- CitoyenNiveau 7
Baldred a écrit:Gatoby a écrit:
Je réagis enfin à la phrase mise en gras dans le message de Lefteris : je ne suis pas certain que le problème est que "les professeurs sont en bas de l'échelle" : leur statut et la liberté pédagogique notamment permet encore (de moins en moins ?) d'avoir une hauteur critique sur les décisions qui sont prises (contrairement au gestionnaire en administration qui lui exécute et est contrôlé sur la qualité de l'exécution). Ils ne sont pas "en bas de l'échelle" au même sens que l'est le personnel d'exécution des entreprises et administrations. En revanche, je crois que les professeurs méconnaissent ces "éléments de langage" (EDL pour les plus aguerris) en ce leur métier a encore un contenu, et rend difficile de concevoir que les entreprises et organisations en ont de moins en moins aujourd'hui. J'y vois moins une forme d'ignorance de la réalité qu'un idéalisme que le choix d'un métier porté sur la connaissance et le fond nourrit naturellement : perdre cet idéalisme serait le dernier rempart à faire tomber pour qu'être enseignant soit aussi absurde qu'être manager, chef de projet, ou tout autre métier qualifié.
Merci @Gatoby pour cette analyse plus nuancée. Effectivement, c'est également un élément d'un certain discours de nous voir "en bas de l'échelle". Deux discours se sont superposés dans ce fil :
Les témoignages du vieux discours poujadiste teinté du bons sens populaire qui n'a pas sa langue dans sa poche parce que moi on ne m'enlèvera pas de l'idée que j'ai raison de penser ce que je pense et que moi à leur place je.....
Vous l'entendez chez votre coiffeur, votre kiné, je l'entendais dans une forme quasi pure chez les chauffeurs de taxi ( avant Uber...). On a sans doute tort d'y prêter trop d'attention. Il a toujours été un bruit de fond, discours souvent répété par ceux que l'école a trié du mauvais côté et qui s'en sont sorti "quand même". On a tort de négliger le fait que "nous" participons à un tri social fondé sur un "mérite scolaire" qui fait quelques dégâts chez les "triés". Et la réalité de notre travail ne les intéresse pas puisque le fils de ma cousine… a toujours raison.
Le deuxième discours, le pire, est le nôtre, celui que nous tenons sur nous-mêmes, si dépréciatif qu'en effet on se demande où les profs vont trouver la force de construire une parole revendicatrice audible. Le new public management va nous broyer, la machine administrative va nous broyer, la réforme va nous broyer : comment va ? Mais elle nous a déjà broyés. Le diable que nous avons peint sur la muraille est si réaliste qu’il nous paralyse, et nous rend sincèrement impuissants.@Gatoby parle d'un idéalisme qui nous sauverait des pratiques "sauvages" du privé et de l'absurdité et je sens qu'il a raison, même si je préférais dire que c'est notre maitrise d'un système absurde depuis longtemps qui pourra nous sauver.
Je préfère le discours de ceux qui regardent la réalité en face, qui ne fuient pas les problèmes, aux discours lénifiants de ceux qui veulent nous faire croire que tout est rose à l'école, ministre de l'Education en tête. Cela ne veut pas dire qu'il faille renouer avec l'école d'antant (on est au XXI° siècle...), mais qu'il faut partir d'un constat juste, et pas d'une autosatisfaction mielleuse, pour arrivier à une amélioration.
- LadyOlennaModérateur
De quelles compétences parles-tu, @Citoyen ? Et de quelles vraies actions d'amélioration ? (ce sont des vraies questions, je n'ironise pas).Citoyen a écrit:Pas mal dit du tout...Ce n'est pas le niveau de la paie qui peut servir à justifier cela car dans les entreprises privées les gens ne sont pas toujours bien payés, mais les réunions se passent le plus souvent sur leur temps de travail, en journée, et les managers évitent de faire de la réunionite pour rien, alors que dans les établissements (privés), les réunions sont gratuites, en dehors des cours...Ce qu'il faut dénoncer c'est le manque d'efficacité de ces réunions, voire leur inutilité pour améliorer la qualité pédagogique en direction des élèves. Parce que ces CDE et autres petits chefs adjoints n'ont généralement pas les compétence pour introduire de vraies actions d'amélioration et sont là pour "tenir" l'équipe, ou même pour se "faire valoir", parce que leur boulot quotidien n'est plus très enthousiasmant. Bref, ce n'est pas de cette façon qu'on va remonter le niveau de nos élèves (ce n'est d'ailleurs pas leur but...).Lefteris a écrit:La réunionite est un des leviers essentiels du management. Je ne peux qu'inviter tout le monde, pour comprendre ce qui se joue et ce qu'ils vivent, à se pencher sur ces traités, ces stages, qui se refilent d'entreprise en entreprise, d'entreprise en services publics, de services publics en services publics. On teste effectivement les gens, on les fait parler, on les jauge et on les juge, on les rend acteurs de projets qu'ils finissent par mettre en oeuvre d'eux-mêmes, sous cette indéfinissable pression du groupe et de l'oeil du maître, qui leur fait faire en faisant croire qu'ils décident. On les met aussi en concurrence,car il faut faire émerger des leaders pour remplir les contrats d'objectifs. Je mets en italique quelques éléments de la phraséologie en usage, partout et à tous les niveaux. Toutes les administrations fonctionnent selon ces schémas, tout le monde, dès qu'il y a encadrement, est formé comme ça ( tout manager est lui-même managé, mot dont la racine est la même que "manier" et "manipuler"). Certains rejettent fortement cette injonction , comme un de mes amis, cadre au Minef, avec qui j'en parlais récemment, mais d'autre parlent parfaitement cette langue de la conduite du changement par projet ou l'acceptent. Le problème des enseignants est que contrairement aux autres cadres, ils sont au bas de l'échelle et ne connaissent pas ces éléments de langage, sauf à s'y intéresser ou venir d'une autre administration. Ils ne voient donc pas tous les ficelles par lesquelles on les meut.Citoyen a écrit:
Il y en a plus dans le privé : un moyen pour les CDE de tester la "docilité" de leur équipe. En général cela marche et il y a peu d'absents...Il y est très rarement question de pédagogie (au vrai sens du terme), mais de projets, de sorties, de perspectives, de préparation des portes ouvertes,...les cours et l'activité d'enseignement sont accessoires dans ces réunions. De plus certains courent bien dans cette direction pour se faire bien voir.
Il n'est pas étonnant que le privé en soit plus victime : la réunionite est à mesure du rapport hiérarchique. Il est plus pesant dans le privé, où l'on nomme même des caporaux flattés d'être choisis (directeurs de cycle, de niveau...).
Par ailleurs il faut quand même reconnaître que notre liberté d'actions est très limitée.
- GatobyNiveau 3
Citoyen a écrit:Baldred a écrit:Gatoby a écrit:
Je réagis enfin à la phrase mise en gras dans le message de Lefteris : je ne suis pas certain que le problème est que "les professeurs sont en bas de l'échelle" : leur statut et la liberté pédagogique notamment permet encore (de moins en moins ?) d'avoir une hauteur critique sur les décisions qui sont prises (contrairement au gestionnaire en administration qui lui exécute et est contrôlé sur la qualité de l'exécution). Ils ne sont pas "en bas de l'échelle" au même sens que l'est le personnel d'exécution des entreprises et administrations. En revanche, je crois que les professeurs méconnaissent ces "éléments de langage" (EDL pour les plus aguerris) en ce leur métier a encore un contenu, et rend difficile de concevoir que les entreprises et organisations en ont de moins en moins aujourd'hui. J'y vois moins une forme d'ignorance de la réalité qu'un idéalisme que le choix d'un métier porté sur la connaissance et le fond nourrit naturellement : perdre cet idéalisme serait le dernier rempart à faire tomber pour qu'être enseignant soit aussi absurde qu'être manager, chef de projet, ou tout autre métier qualifié.
Merci @Gatoby pour cette analyse plus nuancée. Effectivement, c'est également un élément d'un certain discours de nous voir "en bas de l'échelle". Deux discours se sont superposés dans ce fil :
Les témoignages du vieux discours poujadiste teinté du bons sens populaire qui n'a pas sa langue dans sa poche parce que moi on ne m'enlèvera pas de l'idée que j'ai raison de penser ce que je pense et que moi à leur place je.....
Vous l'entendez chez votre coiffeur, votre kiné, je l'entendais dans une forme quasi pure chez les chauffeurs de taxi ( avant Uber...). On a sans doute tort d'y prêter trop d'attention. Il a toujours été un bruit de fond, discours souvent répété par ceux que l'école a trié du mauvais côté et qui s'en sont sorti "quand même". On a tort de négliger le fait que "nous" participons à un tri social fondé sur un "mérite scolaire" qui fait quelques dégâts chez les "triés". Et la réalité de notre travail ne les intéresse pas puisque le fils de ma cousine… a toujours raison.
Le deuxième discours, le pire, est le nôtre, celui que nous tenons sur nous-mêmes, si dépréciatif qu'en effet on se demande où les profs vont trouver la force de construire une parole revendicatrice audible. Le new public management va nous broyer, la machine administrative va nous broyer, la réforme va nous broyer : comment va ? Mais elle nous a déjà broyés. Le diable que nous avons peint sur la muraille est si réaliste qu’il nous paralyse, et nous rend sincèrement impuissants.@Gatoby parle d'un idéalisme qui nous sauverait des pratiques "sauvages" du privé et de l'absurdité et je sens qu'il a raison, même si je préférais dire que c'est notre maitrise d'un système absurde depuis longtemps qui pourra nous sauver.
Je préfère le discours de ceux qui regardent la réalité en face, qui ne fuient pas les problèmes, aux discours lénifiants de ceux qui veulent nous faire croire que tout est rose à l'école, ministre de l'Education en tête. Cela ne veut pas dire qu'il faille renouer avec l'école d'antant (on est au XXI° siècle...), mais qu'il faut partir d'un constat juste, et pas d'une autosatisfaction mielleuse, pour arrivier à une amélioration.
L'un et l'autre ne sont pas incompatibles : je crois que c'est à partir du moment où l'on perd cet idéalisme, autour du rôle joué par la connaissance notamment, que l'on accepte de façon naïve les pratiques lénifiantes que nos dirigeants successifs s'attachent à mettre en place. Le prix de cet idéalisme, c'est parfois une forme de déconnexion avec ce que les transformations dénoncées au sein de l'éducation nationale n'ont pas lieu qu'au sein l'éducation nationale. Avec cette différence qu'il est encore moins possible dans le contexte d'une administration ou d'une entreprise de porter un regard critique sur les transformations : de façon volontairement peu nuancée, on peut dire que le travail qualifié dans ces contextes consiste à les accepter et les diffuser chacun à son niveau. Contrepartie : les salaires y sont plus élevés, et l'implication parfois (souvent) moindre en ce que l'on ne peut s'impliquer dans ce qui n'a ni sens, ni contenu. Le travail enseignant en est certainement d'autant plus dur : la vacuité des changements en cours n'est pas qu'une vague idée que les personnels s'attachent à diffuser, ils s'y heurtent au quotidien.
Je me permets d'apporter ces éléments à la réflexion pour l'auteur du sujet en ce que je crois qu'une orientation éclairée au sein ou en dehors de l'éducation nationale suppose d'appréhender ce que d'autres postes du même niveau (mais mieux rémunérés, et où les conditions matérielles d'exercice sont meilleures très souvent) nécessitera d'accepter.
- BaldredSage
Citoyen a écrit:
Je préfère le discours de ceux qui regardent la réalité en face, qui ne fuient pas les problèmes, aux discours lénifiants de ceux qui veulent nous faire croire que tout est rose à l'école, ministre de l'Education en tête. Cela ne veut pas dire qu'il faille renouer avec l'école d'antant (on est au XXI° siècle...), mais qu'il faut partir d'un constat juste, et pas d'une autosatisfaction mielleuse, pour arrivier à une amélioration.
Désolé @Citoyen, je ne vois pas à qui ni à quoi tu fais référence dans ce (très bel) exemple de langue de bois : où as-tu vu dans ce fil que "tout est rose à l'école, ministre de l'EN en tête" ? Rose le ministre ?
Qui pourrait être autosatisfait ?
Quel est ton juste constat ?
- BaldredSage
Gatoby a écrit:
L'un et l'autre ne sont pas incompatibles : je crois que c'est à partir du moment où l'on perd cet idéalisme, autour du rôle joué par la connaissance notamment, que l'on accepte de façon naïve les pratiques lénifiantes que nos dirigeants successifs s'attachent à mettre en place. Le prix de cet idéalisme, c'est parfois une forme de déconnexion avec ce que les transformations dénoncées au sein de l'éducation nationale n'ont pas lieu qu'au sein l'éducation nationale. Avec cette différence qu'il est encore moins possible dans le contexte d'une administration ou d'une entreprise de porter un regard critique sur les transformations : de façon volontairement peu nuancée, on peut dire que le travail qualifié dans ces contextes consiste à les accepter et les diffuser chacun à son niveau. Contrepartie : les salaires y sont plus élevés, et l'implication parfois (souvent) moindre en ce que l'on ne peut s'impliquer dans ce qui n'a ni sens, ni contenu. Le travail enseignant en est certainement d'autant plus dur : la vacuité des changements en cours n'est pas qu'une vague idée que les personnels s'attachent à diffuser, ils s'y heurtent au quotidien.
Je me permets d'apporter ces éléments à la réflexion pour l'auteur du sujet en ce que je crois qu'une orientation éclairée au sein ou en dehors de l'éducation nationale suppose d'appréhender ce que d'autres postes du même niveau (mais mieux rémunérés, et où les conditions matérielles d'exercice sont meilleures très souvent) nécessitera d'accepter.
Intéressante analyse, encore que je ne sais pas s'il reste un seul prof qui accepte " de façon naïve les pratiques lénifiantes".
En revanche tu as sans doute raison de souligner que le privé, présenté parfois ici comme un contre exemple d'efficacité managériale, où il resterait au moins une logique, celle du profit, n'est pas vraiment un recours.
- GatobyNiveau 3
Baldred a écrit:Gatoby a écrit:
L'un et l'autre ne sont pas incompatibles : je crois que c'est à partir du moment où l'on perd cet idéalisme, autour du rôle joué par la connaissance notamment, que l'on accepte de façon naïve les pratiques lénifiantes que nos dirigeants successifs s'attachent à mettre en place. Le prix de cet idéalisme, c'est parfois une forme de déconnexion avec ce que les transformations dénoncées au sein de l'éducation nationale n'ont pas lieu qu'au sein l'éducation nationale. Avec cette différence qu'il est encore moins possible dans le contexte d'une administration ou d'une entreprise de porter un regard critique sur les transformations : de façon volontairement peu nuancée, on peut dire que le travail qualifié dans ces contextes consiste à les accepter et les diffuser chacun à son niveau. Contrepartie : les salaires y sont plus élevés, et l'implication parfois (souvent) moindre en ce que l'on ne peut s'impliquer dans ce qui n'a ni sens, ni contenu. Le travail enseignant en est certainement d'autant plus dur : la vacuité des changements en cours n'est pas qu'une vague idée que les personnels s'attachent à diffuser, ils s'y heurtent au quotidien.
Je me permets d'apporter ces éléments à la réflexion pour l'auteur du sujet en ce que je crois qu'une orientation éclairée au sein ou en dehors de l'éducation nationale suppose d'appréhender ce que d'autres postes du même niveau (mais mieux rémunérés, et où les conditions matérielles d'exercice sont meilleures très souvent) nécessitera d'accepter.
Intéressante analyse, encore que je ne sais pas s'il reste un seul prof qui accepte " de façon naïve les pratiques lénifiantes".
En revanche tu as sans doute raison de souligner que le privé, présenté parfois ici comme un contre exemple d'efficacité managériale, où il resterait au moins une logique, celle du profit, n'est pas vraiment un recours.
Je ne crois pas non plus : précisément parce que je n'ai jamais croisé d'enseignant (même s'ils doivent exister) qui n'ait pas gardé une forme d'idéalisme sur ce que doit être sa discipline et son métier (les deux devraient être indissociables). Il n'est pas certain que cela dure, la réforme du CAPES faisant de la discipline une critère beaucoup moins important du recrutement. On peut par ailleurs remarquer que les nouveaux critères, en revanche, se rapprochent de ce que l'on trouve dans le privé/dans les autres concours de la FP : on attend des candidats qu'ils adhèrent au discours majoritaire sur l'institution plutôt qu'ils se forgent un discours personnel sur leur matière.
Je ne serai par ailleurs pas étonné que, si revalorisation il doit y avoir un jour, elle passe par l'intégration à l'obligation de service la conduite d'un certain nombre de "projets" plutôt qu'une augmentation de l'horaire 18/15h (en lieu et place d'autres personnels, COP par exemple, ou bien d'heures d'enseignement réelles). Ce serait un sens logique à l'évolution du métier : rapprochement des rémunérations des autres corps cat. A vs. rapprochement du niveau d'absurdité et de loyauté aveugle à l'institution. .
- pseudo-intelloSage
Personnellement, ce n'est pas le diable peint sur le mur qui nous paralyse, c'est le bruit en classe, le comportement de ma CDE, mon pouvoir d'achat en berne et mes (quelques) élèves de 4e qui ne savent pas distinguer "être" et "avoir" dans une phrase (alors que mes collègues sont très bien, donc si elles n'ont pas réussi, qu'est-ce qui pourrait me laisser penser qu'au bout de 7 ans d'apprentissage, je vais apporter le déclic ?), c'est le saccage de la jeunesse par une société (comprendre : ceux qui ont le pognon pour agir à plus grande échelle, qu'ils soient publicitaires, industriel ou énarques) les a laissés moisir entre des écrans débilitants et une école exsangue.
Et encore, je ne sais pas ce que tu entends par"paralyser" ; je résiste tant que je peux, par la résistance active ou passive au sein de mon établissement, les bureaux syndicaux, le grèves, les manifs, le remplissages de cahier CHS, les audiences chez le DASEN...
Et encore, je ne sais pas ce que tu entends par"paralyser" ; je résiste tant que je peux, par la résistance active ou passive au sein de mon établissement, les bureaux syndicaux, le grèves, les manifs, le remplissages de cahier CHS, les audiences chez le DASEN...
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- BaldredSage
Gatoby a écrit:
Je ne crois pas non plus : précisément parce que je n'ai jamais croisé d'enseignant (même s'ils doivent exister) qui n'ait pas gardé une forme d'idéalisme sur ce que doit être sa discipline et son métier (les deux devraient être indissociables). Il n'est pas certain que cela dure, la réforme du CAPES faisant de la discipline une critère beaucoup moins important du recrutement. On peut par ailleurs remarquer que les nouveaux critères, en revanche, se rapprochent de ce que l'on trouve dans le privé/dans les autres concours de la FP : on attend des candidats qu'ils adhèrent au discours majoritaire sur l'institution plutôt qu'ils se forgent un discours personnel sur leur matière.
Je ne serai par ailleurs pas étonné que, si revalorisation il doit y avoir un jour, elle passe par l'intégration à l'obligation de service la conduite d'un certain nombre de "projets" plutôt qu'une augmentation de l'horaire 18/15h (en lieu et place d'autres personnels, COP par exemple, ou bien d'heures d'enseignement réelles). Ce serait un sens logique à l'évolution du métier : rapprochement des rémunérations des autres corps cat. A vs. rapprochement du niveau d'absurdité et de loyauté aveugle à l'institution. .
Il y aurait en effet là deux points de refus net car ils touchent à la formation et donc à l'identité d'un métier : la réforme du CAPES et celle de la formation initiale. Les profs comme profession et non comme "caste" ( le mot est maladroit mais je n'en trouve pas pour l'instant pour décrire le groupe que nous formons) devraient sans doute s'approprier davantage leur métier, ce langage commun entre nous.
Je pense d'ailleurs l'institution assez floue sur ces questions, les rapports internationaux préconisent une professionnalisation qui tend plutôt vers l'enseignant concepteur, les CDE et les inspecteurs ne rêvent pas tous de profs aux ordres, mais la logique administrative que décrit @Gatoby l'entend effectivement autrement, et elle agit.
- BaldredSage
je ne doute ni de tes/nos qualités pédagogiques, ni de ton/notre engagement, ni de tes/nos efforts de résistance, et je trouve normal que la colère s'exprime, mais tout mettre dans le même sac (du bruit en classe aux écrans en passant par la société de l'argent en 5 lignes) me laisse très dubitatif. Alors quoi ? départ dans le privé? repli dans ma classe ? Grand Soir ?pseudo-intello a écrit:Personnellement, ce n'est pas le diable peint sur le mur qui nous paralyse, c'est le bruit en classe, le comportement de ma CDE, mon pouvoir d'achat en berne et mes (quelques) élèves de 4e qui ne savent pas distinguer "être" et "avoir" dans une phrase (alors que mes collègues sont très bien, donc si elles n'ont pas réussi, qu'est-ce qui pourrait me laisser penser qu'au bout de 7 ans d'apprentissage, je vais apporter le déclic ?), c'est le saccage de la jeunesse par une société (comprendre : ceux qui ont le pognon pour agir à plus grande échelle, qu'ils soient publicitaires, industriel ou énarques) les a laissés moisir entre des écrans débilitants et une école exsangue.
Et encore, je ne sais pas ce que tu entends par"paralyser" ; je résiste tant que je peux, par la résistance active ou passive au sein de mon établissement, les bureaux syndicaux, le grèves, les manifs, le remplissages de cahier CHS, les audiences chez le DASEN...
- pseudo-intelloSage
Baldred a écrit:je ne doute ni de tes/nos qualités pédagogiques, ni de ton/notre engagement, ni de tes/nos efforts de résistance, et je trouve normal que la colère s'exprime, mais tout mettre dans le même sac (du bruit en classe aux écrans en passant par la société de l'argent en 5 lignes) me laisse très dubitatif. Alors quoi ? départ dans le privé? repli dans ma classe ? Grand Soir ?pseudo-intello a écrit:Personnellement, ce n'est pas le diable peint sur le mur qui nous paralyse, c'est le bruit en classe, le comportement de ma CDE, mon pouvoir d'achat en berne et mes (quelques) élèves de 4e qui ne savent pas distinguer "être" et "avoir" dans une phrase (alors que mes collègues sont très bien, donc si elles n'ont pas réussi, qu'est-ce qui pourrait me laisser penser qu'au bout de 7 ans d'apprentissage, je vais apporter le déclic ?), c'est le saccage de la jeunesse par une société (comprendre : ceux qui ont le pognon pour agir à plus grande échelle, qu'ils soient publicitaires, industriel ou énarques) les a laissés moisir entre des écrans débilitants et une école exsangue.
Et encore, je ne sais pas ce que tu entends par"paralyser" ; je résiste tant que je peux, par la résistance active ou passive au sein de mon établissement, les bureaux syndicaux, le grèves, les manifs, le remplissages de cahier CHS, les audiences chez le DASEN...
J'ai simplement donné d'autres explications que "diable peint sur un mur", terme qui me paraissait assez incongru ici, et accessoirement méprisant.
Je fais ce que je peux avec ce que j'ai et sans aller au-delà de mes obligations d’exercice, parce que si on veut que je fasse du zèle, faudra me payer avec zèle.
je ne passe pas ma vie sur le dos de mes enfants à les éveiller ou les pousser, loin de là, mais malgré cela (ils font, en ce moment, à peu près ce qu'ils veulent à longueur de journée), ils ont déjà une sacrée avance, preuve que la "niveau qui baisse" n'est pas une fatalité liée à une modification du cerveau des natifs du XXIe siècle, mais bien à un problème qui touche limite à la maltraitance (alors oui, je travaille dans un bassin plutôt sinistré d'un département plutôt sinistré, mais pour arriver à de telles carences éducatifs, de mémoire, de raisonnement, de concentration et si peu de bases , c'est qu'il y a un problème, généralisé.
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- CitoyenNiveau 7
Baldred a écrit:Citoyen a écrit:
Je préfère le discours de ceux qui regardent la réalité en face, qui ne fuient pas les problèmes, aux discours lénifiants de ceux qui veulent nous faire croire que tout est rose à l'école, ministre de l'Education en tête. Cela ne veut pas dire qu'il faille renouer avec l'école d'antant (on est au XXI° siècle...), mais qu'il faut partir d'un constat juste, et pas d'une autosatisfaction mielleuse, pour arrivier à une amélioration.
Désolé @Citoyen, je ne vois pas à qui ni à quoi tu fais référence dans ce (très bel) exemple de langue de bois : où as-tu vu dans ce fil que "tout est rose à l'école, ministre de l'EN en tête" ? Rose le ministre ?
Qui pourrait être autosatisfait ?
Quel est ton juste constat ?
Mon constat est relatif à un établissement privé sous contrat que je connais bien, mais aussi des récits faits dans d'autres établissements.
Bien entendu il n'y a pas que le ministre qui est "autosatisfait", il suffit de regarder les sites internet des établissements (ou au moins de certains établissements) : on y fait tout et rien à la fois, de la pédagogie par projets, du "Montessori", de l'école inclusive,...tout ce qui est à la mode. Or en fait il n'en n'est rien, aucun enseignant n'y a été formé, c'est juste une communication de quelques personnes (direction et quelques enseignants) qui cherchent à faire croire à un établissement exceptionnel tout en s'en servant pour se donner de l'importance. Or , la réalité est toute autre...
Et ceci, sans analyse sérieuse du problème, sans concertation.
Résultat : ces établissements perdent de plus en plus d'élèves d'une année sur l'autre, et même en cours d'année. On en recrute pour compenser parmi les élèves exclus d'autres établissements.
- BaldredSage
L'expression signifie "noircir le tableau" mais aussi "exagérer pour effrayer", c'est ton droit de la trouver incongrue, mais je ne vois pas en quoi elle est méprisante, surtout "accessoirement" ? Surtout que j'ai écris "nous", donc aucun mépris, mais le constat que l'on a sans doute plus besoin d'analyses que de redire que tout va mal.pseudo-intello a écrit:
J'ai simplement donné d'autres explications que "diable peint sur un mur", terme qui me paraissait assez incongru ici, et accessoirement méprisant.
- LefterisEsprit sacré
Je me suis exprimé en raccourci, les messages trop longs étant mal venus sur un forum. Ils sont en bas de l'échelle, dans le sens où on ne leur fait pas connaître ces [grosses] ficelles managériales, ils n'ont pas de subordonnés, ne font pas de stages dans ce sens. Dans les autres métiers de catégorie A, on y a droit, toute la panoplie , avec la conduite du changement le management participatif, le management transversal la gestion de groupe, et tout les recettes de blabla qui en découlent. Je connais, et ça n'a pas changé puisque des amis et ex-collègues au Minef ou ailleurs y ont aussi eu droit. Ce qui sauve parfois la situation, c'est qu'il existe des gens qui n'y croient pas, prennent ça pour de la bouffonnerie ou de l'escroquerie, c'est selon. Mais attention à ceux qui y croient vraiment, à qui on a bien bourré le crâne...Gatoby a écrit:
Je réagis enfin à la phrase mise en gras dans le message de Lefteris : je ne suis pas certain que le problème est que "les professeurs sont en bas de l'échelle" : leur statut et la liberté pédagogique notamment permet encore (de moins en moins ?) d'avoir une hauteur critique sur les décisions qui sont prises (contrairement au gestionnaire en administration qui lui exécute et est contrôlé sur la qualité de l'exécution). Ils ne sont pas "en bas de l'échelle" au même sens que l'est le personnel d'exécution des entreprises et administrations. En revanche, je crois que les professeurs méconnaissent ces "éléments de langage" (EDL pour les plus aguerris) en ce leur métier a encore un contenu, et rend difficile de concevoir que les entreprises et organisations en ont de moins en moins aujourd'hui. J'y vois moins une forme d'ignorance de la réalité qu'un idéalisme que le choix d'un métier porté sur la connaissance et le fond nourrit naturellement : perdre cet idéalisme serait le dernier rempart à faire tomber pour qu'être enseignant soit aussi absurde qu'être manager, chef de projet, ou tout autre métier qualifié.
Les professeurs ne méconnaissent pas tous ces éléments de langage et de manipulation, à preuve certaines réactions ici. Mais globalement, si. Dans les réunions, je ne parle pas, j'observe le biotope, je compte les "mots clés" , et par qui ils sont prononcés (bienveillance, projet, compétences etc.) , et je m'aperçois quand même que certains se sont emparés de la phraséologie et de l'attitude qui va avec.
Quand les professeurs ont encore une part d'idéalisme ( certitude de l'apport intellectuel de leur discipline, idéal de l'école selon les conceptions de Condorcet) , effectivement , il rejetteront ça. Quand ils auront assimilé totalement, et massivement, l'idée qu'ils sont des employés de l’établissement, que leur chef est leur patron, que leur niveau disciplinaire sera catastrophique ( on y est déjà dans certaines disciplines...) ,et qu'ils ne sont pas là pour transmettre des savoirs, mais des "compétences" comme le désire l'ERT, ou des "éducations à...", il n'y aura plus aucun rempart.
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"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- pseudo-intelloSage
Baldred a écrit:L'expression signifie "noircir le tableau" mais aussi "exagérer pour effrayer", c'est ton droit de la trouver incongrue, mais je ne vois pas en quoi elle est méprisante, surtout "accessoirement" ? Surtout que j'ai écris "nous", donc aucun mépris, mais le constat que l'on a sans doute plus besoin d'analyses que de redire que tout va mal.pseudo-intello a écrit:
J'ai simplement donné d'autres explications que "diable peint sur un mur", terme qui me paraissait assez incongru ici, et accessoirement méprisant.
Justement, je n'ai pas l'impression d'exagérer pour effrayer.
Je sais qu'il continue à exister des établissements agréables, j'en ai connus (même si apparemment ça s'est relativement dégradé depuis), mais ils sont rares, en tout cas dans certaines académies, et ce sont rarement les plus gros (donc si on rapporte au nombre d'élèves...) ; au contraire, ce sont les petits établissements, disons, familiaux, que justement les rectorats s'emploient à fermer parce que petit collège = ratio heures/élève plus favorable = ça coûte plus cher.
Mais c'est loins d'être le cas partout, et avec tes histoires de diable sur le mur, tu nous accuses de noircir un tableau qui n'a pas besoin de l'être ; tu nous accuse de dépeindre notre expérience de manière faussée. SI Lefteris parle de se sélèves de la sorte, ce n'est pas juste parce qu'il est blasé ; et s'il l'était, pour l'être à ce oint, c'est bien qu'il assiste dans le quotidien de son exercice à un tableau navrant.
Quand je parle des conditions d’exercice qui se délitent au fil des réformes, la différence en 10 ans est déjà écœurante, et laisse présager une suite réellement catastrophique. Rien qu'au niveau du salaire, en 201p, dans mon syndicat, des mecs ont fait une étude comparative entre un fiche de paie de juillet (= ni primes ni PP, pour avoir le vrai salaire de base) 1999 et 2049, avec le calculateur d'euros constants de l'INSEE, on arrivait à une différence de 500 euros/mois de perte de pouvoir d'achat. Tu m'étonnes que faire grève, partir en vacances sortir, se loger correctement dans les zones qui coûtent cher (on habitait à Paris, ou près de la Suisse, ma paie passerait en logement ; au fait, les parisiens, avec 2000 euros à Paris, on loue quel type de logement ?).
J'ai de plus en plus d'élèves de début de 5e qui ne savent pas trouver le verbe dans une phrase type "le dieu voit la déesse". Un nombre croissant de 4e qui galère également, qui ne sait pas non plus trouver le sujet dans des phrases simples (les profs de langues galèrent aussi, car sans comprendre un minimum la structure d'une phrase, leurs tentatives de phrases anglaises se résument à des mots sans rapport logique 0, 1, 2, 3 verbe, peu importe, puisqu'ils n'ont même plus l'idée de ce que c'est). Quelques-uns rares, heureusement) de mes 4e vont dire que "ont", c'est être et que "est" c'est avoir.
Et c'est écœurant, car mes enfants, eux, échappent totalement à cette baisse de niveau continue, comme une aprtie des enfants de collègues, tout simplement parce que c'est moi leur mère (leur père est prof aussi), et que connaissant le système de l'intérieur, on fait en fonction. En fait, on ne fait d'ailleurs pas tant que ça ; on est plus dans le primum non nocere (même l'histoire du soir, c'est très loin d 'être systématique ); on ne leur a juste pas proposé de divertissement trop crétin, on a suivi les recommandations quant aux écrans, et bizarrement, ils ont tous les trois une grosse appétence pour les livres, pour les jeux de société stratégiques ou qui impliquent du calcul, et mon CP vient, pendant qu'on faisait de la pâte à gaufres, de trouver seul, de tête et facilement la moitié de 250, puis tout aussi facilement, d'additionner (125 (donc) à 250. Alors que mes classes de 4e, quant on s'est retrouvés avec le "demi-quart de lieue" dans un extrait des Misérables, ont galéré (presque tous) à piger qu'un demi-quart était un huitième, puis à diviser 4 par 8.
Comme pas mal de collègues ici, j suis un produit de l'école publique, et ça me révolte de constater que ça n'aurais clairement pas aussi bien fonctionné si j'avais eu 20 ans en moins.
Quant à noircir le tableau sur les pressions de la hiérarchie, il y a eu un suicide dans mon bahut cet automne, alors je ne laisserai personne dire que j'exagère. Vous me direz que c'est local et que tout le monde n'a pas la même hiérarchie, mais il y a 6 semaines, à 20 km de mon collège, un PE s'est pendu dans sa classe la veille de la rentrée des vacances, et pour venir se pendre dans sa classe une veille de rentrée alors que c'est les vacances, c'est bien qu'il y a un rapport avec l'exercice du métier.
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- CitoyenNiveau 7
pseudo-intello a écrit:Baldred a écrit:L'expression signifie "noircir le tableau" mais aussi "exagérer pour effrayer", c'est ton droit de la trouver incongrue, mais je ne vois pas en quoi elle est méprisante, surtout "accessoirement" ? Surtout que j'ai écris "nous", donc aucun mépris, mais le constat que l'on a sans doute plus besoin d'analyses que de redire que tout va mal.pseudo-intello a écrit:
J'ai simplement donné d'autres explications que "diable peint sur un mur", terme qui me paraissait assez incongru ici, et accessoirement méprisant.
Justement, je n'ai pas l'impression d'exagérer pour effrayer.
Je sais qu'il continue à exister des établissements agréables, j'en ai connus (même si apparemment ça s'est relativement dégradé depuis), mais ils sont rares, en tout cas dans certaines académies, et ce sont rarement les plus gros (donc si on rapporte au nombre d'élèves...) ; au contraire, ce sont les petits établissements, disons, familiaux, que justement les rectorats s'emploient à fermer parce que petit collège = ratio heures/élève plus favorable = ça coûte plus cher.
Mais c'est loins d'être le cas partout, et avec tes histoires de diable sur le mur, tu nous accuses de noircir un tableau qui n'a pas besoin de l'être ; tu nous accuse de dépeindre notre expérience de manière faussée. SI Lefteris parle de se sélèves de la sorte, ce n'est pas juste parce qu'il est blasé ; et s'il l'était, pour l'être à ce oint, c'est bien qu'il assiste dans le quotidien de son exercice à un tableau navrant.
Quand je parle des conditions d’exercice qui se délitent au fil des réformes, la différence en 10 ans est déjà écœurante, et laisse présager une suite réellement catastrophique. Rien qu'au niveau du salaire, en 201p, dans mon syndicat, des mecs ont fait une étude comparative entre un fiche de paie de juillet (= ni primes ni PP, pour avoir le vrai salaire de base) 1999 et 2049, avec le calculateur d'euros constants de l'INSEE, on arrivait à une différence de 500 euros/mois de perte de pouvoir d'achat. Tu m'étonnes que faire grève, partir en vacances sortir, se loger correctement dans les zones qui coûtent cher (on habitait à Paris, ou près de la Suisse, ma paie passerait en logement ; au fait, les parisiens, avec 2000 euros à Paris, on loue quel type de logement ?).
J'ai de plus en plus d'élèves de début de 5e qui ne savent pas trouver le verbe dans une phrase type "le dieu voit la déesse". Un nombre croissant de 4e qui galère également, qui ne sait pas non plus trouver le sujet dans des phrases simples (les profs de langues galèrent aussi, car sans comprendre un minimum la structure d'une phrase, leurs tentatives de phrases anglaises se résument à des mots sans rapport logique 0, 1, 2, 3 verbe, peu importe, puisqu'ils n'ont même plus l'idée de ce que c'est). Quelques-uns rares, heureusement) de mes 4e vont dire que "ont", c'est être et que "est" c'est avoir.
Et c'est écœurant, car mes enfants, eux, échappent totalement à cette baisse de niveau continue, comme une aprtie des enfants de collègues, tout simplement parce que c'est moi leur mère (leur père est prof aussi), et que connaissant le système de l'intérieur, on fait en fonction. En fait, on ne fait d'ailleurs pas tant que ça ; on est plus dans le primum non nocere (même l'histoire du soir, c'est très loin d 'être systématique ); on ne leur a juste pas proposé de divertissement trop crétin, on a suivi les recommandations quant aux écrans, et bizarrement, ils ont tous les trois une grosse appétence pour les livres, pour les jeux de société stratégiques ou qui impliquent du calcul, et mon CP vient, pendant qu'on faisait de la pâte à gaufres, de trouver seul, de tête et facilement la moitié de 250, puis tout aussi facilement, d'additionner (125 (donc) à 250. Alors que mes classes de 4e, quant on s'est retrouvés avec le "demi-quart de lieue" dans un extrait des Misérables, ont galéré (presque tous) à piger qu'un demi-quart était un huitième, puis à diviser 4 par 8.
Comme pas mal de collègues ici, j suis un produit de l'école publique, et ça me révolte de constater que ça n'aurais clairement pas aussi bien fonctionné si j'avais eu 20 ans en moins.
Quant à noircir le tableau sur les pressions de la hiérarchie, il y a eu un suicide dans mon bahut cet automne, alors je ne laisserai personne dire que j'exagère. Vous me direz que c'est local et que tout le monde n'a pas la même hiérarchie, mais il y a 6 semaines, à 20 km de mon collège, un PE s'est pendu dans sa classe la veille de la rentrée des vacances, et pour venir se pendre dans sa classe une veille de rentrée alors que c'est les vacances, c'est bien qu'il y a un rapport avec l'exercice du métier.
Le tableau, noirci ou pas, est bien là. Ce qui me chagrine le plus c'est que ceux qui dirigent ce système ne veulent pas l'admettre, ne l'analysent donc pas et ne le corrigent pas, ou pire, l'aggravent.
- HORAHabitué du forum
Citoyen a écrit:pseudo-intello a écrit:Baldred a écrit:L'expression signifie "noircir le tableau" mais aussi "exagérer pour effrayer", c'est ton droit de la trouver incongrue, mais je ne vois pas en quoi elle est méprisante, surtout "accessoirement" ? Surtout que j'ai écris "nous", donc aucun mépris, mais le constat que l'on a sans doute plus besoin d'analyses que de redire que tout va mal.pseudo-intello a écrit:
J'ai simplement donné d'autres explications que "diable peint sur un mur", terme qui me paraissait assez incongru ici, et accessoirement méprisant.
Justement, je n'ai pas l'impression d'exagérer pour effrayer.
Je sais qu'il continue à exister des établissements agréables, j'en ai connus (même si apparemment ça s'est relativement dégradé depuis), mais ils sont rares, en tout cas dans certaines académies, et ce sont rarement les plus gros (donc si on rapporte au nombre d'élèves...) ; au contraire, ce sont les petits établissements, disons, familiaux, que justement les rectorats s'emploient à fermer parce que petit collège = ratio heures/élève plus favorable = ça coûte plus cher.
Mais c'est loins d'être le cas partout, et avec tes histoires de diable sur le mur, tu nous accuses de noircir un tableau qui n'a pas besoin de l'être ; tu nous accuse de dépeindre notre expérience de manière faussée. SI Lefteris parle de se sélèves de la sorte, ce n'est pas juste parce qu'il est blasé ; et s'il l'était, pour l'être à ce oint, c'est bien qu'il assiste dans le quotidien de son exercice à un tableau navrant.
Quand je parle des conditions d’exercice qui se délitent au fil des réformes, la différence en 10 ans est déjà écœurante, et laisse présager une suite réellement catastrophique. Rien qu'au niveau du salaire, en 201p, dans mon syndicat, des mecs ont fait une étude comparative entre un fiche de paie de juillet (= ni primes ni PP, pour avoir le vrai salaire de base) 1999 et 2049, avec le calculateur d'euros constants de l'INSEE, on arrivait à une différence de 500 euros/mois de perte de pouvoir d'achat. Tu m'étonnes que faire grève, partir en vacances sortir, se loger correctement dans les zones qui coûtent cher (on habitait à Paris, ou près de la Suisse, ma paie passerait en logement ; au fait, les parisiens, avec 2000 euros à Paris, on loue quel type de logement ?).
J'ai de plus en plus d'élèves de début de 5e qui ne savent pas trouver le verbe dans une phrase type "le dieu voit la déesse". Un nombre croissant de 4e qui galère également, qui ne sait pas non plus trouver le sujet dans des phrases simples (les profs de langues galèrent aussi, car sans comprendre un minimum la structure d'une phrase, leurs tentatives de phrases anglaises se résument à des mots sans rapport logique 0, 1, 2, 3 verbe, peu importe, puisqu'ils n'ont même plus l'idée de ce que c'est). Quelques-uns rares, heureusement) de mes 4e vont dire que "ont", c'est être et que "est" c'est avoir.
Et c'est écœurant, car mes enfants, eux, échappent totalement à cette baisse de niveau continue, comme une aprtie des enfants de collègues, tout simplement parce que c'est moi leur mère (leur père est prof aussi), et que connaissant le système de l'intérieur, on fait en fonction. En fait, on ne fait d'ailleurs pas tant que ça ; on est plus dans le primum non nocere (même l'histoire du soir, c'est très loin d 'être systématique ); on ne leur a juste pas proposé de divertissement trop crétin, on a suivi les recommandations quant aux écrans, et bizarrement, ils ont tous les trois une grosse appétence pour les livres, pour les jeux de société stratégiques ou qui impliquent du calcul, et mon CP vient, pendant qu'on faisait de la pâte à gaufres, de trouver seul, de tête et facilement la moitié de 250, puis tout aussi facilement, d'additionner (125 (donc) à 250. Alors que mes classes de 4e, quant on s'est retrouvés avec le "demi-quart de lieue" dans un extrait des Misérables, ont galéré (presque tous) à piger qu'un demi-quart était un huitième, puis à diviser 4 par 8.
Comme pas mal de collègues ici, j suis un produit de l'école publique, et ça me révolte de constater que ça n'aurais clairement pas aussi bien fonctionné si j'avais eu 20 ans en moins.
Quant à noircir le tableau sur les pressions de la hiérarchie, il y a eu un suicide dans mon bahut cet automne, alors je ne laisserai personne dire que j'exagère. Vous me direz que c'est local et que tout le monde n'a pas la même hiérarchie, mais il y a 6 semaines, à 20 km de mon collège, un PE s'est pendu dans sa classe la veille de la rentrée des vacances, et pour venir se pendre dans sa classe une veille de rentrée alors que c'est les vacances, c'est bien qu'il y a un rapport avec l'exercice du métier.
Le tableau, noirci ou pas, est bien là. Ce qui me chagrine le plus c'est que ceux qui dirigent ce système ne veulent pas l'admettre, ne l'analysent donc pas et ne le corrigent pas, ou pire, l'aggravent.
Je pense plutôt que ceux qui dirigent ce système sont les mêmes que ceux qui le mettent en place et n'ont pas foncièrement de problème à en admettre les retombées négatives sur la santé des personnels, sur la dégradation du niveau des élèves, sur l'empire du mensonge communicationnel dans l'institution, puisque ces retombées négatives n'apparaissent jamais comme des conséquences directes des politiques menées et dont les dirigeants seraient responsables. Comme le dit très bien Lefteris, et depuis longtemps, il y a un biberonnage des dirigeants, à tous les échelons et pas que dans le MEN, au management et plus spécifiquement au new public management. Lequel peut être résumé par : si vous avez atteint les objectifs assignés, c'est que vous avez su faire plus avec moins, vous avez fait preuve de plus d'agilité, d'audace, de flexibilité, d'adaptabilité, d'esprit d'initiative, de leadership, etc, que vos
- LefterisEsprit sacré
Je crois qu'en haut lieu, ils savent qu'ils cassent tout, mais ils servent un autre projet de société. Tout à fait d'accord avec l'analyse de Jean-Claude Michéa. Il y a même un travail énorme de communication, doublé d'un musellement croissant de la parole, proportionnels au naufrage, pour faire croire que tout va bien.Citoyen a écrit:
Le tableau, noirci ou pas, est bien là. Ce qui me chagrine le plus c'est que ceux qui dirigent ce système ne veulent pas l'admettre, ne l'analysent donc pas et ne le corrigent pas, ou pire, l'aggravent.
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"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- CitoyenNiveau 7
Lefteris a écrit:Je crois qu'en haut lieu, ils savent qu'ils cassent tout, mais ils servent un autre projet de société. Tout à fait d'accord avec l'analyse de Jean-Claude Michéa. Il y a même un travail énorme de communication, doublé d'un musellement croissant de la parole, proportionnels au naufrage, pour faire croire que tout va bien.Citoyen a écrit:
Le tableau, noirci ou pas, est bien là. Ce qui me chagrine le plus c'est que ceux qui dirigent ce système ne veulent pas l'admettre, ne l'analysent donc pas et ne le corrigent pas, ou pire, l'aggravent.
La casse du système éducatif ne me semble pas être un projet de société voulu, ou alors le cynisme de ceux qui nous dirigent dépasse tout ce qu'on peut imaginer.
Je crois plutôt qu'ils ont adhéré à une idéologie "managériale" et qu'ils pensent que ce sera aussi la solution pour améliorer le système éducatif, pour lui donner de l'efficience (c'est à dire plus d'efficacité au moindre coût). Mais comme ils n'ont aucune connaissance du terrain, qu'ils sont "déconnectés", comme diraient certains, ils n'ont pas analysé ce qui pourrait marcher ou pas. Ils n'ont pas compris que la matière "humaine" n'est pas une production industrielle. Et de plus, ils connaissent mal leurs théories, ils ne savent pas en mesurer les résultats, et s'ils ne sont pas là, les biaisent en truquant les règles du jeu (baisse du niveau des examens, élévation artificielle des notes...).
Il va donc falloir revenir sur terre.
- CathEnchanteur
Mais enfin bien sûr qu'ils savent ce qu'ils font ! Quand on bourre des classes de lycées à 37, qu'on supprime des palanquées d'heures disciplinaires sous des motifs fallacieux, qu'on distribue le bac à la volée, sous couvert de bienveillance, à des élèves incapables d'aligner deux mots, on sait ce qu'on fait.
- dansesNiveau 9
Ils savent parfaitement ce qu'ils font. Et en sont fiers.
- Dame JouanneÉrudit
Je pense à un mixte des deux.
Ils savent qu'ils cassent des choses mais voient-ils à quelle point la casse est importante et grave, avec leurs enfants certainement tous casés dans de bons établissements? Et l'idéologie managériale, la conviction que la priorité est de faire des économies et que le seul moyen est de réduire les dépenses salariales l'emportent sur tout le reste. Augmenter la qualité du système éducatif est plus complexe qu'essayer de réduire un budget en optimisant et réduisant les coûts. Et comme cela irait certainement contre la politique d'économie, donc, par paresse, ils vont au plus simple.
Je me demande aussi si certaines thèses pédagogistes rabâchées depuis vingt trente ans n'ont pas été intégrées en haut lieu comme des vérités, d'autant plus facilement qu'elles servaient leurs objectifs. Déjà, il y a plus de vingt ans, les formateurs de l'IUFM nous déclaraient que le nombre d'élèves n'avait pas d'importance et que seule la pédagogie et la différentiation importaient, que 25 ou 35 élèves c'était pareil du moment qu'on utilisait les bonnes méthodes. En France, la théorie est toujours plus importante que l'expérience : si les théoriciens déclarent cela, ils ont forcément raison. On nous impose aujourd'hui des classe à 36 et on peut bien dire que les pédagogistes hors sol qui ont soutenu ce genre de fadaises ont bien contribué à la dégradation du système. Ils ont donnés des arguments prêts à l'emploi aux gestionnaires.
De même pour l'image de l'enseignant réfractaire, peu efficace, réticent au changement : nos protestations ne doivent être aux yeux de beaucoup que les récriminations d'employés accrochés à leurs vieilles habitudes. Je me souviens de la phrase d'un principal adjoint, jeune, qui voulait qu'une collègue proche de la retraite quitte sa salle, salle qui venait d'être équipée d'un vidéoprojecteur dont elle se servait trop peu à son goût : on ne fait pas d'omelette sans casser d’œufs. Ils cassent des œufs mais ne veulent pas voir que l'omelette obtenue sera pourrie.
Voilà. C'est un peu en vrac mais j'ai du mal à voir autant de machiavélisme : je crois plutôt à un aveuglement volontaire sur les effets à long terme de leurs décisions par paresse intellectuelle, opportunisme politique et culture de l'immédiat. Bref, la bêtise et l’égoïsme humains (ma carrière est assurée car j'ai rempli tous les objectifs, mes enfants sont dans de bons établissements, après moi le déluge)
Ils savent qu'ils cassent des choses mais voient-ils à quelle point la casse est importante et grave, avec leurs enfants certainement tous casés dans de bons établissements? Et l'idéologie managériale, la conviction que la priorité est de faire des économies et que le seul moyen est de réduire les dépenses salariales l'emportent sur tout le reste. Augmenter la qualité du système éducatif est plus complexe qu'essayer de réduire un budget en optimisant et réduisant les coûts. Et comme cela irait certainement contre la politique d'économie, donc, par paresse, ils vont au plus simple.
Je me demande aussi si certaines thèses pédagogistes rabâchées depuis vingt trente ans n'ont pas été intégrées en haut lieu comme des vérités, d'autant plus facilement qu'elles servaient leurs objectifs. Déjà, il y a plus de vingt ans, les formateurs de l'IUFM nous déclaraient que le nombre d'élèves n'avait pas d'importance et que seule la pédagogie et la différentiation importaient, que 25 ou 35 élèves c'était pareil du moment qu'on utilisait les bonnes méthodes. En France, la théorie est toujours plus importante que l'expérience : si les théoriciens déclarent cela, ils ont forcément raison. On nous impose aujourd'hui des classe à 36 et on peut bien dire que les pédagogistes hors sol qui ont soutenu ce genre de fadaises ont bien contribué à la dégradation du système. Ils ont donnés des arguments prêts à l'emploi aux gestionnaires.
De même pour l'image de l'enseignant réfractaire, peu efficace, réticent au changement : nos protestations ne doivent être aux yeux de beaucoup que les récriminations d'employés accrochés à leurs vieilles habitudes. Je me souviens de la phrase d'un principal adjoint, jeune, qui voulait qu'une collègue proche de la retraite quitte sa salle, salle qui venait d'être équipée d'un vidéoprojecteur dont elle se servait trop peu à son goût : on ne fait pas d'omelette sans casser d’œufs. Ils cassent des œufs mais ne veulent pas voir que l'omelette obtenue sera pourrie.
Voilà. C'est un peu en vrac mais j'ai du mal à voir autant de machiavélisme : je crois plutôt à un aveuglement volontaire sur les effets à long terme de leurs décisions par paresse intellectuelle, opportunisme politique et culture de l'immédiat. Bref, la bêtise et l’égoïsme humains (ma carrière est assurée car j'ai rempli tous les objectifs, mes enfants sont dans de bons établissements, après moi le déluge)
- Ajonc35Sage
En effet, aujourd'hui il y en a qui décident en haut et sans connaitre ce qui se passe en bas parce que ce n'est pas leur souci. C'est vrai dans de nombreux domaines. Aujourd'hui ils nous placent dans un système qui dysfonctionne de plus en plus non pas du fait des exécutants mais de leur fait. C'est vrai dans de nombreux domaines le sanitaire, le social, les secours, la sécurité, la justice, etc.... On ne remplace pas ceux qui partent et ceux qui restent doivent se répartir le travail et ils ne peuvent en faire toujours plus. on peut remplir un verre et un jour il déborde, comme lui nous avons une capacité.
Dans l'enseignement les Français pensent que nous réalisons depuis des décennies toujours les mêmes missions, celles qu'ils ont connues. Je pense ici à un post d'un néo qui au début des années 70, avait deux classes de 6ème et 18 heures de cours ( 3 heures + 3 heures dédoublées pour chaque classe) avec toutes les activités de correction, de préparation, etc. Elle faisait le constat de la dégradation à la fois pour les élèves et pour les enseignants depuis.
J'enseigne depuis longtemps et je constate que nos conditions se dégradent. En plus des activités traditionnelles, nous sommes de plus sollicités pour des tas d'autres activités: projets pour les élèves ( comme si un cours n'était pas un projet déjà), pour l'établissement ( et parfois en mettant les élèves à contribution donc du temps de cours perdus parfois), voyages ( de plus en plus obligatoires. Je pense à une personne de ma connaissance qui a été embauché dans un LEP privé et ce qui était mis en avant c'étaient les projets, les activités annexes comme les voyages, ...), création de partenariats avec les entreprises ( pas seulement pour les stages, ça je connais). Et tout cela avec des horaires disciplines qui diminuent et des élèves de moins en moins en capacité, de moins en moins autonomes. Je n'oublie pas l'inclusion ( quand on parle de jeunes en situation de handicap, je m'interroge), bref de fins connaisseurs, et cela sans temps supplémentaire et sans formation nous devenons orthophonistes, psychomotriciens, etc et cela les parents ne le comprennent pas, ils croient que nous sommes desspécialistes couteaux suisses et pour les plus fragiles attendent beaucoup de nous. De plus on a une messagerie pro et s'en détacher relève de l'exploit ( surtout que j'ai un CDE adjoint qui envoie des do au dernier moment et s'ETONNE d'une réponse aussi lente), sans compter l'agenda électronique que je ne peux remplir après chaque cours, donc c'est le soir quand je rentre ( vu l'indigence de notre équipement en PC en sdp) Dans mon Etbt , c'est l'enseignant qui change de classe ( pas assez de salles et avec le covid c'est encore plus catastrophique).
Il y a 30 ans, j'avais le temps de trainer à la bibliothèque universitaire et emprunter des livres. Aujourd'hui je n'y met plus les pieds et depuis longtemps. Je me suis appauvrie.
Je rajoute que les réunions ne sont pas toujours le fait d'un CDE ou de son adjoint mais aussi de certains collègues dont je me demande parfois s'ils s'ennuient. J'oublie que chaque réunion nécessite souvent une trace écrite afin de se couvrir là où la confiance existait autrefois.
Quels que soient les domaines, il faut constater que le système français est bien malade et s'il tient encore c'est le fait des petites mains sur lesquelles tout le poids de la hiérarchie s'exerce.
Je sors du sujet, mais quand je dis autour de moi que le protocole dans mon lycée n'est pas appliqué, on ne me croit pas non plus. Une entreprise privée agirait de la sorte avec ses personnels, et l'inspection du travail serait informée ( car elle n'agira pas , trop de dossiers encore plus lourds), ce qui oblige les employeurs à être vigilants à la fois pour leurs personnels et leurs clients.
Dans l'enseignement les Français pensent que nous réalisons depuis des décennies toujours les mêmes missions, celles qu'ils ont connues. Je pense ici à un post d'un néo qui au début des années 70, avait deux classes de 6ème et 18 heures de cours ( 3 heures + 3 heures dédoublées pour chaque classe) avec toutes les activités de correction, de préparation, etc. Elle faisait le constat de la dégradation à la fois pour les élèves et pour les enseignants depuis.
J'enseigne depuis longtemps et je constate que nos conditions se dégradent. En plus des activités traditionnelles, nous sommes de plus sollicités pour des tas d'autres activités: projets pour les élèves ( comme si un cours n'était pas un projet déjà), pour l'établissement ( et parfois en mettant les élèves à contribution donc du temps de cours perdus parfois), voyages ( de plus en plus obligatoires. Je pense à une personne de ma connaissance qui a été embauché dans un LEP privé et ce qui était mis en avant c'étaient les projets, les activités annexes comme les voyages, ...), création de partenariats avec les entreprises ( pas seulement pour les stages, ça je connais). Et tout cela avec des horaires disciplines qui diminuent et des élèves de moins en moins en capacité, de moins en moins autonomes. Je n'oublie pas l'inclusion ( quand on parle de jeunes en situation de handicap, je m'interroge), bref de fins connaisseurs, et cela sans temps supplémentaire et sans formation nous devenons orthophonistes, psychomotriciens, etc et cela les parents ne le comprennent pas, ils croient que nous sommes des
Il y a 30 ans, j'avais le temps de trainer à la bibliothèque universitaire et emprunter des livres. Aujourd'hui je n'y met plus les pieds et depuis longtemps. Je me suis appauvrie.
Je rajoute que les réunions ne sont pas toujours le fait d'un CDE ou de son adjoint mais aussi de certains collègues dont je me demande parfois s'ils s'ennuient. J'oublie que chaque réunion nécessite souvent une trace écrite afin de se couvrir là où la confiance existait autrefois.
Quels que soient les domaines, il faut constater que le système français est bien malade et s'il tient encore c'est le fait des petites mains sur lesquelles tout le poids de la hiérarchie s'exerce.
Je sors du sujet, mais quand je dis autour de moi que le protocole dans mon lycée n'est pas appliqué, on ne me croit pas non plus. Une entreprise privée agirait de la sorte avec ses personnels, et l'inspection du travail serait informée ( car elle n'agira pas , trop de dossiers encore plus lourds), ce qui oblige les employeurs à être vigilants à la fois pour leurs personnels et leurs clients.
- Ajonc35Sage
Je suis d'accord car leur objectif n'est pas de servir mais de se servir et donc de monter les échelons le plus vite possible, ou de se faire une place au soleil. On ne connait pas le devenir de ces décideurs-fonctionnaires mais on connait le devenir des décideurs politiques. Pour certains la politique est un tremplin, ils perdent un peu d'argent pendant 2, 3 ans voire moins puis sont propulsés dans un service public à un poste plus élevé ou dans une entreprise privée qui les accueillent avec bienveillance. Et cela est vrai pour leur progéniture bien sûr.Dame Jouanne a écrit:Je pense à un mixte des deux.
Ils savent qu'ils cassent des choses mais voient-ils à quelle point la casse est importante et grave, avec leurs enfants certainement tous casés dans de bons établissements? Et l'idéologie managériale, la conviction que la priorité est de faire des économies et que le seul moyen est de réduire les dépenses salariales l'emportent sur tout le reste. Augmenter la qualité du système éducatif est plus complexe qu'essayer de réduire un budget en optimisant et réduisant les coûts. Et comme cela irait certainement contre la politique d'économie, donc, par paresse, ils vont au plus simple.
Je me demande aussi si certaines thèses pédagogistes rabâchées depuis vingt trente ans n'ont pas été intégrées en haut lieu comme des vérités, d'autant plus facilement qu'elles servaient leurs objectifs. Déjà, il y a plus de vingt ans, les formateurs de l'IUFM nous déclaraient que le nombre d'élèves n'avait pas d'importance et que seule la pédagogie et la différentiation importaient, que 25 ou 35 élèves c'était pareil du moment qu'on utilisait les bonnes méthodes. En France, la théorie est toujours plus importante que l'expérience : si les théoriciens déclarent cela, ils ont forcément raison. On nous impose aujourd'hui des classe à 36 et on peut bien dire que les pédagogistes hors sol qui ont soutenu ce genre de fadaises ont bien contribué à la dégradation du système. Ils ont donnés des arguments prêts à l'emploi aux gestionnaires.
De même pour l'image de l'enseignant réfractaire, peu efficace, réticent au changement : nos protestations ne doivent être aux yeux de beaucoup que les récriminations d'employés accrochés à leurs vieilles habitudes. Je me souviens de la phrase d'un principal adjoint, jeune, qui voulait qu'une collègue proche de la retraite quitte sa salle, salle qui venait d'être équipée d'un vidéoprojecteur dont elle se servait trop peu à son goût : on ne fait pas d'omelette sans casser d’œufs. Ils cassent des œufs mais ne veulent pas voir que l'omelette obtenue sera pourrie.
Voilà. C'est un peu en vrac mais j'ai du mal à voir autant de machiavélisme : je crois plutôt à un aveuglement volontaire sur les effets à long terme de leurs décisions par paresse intellectuelle, opportunisme politique et culture de l'immédiat. Bref, la bêtise et l’égoïsme humains (ma carrière est assurée car j'ai rempli tous les objectifs, mes enfants sont dans de bons établissements, après moi le déluge)
- LefterisEsprit sacré
Ils le savent , étant nourris des théories de l'OCDE qui irriguent l'UE. L'école à la française doit disparaître, au profit d'une école d'inspiration anglo-saxonne, tournée vers le marché, l'employabilité". Or, dans ce système, on n'aura besoin que de 20 % de gens très bien formés, et les savoirs n'ont plus leur place en tant que tels, notamment les savoirs abstraits, la culture (voir le massacre du LP) . Il faut pour les 80% restants des "compétences". C'est tout l'objet de la table ronde des entrepreneurs de 2001, dont le dogme principal est que l'école est un service "dans l'intérêt de l'entreprise". C'est le projet affiché ouvertement par un de nos anciens commissaires européens, Pascal Lamy. Dans le même temps, il faut faire des économies d'échelle, à cause de la dette : tout concorde parfaitement. Donc tout se tient : démolition des disciplines, liée à la démolition du statut des enseignants, désengagement maximal de l'Etat et transfert au régions (les personnels administratifs et techniques, et aussi encore une fois le sort du LP illustrent cette orientation), dévaluation des diplômes, qui sont un frein à la déréglementation (conventions collectives, statuts...)Citoyen a écrit:
La casse du système éducatif ne me semble pas être un projet de société voulu, ou alors le cynisme de ceux qui nous dirigent dépasse tout ce qu'on peut imaginer.
Je crois plutôt qu'ils ont adhéré à une idéologie "managériale" et qu'ils pensent que ce sera aussi la solution pour améliorer le système éducatif, pour lui donner de l'efficience (c'est à dire plus d'efficacité au moindre coût). Mais comme ils n'ont aucune connaissance du terrain, qu'ils sont "déconnectés", comme diraient certains, ils n'ont pas analysé ce qui pourrait marcher ou pas. Ils n'ont pas compris que la matière "humaine" n'est pas une production industrielle. Et de plus, ils connaissent mal leurs théories, ils ne savent pas en mesurer les résultats, et s'ils ne sont pas là, les biaisent en truquant les règles du jeu (baisse du niveau des examens, élévation artificielle des notes...).
Il va donc falloir revenir sur terre.
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"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- CitoyenNiveau 7
Dame Jouanne a écrit:Je pense à un mixte des deux.
Ils savent qu'ils cassent des choses mais voient-ils à quelle point la casse est importante et grave, avec leurs enfants certainement tous casés dans de bons établissements? Et l'idéologie managériale, la conviction que la priorité est de faire des économies et que le seul moyen est de réduire les dépenses salariales l'emportent sur tout le reste. Augmenter la qualité du système éducatif est plus complexe qu'essayer de réduire un budget en optimisant et réduisant les coûts. Et comme cela irait certainement contre la politique d'économie, donc, par paresse, ils vont au plus simple.
Je me demande aussi si certaines thèses pédagogistes rabâchées depuis vingt trente ans n'ont pas été intégrées en haut lieu comme des vérités, d'autant plus facilement qu'elles servaient leurs objectifs. Déjà, il y a plus de vingt ans, les formateurs de l'IUFM nous déclaraient que le nombre d'élèves n'avait pas d'importance et que seule la pédagogie et la différentiation importaient, que 25 ou 35 élèves c'était pareil du moment qu'on utilisait les bonnes méthodes. En France, la théorie est toujours plus importante que l'expérience : si les théoriciens déclarent cela, ils ont forcément raison. On nous impose aujourd'hui des classe à 36 et on peut bien dire que les pédagogistes hors sol qui ont soutenu ce genre de fadaises ont bien contribué à la dégradation du système. Ils ont donnés des arguments prêts à l'emploi aux gestionnaires.
De même pour l'image de l'enseignant réfractaire, peu efficace, réticent au changement : nos protestations ne doivent être aux yeux de beaucoup que les récriminations d'employés accrochés à leurs vieilles habitudes. Je me souviens de la phrase d'un principal adjoint, jeune, qui voulait qu'une collègue proche de la retraite quitte sa salle, salle qui venait d'être équipée d'un vidéoprojecteur dont elle se servait trop peu à son goût : on ne fait pas d'omelette sans casser d’œufs. Ils cassent des œufs mais ne veulent pas voir que l'omelette obtenue sera pourrie.
Voilà. C'est un peu en vrac mais j'ai du mal à voir autant de machiavélisme : je crois plutôt à un aveuglement volontaire sur les effets à long terme de leurs décisions par paresse intellectuelle, opportunisme politique et culture de l'immédiat. Bref, la bêtise et l’égoïsme humains (ma carrière est assurée car j'ai rempli tous les objectifs, mes enfants sont dans de bons établissements, après moi le déluge)
Bonne analyse, je rajouterai qu'on s'entête parfois dans des erreurs pour ne pas reconnaître qu'on a été mauvais. Notre cher ministre l'illustre assez bien, ce qui pousse le système encore plus dans l'échec. C'est le juste constat qui fait faire des progrès, or là, il n'en n'est jamais question.
- CitoyenNiveau 7
Ajonc35 a écrit:En effet, aujourd'hui il y en a qui décident en haut et sans connaitre ce qui se passe en bas parce que ce n'est pas leur souci. C'est vrai dans de nombreux domaines. Aujourd'hui ils nous placent dans un système qui dysfonctionne de plus en plus non pas du fait des exécutants mais de leur fait. C'est vrai dans de nombreux domaines le sanitaire, le social, les secours, la sécurité, la justice, etc.... On ne remplace pas ceux qui partent et ceux qui restent doivent se répartir le travail et ils ne peuvent en faire toujours plus. on peut remplir un verre et un jour il déborde, comme lui nous avons une capacité.
Dans l'enseignement les Français pensent que nous réalisons depuis des décennies toujours les mêmes missions, celles qu'ils ont connues. Je pense ici à un post d'un néo qui au début des années 70, avait deux classes de 6ème et 18 heures de cours ( 3 heures + 3 heures dédoublées pour chaque classe) avec toutes les activités de correction, de préparation, etc. Elle faisait le constat de la dégradation à la fois pour les élèves et pour les enseignants depuis.
J'enseigne depuis longtemps et je constate que nos conditions se dégradent. En plus des activités traditionnelles, nous sommes de plus sollicités pour des tas d'autres activités: projets pour les élèves ( comme si un cours n'était pas un projet déjà), pour l'établissement ( et parfois en mettant les élèves à contribution donc du temps de cours perdus parfois), voyages ( de plus en plus obligatoires. Je pense à une personne de ma connaissance qui a été embauché dans un LEP privé et ce qui était mis en avant c'étaient les projets, les activités annexes comme les voyages, ...), création de partenariats avec les entreprises ( pas seulement pour les stages, ça je connais). Et tout cela avec des horaires disciplines qui diminuent et des élèves de moins en moins en capacité, de moins en moins autonomes. Je n'oublie pas l'inclusion ( quand on parle de jeunes en situation de handicap, je m'interroge), bref de fins connaisseurs, et cela sans temps supplémentaire et sans formation nous devenons orthophonistes, psychomotriciens, etc et cela les parents ne le comprennent pas, ils croient que nous sommes desspécialistescouteaux suisses et pour les plus fragiles attendent beaucoup de nous. De plus on a une messagerie pro et s'en détacher relève de l'exploit ( surtout que j'ai un CDE adjoint qui envoie des do au dernier moment et s'ETONNE d'une réponse aussi lente), sans compter l'agenda électronique que je ne peux remplir après chaque cours, donc c'est le soir quand je rentre ( vu l'indigence de notre équipement en PC en sdp) Dans mon Etbt , c'est l'enseignant qui change de classe ( pas assez de salles et avec le covid c'est encore plus catastrophique).
Il y a 30 ans, j'avais le temps de trainer à la bibliothèque universitaire et emprunter des livres. Aujourd'hui je n'y met plus les pieds et depuis longtemps. Je me suis appauvrie.
Je rajoute que les réunions ne sont pas toujours le fait d'un CDE ou de son adjoint mais aussi de certains collègues dont je me demande parfois s'ils s'ennuient. J'oublie que chaque réunion nécessite souvent une trace écrite afin de se couvrir là où la confiance existait autrefois.
Quels que soient les domaines, il faut constater que le système français est bien malade et s'il tient encore c'est le fait des petites mains sur lesquelles tout le poids de la hiérarchie s'exerce.
Je sors du sujet, mais quand je dis autour de moi que le protocole dans mon lycée n'est pas appliqué, on ne me croit pas non plus. Une entreprise privée agirait de la sorte avec ses personnels, et l'inspection du travail serait informée ( car elle n'agira pas , trop de dossiers encore plus lourds), ce qui oblige les employeurs à être vigilants à la fois pour leurs personnels et leurs clients.
Très bonne description je connais un LEP privé où c'est presque exactement cela. Je rajouterai que certains collègues sont de vrais moteurs pour imposer aux autres, sans concertation, ce type de fonctionnement. Ce qui est regrettable c'est que les autres ne réagissent pas, ni dans les réunions, ni dans la messagerie. Ils ne font que se plaindre en salle des profs, mais discrètement, sans jamais agir. Dans ce type d'établissement il y a très peu de syndiqués, parfois pas de CSE, ou un CSE fantoche (dans le privé les enseignants de droit public sont éligibles et électeurs au CSE).
Le plus grave c'est que l'ambiance se dégrade dans l'équipe, et que la confiance n'y règne plus. Il arrive même que des choses soient dérobées en salle des profs, sans qu'on sache si c'est vraiment des élèves. Les gens deviennent soupçonneux.
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