Assassinat de notre collègue Samuel Paty

Je n'ai pas prévu de la faire (sauf si les élèves m'en parlent d'eux même)

zigmag17 a écrit:

Clecle78 a écrit:Et il se passait quoi si tu disais non ?

Je t'envoie un mp clecle si tu veux des précisions

Je ne comprends pas, des élèves fouillaient les professeurs ? Comment est-ce possible ???

Stered a écrit:J'ai aussi une classe difficile, mais gentille sur ce créneau. Ils m'ont demandé - innocemment - pourquoi on ferait une minute de silence. Je leur ai dit que si eux avaient oublié ces faits (ils étaient en primaire quand M. Paty a été assassiné) ou n'y pensaient pas souvent, pour nous, professeurs, c'était un traumatisme brûlant. Je leur ai parlé des familles des deux victimes, d'eux aussi. Et je leur ai dit de se rappeler lundi que pour les adultes face à eux, c'était un moment de recueillement douloureux.
Appel à l'empathie. C'est aussi important, je pense, de les décentrer d'eux-mêmes. Et je suis d'accord avec Isis : cette commémoration, elle est plutôt pour les adultes que pour les élèves.

Tout à fait. C'est que je fais en lycée. Et l'année dernière, des étudiants de BTS sont sortis en me souhaitant bon courage, en me demandant comment j'allais.

Clp a écrit:

zigmag17 a écrit:

Clecle78 a écrit:Et il se passait quoi si tu disais non ?

Je t'envoie un mp clecle si tu veux des précisions

Je ne comprends pas, des élèves fouillaient les professeurs ? Comment est-ce possible ???

Je t'enverrai un mp si tu veux parce que je ne voulais pas m'étendre là-dessus ici, je l'ai évoqué parce que mis en regard avec la minute de silence ça me paraît distordu mais ce n'est pas l'objet du fil. J'en ai déjà parlé sur un autre fil mais je ne sais plus lequel

Ok Zigmag !

Nous, il y a eu la minute de silence. Et les collègues (certains) fidèles à eux-mêmes "Ah j'ai un devoir, comme ça, ils seront en silence au moins ah ah" "De toute façon, moi je ne connais pas bien l'histoire" Et quand j'explique "Ah mais toi tu es pointue sur le sujet, moi je ne sais pas tout ça. " Ben, il n'y a qu'à écouter en fait. On parle de deux collègues assassin"s et un décapité. On leur doit ça au moins.

Une bonne chose.

Publié aujourd'hui par Le Monde, un entretien avec Ismaïl Ferhat et Sébastien Ledoux, auteurs d'Une Ecole sous le choc ? Le monde enseignant après l’assassinat de Samuel Paty.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/10/14/attentat-contre-samuel-paty-la-comptabilite-des-contestations-de-la-minute-de-silence-masque-la-reponse-pedagogique-des-enseignants_6351657_3224.html

Comme prévu, beaucoup de collègues n'ont pas vu la minute de silence dans la liste longue comme un jour sans pain envoyée par le CDE ("Ah bon ? Quelle minute de silence ? C'était écrit où ? ah ben tant pis."). D'autres, pris par leur cours, ont oublié de la faire (vu l'heure prévue, cela ne m'étonne pas et l'une de mes collègues était vraiment mal d'avoir pu oublier).
J'ai dû expliquer à mes élèves qui était Dominique Bernard, et manisfestement certains se demandaient pourquoi il fallait faire cette minute de silence (ils ne se sentent pas concernés, et n'ont peut-être pas tort : ce sont des élèves de seconde, et ils ne sont pas touchés, concernés comme nous pouvons l'être).
Bref, tout était mal fichu dans cette organisation. Je suis vraiment désabusée.

Bonsoir,
Tu as entièrement raison @roxanne. Nous devons bien ça à nos collègues.
Je voulais vous faire part d’une initiative de notre CDE qui me laisse dubitative. Je ne sais pas trop quoi en penser.

Nous avons tous reçu un message nous invitant (nous n’avons visiblement pas le choix) à lire à nos élèves pendant notre cours (jour et heure précis) une lettre à la mémoire de S. Paty écrite, rédigée de la main même de ce CDE. Nous avons donc à transmettre les mots mêmes du CDE et diffuser ses idées et formulations. Qu’en pensez vous ?

ça me semble une idée assez bizarre. Bien sûr il faut voir la teneur de la lettre : si ce sont des idées et des formulations "convenues" (le mot est mal choisi vues les circonstances, mais je n'en trouve pas de mieux), à la limite pourquoi pas. Mais ça ne me mettrait pas très à l'aise. ça fait un peu "ego-trip du CDE" et ça me paraît innapproprié.

Pour ma part j'ai découvert à 7h45 en salle des profs les modalités de notre minute de silence. Apparemment un mail a circulé, mais je n'étais pas dans la boucle et je ne l'ai pas reçu. Une minute a été faite à 9h15 : sonnerie spécifique, puis quelques mots du proviseur, une minute de silence, un message "fin de la minute de silence". Mes élèves se sont raisonnablement bien tenus (j'avais peur que ce soit pire) mais ils ne savaient pas pourquoi c'était, je le leur ai expliqué rapidement.

Hilde a écrit:ça me semble une idée assez bizarre. Bien sûr il faut voir la teneur de la lettre : si ce sont des idées et des formulations "convenues" (le mot est mal choisi vues les circonstances, mais je n'en trouve pas de mieux), à la limite pourquoi pas. Mais ça ne me mettrait pas très à l'aise. ça fait un peu "ego-trip du CDE" et ça me paraît innapproprié.

Pour ma part j'ai découvert à 7h45 en salle des profs les modalités de notre minute de silence. Apparemment un mail a circulé, mais je n'étais pas dans la boucle et je ne l'ai pas reçu. Une minute a été faite à 9h15 : sonnerie spécifique, puis quelques mots du proviseur, une minute de silence, un message "fin de la minute de silence". Mes élèves se sont raisonnablement bien tenus (j'avais peur que ce soit pire) mais ils ne savaient pas pourquoi c'était, je le leur ai expliqué rapidement.

« Ego trip du CDE ». C’est exactement ça. Combien de temps allons nous continuer d’être infantilisés de la sorte ? La situation liée à l’hommage à notre collègue augmente mon mal aise.

Je viens de regarder l'émission C ce soir, sur France 5, sur le thème "Paty-Bernard : Les profs encore face à la peur ?".

https://www.france.tv/france-5/c-ce-soir/saison-5/6540458-paty-bernard-les-profs-encore-face-a-la-peur.html

Pour tout dire, j'ai été déçu et largement agacé de la manière d'aborder la question. Je n'en peux plus d'entendre le mantra "il faut mieux former les professeurs" donné comme solution à tous les problèmes, et plus particulièrement à ceux causés par l'instrumentalisation meurtrière du religieux.

Pourquoi "mieux former" les professeurs? Pour qu'en faisant de meilleurs cours ils ne risquent plus de se faire assassiner? Serait-ce donc que ceux qu'ils font sont si mauvais? Et professeur, ne serait-ce pas une profession intellectuelle, au fait? Quand reconnaîtra-t-on enfin que nous sommes des professionnels de l'enseignement (formés en principe à bac + 5), avec ce que cela implique comme expertise? Personnellement je trouve insupportable que les médias (qui d'ailleurs ne font en cela qu'emboîter le pas à l'institution) nous supposent toujours si peu capables de nous informer - et même, oui, de nous former - par nous-mêmes, et d'analyser avec suffisamment de recul et de finesse une situation de cours. Que la participation à des formations s'avère parfois nécessaire, c'est un fait, mais qu'on nous laisse en décider pour nous-mêmes. Faire de cette question de la formation l'élément principal de la solution montre surtout qu'on n'en a pas - de solution - et je ne peux m'empêcher d'y voir une sorte d'inversion sournoise de la responsabilité. Comme si sur une voie où sévissent des meurtriers de la route on prétendait régler le problème en apprenant aux piétons à mieux traverser.

Et le comble à mon sens est d'entendre "il faut mieux former les professeurs sur les caricatures". Ah mais ça tombe bien! Si ceux qui nous conseillent de nous former commençaient par employer les termes vraiment adéquats en parlant de dessins satiriques ou de dessins de presse. Mais j'ai l'impression là d'un combat perdu depuis longtemps, tant ce terme de "caricature" s'est imposé partout, jusque dans les articles de Wikipédia se rapportant aux attentats. Pourtant, nommer ces objets de travers ne fait que conforter insidieusement le malentendu sur lequel, dans l'opinion publique, s'appuient les réticences malsaines de certains concernant le sens des publications de Charlie Hebdo ou la démarche pédagogique de Samuel Paty. Se demander pourquoi telle expression est plus adaptée que telle autre et employer des mots plus justes serait peut-être déjà un bon point de départ. Et pas besoin pour cela de suivre des heures de formation.

Bjr,
Dans mon lycée, mail ce WE annonçant l'organisation de la cérémonie envoyé à tous par l'ENT (collègues, parents, élèves).
9h45 arrêt des cours rassemblement dans la cour. Tous les collègues étaient invités à venir et à se fondre dans la foule pour accompagner les élèves. 9h50, début du discours que peu ont entendu, la sono est pourrie, en présence du maire, des gendarmes, des parents élus au CA. Et là, une vague de silence qui se diffuse dans la foule, même les zozos finissent par se faire et écouter.
Fin du discours, minute de silence, scrupuleusement respectée. "Merci" du chef à la fin, dispersion et recré.
Franchement, j'ai apprecié tant l'organisation que la chance d'être dans un tel bahut avec des élèves en or, malgré les guignols.

Aperçu par hasard a écrit:

Pourquoi "mieux former" les professeurs? Pour qu'en faisant de meilleurs cours ils ne risquent plus de se faire assassiner? Serait-ce donc que ceux qu'ils font sont si mauvais?

ça me rend maboule aussi. Une fois j'ai demandé à un IPR ce qui était prévu comme formation, si ça consistait à éviter les coups de couteau, parce que bon, pour la laïcité, merci mais j'en savais autant sinon plus que lui. Il n'a pas trop trop apprécié.

Aperçu par hasard a écrit:
Et le comble à mon sens est d'entendre "il faut mieux former les professeurs sur les caricatures".

Mais là aussi, c'est quoi le délire ? Les fameux dessins sont-ils devenus un point de passage absolument indispensable à tout élève ? Pourquoi ? Je n'ai jamais utilisé la projection de ces dessins en cours, je ne pense pas les utiliser un jour (je ne les trouve ni beaux, ni intéressants, ni utiles à mon propos). Jusqu'à preuve du contraire je ne pense pas non plus faire un cours indigne. Faut aussi arrêter de saouler tout le monde avec ça.

Aperçu par hasard a écrit:Pourquoi "mieux former" les professeurs? Pour qu'en faisant de meilleurs cours ils ne risquent plus de se faire assassiner? Serait-ce donc que ceux qu'ils font sont si mauvais? Et professeur, ne serait-ce pas une profession intellectuelle, au fait? Quand reconnaîtra-t-on enfin que nous sommes des professionnels de l'enseignement (formés en principe à bac + 5), avec ce que cela implique comme expertise? [...]
Faire de cette question de la formation l'élément principal de la solution montre surtout qu'on n'en a pas - de solution - et je ne peux m'empêcher d'y voir une sorte d'inversion sournoise de la responsabilité. Comme si sur une voie où sévissent des meurtriers de la route on prétendait régler le problème en apprenant aux piétons à mieux traverser.

Et le comble à mon sens est d'entendre "il faut mieux former les professeurs sur les caricatures". Ah mais ça tombe bien! Si ceux qui nous conseillent de nous former commençaient par employer les termes vraiment adéquats en parlant de dessins satiriques ou de dessins de presse.

Presque complètement d'accord avec ce que je cite, et tout particulièrement la partie en gras ; ça me fait bondir et j'en ai également ras-le-bol.
Une réserve sur les professeurs bien formés : quand je lis et entends certains collègues... non. Beaucoup de confusions. Mais il se trouve que cela concerne principalement, dans ce que j'ai pu voir du moins, des collègues de sciences et des collègues jeunes : le parcours d'études poussées dans les disciplines de sciences humaines et lettres/philo/arts semble donner de meilleurs outils sur ces sujets quand même.

Pour compléter le bal des horreurs : chez nous, la première idée avait été de faire la minute de silence mercredi, à la suite (ou juste avant, je ne sais plus) le PPMS (version intrusion, bien sûr), dans l’idée que, quitte à déranger un cours, autant faire d’une pierre deux coups. Ce, donc, mercredi 16 octobre.
Heureusement les collègues qui en ont eu vent ont réussi à modifier les choses, mais on reste avec un PPMS à la date anniversaire.

Pour ma part hier j’avais un tout petit groupe d’élèves gentilles, je leur ai dit ce que c’était d’être enseignante et de se dire qu’on était à la merci d’un mensonge et/ou d’une rumeur (en rappelant rapidement l’engrenage, pas plus que Roxanne je ne me sens «pointue» sur les faits), que ces deux collègues avaient été assassinés parce qu’ils faisaient leur travail. Et j’ai vite enchaîné en leur disant : continuons à faire notre travail pour ne pas céder à la terreur… Mais je me serais sentie très en difficulté dans une classe moins facile.

Ici finalement exercice intrusion lundi après-midi et ce mardi après-midi une minute de silence après un beau discours de Mme la Principale. Je pense que l'exercice avait été calé de longue date.

Poignant documentaire sur les derniers jours de Samuel Paty qui retrace l'enquête de sa sœur et les coupables renoncements de l'institution. Quelle dignité et quel courage, bien loin des arguties jésuites.
Pensées à cette famille remarquable.

Charles-Maurice a écrit:Poignant documentaire sur les derniers jours de Samuel Paty qui retrace l'enquête de sa sœur et les coupables renoncements de l'institution. Quelle dignité et quel courage, bien loin des arguties jésuites.
Pensées à cette famille remarquable.

Et à sa sœur remarquable.

Elle ne lâchera rien. Ce sera le combat de sa vie. Et elle se bat pour nous aussi. C'est pour ça, que quand des collègues préfèrent faire une évaluation pendant la minute de silence ou "ne savent plus trop l'histoire", ça me met hors de moi.

roxanne a écrit:Elle ne lâchera rien. Ce sera le combat de sa vie. Et elle se bat pour nous aussi. C'est pour ça, que quand des collègues préfèrent faire une évaluation pendant la minute de silence ou "ne savent plus trop l'histoire", ça me met hors de moi.

Sérieusement ?! Mais c'est quoi ces collègues ???

Une de mes collègues a tranquillement continué à faire cours alors que la minute de silence était annoncée au micro. On la connait bien. Tant que cela ne la concerne pas elle ou sa famille, rien ne l'émeut.

L'article de Gérard Biard dans Charlie-Hebdo de cette semaine :

Gérard Biard a écrit:Imaginons. Imaginons un soir d’octobre 2020 en banlieue parisienne. Imaginons que Brahim Chnina, père de Z., adolescente scolarisée en quatrième dans un collège de Conflans-Sainte-Honorine, réponde simplement à sa fille « va faire tes devoirs » quand elle lui raconte qu’elle a été exclue de la classe parce que son professeur d’histoire-géographie a ordonné à tous les élèves musulmans de sortir, car il va montrer des caricatures du prophète Mahomet. Imaginons qu’il demande, tout aussi simplement, un rendez-vous au professeur et à la principale afin d’éclaircir cette situation. Il apprend alors que sa fille lui a menti, qu’elle n’a jamais assisté au cours du professeur – qui s’est déroulé, comme tous ses cours, sans heurts particuliers – et qu’elle a inventé cette histoire pour justifier une exclusion pour des raisons de discipline. Imaginons qu’il se comporte en parent responsable et normal, et demande à sa fille de lui expliquer le pourquoi de ce mensonge.

Charlie-Hebdo

[quote="LouisBarthas"]L'article de Gérard Biard dans Charlie-Hebdo de cette semaine :

Gérard Biard a écrit:Imaginons. Imaginons un soir d’octobre 2020 en banlieue parisienne. Imaginons que Brahim Chnina, père de Z., adolescente scolarisée en quatrième dans un collège de Conflans-Sainte-Honorine, réponde simplement à sa fille « va faire tes devoirs » quand elle lui raconte qu’elle a été exclue de la classe parce que son professeur d’histoire-géographie a ordonné à tous les élèves musulmans de sortir, car il va montrer des caricatures du prophète Mahomet. Imaginons qu’il demande, tout aussi simplement, un rendez-vous au professeur et à la principale afin d’éclaircir cette situation. Il apprend alors que sa fille lui a menti, qu’elle n’a jamais assisté au cours du professeur – qui s’est déroulé, comme tous ses cours, sans heurts particuliers – et qu’elle a inventé cette histoire pour justifier une exclusion pour des raisons de discipline. Imaginons qu’il se comporte en parent responsable et normal, et demande à sa fille de lui expliquer le pourquoi de ce mensonge.

Un bien triste scénario à la "what if..."

henriette a écrit:

roxanne a écrit:Elle ne lâchera rien. Ce sera le combat de sa vie. Et elle se bat pour nous aussi. C'est pour ça, que quand des collègues préfèrent faire une évaluation pendant la minute de silence ou "ne savent plus trop l'histoire", ça me met hors de moi.

Sérieusement ?! Mais c'est quoi ces collègues ???

C'est dingue...
Mais dans ce genre de situation, ça ne vire pas au clash en salle des profs?!