Commencer sa carrière... en REP+

Bonjour Moon,
j'ai été assistant d'éducation en ZEP et ce n'est pas le travail que d'assister l'enseignant; pour le mot absurde je m'en excuse mais je trouve que c'est beaucoup demandé aux AE qui sont déjà à la base en situation de précarité, mal payés, traités comme du sous personnel que d'aider l'enseignant à gérer sa classe. De plus quelle image renvoie-t-on de l'enseignant?
A mon sens; ce sont des formations dont ces enseignants ont besoin: gestion de la violence, gestion des conflits etc.

Oui je comprends et je suis d'accord avec toi. On a surtout besoin de tous petits effectifs, particulièrement en primaire dans les zones difficiles. Si les instits avaient les moyens d'apprendre à lire écrire et compter correctement aux enfants on n'en serait pas là au collège.  ..

Je ne vais pas en rajouter sur les conseils qui t'ont été donnés, que tes collègues pourront d'ailleurs te redonner, et qui peuvent être résumés par une seule chose : leur serrer la vis, tout le temps. De toutes façons, il vaut mieux passer 40 mn à faire la police et 15 mn à faire cours (d'autant que ces 40 mn vont diminuer à mesure qu'eux comprennent le message et que toi tu prends tes marques) que 55 mn à ne rien pouvoir faire parce que c'est le zoo. N'hésite pas à noter tout incident : cela donnera du biscuit, à toi pour appeler les parents, au CPE et au PP pour leur remonter les bretelles régulièrement.

Juste une chose : c'est normal d'avoir du bazar quand on débute (on ne connaît pas encore bien tous les trucs, on construit son autorité), c'est normal aussi de se faire tester quand on est nouveau dans un établissement. Alors en REP+ ! Ma première année, j'ai pleuré après un cours de 6e, et c'était juste une classe de pénibles dans un établissement facile... Mais l'important c'est de se détacher, de ne pas culpabiliser. Tu vas progresser (un jour tu vas muter, aussi ), les choses vont s'arranger, même si cela va prendre du temps et même si ces heures vont être épuisantes. Il faut te détacher, prendre du recul et ne pas tout prendre sur tes épaules. Je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire.

Merci, merci encore pour tous ces conseils que je lis avec attention.

Il est clair que ces élèves sont capables de bien se tenir, et connaissent déjà les règles : ils me l'ont prouvé ce matin après que leur PP soit passée dans ma classe, les avertir qu'au moindre mot de ma part elle les collerait tous les matins de la semaine prochaine.

Il faut qu'ils comprennent que l'autorité, c'est tout autant moi qu'elle.

Bon, depuis que les carnets sont là, je suis, selon leurs mots, devenue "méchante", en plus de "prof qu'a pas d'autorité". Faudrait savoir :lol:
C'est plutôt encourageant, en tout cas.

Une question me taraude : une collègue m'a dit qu'elle, quand ça n'allait vraiment pas avec une classe, elle ne faisait que des cours magistraux où elle dictait la leçon aux élèves. Et ce pendant des mois.

Qu'est-ce que vous en pensez ? Leur faire des cours plutôt "arides" le temps qu'ils se calment, est-ce une bonne idée ?

Déjà fait avec des classes difficiles, c'est parfois efficace. Par contre, je retentais le cours normal très souvent, mais je reprenais la dictée dès que les élèves chahutaient. Ca permet de ne pas prendre de retard.

Oui tu peux tout à fait mais je ne sais pas combien c'est faisable de dicter avec des 5e qui ont peut-être un petit niveau. Si tu as un vidéoprojecteur, leur projeter le cours à copier ? (en ne projetant qu'une phrase à la fois pour les obliger à garder le rythme et à ne pas se déconcentrer )

C'est jouable mais il faut dicter très lentement et écrire les mots difficiles / importants au tableau.

C'est quand même dingue... bientôt pour être professeur il faudra un master en stratégie vu tout les contournements qu'il faut opérer pour essayer de faire cours...

Jenny a écrit:C'est jouable mais il faut dicter très lentement et écrire les mots difficiles / importants au tableau.

Ah le truc fabuleux, c'est d'écrire devant eux à l'ordinateur le texte qui s'affiche au vidéoproj. Tant qu'ils ne se taisent pas, je continue à taper... L'effet est assez bon.

Marie Laetitia a écrit:

Jenny a écrit:C'est jouable mais il faut dicter très lentement et écrire les mots difficiles / importants au tableau.

Ah le truc fabuleux, c'est d'écrire devant eux à l'ordinateur le texte qui s'affiche au vidéoproj. Tant qu'ils ne se taisent pas, je continue à taper... L'effet est assez bon.

Excellent :lol:
sans compter qu'avec certaines classes, il vaut mieux ne pas se retourner pour écrire au tableau...

Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Dadoo33 a écrit:Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Impossible chez moi, par exemple : j'ai de 1 à 5 élèves non francophones (dont certains qui n'ont jamais été scolarisés dans leur pays d'origine) dans chacune de mes classes.

Tallulah23 a écrit:

Marie Laetitia a écrit:

Jenny a écrit:C'est jouable mais il faut dicter très lentement et écrire les mots difficiles / importants au tableau.

Ah le truc fabuleux, c'est d'écrire devant eux à l'ordinateur le texte qui s'affiche au vidéoproj. Tant qu'ils ne se taisent pas, je continue à taper... L'effet est assez bon.

Excellent :lol:
sans compter qu'avec certaines classes, il vaut mieux ne pas se retourner pour écrire au tableau...

C'est certain. D'où l'intérêt de vidéoprojeter.

Quand je ne peux pas travailler dans le calme, en fait, je vais plus loin. Au lieu de travailler à l'oral, je leur fais écrire mes explications pendant une demi-heure, par exemple, voire une heure. Enfin, ça dure tant qu'ils n'ont pas tous compris qu'on se tait.
En principe dans le cahier, il n'y a que des leçons, du vocabulaire et des exercices. Donc là, je leur fais écrire dans la marge : "explications - à ne pas apprendre".

Ce qui avait bien marché avec ma première classe super pénible en REP, c'était un tableau de participation. Les élèves partaient avec une note de 10/20 coeff 0,5 (comme en général ils ne comprennent rien aux coeff, ils jouent le jeu à fond). Ils gagnaient un point à chaque fois qu'ils répondaient en levant la main. S'ils n'avaient pas levé la main, c'est le voisin qui avait levé la main et chopé leur réponse qui gagnait le point (ça les rendaient furieux et ils faisaient très attention après à respecter les règles). S'ils bavardaient ou perturbaient le cours, ils perdaient un point. Je bloquais les notes au premier qui avait atteint 0. Ce qui arrivait rarement, ils se débrouillaient pour éviter le 0. C'était fastidieux mais ça marchait bien. Il fallait seulement stopper les sollicitations en fin de cours "Madame, j'ai perdu des poiiiiints?"

Dadoo33 a écrit:Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Je répondais par rapport au commentaire de Tallulah.

Dadoo33 a écrit:Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Oui. Enfin, avec ma 4e de dingues, même deux secondes, c'était des trucs qui volaient, des gamins qui tentaient un déplacement en douce, bref... non, même deux secondes, c'était impossible. Je leur faisais TOUJOURS face, même quand je circulais dans la classe (je longeais les murs et ne prenais jamais l'allée centrale).

Dadoo33 a écrit:

Dadoo33 a écrit:Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Je répondais par rapport au commentaire de Tallulah.

Un collègue stagiaire a éclaté en sanglots dans la salle des profs à cause de ce problème: il s'était tourné pour écrire un mot au tableau, trois projectiles sont venus s'écraser à quelques centimètres de sa tête, plusieurs élèves ont poussé des cris d'animaux et proféré des insultes sachant pertinemment qu'il ne pourrait pas savoir quels sont les coupables pour les punir. Il a senti l'heure de cours passer lentement, très lentement... Face à de tels élèves, il vaut mieux ne pas leur tendre la perche leur tourner le dos.

Marie Laetitia a écrit:

Dadoo33 a écrit:Oui enfin écrire un mot compliqué au tableau c'est 2 secondes...
Je suis d'accord avec Jenny. On peut dicter à des élèves de 5e en allant doucement.

Oui. Enfin, avec ma 4e de dingues, même deux secondes, c'était des trucs qui volaient, des gamins qui tentaient un déplacement en douce, bref... non, même deux secondes, c'était impossible. Je leur faisais TOUJOURS face, même quand je circulais dans la classe (je longeais les murs et ne prenais jamais l'allée centrale).

Ah on a démarré avec les mêmes?  Ça me rappelle le sketch de forresti. ...

Un mot au tableau quand on a une classe qui n'attend que ça et qui a déjà plein de projectiles tout prêts dans les trousses c'est déjà trop. A l'époque je travaillais au rétroprojecteur qui a l'avantage en plus de permettre de rester au fond de la salle dans le dos des élèves.  Ils détestent ça.  Je pense que l'équivalent peut être des trucs à copier prêts sur ppt  et on passe les diapos juste en appuyant sur le clavier. Ça permet de ne pas quitter la classe des yeux.
Ml j'aime beaucoup ta méthode particulièrement le coup du point qui va au voisin. ..diviser pour mieux régner. ...

ML: sur tout !

Pour ceux et celles qui veulent suivre l'affaire, premier bilan de ma deuxième semaine :
https://lejournalduneprofderep.wordpress.com/2016/09/16/semaine-2-cest-dans-les-15-premiers-jours-a/

Comme je compatis... C'est ma seconde année en REP+ et je vis "presque" la même chose. J'étais déjà dans l'établissement en question en tant que contractuelle il y a 2 ans et les élèves m'en avaient fait voir de toutes les couleurs. Entre-temps, j'ai obtenu mon CAPES et effectué mon stage dans un collège "normal": quel bonheur!!!!
Et là, me voici affectée de nouveau dans ce collège où j'ai tant souffert il y a 2 ans. Celui qui m'avait fait cocher "pas d'établissement REP" lors des mutations inter, et dans lequel j'ai échoué depuis mon affectation en tant que TZR.
Depuis, je suis beaucoup plus ferme mais je sais que certains anciens élèves ont dit à ceux de ma classe qu'ils pouvaient me malmener (certains en sont les petits frères ou les cousins...), donc je bataille et là je me suis préparé un arsenal de punitions pour lundi!
Heureusement, je suis dans un autre collège (REP aussi) où tout se passe mieux, même si les élèves sont plutôt bavards.
Allez, on est là pour se serrer les coudes! On va y arriver!

Le dicton se trompe Inhumaine !
Courage.

Courage....

Une partie des choses qui m'ont sauvée :
- vidéoprojeter et utiliser une souris sans fil pour pouvoir passer d'une diapo à l'autre, etc., même en étant au fond de la classe.
- le schéma leçon - exercices d'application - correction avec relevé systématique
- l'acquisition successive des "privilèges" : d'abord, pas de sac. Au pied du tableau, tous fermés. J'avais investi dans un stock de stylos bics de couleur bleue et je donnais un polycop sur lequel prendre le cours. Ensuite, à la fin de l'heure je ramassais les bics puis chaque colonne pouvait l'une après l'autre aller chercher son sac, ranger son polycop dans le cahier, puis se rasseoir en silence à sa place pour attendre que l'autre colonne l'ait fait avant d'avoir le droit de sortir. Ensuite, j'ai autorisé les sacs fermés au pied des tables et  de sortir son propre stylo et cahier mais pas sa trousse, puis d'avoir sa trousse etc. Au moindre dérapage (il n'y en a pas eu tant que ça au final), je disais "très bien, on revient en arrière alors ? ça ne me gêne pas de passer l'année comme ça."
- des courriers pré-remplis pour les parents, des rapports pré-remplis, qui puissent très vite être complétés pour pouvoir sévir sans que le cours en pâtisse
- des listes complètes d'exos laissées à l'avance la vie scolaire à donner aux exclus
- adopter une position commune avec les collègues : mêmes attentes, même discours et communiquer. Ne pas laisser l'élève X déborder dans plusieurs cours consécutifs, sanctionner en tant qu'équipe, délocaliser les élèves (hop, bidule, puisque tu ne laisses pas la classe travailler, tu vas donc aller dans le cours de Mme X en 6e en face faire cette fiche d'exercices...)
- me forcer à travailler le soir malgré la fatigue mais ne toucher à RIEN le week-end pour me changer les idées et tenir le choc
- faire du sport
- manger du bon chocolat
- avoir une carte de cinéma

Courage !

Pour les classes très dures:

- diminuer le plus possible le "travail" en autonomie (source de désordres divers),
- "patrouiller" dans la classe en privilégiant le fond de la classe pour être dans leur dos et pouvoir voir toute la classe,
- allonger et multiplier les traces écrites,
- si possible se servir de l'ordinateur et du vidéo-projecteur,
- préparer la trace écrite pour ne pas avoir à l'écrire en direct, ou la faire écrire par un élève,
-etc.

J'ai passé comme ça un an le dos collé au mur du fond avec un élève écrivant au tableau sous ma dictée...

J'ai multiplié les vidéos "pédagogiques" (tout en continuant de quadriller la classe en patrouillant...).

Bon courage, et comme l'a dit un intervenant, à l'impossible nul n'est tenu.

Très bons conseils d'Hervé Hervé

Je n'ai peut-être pas été claire en parlant de "schéma" de cours : je minutais tout en amont. Je vais faire ça, puis ça, puis ça. Je m'assurais de préparer beaucoup de choses pour être certaine de pouvoir toujours meubler et ne jamais avoir de temps mort, même une minute ou deux. Bien entendu, je faisais rarement tout ce que j'avais préparé (qui était donc pour le cours suivant), mais j'évitais à tout prix les moments de flottement qui favorisent les dérapages.

Autre truc : prévoir des temps courts. Pas d'activités trop longues. 5 exercices de 4 questions plutôt qu'un de 20. Partie 1 de la leçon, exo, correction, partie 2, etc.
Toujours avoir du rab pour ceux qui travaillent vite et bien (il y en a malgré tout) et pour ceux qui, en ayant dit "non mais je n'y arrive pas donc j'ai arrêté", vont se dissiper.

Merci pour vos très bons conseils! J'ai pris des notes!