moyen d'une conjonction de subordination. Celle qui sera soumise sera forcée de prendre une fonction dans l'autre proposition.
On exprime donc le même lien logique mais on le construit syntaxiquement de deux façons très différentes.
_________________
"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- NLM76Grand Maître
Il y a tout de même, me semble-t-il, un autre problème dans l'exemple proposé par @Logonauta. Il me semble que la phrase proposée n'est pas très naturelle, voire pas très "correcte" en français moderne. En effet, on tend à préférer, pour exprimer la cause, la conjonction de subordination "parce que", et à réserver la conjonction de coordination "car" à l'expression de la justification.
Il me semble qu'on pourrait dire quelque chose comme "Pendant notre absence, Irène a sans aucun doute tenté de me rappeler, car j'avais oublié de répondre à sa demande." On aurait là justification d'un énoncé, plutôt qu'une cause.
Je pense qu'il est préférable d'éviter de leur donner des exemples d'utilisation de "car" où il n'exprimerait pas la justification, mais la cause : cela conduit à un abus de ce "car" dans de nombreux cas où il serait préférable d'utiliser "parce que".
Maintenant, même si l'on réserve "car" à la justification, il reste le problème de sa concurrence avec "puisque", véritable concurrente parmi les conjonctions de subordinations. On voit alors qu'on est dans un domaine-limite, où la différence entre les deux constructions syntaxiques est au plan sémantique très ténue. En tout cas, il y a une autre conséquence syntaxique : la conjonction de subordination peut être reprise par "et que" ; la conjonction de coordination ne le peut pas. C'est une affaire relativement importante, qu'il n'est pas inutile d'enseigner aux élèves à un moment ou à un autre.
Il me semble qu'on pourrait dire quelque chose comme "Pendant notre absence, Irène a sans aucun doute tenté de me rappeler, car j'avais oublié de répondre à sa demande." On aurait là justification d'un énoncé, plutôt qu'une cause.
Je pense qu'il est préférable d'éviter de leur donner des exemples d'utilisation de "car" où il n'exprimerait pas la justification, mais la cause : cela conduit à un abus de ce "car" dans de nombreux cas où il serait préférable d'utiliser "parce que".
Maintenant, même si l'on réserve "car" à la justification, il reste le problème de sa concurrence avec "puisque", véritable concurrente parmi les conjonctions de subordinations. On voit alors qu'on est dans un domaine-limite, où la différence entre les deux constructions syntaxiques est au plan sémantique très ténue. En tout cas, il y a une autre conséquence syntaxique : la conjonction de subordination peut être reprise par "et que" ; la conjonction de coordination ne le peut pas. C'est une affaire relativement importante, qu'il n'est pas inutile d'enseigner aux élèves à un moment ou à un autre.
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- OudemiaBon génie
NLM76 a écrit: En tout cas, il y a une autre conséquence syntaxique : la conjonction de subordination peut être reprise par "et que" ; la conjonction de coordination ne le peut pas. C'est une affaire relativement importante, qu'il n'est pas inutile d'enseigner aux élèves à un moment ou à un autre.
Voilà pourquoi je fulmine quand je lis, même ici, et trop souvent, "..... car.... et que...."
- IphigénieProphète
Vous posez tout le gros problème de la perception du sens des nuances: et pour ceux qui s'interrogent sur l'utilité de la grammaire ils trouveraient peut-être là son utilite principale.
Il n'en reste pas moins que pour l'enseigner je suis persuadée qu'il ne faut pas ( plus exactement: qu'on ne peut pas) partir des nuances, puisque visiblement le sens précis de "car", par exemple, tend à s'estomper comme coordination...C'est pourquoi je crois fortement, et par expérience, qu'il faut d'abord ancrer des réflexes simples de distinction ( comme "mais où est donc Ornicar") et dans un second temps réfléchir avec profit à ces differences de constructions dans la coordination des subordonnées ou des indépendantes : ce sont des observations secondes ( secondes dans l'apprentissage) qui me paraissent n'être possibles qu'à partir d'un socle déjà installé :
pour le dire autrement je crois que les élèves n'ont jamais été aussi perdus en grammaire que depuis qu'on a voulu rendre la grammaire "intelligente" à tout prix ce qui revient à leur demander de réfléchir à des choses qu'ils ne maîtrisent pas et, pire, qu'ils ne sentent pas.
Cela me paraît être bien illustré par le problème posé à Logonauta par ses élèves.
J'ajoute: d'où aussi la folie, AMHA, de cette mode effrénée du recours aux déplacements et substitutions comme critères obligés...
Il n'en reste pas moins que pour l'enseigner je suis persuadée qu'il ne faut pas ( plus exactement: qu'on ne peut pas) partir des nuances, puisque visiblement le sens précis de "car", par exemple, tend à s'estomper comme coordination...C'est pourquoi je crois fortement, et par expérience, qu'il faut d'abord ancrer des réflexes simples de distinction ( comme "mais où est donc Ornicar") et dans un second temps réfléchir avec profit à ces differences de constructions dans la coordination des subordonnées ou des indépendantes : ce sont des observations secondes ( secondes dans l'apprentissage) qui me paraissent n'être possibles qu'à partir d'un socle déjà installé :
pour le dire autrement je crois que les élèves n'ont jamais été aussi perdus en grammaire que depuis qu'on a voulu rendre la grammaire "intelligente" à tout prix ce qui revient à leur demander de réfléchir à des choses qu'ils ne maîtrisent pas et, pire, qu'ils ne sentent pas.
Cela me paraît être bien illustré par le problème posé à Logonauta par ses élèves.
J'ajoute: d'où aussi la folie, AMHA, de cette mode effrénée du recours aux déplacements et substitutions comme critères obligés...
- henrietteMédiateur
Sauf que très régulièrement au DNB on demande aux élèves de remplacer coordination par subordination (ou inversement) et c'est souvent parce que <-> car qui est attendu.NLM76 a écrit:Il y a tout de même, me semble-t-il, un autre problème dans l'exemple proposé par @Logonauta. Il me semble que la phrase proposée n'est pas très naturelle, voire pas très "correcte" en français moderne. En effet, on tend à préférer, pour exprimer la cause, la conjonction de subordination "parce que", et à réserver la conjonction de coordination "car" à l'expression de la justification.
Il me semble qu'on pourrait dire quelque chose comme "Pendant notre absence, Irène a sans aucun doute tenté de me rappeler, car j'avais oublié de répondre à sa demande." On aurait là justification d'un énoncé, plutôt qu'une cause.
Je pense qu'il est préférable d'éviter de leur donner des exemples d'utilisation de "car" où il n'exprimerait pas la justification, mais la cause : cela conduit à un abus de ce "car" dans de nombreux cas où il serait préférable d'utiliser "parce que".
Maintenant, même si l'on réserve "car" à la justification, il reste le problème de sa concurrence avec "puisque", véritable concurrente parmi les conjonctions de subordinations. On voit alors qu'on est dans un domaine-limite, où la différence entre les deux constructions syntaxiques est au plan sémantique très ténue. En tout cas, il y a une autre conséquence syntaxique : la conjonction de subordination peut être reprise par "et que" ; la conjonction de coordination ne le peut pas. C'est une affaire relativement importante, qu'il n'est pas inutile d'enseigner aux élèves à un moment ou à un autre.
_________________
"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- NLM76Grand Maître
Merci pour cette précision, @henriette. Ce choix fait par les concepteurs du brevet me paraît être une erreur, comme à Iphigénie. Mais d'après toi, y a-t-il des arguments raisonnables en sa faveur ?
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum