- ElyasEsprit sacré
Un peu plus de six mois après, je reviens sur ce fil parce que ma réflexion et mes lectures ainsi que mes tests en classe ont avancé.
Comme je le disais, je ne crois plus aux questionnaires et je pense même qu'ils sont responsables du niveau en HG tant ils sont systématisés dans les pratiques quotidiennes de classe du CM1 à la Tle. On cherche à les faire réfléchir et on fait tout pour que la réflexion soit balisée à tel point qu'elle n'est plus utile. De plus, ces questionnaires sont majoritairement des questionnaires de compréhension littérale (en clair, on demande aux élèves de prélever des informations explicitement données par le document) et on travaille très peu la compréhension inférentielle (càd la compréhension qui mobilise la culture de l'élève pour remplir les blancs et les implicites du document ou faire des liens, par exemple quand un auteur écrit "Le Prophète Mahomet", si l'élève dit que l'auteur est musulman, il fait un calcul inférentiel, une mise en relation avec ses connaissances) et encore moins la compréhension critique (c'est à dire expliquer les enjeux du document, comme par exemple s'interroger sur les destinataires du document).
De plus, en HG, l'étude de document est une pratique langagière précise, rigoureuse avec ses codes : le commentaire de document, l'épreuve reine des études d'histoire-géographie, celle qui est employée avant toute chose quand on étudie/fait de la recherche en histoire et en géographie.
A mon sens, il faut d'abord commencer par enseigner aux élèves les enjeux, les formes et les leviers de réussite de cet exercice. Cela passe au collège par la compréhension des trois verbes de consigne inscrits dans nos programmes pour comprendre et analyser un document : identifier (le document/la source), décrire (le document, ce qu'il montre/dit, une sorte de résumé) et expliquer [les enjeux du document]. Cela passe aussi par la présentation de la forme conventionnelle du commentaire de document : des paragraphes avec alinéas, l'usage de "selon le document" pour montrer qu'on est pas dans l'adhésion au document mais dans l'approche critique. Il faut aussi leur donner les moyens de s'exprimer sur les blancs ou les inconnus du document et cela passe par le fait de les laisser émettre des hypothèses et les développer. Cela passe aussi par l'enseignement de la citation et de la justification ainsi que leur forme pour que peu à peu la paraphrase cède la place à la justification avec citation (la paraphrase n'est pas un souci au collège parce qu'elle montre si elle est bien faite que l'élève a compris ce qui doit être décrit et que des contraintes comme le temps ou la difficulté à gérer la lecture, l'analyse et la formulation personnelle en même temps peuvent troubler ; cependant il faut bien faire comprendre que ce n'est qu'une étape et que l'objectif est de se dégager de la paraphrase à terme ; on peut même imaginer des exercices fondés sur la paraphrase et sur sa transformation en texte justifié avec citations).
Dès lors, on peut imaginer des mises en œuvre (des scénarios pédagogiques) multiples entrant dans une progression amenant l'élève à finir par faire tout seul un commentaire de document :
Exemple 1 : La co-construction (modelage) :
On donne un document aux élèves. On le leur fait lire une première fois, puis le professeur le lit à haute voix et enfin ils le relisent une deuxième fois avec un stabilo ou un crayon à la main pour mettre en valeur les éléments importants et les éléments qu'ils ne comprennent pas.
Le professeur débute par une question : "Qu'avez-vous compris du texte ?"
Ayant préalablement préparé son tableau en trois colonnes (identifier, décrire et expliquer) et un brouillon, il note les éléments donnés par les élèves sur la partie brouillon du tableau.
Il demande alors : De quoi avez-vous besoin pour comprendre et analyser historiquement ce document ? Il répond aux questions et note ses réponses au tableau et redemande si de nouvelles choses ont été compris (et là, il rajoute au tableau ces derniers éléments).
Il demande alors aux élèves de lui dire où mettre chaque élément dans les colonnes identifier, décrire et expliquer. Si une colonne apparaît vide, il se lance dans de nouvelles questions :
- Que pouvez-vous dire pour identifier/décrire/expliquer ?
- Pourquoi vous ai-je fait étudier ce document ?
- Que retenez-vous de ce document ?
Avec ces éléments, il finit son tableau et rajoute des choses qu'il peut estimer importantes (enseignant au passage des questionnements et des stratégies d'analyse que les élèves n'ont pas toujours).
Ceci fini, il demande aux élèves de transformer le tableau en commentaire de document bien rédigé.
Exemple 2 : Après avoir fait quelques séances comme l'exemple 1, on peut donner aux élèves un tableau avec les 3 colonnes à remplir avant de passer à la rédaction du commentaire. Là, on peut les mettre en groupe pour construire ensemble le tableau (et ainsi partager leurs stratégies d'analyse) avant de rédiger, on peut leur donner 15-20 minutes pour faire le tableau avant de faire une mise en commun et les mettre ensuite en rédaction, et enfin on peut tout simplement les mettre en autonomie totale avec à la fin un temps de béta-lecture partagée (en gros, les élèves échangent leur texte et chacun amende et perfectionne le commentaire d'un copain à partir de la correction projetée par le professeur en trois temps : vérification de la cohérence du texte (il y a des phrases, il y a des paragraphes, il y a des majuscules et des points) / vérification que les principaux éléments de compréhension et d'analyse sont là / vérification de l'orthographe des mots les plus importants. On garde cinq minutes pour que les élèves discutent entre eux des forces de leurs textes et des pistes d'amélioration possibles/
--> A ce moment là, on peut créer avec eux des fiches-outils énonçant les stratégies gagnantes et les erreurs à ne surtout pas commettre.
Exemple 3 : le débat de compréhension :
Sur une idée qui vient des lettres (https://lettres.ac-versailles.fr/spip.php?article1411), on peut élaborer une séance ainsi :
- les élèves lisent le document avec leur stylo/stabilo.
- on lance le débat en rappelant bien deux choses : en histoire, on travaille sur identifier la source, décrire le document et expliquer les enjeux du document / on commence ses phrases par un de ces quatre incises : j'ai compris / je n'ai pas compris / je suis d'accord / je ne suis pas d'accord et on doit toujours justifier. Un élève parle et donne la parole à un suivant (on peut utiliser un bâton de parole mais personnellement, ça ne fonctionne pas chez moi alors que chez d'autres si).
- le professeur est le secrétaire durant les 15 minutes de débat.
- Le débat fini, le professeur donne les éléments donnés sous forme de brouillon et demande aux élèves de faire leur commentaire de document.
Exemple 4 : le plan de travail.
On donne quatre documents à comprendre et analyser et les élèves le font en 2h. A chaque commentaire finalisé, ils le rendent au professeur qui le corrige en donnant des conseils pour améliorer le suivant. Les élèves sont libres de s'entraider et de faire les travaux dans l'ordre qu'ils souhaitent.
Il y a sans doute d'autres possibilités (j'en vois bien une fondée sur la technique de la rotative mais mon message est déjà bien assez long). Tous ces exemples entrent bien dans des séances d'AP.
Il y a un point qui me semble important. Chaque fois qu'on finit une étude de documents, il faut clore la séance avec ces trois questions :
- Que fallait-il comprendre de ce document ?
- Pourquoi vous ai-je fait étudier ce document ?
- Que faut-il retenir de cette séance ?
De même, pour les questions des compréhensions inférentielle (remplir les blances/non-dits du texte et mettre en relation) et critique (s'interroger sur les enjeux du texte), il est important de leur donner une culture ou de les laisser émettre des hypothèses. De même, pour la compréhension critique, il faut leur apprendre que c'est un questionnement et leur apprendre ce questionnement : Pour qui ce document a-t-il été fait ? Quelle est la part de subjectivité du document ? Pourquoi l'auteur a-t-il créé ce document ? etc.
Enfin, on peut s'amuser peu à peu à suivre d'autres pistes :
- faire croiser des documents sur le même sujet mais pas avec les mêmes points de vue et laisser les élèves se débrouiller.
- leur apprendre à faire des récits où les sources sont interrogées ce qui enrichit le récit ainsi élaboré.
- les faire problématiser l'analyse du document (travaux de Sylvain Doussot, MCF à l'université de Nantes).
Si on commence à travailler ainsi dès la 6e en construisant une progressivité adaptée à notre public pour atteindre en 3e un objectif commun, le passage au lycée sera très facile sur cette question.
EDIT : J'oubliais, il faut entraîner les élèves. Cela signifie fait au moins six séances de ce genre par an (je dirai une dizaine personnellement, mais je sais que ça n'est pas simple).
Comme je le disais, je ne crois plus aux questionnaires et je pense même qu'ils sont responsables du niveau en HG tant ils sont systématisés dans les pratiques quotidiennes de classe du CM1 à la Tle. On cherche à les faire réfléchir et on fait tout pour que la réflexion soit balisée à tel point qu'elle n'est plus utile. De plus, ces questionnaires sont majoritairement des questionnaires de compréhension littérale (en clair, on demande aux élèves de prélever des informations explicitement données par le document) et on travaille très peu la compréhension inférentielle (càd la compréhension qui mobilise la culture de l'élève pour remplir les blancs et les implicites du document ou faire des liens, par exemple quand un auteur écrit "Le Prophète Mahomet", si l'élève dit que l'auteur est musulman, il fait un calcul inférentiel, une mise en relation avec ses connaissances) et encore moins la compréhension critique (c'est à dire expliquer les enjeux du document, comme par exemple s'interroger sur les destinataires du document).
De plus, en HG, l'étude de document est une pratique langagière précise, rigoureuse avec ses codes : le commentaire de document, l'épreuve reine des études d'histoire-géographie, celle qui est employée avant toute chose quand on étudie/fait de la recherche en histoire et en géographie.
A mon sens, il faut d'abord commencer par enseigner aux élèves les enjeux, les formes et les leviers de réussite de cet exercice. Cela passe au collège par la compréhension des trois verbes de consigne inscrits dans nos programmes pour comprendre et analyser un document : identifier (le document/la source), décrire (le document, ce qu'il montre/dit, une sorte de résumé) et expliquer [les enjeux du document]. Cela passe aussi par la présentation de la forme conventionnelle du commentaire de document : des paragraphes avec alinéas, l'usage de "selon le document" pour montrer qu'on est pas dans l'adhésion au document mais dans l'approche critique. Il faut aussi leur donner les moyens de s'exprimer sur les blancs ou les inconnus du document et cela passe par le fait de les laisser émettre des hypothèses et les développer. Cela passe aussi par l'enseignement de la citation et de la justification ainsi que leur forme pour que peu à peu la paraphrase cède la place à la justification avec citation (la paraphrase n'est pas un souci au collège parce qu'elle montre si elle est bien faite que l'élève a compris ce qui doit être décrit et que des contraintes comme le temps ou la difficulté à gérer la lecture, l'analyse et la formulation personnelle en même temps peuvent troubler ; cependant il faut bien faire comprendre que ce n'est qu'une étape et que l'objectif est de se dégager de la paraphrase à terme ; on peut même imaginer des exercices fondés sur la paraphrase et sur sa transformation en texte justifié avec citations).
Dès lors, on peut imaginer des mises en œuvre (des scénarios pédagogiques) multiples entrant dans une progression amenant l'élève à finir par faire tout seul un commentaire de document :
Exemple 1 : La co-construction (modelage) :
On donne un document aux élèves. On le leur fait lire une première fois, puis le professeur le lit à haute voix et enfin ils le relisent une deuxième fois avec un stabilo ou un crayon à la main pour mettre en valeur les éléments importants et les éléments qu'ils ne comprennent pas.
Le professeur débute par une question : "Qu'avez-vous compris du texte ?"
Ayant préalablement préparé son tableau en trois colonnes (identifier, décrire et expliquer) et un brouillon, il note les éléments donnés par les élèves sur la partie brouillon du tableau.
Il demande alors : De quoi avez-vous besoin pour comprendre et analyser historiquement ce document ? Il répond aux questions et note ses réponses au tableau et redemande si de nouvelles choses ont été compris (et là, il rajoute au tableau ces derniers éléments).
Il demande alors aux élèves de lui dire où mettre chaque élément dans les colonnes identifier, décrire et expliquer. Si une colonne apparaît vide, il se lance dans de nouvelles questions :
- Que pouvez-vous dire pour identifier/décrire/expliquer ?
- Pourquoi vous ai-je fait étudier ce document ?
- Que retenez-vous de ce document ?
Avec ces éléments, il finit son tableau et rajoute des choses qu'il peut estimer importantes (enseignant au passage des questionnements et des stratégies d'analyse que les élèves n'ont pas toujours).
Ceci fini, il demande aux élèves de transformer le tableau en commentaire de document bien rédigé.
Exemple 2 : Après avoir fait quelques séances comme l'exemple 1, on peut donner aux élèves un tableau avec les 3 colonnes à remplir avant de passer à la rédaction du commentaire. Là, on peut les mettre en groupe pour construire ensemble le tableau (et ainsi partager leurs stratégies d'analyse) avant de rédiger, on peut leur donner 15-20 minutes pour faire le tableau avant de faire une mise en commun et les mettre ensuite en rédaction, et enfin on peut tout simplement les mettre en autonomie totale avec à la fin un temps de béta-lecture partagée (en gros, les élèves échangent leur texte et chacun amende et perfectionne le commentaire d'un copain à partir de la correction projetée par le professeur en trois temps : vérification de la cohérence du texte (il y a des phrases, il y a des paragraphes, il y a des majuscules et des points) / vérification que les principaux éléments de compréhension et d'analyse sont là / vérification de l'orthographe des mots les plus importants. On garde cinq minutes pour que les élèves discutent entre eux des forces de leurs textes et des pistes d'amélioration possibles/
--> A ce moment là, on peut créer avec eux des fiches-outils énonçant les stratégies gagnantes et les erreurs à ne surtout pas commettre.
Exemple 3 : le débat de compréhension :
Sur une idée qui vient des lettres (https://lettres.ac-versailles.fr/spip.php?article1411), on peut élaborer une séance ainsi :
- les élèves lisent le document avec leur stylo/stabilo.
- on lance le débat en rappelant bien deux choses : en histoire, on travaille sur identifier la source, décrire le document et expliquer les enjeux du document / on commence ses phrases par un de ces quatre incises : j'ai compris / je n'ai pas compris / je suis d'accord / je ne suis pas d'accord et on doit toujours justifier. Un élève parle et donne la parole à un suivant (on peut utiliser un bâton de parole mais personnellement, ça ne fonctionne pas chez moi alors que chez d'autres si).
- le professeur est le secrétaire durant les 15 minutes de débat.
- Le débat fini, le professeur donne les éléments donnés sous forme de brouillon et demande aux élèves de faire leur commentaire de document.
Exemple 4 : le plan de travail.
On donne quatre documents à comprendre et analyser et les élèves le font en 2h. A chaque commentaire finalisé, ils le rendent au professeur qui le corrige en donnant des conseils pour améliorer le suivant. Les élèves sont libres de s'entraider et de faire les travaux dans l'ordre qu'ils souhaitent.
Il y a sans doute d'autres possibilités (j'en vois bien une fondée sur la technique de la rotative mais mon message est déjà bien assez long). Tous ces exemples entrent bien dans des séances d'AP.
Il y a un point qui me semble important. Chaque fois qu'on finit une étude de documents, il faut clore la séance avec ces trois questions :
- Que fallait-il comprendre de ce document ?
- Pourquoi vous ai-je fait étudier ce document ?
- Que faut-il retenir de cette séance ?
De même, pour les questions des compréhensions inférentielle (remplir les blances/non-dits du texte et mettre en relation) et critique (s'interroger sur les enjeux du texte), il est important de leur donner une culture ou de les laisser émettre des hypothèses. De même, pour la compréhension critique, il faut leur apprendre que c'est un questionnement et leur apprendre ce questionnement : Pour qui ce document a-t-il été fait ? Quelle est la part de subjectivité du document ? Pourquoi l'auteur a-t-il créé ce document ? etc.
Enfin, on peut s'amuser peu à peu à suivre d'autres pistes :
- faire croiser des documents sur le même sujet mais pas avec les mêmes points de vue et laisser les élèves se débrouiller.
- leur apprendre à faire des récits où les sources sont interrogées ce qui enrichit le récit ainsi élaboré.
- les faire problématiser l'analyse du document (travaux de Sylvain Doussot, MCF à l'université de Nantes).
Si on commence à travailler ainsi dès la 6e en construisant une progressivité adaptée à notre public pour atteindre en 3e un objectif commun, le passage au lycée sera très facile sur cette question.
EDIT : J'oubliais, il faut entraîner les élèves. Cela signifie fait au moins six séances de ce genre par an (je dirai une dizaine personnellement, mais je sais que ça n'est pas simple).
- Isis39Enchanteur
Cette approche m'intéresse beaucoup. J'y réfléchis depuis quelques temps, mais j'ai une difficulté pour m'y mettre : trouver des documents suffisamment "consistants".
Ainsi pour le chapitre de 6e sur Rome (du mythe à l'histoire), je n'arrive pas à trouver ce fameux document. Aurais-tu une idée ?
Ainsi pour le chapitre de 6e sur Rome (du mythe à l'histoire), je n'arrive pas à trouver ce fameux document. Aurais-tu une idée ?
- ElyasEsprit sacré
Sur Rome, je fais lire un roman jeunesse sur Romulus et Rémus, je fais ensuite une leçon sur Rome sous Auguste et après on est parti sur des extraits de Virgile et Tite-Live en insistant principalement sur l'identification et l'explication des enjeux.
Je finis avec les trois questions que j'ai mentionnées (que fallait-il comprendre ?/pourquoi avoir lu ces documents/ que faut-il retenir de la séance?) et j'ai fini mon chapitre avec le lien entre écriture des mythes et relation au pouvoir et à l'Etat dans la Rome antique. Je ne vais pas plus loin.
Je finis avec les trois questions que j'ai mentionnées (que fallait-il comprendre ?/pourquoi avoir lu ces documents/ que faut-il retenir de la séance?) et j'ai fini mon chapitre avec le lien entre écriture des mythes et relation au pouvoir et à l'Etat dans la Rome antique. Je ne vais pas plus loin.
- MalagaModérateur
Merci pour le partage de tes réflexions Elyas.
_________________
J'utilise des satellites coûtant plusieurs millions de dollars pour chercher des boîtes Tupperware dans la forêt ; et toi, c'est quoi ton hobby ?
- CaroliineNiveau 5
Bonjour,
Je te rejoins @ Elyas, sur le fait que dès la 6ème on peut travailler ces éléments. D’autant que c’est même le moment opportun pour leur donner une rigueur de travail ( en tenant compte de leurs capacités) qui leur sera utile ultérieurement.
Par ailleurs, je me pose une question peut être bête par rapport aux démarches que tu proposes. Si on fait étudier un document aux élèves en leur demandant d’identifier sa date, sa nature, information… on peut tout aussi bien rebondir avec eux sur la nature du document par exemple et son intérêt pour comprendre la problématique du cours….et soulever justement l’importance du droit dans les rapports sociaux (quand le texte est document juridique, un contrat par exemple..) ça permet de monter en généralité et participe à faire acquérir aux élèves une vision plus globale et globalisante du sujet…. Est-ce bien cela que tu souhaite faire acquérir aux élèves ? (en intégrant les compétences langagières nécessaires pour qu’ils puissent formaliser le tout par écrit..
Je te rejoins @ Elyas, sur le fait que dès la 6ème on peut travailler ces éléments. D’autant que c’est même le moment opportun pour leur donner une rigueur de travail ( en tenant compte de leurs capacités) qui leur sera utile ultérieurement.
Par ailleurs, je me pose une question peut être bête par rapport aux démarches que tu proposes. Si on fait étudier un document aux élèves en leur demandant d’identifier sa date, sa nature, information… on peut tout aussi bien rebondir avec eux sur la nature du document par exemple et son intérêt pour comprendre la problématique du cours….et soulever justement l’importance du droit dans les rapports sociaux (quand le texte est document juridique, un contrat par exemple..) ça permet de monter en généralité et participe à faire acquérir aux élèves une vision plus globale et globalisante du sujet…. Est-ce bien cela que tu souhaite faire acquérir aux élèves ? (en intégrant les compétences langagières nécessaires pour qu’ils puissent formaliser le tout par écrit..
- ElyasEsprit sacré
Caroliine a écrit:Bonjour,
Je te rejoins @ Elyas, sur le fait que dès la 6ème on peut travailler ces éléments. D’autant que c’est même le moment opportun pour leur donner une rigueur de travail ( en tenant compte de leur capacités) qui leur sera utile ultérieurement.
Par ailleurs, je me pose une question peut être bête par rapport aux démarches que tu proposes. Si on fait étudier un document aux élèves en leur demandant d’identifier sa date, sa nature, information… on peut tout aussi bien rebondir avec eux sur la nature du document par exemple et son intérêt pour comprendre la problématique du cours….et soulever justement l’importance du droit dans les rapports sociaux (quand le texte est document juridique, un contrat par exemple..) ça permet de monter en généralité et participe à faire acquérir aux élèves une vision plus globale et globalisante du sujet…. Est-ce bien cela que tu souhaite faire acquérir aux élèves ? (en intégrant les compétences langagières nécessaires pour qu’ils puissent formaliser le tout par écrit..
Oui, c'est tout à fait cela. On peut les faire accéder à la complexité. Je prends un exemple de document :
"Nous voulons édifier un village neuf près du village de Puybrun. Les redevances que les habitants devront nous verser pour les terres cultivées seront partagées par moitié avec le roi. Nous souhaitons que sur ces terres soient édifiés une église, un cimetière, des maisons de charité et une grange, dans laquelle seront gardés le blé, le vin et autres biens de notre terre avant d'être vendus."
Contrat entre Guiilaume, abbé cistercien de Dalon, et le roi de France Philippe III le Hardi, 1279.
Dans l'explication des enjeux du document, on s'interrogera sur la raison de l'écriture d'un contrat et pourquoi on verse la moitié au roi. On entre dès lors dans pas mal d'éléments de la vie rurale médiévale (contrat d'appariement entre un seigneur foncier et un seigneur qui a le pouvoir banal, entre un seigneur qui a des gens ou du matériel et un seigneur qui a des terres en friche, l'importance des moines dans le développement rural, l'importance de la religion, la question des rapports contractuels interpersonnels etc... bref, tu fais quasiment ton chapitre avec lui ^^).
- CaroliineNiveau 5
Je vois très bien dans ce cas, et je fonctionne comme cela avec mes élèves.
Ce que je trouve très intéressant dans cette démarche c'est que comme tu l'as très bien dit on peut quasiment appréhender tous les enjeux d'un chapitre à travers un document. Mais plus encore... En tant que "facilitateurs" de savoirs, pour nous enseignants, cette démarche permet justement après avoir travaillé autour d'un document ou plusieurs (quand différents acteurs.. sont impliqués et qu'il est essentiel d'évoquer leur place, rôle...), d'aborder le reste du chapitre avec des élèves plus aguerris et ayant bien saisis les multiples enjeux relatifs au chapitre travaillé. La suite du cours leur paraît donc "logique" comme ont pu me dire certains élèves.
ps: les élèves sont moins "la tête dans le guidon" et je rappelle aussi les finalités de l'histoire c'est étudier des faits événements... mais aussi développer une connaissance des institutions idéologies qui sont à l'origines de nos sociétés actuelles. Il y a donc une étape découverte / compréhension pour tendre vers une connaissance non pas uniquement érudite (par l'accumulation de faits mémorisés..) mais bien savante ( avec une réelle compréhension du rôle des institutions.. par exemple). Toujours adaptée bien évidemment au degré de maturité des jeunes.
Ce que je trouve très intéressant dans cette démarche c'est que comme tu l'as très bien dit on peut quasiment appréhender tous les enjeux d'un chapitre à travers un document. Mais plus encore... En tant que "facilitateurs" de savoirs, pour nous enseignants, cette démarche permet justement après avoir travaillé autour d'un document ou plusieurs (quand différents acteurs.. sont impliqués et qu'il est essentiel d'évoquer leur place, rôle...), d'aborder le reste du chapitre avec des élèves plus aguerris et ayant bien saisis les multiples enjeux relatifs au chapitre travaillé. La suite du cours leur paraît donc "logique" comme ont pu me dire certains élèves.
ps: les élèves sont moins "la tête dans le guidon" et je rappelle aussi les finalités de l'histoire c'est étudier des faits événements... mais aussi développer une connaissance des institutions idéologies qui sont à l'origines de nos sociétés actuelles. Il y a donc une étape découverte / compréhension pour tendre vers une connaissance non pas uniquement érudite (par l'accumulation de faits mémorisés..) mais bien savante ( avec une réelle compréhension du rôle des institutions.. par exemple). Toujours adaptée bien évidemment au degré de maturité des jeunes.
- Isis39Enchanteur
Elyas a écrit:Sur Rome, je fais lire un roman jeunesse sur Romulus et Rémus, je fais ensuite une leçon sur Rome sous Auguste et après on est parti sur des extraits de Virgile et Tite-Live en insistant principalement sur l'identification et l'explication des enjeux.
Je finis avec les trois questions que j'ai mentionnées (que fallait-il comprendre ?/pourquoi avoir lu ces documents/ que faut-il retenir de la séance?) et j'ai fini mon chapitre avec le lien entre écriture des mythes et relation au pouvoir et à l'Etat dans la Rome antique. Je ne vais pas plus loin.
Pas de texte avec une étude approfondie ?
- ElyasEsprit sacré
Si mais je le fais à la rentrée. Je n'ai pas encore choisi mon extrait.
- Isis39Enchanteur
Elyas a écrit:Si mais je le fais à la rentrée. Je n'ai pas encore choisi mon extrait.
Ah oui, tu as encore une semaine de vacances, toi !
- NeyrelleNiveau 6
Pour Rome, en 6e, je fais travailler les élèves sur un extrait de l'Enéide : dans l'épisode de la descente aux enfers (chant VI), le passage durant lequel Anchise présente sa descendance à Enée (Révélations et prophéties d'Anchise - Revue des héros romains). J'ai trouvé ce passage intéressant car il permet de travailler le contexte d'écriture du mythe mais aussi de différencier personnages mythologiques/personnages historiques (puisqu'ils s'y mêlent justement).
Je distingue aussi "Identifier/décrire/expliquer" mais avec un questionnaire (dont je ne suis pas nécessairement satisfaite). En revanche, j'ai fait rédiger une sorte de commentaire de documents dans le chapitre sur le monde des cités grecques. J'ai fait, avec eux, le commentaire d'un extrait de l'Iliade et du détail d'un vase du Ve siècle av. J.-C. A partir de ce modèle, ils ont dû me rédiger celui d'un extrait de l'Odyssée et du détail d'une coupe du Ve siècle av. J.-C.
Après, étant TZR sur des remplacements de durée courte/moyenne, j'ai un peu de mal à inscrire cela dans une progression cohérente... D'un autre côté, ça me permet de tester pas mal de choses.
Je distingue aussi "Identifier/décrire/expliquer" mais avec un questionnaire (dont je ne suis pas nécessairement satisfaite). En revanche, j'ai fait rédiger une sorte de commentaire de documents dans le chapitre sur le monde des cités grecques. J'ai fait, avec eux, le commentaire d'un extrait de l'Iliade et du détail d'un vase du Ve siècle av. J.-C. A partir de ce modèle, ils ont dû me rédiger celui d'un extrait de l'Odyssée et du détail d'une coupe du Ve siècle av. J.-C.
Après, étant TZR sur des remplacements de durée courte/moyenne, j'ai un peu de mal à inscrire cela dans une progression cohérente... D'un autre côté, ça me permet de tester pas mal de choses.
- Isis39Enchanteur
Neyrelle a écrit:[justify]Pour Rome, en 6e, je fais travailler les élèves sur un extrait de l'Enéide : dans l'épisode de la descente aux enfers (chant VI), le passage durant lequel Anchise présente sa descendance à Enée (Révélations et prophéties d'Anchise - Revue des héros romains). J'ai trouvé ce passage intéressant car il permet de travailler le contexte d'écriture du mythe mais aussi de différencier personnages mythologiques/personnages historiques (puisqu'ils s'y mêlent justement).
Cela m'intéresse. Tu les fais travailler comme Elyas sans questionnaire ? Comment font-ils pour différencier personnages mythologiques et personnages historiques ? A quel moment du cours fais-tu cette étude ?
- ArtysiaVénérable
Merci Elyas pour ce long message pratique. Je fais davantage travailler sur document mais pas encore autant que je le souhaiterais (on ne peut pas tout changer d'un coup ). Je n'arrive pas à construire des tableaux car ma logique ne fonctionne pas ainsi mais je vais pouvoir le proposer aux élèves.
- NeyrelleNiveau 6
Isis39 a écrit:
Cela m'intéresse. Tu les fais travailler comme Elyas sans questionnaire ? Comment font-ils pour différencier personnages mythologiques et personnages historiques ? A quel moment du cours fais-tu cette étude ?
Non, justement, pour cette étude j'ai fait un questionnaire. C'est vrai que ça oriente la réflexion des élèves et que cela la limite donc, ce qui fait que je n'en suis pas vraiment satisfaite.
Je fais cette étude après avoir travaillé le mythe des origines (à l'aide du dossier documentaire du manuel hatier p.96-97) sous forme d'un récit, si bien qu'ils connaissent déjà certains des personnages mythologiques (Anchise, Enée, Ascagne/Iule, Romulus).
Pour qu'ils travaillent le texte à l'aide du questionnaire en autonomie, je leur donne un glossaire avec les définitions des mots difficiles et des explications sur les différents personnages (à l'exception de ceux évoqués lors de la séance précédente). Ils doivent souligner, dans le texte, le nom des personnages mythologiques d'une couleur et les noms des personnages historiques d'une autre et souligner le nom au crayon à papier lorsqu'il y a incertitude.
Je fais cette étude après avoir travaillé le mythe des origines (à l'aide du dossier documentaire du manuel hatier p.96-97) sous forme d'un récit, si bien qu'ils connaissent déjà certains des personnages mythologiques (Anchise, Enée, Ascagne/Iule, Romulus).
Pour qu'ils travaillent le texte à l'aide du questionnaire en autonomie, je leur donne un glossaire avec les définitions des mots difficiles et des explications sur les différents personnages (à l'exception de ceux évoqués lors de la séance précédente). Ils doivent souligner, dans le texte, le nom des personnages mythologiques d'une couleur et les noms des personnages historiques d'une autre et souligner le nom au crayon à papier lorsqu'il y a incertitude.
- FoulquartNiveau 6
Bonjour Elias,
Je découvre avec grand intérêt ton post très inspirant.
Petite question : si tu ne fais plus de questionnaires et que tu fais cet exercice de présentation de document 8 à 10 fois dans l'année, le reste du temps, tu ne travailles que par tâches complexes ou changement de langage ?
Je découvre avec grand intérêt ton post très inspirant.
Petite question : si tu ne fais plus de questionnaires et que tu fais cet exercice de présentation de document 8 à 10 fois dans l'année, le reste du temps, tu ne travailles que par tâches complexes ou changement de langage ?
- ElyasEsprit sacré
Je travaille par pratiques langagières, en fait. On peut nommer ça tâche complexes ou changement de langage. Les travaux que je donne en classe sont principalement de cinq ordres :
- expliquer.
- périodiser.
- conceptualiser.
- spatialiser.
- mémoriser.
Donc, mes élèves écrivent des récits ou des synthèses, font des commentaire de documents, émettent des hypothèses, mettent en relation des informations et justifient leurs choix, cartographient, créent des bibliographies/webographie commentées etc. Là, mes 6e ont un croquis sur Cancun à réaliser sans questionnaire et mes 5e font une carte qui raconte la première circumnavigation de Magellan et El Cano avec juste la consigne "Réalisez une carte qui raconte le voyage de Magellan et El Cano avec les documents des pages 106 et 107" et la leçon précédente était une étude de document unique, la lettre de François 1er à Giorgio Gritti en 1516.
Je n'utilise les questionnaires que dans trois cas :
- faire comprendre aux élèves le questionnement disciplinaire (ce qui me permet de faire disparaître le questionnaire dès le 2e trimestre).
- former à un langage (en 6e, mes questionnaires aboutissant à de la production de cartes durent longtemps, jusqu'au 4e chapitre de géographie).
- les QSV (questions socialement vives) sur lesquelles je me sens fragile pour traiter librement (et là, j'avoue, j'entre dans le modèle des 4R pleinement et totalement).
- expliquer.
- périodiser.
- conceptualiser.
- spatialiser.
- mémoriser.
Donc, mes élèves écrivent des récits ou des synthèses, font des commentaire de documents, émettent des hypothèses, mettent en relation des informations et justifient leurs choix, cartographient, créent des bibliographies/webographie commentées etc. Là, mes 6e ont un croquis sur Cancun à réaliser sans questionnaire et mes 5e font une carte qui raconte la première circumnavigation de Magellan et El Cano avec juste la consigne "Réalisez une carte qui raconte le voyage de Magellan et El Cano avec les documents des pages 106 et 107" et la leçon précédente était une étude de document unique, la lettre de François 1er à Giorgio Gritti en 1516.
Je n'utilise les questionnaires que dans trois cas :
- faire comprendre aux élèves le questionnement disciplinaire (ce qui me permet de faire disparaître le questionnaire dès le 2e trimestre).
- former à un langage (en 6e, mes questionnaires aboutissant à de la production de cartes durent longtemps, jusqu'au 4e chapitre de géographie).
- les QSV (questions socialement vives) sur lesquelles je me sens fragile pour traiter librement (et là, j'avoue, j'entre dans le modèle des 4R pleinement et totalement).
- ElyasEsprit sacré
Bon, je continue à m'amuser avec le travail sur document.
Je ne travaille quasiment plus avec des questionnaires mais pratiquement que par verbes de consignes (identifier, décrire et expliquer le document et j'hésite à utiliser "analyser le document" ce qui sous-entendrait qu'analyser signifie "identifier, décrire, expliquer le document" ce qui en ferait un verbe "patron" comme raconter ou réaliser une carte).
Cela fait que je suis en profond désaccord avec ce collègue (http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2019/04/19042019Article636912544959070542.aspx) qui vante le questionnaire comme supérieur à la consigne. Pour moi, retourner au questionnaire est une régression intellectuelle majeure. Cependant, travailler par consigne induit que les élèves ont intériorisé le patron langagier, le questionnement interne disciplinaire et le raisonnement disciplinaire ce qui leur permet de questionner avec pertinence le document (ou les documents) sans avoir besoin de questionnaire. Cela demande une approche d'apprentissage reprenant le modèle de l'enseignement explicite de B. Rosenshine (modelage, guidance, autonomie) mais élaboré à l'échelle de l'année en tant que progressivité de la maîtrise de l'analyse de document. Si on n'a pas cette approche, le collègue a raison. Il vaut mieux le questionnaire. Cependant, cela aboutit au fait que des 6e et des 5e maîtrisent mieux le raisonnement historique que des Tle et c'est triste. Je ne vais pas le cacher mais je pense, preuve à l'appui maintenant, qu'on peut donner aux élèves dès la 6e les moyens de produire ce qui n'est souvent attendu qu'en 2de. Identifier ne pose aucun souci ni la description du document. C'est toute la question de l'explication/contextualisation/mise en lumière des implicites qui est cruciale. Là, deux approches : faire les analyses de documents après le cours pour que les élèves aient les moyens (mais là, il faut aussi que les élèves aient accès aux biographies des auteurs pour pouvoir voir les réseaux de l'époque et comprendre des sous-entendus, comme savoir que l'auteur est le cousin du roi dont il vante les mérites) ou les autoriser à l'émission d'hypothèses. Ce dernier point effraie parce que les clichés et les perles véhiculent un imaginaire de l'élève qui va parler de la bombe nucléaire pour l'Antiquité. Or, tous les travaux récents et les travaux quotidiens que de nombreux collègues reçoivent témoignent qu'au contraire les élèves sont extrêmement pertinents même s'ils n'ont pas toujours raison (mais ils ont souvent raison). C'est lié à l'usage de la pensée naturelle (le bon sens, le sens commun) en histoire et aux analogies (voir travaux de Cariou et de Doussot à ce sujet). L'objectif est de permettre aux élèves de passer d'une pensée naturelle ) une pensée historienne. Cela demande donc de travailler souvent les documents et de les y entraîner.
Enfin, je suis très content de mon travail sur la construction du corpus documentaire ( voir ici : https://www.neoprofs.org/t94827p875-hg-programmes-2016-le-programme-de-5e#4642048 ).
Cependant, je constate au fil des rencontres, des discussions et des lectures que le travail sur document, pourtant le fondement même de notre savoir disciplinaire, ne fait pas du tout consensus dans la profession hormis sur la présentation/identification de documents. Cela m'interroge.
Il y a aussi la question du traitement des documents informatifs et des dossiers de documents composites. J'en parlerai plus tard si ça intéresse les gens (je donne beaucoup de formations sur ce sujet en ce moment et c'est passionnant).
Je ne travaille quasiment plus avec des questionnaires mais pratiquement que par verbes de consignes (identifier, décrire et expliquer le document et j'hésite à utiliser "analyser le document" ce qui sous-entendrait qu'analyser signifie "identifier, décrire, expliquer le document" ce qui en ferait un verbe "patron" comme raconter ou réaliser une carte).
Cela fait que je suis en profond désaccord avec ce collègue (http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2019/04/19042019Article636912544959070542.aspx) qui vante le questionnaire comme supérieur à la consigne. Pour moi, retourner au questionnaire est une régression intellectuelle majeure. Cependant, travailler par consigne induit que les élèves ont intériorisé le patron langagier, le questionnement interne disciplinaire et le raisonnement disciplinaire ce qui leur permet de questionner avec pertinence le document (ou les documents) sans avoir besoin de questionnaire. Cela demande une approche d'apprentissage reprenant le modèle de l'enseignement explicite de B. Rosenshine (modelage, guidance, autonomie) mais élaboré à l'échelle de l'année en tant que progressivité de la maîtrise de l'analyse de document. Si on n'a pas cette approche, le collègue a raison. Il vaut mieux le questionnaire. Cependant, cela aboutit au fait que des 6e et des 5e maîtrisent mieux le raisonnement historique que des Tle et c'est triste. Je ne vais pas le cacher mais je pense, preuve à l'appui maintenant, qu'on peut donner aux élèves dès la 6e les moyens de produire ce qui n'est souvent attendu qu'en 2de. Identifier ne pose aucun souci ni la description du document. C'est toute la question de l'explication/contextualisation/mise en lumière des implicites qui est cruciale. Là, deux approches : faire les analyses de documents après le cours pour que les élèves aient les moyens (mais là, il faut aussi que les élèves aient accès aux biographies des auteurs pour pouvoir voir les réseaux de l'époque et comprendre des sous-entendus, comme savoir que l'auteur est le cousin du roi dont il vante les mérites) ou les autoriser à l'émission d'hypothèses. Ce dernier point effraie parce que les clichés et les perles véhiculent un imaginaire de l'élève qui va parler de la bombe nucléaire pour l'Antiquité. Or, tous les travaux récents et les travaux quotidiens que de nombreux collègues reçoivent témoignent qu'au contraire les élèves sont extrêmement pertinents même s'ils n'ont pas toujours raison (mais ils ont souvent raison). C'est lié à l'usage de la pensée naturelle (le bon sens, le sens commun) en histoire et aux analogies (voir travaux de Cariou et de Doussot à ce sujet). L'objectif est de permettre aux élèves de passer d'une pensée naturelle ) une pensée historienne. Cela demande donc de travailler souvent les documents et de les y entraîner.
Enfin, je suis très content de mon travail sur la construction du corpus documentaire ( voir ici : https://www.neoprofs.org/t94827p875-hg-programmes-2016-le-programme-de-5e#4642048 ).
Cependant, je constate au fil des rencontres, des discussions et des lectures que le travail sur document, pourtant le fondement même de notre savoir disciplinaire, ne fait pas du tout consensus dans la profession hormis sur la présentation/identification de documents. Cela m'interroge.
Il y a aussi la question du traitement des documents informatifs et des dossiers de documents composites. J'en parlerai plus tard si ça intéresse les gens (je donne beaucoup de formations sur ce sujet en ce moment et c'est passionnant).
- LaotziSage
Dans le lien que tu cites, Thibaut Poirot (choix un peu curieux car il ne doit enseigner dans le secondaire que depuis deux ans, les réponses témoignent d'une certaine candeur) évoque l'épreuve de bac (du futur contrôle continu) visiblement reprise de ce qui existe depuis la réforme précédente, à savoir l'étude critique d'un ou de deux documents. Bien sûr, dans le travail quotidien de la classe, c'est un travail stimulant, parce que le professeur choisit un document pertinent, qu'il le propose au bon moment (avant ou après comme tu le développes, selon son choix, dans tous les cas en s'inscrivant dans une démarche réfléchie). Mais l'épreuve de bac pose incontestablement des problèmes sérieux. Les documents doivent être suffisamment généraux pour être analysés par tous les élèves de France. Surtout, c'est une épreuve qui demande un jeu d'équilibre entre la paraphrase et la récitation de cours. Or, les documents proposés au bac sont très souvent des prétexte à la récitation des connaissances. Soit les documents sont très riches, et finalement les élèves ne font qu'une paraphrase reformulée, soit ils sont pauvres et ils les prennent comme prétexte à réciter des documents.
Après, je ne dis pas qu'une épreuve de bac avec questionnaire serait plus pertinente (c'est ce qui se fait toujours en série techno, et ça se limite très largement à du prélèvement d'information). Peut-être que la banque d'épreuves, en permettant à une équipe de choisir les sujets qui lui semblent les plus pertinents, résoudra en partie le problème des sujets de bac indigents (je dis ça alors que je suis totalement opposé à ce contrôle continu) mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une fracture entre l'idéal du commentaire de documents (tel qu'on le pratique dans le supérieur, la consigne disparaissant finalement même elle aussi) et ce qui est proposé aux élèves sur des programmes trop lourds qui ne nous laissent de toute façon pas le temps d'approfondir sérieusement cela en classe et de les amener à une véritable étude critique.
Après, je ne dis pas qu'une épreuve de bac avec questionnaire serait plus pertinente (c'est ce qui se fait toujours en série techno, et ça se limite très largement à du prélèvement d'information). Peut-être que la banque d'épreuves, en permettant à une équipe de choisir les sujets qui lui semblent les plus pertinents, résoudra en partie le problème des sujets de bac indigents (je dis ça alors que je suis totalement opposé à ce contrôle continu) mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une fracture entre l'idéal du commentaire de documents (tel qu'on le pratique dans le supérieur, la consigne disparaissant finalement même elle aussi) et ce qui est proposé aux élèves sur des programmes trop lourds qui ne nous laissent de toute façon pas le temps d'approfondir sérieusement cela en classe et de les amener à une véritable étude critique.
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"Trouvez donc bon qu'au lieu de vous dire aussi, adieu comme autrefois, je vous dise, adieu comme à présent."
- ElyasEsprit sacré
Je comprends tout à fait ce que tu décris et expliques par rapport à la question de cet exercice dans le cadre du baccalauréat - tronc commun. Il est extrêmement curieux qu'il n'existe pas dans la spécialité. Je pense que le principal souci vient de deux dynamiques :
- à l'examen, on veut surtout du contenu académique, pas réellement la prise de risque du raisonnement disciplinaire académique (la question de l'émission d'hypothèses est un sujet extrêmement clivant pour les multiples fois où je l'ai abordé professionnellement).
- l'aspect national de l'examen (mais il est devenu local).
Je partage aussi ton interrogation sur la pertinence du choix de la personne interviewée par le Café pédagogique.
Après, je ne fais pas partie des gens qui pensent qu'il faut supprimer un exercice parce qu'il est difficile à évaluer par rapport à l'idéal. En fait, le problème, ce sont les examens terminaux.
Ce que je trouve intéressant dans ton propos est que la finalité du travail sur document est d'aller vers le patron langagier du commentaire de document académique. En gros, on a : questionnaire --> consignes (les consignes levier qui permettent de faire tout le commentaire dans toutes ses dimensions) --> consigne-patron (la consigne "analyser le document qui appelle à faire le reste) --> patron (le commentaire de document où on n'a que le document et, étant formé, on sait ce qu'on a à faire sans qu'on nous le dise).
- à l'examen, on veut surtout du contenu académique, pas réellement la prise de risque du raisonnement disciplinaire académique (la question de l'émission d'hypothèses est un sujet extrêmement clivant pour les multiples fois où je l'ai abordé professionnellement).
- l'aspect national de l'examen (mais il est devenu local).
Je partage aussi ton interrogation sur la pertinence du choix de la personne interviewée par le Café pédagogique.
Après, je ne fais pas partie des gens qui pensent qu'il faut supprimer un exercice parce qu'il est difficile à évaluer par rapport à l'idéal. En fait, le problème, ce sont les examens terminaux.
Ce que je trouve intéressant dans ton propos est que la finalité du travail sur document est d'aller vers le patron langagier du commentaire de document académique. En gros, on a : questionnaire --> consignes (les consignes levier qui permettent de faire tout le commentaire dans toutes ses dimensions) --> consigne-patron (la consigne "analyser le document qui appelle à faire le reste) --> patron (le commentaire de document où on n'a que le document et, étant formé, on sait ce qu'on a à faire sans qu'on nous le dise).
- Volo'Neoprof expérimenté
Une petite question me taraude, Elyas, et je ne sais plus si tu l'as évoqué dans les pages précédentes.
Comment construis-tu le sens des verbes avec les élèves ? Est-ce que tu passes par des séances qui se fondent sur un questionnaire pour construire le verbe ? Ou est-ce que tu cherches à construire le sens du verbe à partir des impressions des élèves ?
J'imagine qu'une fois que les élèves sont habitués à travailler par les verbes de consigne, c'est aisé pour eux de mettre le sens. Mais quid de l'étape antérieure ?
Sur ton message de départ, tu dis que tu les aiguilles sur les attendus que toi tu mets sur les verbes. Est-ce tout ?
Comment construis-tu le sens des verbes avec les élèves ? Est-ce que tu passes par des séances qui se fondent sur un questionnaire pour construire le verbe ? Ou est-ce que tu cherches à construire le sens du verbe à partir des impressions des élèves ?
J'imagine qu'une fois que les élèves sont habitués à travailler par les verbes de consigne, c'est aisé pour eux de mettre le sens. Mais quid de l'étape antérieure ?
Sur ton message de départ, tu dis que tu les aiguilles sur les attendus que toi tu mets sur les verbes. Est-ce tout ?
- ElyasEsprit sacré
En fait, ça va très vite. Je n'ai au final qu'une petite dizaine de verbes (localiser, situer, décrire, expliquer, caractériser, identifier, raconter, cartographier, réaliser un corpus documentaire critique, justifier, analyser, comparer, confronter). Certains sont des verbes de consignes-briques (localiser, situer, décrire, expliquer, caractériser, justifier, identifier), d'autres des verbes de consignes-patron (raconter, cartographier, analyser, réaliser un corpus documentaire critique) et certains sont rares (confronter, comparer). Etant surtout historien, je n'ai pas exploiter à fond comparer ou développer catégoriser mais c'est possible.
Je travaille, je me rends compte, dès la première séance avec des verbes de consigne. J'explique et explicite mes verbes-briques avec des travaux les utilisant. Puis, quand ils les maîtrisent, je passe aux verbes-patrons.
En gros, en 6e, je fais une séance sur des peintures du Paléolithique où on travaille situer, identifier, décrire, caractériser. Puis, je fais un dépliant sur des sites néolithiques où on travaille localiser, situer, décrire, expliquer, caractériser. En géographie, je fais pareil. Quand j'utilise mes verbes-patrons, je mets entre parenthèses les verbes-briques qui y sont associés et des questions s'il faut.
Je me rends compte que je n'utilise plus que 7-8 questionnaires en 6e et 2-3 en 5e-4e-3e. Je ne fonctionne quasiment que par verbes de consignes et ce, dès le début de l'année.
En fait, c'est surtout que j'ai réfléchi à quels étaient les verbes de consignes que j'utilisais le plus, je les ai définis et ils sont les outils de ma mallette de travail quotidien. C'est devenu très naturel pour moi.
Cependant, je définis la signification du verbe, ses attentes et les questions qu'il initie et je fais, une fois le travail fait, de la rétro-action avec mes élèves (que veut dire ce verbe ? que faut-il faire ? quelles questions permet-il de résoudre ? cela demande quelle forme de discours ? etc).
Le but est que je leur donne à la fin qu'une seule consigne : raconter / cartographier / analyser le document / réaliser un corpus documentaire critique. En tout cas, ça, c'est en histoire. N'étant pas géographe ou didacticien de la géographie, je n'ai pas encore trop pensé cela en géographie (le plus drôle est que mes collègues pensent que je suis géographe et obsédé par la cartographie ^^ mon analyse est que juste parce que je fais faire des cartes, on me pense géographe).
Je travaille, je me rends compte, dès la première séance avec des verbes de consigne. J'explique et explicite mes verbes-briques avec des travaux les utilisant. Puis, quand ils les maîtrisent, je passe aux verbes-patrons.
En gros, en 6e, je fais une séance sur des peintures du Paléolithique où on travaille situer, identifier, décrire, caractériser. Puis, je fais un dépliant sur des sites néolithiques où on travaille localiser, situer, décrire, expliquer, caractériser. En géographie, je fais pareil. Quand j'utilise mes verbes-patrons, je mets entre parenthèses les verbes-briques qui y sont associés et des questions s'il faut.
Je me rends compte que je n'utilise plus que 7-8 questionnaires en 6e et 2-3 en 5e-4e-3e. Je ne fonctionne quasiment que par verbes de consignes et ce, dès le début de l'année.
En fait, c'est surtout que j'ai réfléchi à quels étaient les verbes de consignes que j'utilisais le plus, je les ai définis et ils sont les outils de ma mallette de travail quotidien. C'est devenu très naturel pour moi.
Cependant, je définis la signification du verbe, ses attentes et les questions qu'il initie et je fais, une fois le travail fait, de la rétro-action avec mes élèves (que veut dire ce verbe ? que faut-il faire ? quelles questions permet-il de résoudre ? cela demande quelle forme de discours ? etc).
Le but est que je leur donne à la fin qu'une seule consigne : raconter / cartographier / analyser le document / réaliser un corpus documentaire critique. En tout cas, ça, c'est en histoire. N'étant pas géographe ou didacticien de la géographie, je n'ai pas encore trop pensé cela en géographie (le plus drôle est que mes collègues pensent que je suis géographe et obsédé par la cartographie ^^ mon analyse est que juste parce que je fais faire des cartes, on me pense géographe).
- Christian-HG-TZR67Niveau 6
Merci Elyas pour ces idées....
Je vais essayer d'en faire mon miel avec la Réforme Blanquer....
Je vais essayer d'en faire mon miel avec la Réforme Blanquer....
- Dadoo33Grand sage
Elyas, qu’est-ce-qu’un verbe brique et un verbe patron,stp? Je crois comprendre mais préfère être sure.
- ElyasEsprit sacré
En gros, dans mon imaginaire (ce n'est pas du tout un vocable existant), un verbe de consigne brique est un verbe qui entre dans une production complexe et qui s'associe à d'autres pour produire des patrons (récit, carte, commentaire de document etc). Le verbe de consigne patron, lui, est le verbe de consigne qui sous-entend les verbes-briques pour produire le patron demandé (récit, carte, commentaire de document etc). Ils permettent de passer de la pensée naturelle à la pensée historienne/géographe et de lever l'implicite.
Il faut me dire si je suis clair. Pour moi, on pose les briques pour construire la maison (le patron).
Il faut me dire si je suis clair. Pour moi, on pose les briques pour construire la maison (le patron).
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