- *Ombre*Grand sage
DesolationRow a écrit:Tiens, ça me rappelle une discussion qui n'avait pas été tranchée, me semble-t-il, sur une expression qui devait être : "la pianiste que j'ai entendu critiquer". Certains (dont j'étais) voulaient l'infinitif, d'autres jugeaient que seul le participe "critiquée" était acceptable, il me semble. Je vais essayer de retrouver le fil.
Oui. Je me souviens de cette discussion. On admet pourtant "J'ai entendu dire que…" ou "Voici ce que j'ai vu faire ailleurs". Là, l'infinitif ne fait aucun doute.
- DesolationRowEmpereur
- AnaxagoreGuide spirituel
Le problème ne me semble pas tant être celui de l'infinitif que celui de l'ambiguïté à propos de la personne qui émet la critique et de celle qui la reçoit. "Être critiquée" lève l'ambiguïté.
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"De même que notre esprit devient plus fort grâce à la communication avec les esprits vigoureux et raisonnables, de même on ne peut pas dire combien il s'abâtardit par le commerce continuel et la fréquentation que nous avons des esprits bas et maladifs." Montaigne
"Woland fit un signe de la main, et Jérusalem s'éteignit."
"On déclame contre les passions sans songer que c'est à leur flambeau que la philosophie allume le sien." Sade
- JayKewNiveau 9
Je suis loin d'être spécialiste de grammaire française, mais j'ose une interprétation; dites-moi si c'est recevable:
(1) la pianiste que j'ai entendu critiquée : --> elle a été critiquée / fait l'objet de critiques
(2) la pianiste que j'ai entendu critiquer: --> elle a elle-même critiqué / émis elle-même des critiques
Est-ce que cette interprétation est possible, ou bien ai-je tout faux?
(1) la pianiste que j'ai entendu critiquée : --> elle a été critiquée / fait l'objet de critiques
(2) la pianiste que j'ai entendu critiquer: --> elle a elle-même critiqué / émis elle-même des critiques
Est-ce que cette interprétation est possible, ou bien ai-je tout faux?
- LédisséEsprit sacré
Non, dans le deuxième cas, la pianiste est critiquée. Si tu veux que ce soit elle qui critique, il faut écrire "que j'ai entendue critiquer".
EDIT : la première phrase est incorrecte : si c'est la pianiste que tu as entendu, il faut écrire "entendue". Mais "que j'ai entendue critiquée" est... pour le moins étrange. En fait, tu as entendu les critiques, l'action de critiquer, pas la pianiste. Là, c'est "que j'ai entendu critiquer" (où "que = la pianiste" est le COD de "critiquer") qui convient.
EDIT : la première phrase est incorrecte : si c'est la pianiste que tu as entendu, il faut écrire "entendue". Mais "que j'ai entendue critiquée" est... pour le moins étrange. En fait, tu as entendu les critiques, l'action de critiquer, pas la pianiste. Là, c'est "que j'ai entendu critiquer" (où "que = la pianiste" est le COD de "critiquer") qui convient.
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Life is what happens to you while you're making other plans. John Lennon
Life is not governed by will or intention. Life is a question of nerves, and fibres, and slowly built-up cells in which thought hides itself and passion has its dreams. Oscar Wilde
Bien que femme, je me suis permis_ / demandé_ / rendu_ compte / fait_ désirer... etc._
- JayKewNiveau 9
Ah, merci, je vois. J’etais Loin du compte!!
(Je serais bien incapable de me souvenir de règles aussi subtiles!)
(Je serais bien incapable de me souvenir de règles aussi subtiles!)
- nicole 86Expert spécialisé
J'avais oublié que la grammaire était aussi passionnante ! Je rajeunis de ....
Je vais aller lire l'autre fil.
Je vais aller lire l'autre fil.
- IphigénieProphète
Bah oui: une proposition infinitive est forcement c.o dans sa totalité : credo eum errare, on va dire selon ton raisonnement que ce n'est pas une proposition infinitive non plus.*Ombre* a écrit:On touche là à la limite de la notion de proposition infinitive, contestée par certains grammairiens, précisément à cause du détachement possible du pronom, perçu sémantiquement comme sujet du verbe mais qui prend bien la forme du pronom objet.
Je me répète : fonder les règles d'orthographe sur des cas limites, c'est casse-gueule. La preuve : personne n'entrave que dalle à ces règles, à part les professeurs de Lettres (et encore).
- ipomeeGuide spirituel
Iphigénie a écrit:Bah oui: une proposition infinitive est forcement c.o dans sa totalité : credo eum errare, on va dire selon ton raisonnement que ce n'est pas une proposition infinitive non plus.*Ombre* a écrit:On touche là à la limite de la notion de proposition infinitive, contestée par certains grammairiens, précisément à cause du détachement possible du pronom, perçu sémantiquement comme sujet du verbe mais qui prend bien la forme du pronom objet.
Je me répète : fonder les règles d'orthographe sur des cas limites, c'est casse-gueule. La preuve : personne n'entrave que dalle à ces règles, à part les professeurs de Lettres (et encore).
Serait-ce une pipe alors ?
- *Ombre*Grand sage
Ce n'est pas mon raisonnement, en fait. C'est celui de grammairiens.
(Pour ceux que le sujet intéresse, voir le travail de Jacqueline Picoche ou ceci http://scd-theses.u-strasbg.fr/532/01/marsac_new.pdf)
Pour ma part, d'obédience classique,j'enseigne j'enseignais la proposition infinitive.
Mais on ne peut pas dire en toute logique "la proposition infinitive est COD dans sa totalité" (ce à quoi je souscris) et "dans Les musiciens que j'ai entendus chanter, le COD est la proposition en entier mais on va faire l'accord avec le COD "musiciens", qui se trouve en être le sujet". C'est tout ce que je dis. "C'est tout pareil comme l'accord avec normal avec le COD", ben non. Ce n'est justement pas cohérent, ni en soi, ni avec la règle générale.
(Pour ceux que le sujet intéresse, voir le travail de Jacqueline Picoche ou ceci http://scd-theses.u-strasbg.fr/532/01/marsac_new.pdf)
Pour ma part, d'obédience classique,
Mais on ne peut pas dire en toute logique "la proposition infinitive est COD dans sa totalité" (ce à quoi je souscris) et "dans Les musiciens que j'ai entendus chanter, le COD est la proposition en entier mais on va faire l'accord avec le COD "musiciens", qui se trouve en être le sujet". C'est tout ce que je dis. "C'est tout pareil comme l'accord avec normal avec le COD", ben non. Ce n'est justement pas cohérent, ni en soi, ni avec la règle générale.
- InvitéInvité
Pour abonder dans le même sens : Le Goffic, par exemple, s'appuie sur la pronominalisation pour rapprocher ladite proposition infinitive des constructions verbales à double complémentation c.o. / attribut du c.o., en tant que le premier terme est support d'une prédication seconde. Même chose sur les constructions apparentées "j'entends mon bébé pleurer / j'entends mon bébé qui pleure / je l'entends pleurer / je l'entends qui pleure".
C'est un vaste chantier, l'infinitive française, quand même, car elle manque cruellement de cohérence.
C'est un vaste chantier, l'infinitive française, quand même, car elle manque cruellement de cohérence.
Moui, j'avais lancé cette dispute... L'Académie française avait tranché en faveur du participe passé mais ça ne m'avait pas plus convaincu que ça.DesolationRow a écrit:https://www.neoprofs.org/t106701p425-vos-questions-de-grammaire
- *Ombre*Grand sage
Je précise que ces mêmes grammairiens reprochent à l'analyse classique d'être une sorte de latinisme. Pour ma part, tout cela m'intéresse, mais je me garderai bien de faire entrer ces discussions à l'école, jusqu'au bac. Nous avons déjà trop souffert de telles tentatives. Et si j'enseigne une grammaire non pas fausse, mais discutable, et transposable aisément au latin, voire à d'autre langues, je dis banco. Vive la proposition infinitive.
Mais pour en revenir à l'accord du participe passé, il ne faut pas essayer de me faire croire que dans le cas de l'infinitive, il serait logique.
Mais pour en revenir à l'accord du participe passé, il ne faut pas essayer de me faire croire que dans le cas de l'infinitive, il serait logique.
- RendashBon génie
Supprimons la Belgique.
Ils se mêleront de grammaire quand ils auront gagné une coupe du monde, stoo.
Ils se mêleront de grammaire quand ils auront gagné une coupe du monde, stoo.
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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
- HirondelleNiveau 8
Une analyse par un linguiste, c'est assez intéressant :
https://www.youtube.com/watch?v=g9yOnw0czVg
https://www.youtube.com/watch?v=g9yOnw0czVg
- *Ombre*Grand sage
Oui, c'est vrai que c'est intéressant. Merci, Hirondelle.
Deux questions toutefois restent en suspens.
D'abord, celle d'une certaine cohérence de la valeur adjective (donc variable) du participe passé. Pour reprendre l'exemple de la vidéo, les pommes mangées = les pommes [qui sont] mangées = les pommes [qu'on a] mangées. On a beau dire, il y a de la logique dans cette règle et l'abandonner pour quelque chose de moins logique me paraît… moins logique.
Par ailleurs, et sans en faire un objet de fantasme, reste le problème de la préparation des élèves à une certaine norme, y compris, c'est vrai, à une certaine norme sociale. Pendant presque 30 ans, on nous a demandé d'appliquer la réforme orthographique de 1990. Mais personne n'appliquait cette réforme. Je n'ai jamais vu un article de presse, un roman ou quoi que ce soit de public qui respectât cette réforme. Dès lors, enseigner à mes élèves l'orthographe réformée m'aurait donné l'impression de les mettre en difficulté, de leur faire courir le risque d'être socialement pénalisés pour leur apprentissage, ce qui serait un comble. Vous me direz (en tout cas la vidéo dit) qu'en l'occurrence, la règle mise en cause n'est justement pas appliquée. Mais si c'est vrai à l'oral pour la majorité de la population (je ne mets pas en doute les chiffres avancés), ce l'est beaucoup moins pour les écrits publics. À nouveau, à édicter des règles contraires non à un usage non majoritaire, mais à un usage normé, qui a trait à un certain pouvoir, je craindrais qu'on ne prive certains élèves de tout espoir d'arriver à ce pouvoir, ou en tout cas qu'on ne leur ferme toutes les voies qui mettent en œuvre publiquement l'écrit.
Deux questions toutefois restent en suspens.
D'abord, celle d'une certaine cohérence de la valeur adjective (donc variable) du participe passé. Pour reprendre l'exemple de la vidéo, les pommes mangées = les pommes [qui sont] mangées = les pommes [qu'on a] mangées. On a beau dire, il y a de la logique dans cette règle et l'abandonner pour quelque chose de moins logique me paraît… moins logique.
Par ailleurs, et sans en faire un objet de fantasme, reste le problème de la préparation des élèves à une certaine norme, y compris, c'est vrai, à une certaine norme sociale. Pendant presque 30 ans, on nous a demandé d'appliquer la réforme orthographique de 1990. Mais personne n'appliquait cette réforme. Je n'ai jamais vu un article de presse, un roman ou quoi que ce soit de public qui respectât cette réforme. Dès lors, enseigner à mes élèves l'orthographe réformée m'aurait donné l'impression de les mettre en difficulté, de leur faire courir le risque d'être socialement pénalisés pour leur apprentissage, ce qui serait un comble. Vous me direz (en tout cas la vidéo dit) qu'en l'occurrence, la règle mise en cause n'est justement pas appliquée. Mais si c'est vrai à l'oral pour la majorité de la population (je ne mets pas en doute les chiffres avancés), ce l'est beaucoup moins pour les écrits publics. À nouveau, à édicter des règles contraires non à un usage non majoritaire, mais à un usage normé, qui a trait à un certain pouvoir, je craindrais qu'on ne prive certains élèves de tout espoir d'arriver à ce pouvoir, ou en tout cas qu'on ne leur ferme toutes les voies qui mettent en œuvre publiquement l'écrit.
- IphigénieProphète
de fait ce n'est pas ce que l'on dit.*Ombre* a écrit:Ce n'est pas mon raisonnement, en fait. C'est celui de grammairiens.
(Pour ceux que le sujet intéresse, voir le travail de Jacqueline Picoche ou ceci http://scd-theses.u-strasbg.fr/532/01/marsac_new.pdf)
Pour ma part, d'obédience classique,j'enseignej'enseignais la proposition infinitive.
Mais on ne peut pas dire en toute logique "la proposition infinitive est COD dans sa totalité" (ce à quoi je souscris) et "dans Les musiciens que j'ai entendus chanter, le COD est la proposition en entier mais on va faire l'accord avec le COD "musiciens", qui se trouve en être le sujet". C'est tout ce que je dis. "C'est tout pareil comme l'accord avec normal avec le COD", ben non. Ce n'est justement pas cohérent, ni en soi, ni avec la règle générale.
On dit que dans "les musiciens que j'ai entendus chanter, on admet le s à entendu parce que "les musiciens" sont effectivement en position de COD de entendre, alors que dans "les airs que j'ai entendu chanter,"les airs ne sont en rien en rapport grammatical avec entendre: ce que j'entends, c'est chanter. les airs sont cod de chanter.
Si on veut être latiniste adonf, et qu'on applique l'usage plus fréquent du participe après le verbe de perception, on voit bien qu'on n'a pas malgré les apprences la même construction grammaticale:
les musiciens que j'ai entendus chantant/ j'ai entendu les musiciens chantant(s: on discutera de l'accord des participes présents plus tard )
les airs que j'ai entendu chanter/ j'ai entendu des airs chantés: participe présent impossible ici. Ce n'est pas la même construction malgré l'apparence trompeuse de suimilititude en français
Après je suis da'ccord pour dire que cette règle relève des discussions sur le sexe des anges, surtout au regard des capacités moyennes d'accord de nos élèvent , mais c'est ce qui rend l'orthographe amusante, comme la grammaire, lorsqu'elle résiste un peu...
Plus sérieusement (et sans être, je l'espère bien!, complotiste), je suis depuis très longtemps persuadée que les enjeux des modifications de la grammaire française ces quarante dernières années ont été effectivement de déconnecter le français du latin pour toutes sortes de motivations, trop compliquées à préciser ici.
On tire désormais sur un corbillard (l'enseignement du latin) mais l'habitude est tellement bien prise...
Je veux bien qu'on ne fasse pas la grammaire française pour faire du latin mais néanmoins, les comparaisons des structures aident bien à saisir les points de subtilités qui peuvent paraître d'autant plus excessives qu'elles ont été instituées justement en s'appuyant sur ces comparaisons, je veux dire par des grammairiens classiques qui pensaient effectivement une langue avec l'autre (et en passant par l'intermédiaire de l'italien, merci Hirondelle, peut-être je ne l'ai pas vérifié mais ce n'est qu'une couche de crème supplémentaire...) . Alors on peut aller au bout de l'élimination des traces du latin dans le français, mais le socle résiste.
PS ta référence de thèse est sûrement intéressante mais elle est inaccessible
PS2, en regardant la video de Linguisticae qui veut s'appuyer sur l'usage, les élèves actuels ne maîtrisent pas plus l'accord avec être qu'avec avoir parce qu'ils n'identifient pas les participes: ils sont arriver. Alors bon, l'usage.... :lol:
Sinon j'ai fini de regarder jusqu'au bout et on arrive à la conclusion: que d'énergie pour défendre un accord qu'on ne fait que très exceptionnellement dans la vie réelle. Donc supprimons cette règle. Eh bien! puisque Linguisticae se pose toujours en champion du bon sens, il doit inverser sa conclusion:
non pas "que d'énergie pour maintenir une règle qu'on n'applique pas: supprimons-la"
mais "que d'énergie pour expliquer qu'on doit supprimer une règle que personne ne connaît: laissons donc les choses en l'état !
- *Ombre*Grand sage
Iphigénie a écrit: Bah oui: une proposition infinitive est forcement c.o dans sa totalité
Iphigénie a écrit:On dit que dans "les musiciens que j'ai entendus chanter, on admet le s à entendu parce que "les musiciens" sont effectivement en position de COD de entendre
Iphigénie, tu ne vois pas une légère contradiction entre ces deux affirmations ?
J'ai entendu les musiciens chanter = Je les ai entendus chanter = même construction : verbe de perception + infinitive.
Faudrait savoir, à la fin : le COD, c'est la proposition en entier ou c'est "les musiciens" ?
En fait, on s'embourbe, à essayer de trancher cette question, parce qu'on touche aux limites de la notion d'infinitive en français (qui n'est, malgré tout, pas le latin). C'est normal, cf. les analyses que j'ai citées.
Mais fonder une règle d'orthographe sur un cas limite, ça ne marche pas.
- CarabasVénérable
Le COD est la proposition en entier. Les musiciens = sujet de l'infinitif.
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Les chances uniques sur un million se réalisent neuf fois sur dix.
Terry Pratchett
- *Ombre*Grand sage
Je suis d'accord, Carabas. Mais
1°) en ce cas, tu m'accorderas que l'accord du participe passé avec le sujet d'un autre verbe n'a rien de logique ni de conforme à la règle générale.
2°) je comprends aussi la seconde analyse d'Iphigénie, et sa contradiction avec sa première assertion n'a rien d'anormal : elle ne fait que révéler les problèmes liés à l'analyse de la construction infinitive en français.
Dans tous les cas, dire que l'accord, dans ces cas-là, est fort simple et conforme à la règle générale d'accord du participe passé employé avec avoir, c'est aller un peu vite en besogne.
1°) en ce cas, tu m'accorderas que l'accord du participe passé avec le sujet d'un autre verbe n'a rien de logique ni de conforme à la règle générale.
2°) je comprends aussi la seconde analyse d'Iphigénie, et sa contradiction avec sa première assertion n'a rien d'anormal : elle ne fait que révéler les problèmes liés à l'analyse de la construction infinitive en français.
Dans tous les cas, dire que l'accord, dans ces cas-là, est fort simple et conforme à la règle générale d'accord du participe passé employé avec avoir, c'est aller un peu vite en besogne.
- LédisséEsprit sacré
@*Ombre* : Si on admet (ce que je fais) la proposition infinitive en français, oui, c'est la proposition entière qui est CO. Et si on ne l'admet pas, c'est "les musiciens" (enfin, "que"). Mais peu importe : si on l'admet, "les musiciens" fait partie du CO, il est ce qui est perçu en premier du CO, l'élément le plus important (en français), auquel "jouer" vient s'ajouter. Justement, pas besoin d'être professeur de Lettres et de raisonner en termes de proposition infinitive : c'est parce que "les musiciens" est perçu comme COD de "entendre" qu'on fait l'accord, en suivant donc la règle générale, "le participe passé utilisé avec l'auxiliaire avoir s'accorde avec le COD antéposé". Pas besoin de réfléchir plus que ça, il suffit de savoir ce qu'est un COD. Le non-professeur ne se posera pas de question existentielle en remarquant que, dis donc, ce qu'on entend, c'est "les musiciens jouer", rho, toute une proposition comme COD, donc le COD devrait être considéré comme un neutre et ne pas commander d'accord.
L'accord au pluriel avec "musiciens" est justement la marque du français par rapport au latin.
Alors que pour "les airs... jouer", "les airs" est COD de "jouer", pas de "entendre" : pas d'ambiguïté possible, encore une fois, si on sait ce que c'est qu'un COD (notion censée être acquise au primaire ; certes, là, la phrase est "piège", mais il suffit de défaire la relative : "j'ai entendu jouer les airs", et non "j'ai entendu les airs (jouer)" : c'est "jouer" qui vient en premier ; alors qu'on aurait "j'ai entendu les musiciens jouer").
Il ne s'agit donc absolument pas de "fonder une règle sur un cas limite", mais d'appliquer la règle, strictement.
C'est la même, en fait, qui commande l'absence d'accord dans les cas comme "je me suis fait coiffer" : la première personne n'est pas le COD du verbe faire, mais du verbe coiffer. Ce n'est pas du chinois, non plus. C'est toujours le même type de question qu'il faut se poser (au lieu d'appliquer le "truc" - et non la règle - "si un infinitif suit un participe, celui-ci ne s'accorde pas" ; comme le truc de "où est donc Ornicar" : ce n'est qu'un aide-mémoire, qui, si on l'applique sans réfléchir, donne de magnifiques confusions ou/où et est/et...) : "est-ce que je suis "faite" ou "coiffée"" ?
Et, encore une fois, ce n'est pas une affaire de sécurité nationale non plus : un postulant écrivant "les airs que j'ai entendus jouer" ne se fera saquer nulle part, sauf au concours de professeur de Lettres (et encore :| ). Seuls les professionnels du français, dans l'enseignement, l'édition ou l'écriture, sont censés maîtriser parfaitement l'application de la règle dans ces cas, non pas limites, mais pièges. Donc pourquoi s'en prendre à l'accord du participe passé ?
Pourquoi ? Parce que l'orthographe, de plus en plus, est perçu avec rancoeur par ceux qui ne le maîtrisent pas. J'ai subi des humiliations en dictée, l'orthographe est un marqueur social injuste (la compréhension des règles est transmise magiquement, génétiquement sans doute), je ne comprends pas tout donc c'est trop compliqué, cassons tout ça. Et ceux qui le maîtrisent ont une espèce de complexe, ne voulant pas qu'on croie qu'ils se sentent supérieurs. Les méthodes dévastatrices d'apprentissage de la lecture ne sont, je pense, pas pour rien dans ce phénomène, de même que cette idée politiquement correcte - en France - que tout le monde doit réussir ses études, et des études intellectuelles, attention : hors de l'intellect, point de salut. Donc le bac à tout le monde, la suppression des notes, et la simplification de l'orthographe. Et la destruction du latin, marqueur social idem, reproduisant les élites, si si. D'ailleurs les règles orthographiques sont absurdes parce qu'elles sont copiées du latin alors que le français n'est pas le latin. Et hop, d'une pierre deux coups, trois avec l'augmentation artificielle des résultats.
L'accord au pluriel avec "musiciens" est justement la marque du français par rapport au latin.
Alors que pour "les airs... jouer", "les airs" est COD de "jouer", pas de "entendre" : pas d'ambiguïté possible, encore une fois, si on sait ce que c'est qu'un COD (notion censée être acquise au primaire ; certes, là, la phrase est "piège", mais il suffit de défaire la relative : "j'ai entendu jouer les airs", et non "j'ai entendu les airs (jouer)" : c'est "jouer" qui vient en premier ; alors qu'on aurait "j'ai entendu les musiciens jouer").
Il ne s'agit donc absolument pas de "fonder une règle sur un cas limite", mais d'appliquer la règle, strictement.
C'est la même, en fait, qui commande l'absence d'accord dans les cas comme "je me suis fait coiffer" : la première personne n'est pas le COD du verbe faire, mais du verbe coiffer. Ce n'est pas du chinois, non plus. C'est toujours le même type de question qu'il faut se poser (au lieu d'appliquer le "truc" - et non la règle - "si un infinitif suit un participe, celui-ci ne s'accorde pas" ; comme le truc de "où est donc Ornicar" : ce n'est qu'un aide-mémoire, qui, si on l'applique sans réfléchir, donne de magnifiques confusions ou/où et est/et...) : "est-ce que je suis "faite" ou "coiffée"" ?
Et, encore une fois, ce n'est pas une affaire de sécurité nationale non plus : un postulant écrivant "les airs que j'ai entendus jouer" ne se fera saquer nulle part, sauf au concours de professeur de Lettres (et encore :| ). Seuls les professionnels du français, dans l'enseignement, l'édition ou l'écriture, sont censés maîtriser parfaitement l'application de la règle dans ces cas, non pas limites, mais pièges. Donc pourquoi s'en prendre à l'accord du participe passé ?
Pourquoi ? Parce que l'orthographe, de plus en plus, est perçu avec rancoeur par ceux qui ne le maîtrisent pas. J'ai subi des humiliations en dictée, l'orthographe est un marqueur social injuste (la compréhension des règles est transmise magiquement, génétiquement sans doute), je ne comprends pas tout donc c'est trop compliqué, cassons tout ça. Et ceux qui le maîtrisent ont une espèce de complexe, ne voulant pas qu'on croie qu'ils se sentent supérieurs. Les méthodes dévastatrices d'apprentissage de la lecture ne sont, je pense, pas pour rien dans ce phénomène, de même que cette idée politiquement correcte - en France - que tout le monde doit réussir ses études, et des études intellectuelles, attention : hors de l'intellect, point de salut. Donc le bac à tout le monde, la suppression des notes, et la simplification de l'orthographe. Et la destruction du latin, marqueur social idem, reproduisant les élites, si si. D'ailleurs les règles orthographiques sont absurdes parce qu'elles sont copiées du latin alors que le français n'est pas le latin. Et hop, d'une pierre deux coups, trois avec l'augmentation artificielle des résultats.
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Life is what happens to you while you're making other plans. John Lennon
Life is not governed by will or intention. Life is a question of nerves, and fibres, and slowly built-up cells in which thought hides itself and passion has its dreams. Oscar Wilde
Bien que femme, je me suis permis_ / demandé_ / rendu_ compte / fait_ désirer... etc._
- ipomeeGuide spirituel
Je suis en accord total avec toi, LadyC.
- AnaxagoreGuide spirituel
Tout ceci est très logique et lié au sens de ce qui est exprimé. On est sujet d'un verbe. On n'est pas sujet dans l'absolu.
_________________
"De même que notre esprit devient plus fort grâce à la communication avec les esprits vigoureux et raisonnables, de même on ne peut pas dire combien il s'abâtardit par le commerce continuel et la fréquentation que nous avons des esprits bas et maladifs." Montaigne
"Woland fit un signe de la main, et Jérusalem s'éteignit."
"On déclame contre les passions sans songer que c'est à leur flambeau que la philosophie allume le sien." Sade
- IphigénieProphète
Voilà! Lady C tu as la réponse parfaite.
Je signale d'ailleurs, au cas où ce débat l'occulterait, que l'on admet, d'ores et déjà, de ne pas faire cet accord, sauf s'il y a un risque d'ambiguïté:
les individus que j'ai vu voler" (être volés) n'aura pas le même sens que "les individus que j'ai vus voler"(volant): j'admet que c'est subtil et qu'au commissariat on évitera ce type de déposition...
C'est compliqué comme règle si on veut: la substitution par le participe présent est toutefois assez facile à vérifier.
On est d'accord aussi pour dire que toute règle est dans les limites, discutable. Néanmoins c'est bien moins gênant d'accorder avec une partie du COD que de dire que les deux constructions sont pareilles: le plus gênant à mon sens c'est de ne pas distinguer la fonction "des airs"comme COD de jouer et non d'entendre.
Non je ne vois pas de contradiction.Iphigénie, tu ne vois pas une légère contradiction entre ces deux affirmations ?
J'ai entendu les musiciens chanter = Je les ai entendus chanter = même construction : verbe de perception + infinitive.
Faudrait savoir, à la fin : le COD, c'est la proposition en entier ou c'est "les musiciens" ?
Je signale d'ailleurs, au cas où ce débat l'occulterait, que l'on admet, d'ores et déjà, de ne pas faire cet accord, sauf s'il y a un risque d'ambiguïté:
les individus que j'ai vu voler" (être volés) n'aura pas le même sens que "les individus que j'ai vus voler"(volant): j'admet que c'est subtil et qu'au commissariat on évitera ce type de déposition...
C'est compliqué comme règle si on veut: la substitution par le participe présent est toutefois assez facile à vérifier.
On est d'accord aussi pour dire que toute règle est dans les limites, discutable. Néanmoins c'est bien moins gênant d'accorder avec une partie du COD que de dire que les deux constructions sont pareilles: le plus gênant à mon sens c'est de ne pas distinguer la fonction "des airs"comme COD de jouer et non d'entendre.
- DesolationRowEmpereur
LadyC a écrit:Pourquoi ? Parce que l'orthographe, de plus en plus, est perçu avec rancoeur par ceux qui ne le maîtrisent pas. J'ai subi des humiliations en dictée, l'orthographe est un marqueur social injuste (la compréhension des règles est transmise magiquement, génétiquement sans doute), je ne comprends pas tout donc c'est trop compliqué, cassons tout ça. Et ceux qui le maîtrisent ont une espèce de complexe, ne voulant pas qu'on croie qu'ils se sentent supérieurs. Les méthodes dévastatrices d'apprentissage de la lecture ne sont, je pense, pas pour rien dans ce phénomène, de même que cette idée politiquement correcte - en France - que tout le monde doit réussir ses études, et des études intellectuelles, attention : hors de l'intellect, point de salut. Donc le bac à tout le monde, la suppression des notes, et la simplification de l'orthographe. Et la destruction du latin, marqueur social idem, reproduisant les élites, si si. D'ailleurs les règles orthographiques sont absurdes parce qu'elles sont copiées du latin alors que le français n'est pas le latin. Et hop, d'une pierre deux coups, trois avec l'augmentation artificielle des résultats.
- DaphnéDemi-dieu
Exactement ! Et on n'en est pas mort.Lefteris a écrit:Du reste, je ne vois pas pourquoi ces règles ne pourraient être apprises, comme tout le reste. Des générations l'ont fait, et en primaire.
Pour l'examen d'entrée en 6ème qu'on passait à 10 ou 11 ans on maîtrisait cette règle.
Et en calcul les multiplications et divisions à plusieurs chiffres après la virgule.
- IphigénieProphète
Très bien vu en effet, LadyC!
Je trouve que la grammaire et l'orthographe traditionnelles françaises, après une histoire tumultueuse et donc forcément de petites bizarreries somme toute juste amusantes dans le cercle des profs de lettres et la section idoine de néoprof (ce qui est assez loin quand même de la place de grève et des exécutions publiques comme on voudrait nous le faire croire avec des mots comme "traumatismes" et "culpabilité"...),était arrivée à une assez rigoureuse logique et un bel ensemble cohérent que l'on s'applique à détruire par petit coup en montrant ensuite que l'édifice ne tient plus. Et dans tous les cas toute cette énergie pourrait être plus utile à consolider qu'à déconstruire, vu l'état.
Je trouve que la grammaire et l'orthographe traditionnelles françaises, après une histoire tumultueuse et donc forcément de petites bizarreries somme toute juste amusantes dans le cercle des profs de lettres et la section idoine de néoprof (ce qui est assez loin quand même de la place de grève et des exécutions publiques comme on voudrait nous le faire croire avec des mots comme "traumatismes" et "culpabilité"...),était arrivée à une assez rigoureuse logique et un bel ensemble cohérent que l'on s'applique à détruire par petit coup en montrant ensuite que l'édifice ne tient plus. Et dans tous les cas toute cette énergie pourrait être plus utile à consolider qu'à déconstruire, vu l'état.
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