Ressentez-vous un sentiment d'imposture quand vous enseignez ?
- Dadoo33Grand sage
SVoronca a écrit:Non, je l'ai sûrement eu quand j'étais stagiaire mais ça n'a pas duré.
Je transmets ce que je sais et j'admets mes limites. En fait, je crois qu'il n'y a pas d'autre endroit où j'ai plus d'assurance qu'au sein de l'espace professionnel. Quand je suis dans une salle de classe je sais que j'y suis à ma place (ou que j'y étais, pour diverses raisons, j'envisage d'arrêter ce métier). L'assurance que j'ai développée grâce à ce métier m'a permis de "grandir" et de m'affirmer dans d'autres domaines.
+ 1
- gauvain31Empereur
Le problème de certains formateurs ESPE ne supportent probablement pas le fait d'être inutile. Cette pression se retrouve aussi chez les tuteurs. Un de mes collègues m'a raconté la même chose qu'à la réunion de Bipède sans plumes : surtout contacter les IPR s'il y a un problème (avec presque un ton menaçant)
- Bipède sans plumesNiveau 2
J'entends bien ce que vous dites.
Je vais surement préparer quelques histoires un peu vraies mais pas trop dont la trame principale serait : je rencontre des difficultés, mais en appliquant les conseils de l'ESPE je parviens à surmonter l'épreuve. Néanmoins il faut rester modeste car il y a encore du travail à faire
Je vais surement préparer quelques histoires un peu vraies mais pas trop dont la trame principale serait : je rencontre des difficultés, mais en appliquant les conseils de l'ESPE je parviens à surmonter l'épreuve. Néanmoins il faut rester modeste car il y a encore du travail à faire
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Et surtout pas un coq déplumé !
- gauvain31Empereur
Bipède sans plumes a écrit:J'entends bien ce que vous dites.
Je vais surement préparer quelques histoires un peu vraies mais pas trop dont la trame principale serait : je rencontre des difficultés, mais en appliquant les conseils de l'ESPE je parviens à surmonter l'épreuve. Néanmoins il faut rester modeste car il y a encore du travail à faire
Oui surtout joue bien le modeste devant les formateurs; fais semblant de t'intéresser à ce qu'ils racontent en prenant des notes; souris, ou ris même à leurs blagues. Pose-leur des questions pour montrer que tu t'intéresses à leur domaine
Et ton année se passera trèèèèès bien
- pseudo-intelloSage
Bipède sans plumes a écrit:J'entends bien ce que vous dites.
Je vais surement préparer quelques histoires un peu vraies mais pas trop dont la trame principale serait : je rencontre des difficultés, mais en appliquant les conseils de l'ESPE je parviens à surmonter l'épreuve. Néanmoins il faut rester modeste car il y a encore du travail à faire
Voilà. Y'a pas à dire, tu apprends vite.
- MathadorEmpereur
Je vois une autre interprétation possible: les arrêtés du 22 août 2014 ne rendent pas obligatoire l'inspection des stagiaires à moins qu'ils soient agrégés ou en renouvellement. En l'absence d'inspection, l'IA-IPR se base sur la grille d'évaluation du tuteur, d'où la pression de ce côté.gauvain31 a écrit:Le problème de certains formateurs ESPE ne supportent probablement pas le fait d'être inutile. Cette pression se retrouve aussi chez les tuteurs. Un de mes collègues m'a raconté la même chose qu'à la réunion de Bipède sans plumes : surtout contacter les IPR s'il y a un problème (avec presque un ton menaçant)
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Je ne sais pas si je suis fondé à poster sur ce sujet: je n'ai jamais éprouvé ce sentiment en tant que prof. Seulement un peu, en licence: je sortais de prépa, où l'on avait bien pris soin de m'expliquer que j'étais un élève médiocre, bourré de carences (pas trop, tout de même, car j'étais et je suis encore capable de pas mal d'agressivité quand on me “cherchait”). Du coup, en arrivant en licence (le jour des exams, car je n'étais quasiment pas allé en cours), j'avais pas mal de doutes: au point que, les résultats étant particulièrement “bons”, j'avais même évité d'aller chercher mon diplôme, pour éviter de constater que c'était une erreur… Mais ça m'a passé presque tout de suite: ne serait-ce que parce que mes profs de fac, en particulier mon prof de maîtrise et de DEA, mais pas seulement, me “prenaient au sérieux”, et que ça n'était pas du tout une “atmosphère prépa”.
Comme prof, quand j'ai débuté, je pouvais avoir des doutes: stagiaire, en pleine période de “massification”, puis “titulaire d'une zone de remplacement” (je n'ai jamais su si j'étais sous-prof ou super-élève, et pareil pendant mon service militaire, passé en Lycée avec des “enfants de troupe”). Mais pas vraiment ce sentiment d'imposture: plutôt le contraire, même, quelque chose comme “c'est déjà pas facile de faire cours, donc je suis seul maître dans ma classe”. Sentiment dont je constate la présence chez pas mal de collègues, parfois âgés, souvent plus jeunes. Quand je discute avec eux, j'essaie toujours de leur dire que quand on a des diplômes, ça n'est jamais par hasard: on a été “jugé” pendant ses études, par des gens dont c'est le métier, on a passé des concours “à la loyale” (à peu près le même stylo, le même temps, les mêmes sujets, etc.) et on les a eu. C'est quand même une preuve, qui ne dépend pas de nous, et une preuve par le fait. Et c'est pareil quand on fait cours: d'une part, ça ne s'apprend pas en quelques semaines, mais sur la durée (on gagne en efficacité avec le temps), d'autre part, on a des élèves ou des étudiants, et on “voit” tout de même que la classe tourne. Je ne suis absolument pas certain que ça soit “efficace”, car il faut du temps et du travail pour surmonter des problèmes personnels: mais je reste convaincu qu'on n'est pas bien placé pour “se juger soi-même”, c'est plutôt l'institution et le travail qui font ce travail.
Du coup, je me demande si le “flottement” dans la qualité des diplômes, d'une part, (je veux dire: le discours idéologique sur “tout ça ne vaut plus rien, la société a changé, ça n'est pas la vraie vie, le savoir est ailleurs, pas besoin de profs pour apprendre”, etc.), et, pire encore, l'idéologie de “l'approche par les compétences” (un individu est un “centre de ressources” qu'il est chargé de “valoriser”: donc il est totalement responsable) qui tombe sur la tête des nouveaux profs (comme si on devenait un “professionnel de l'enseignement” en quelques mois/semaines, surtout vu les conditions faites alors!) n'y est pas pour une large part: c'est épuisant de devoir sans arrêt “faire ses preuves” sans aucune assurance, car ça revient à dépendre d'une sorte de “cadre” censément possédé par certains (des supérieurs hiérarchiques, dans la plupart des cas, comme par hasard) et sur lequel on n'a aucune prise, voir auquel on n'a aucun accès… Je ne perds jamais une occasion de tenir ce discours à mes stagiaires quand ils débutent, quand ils progressent, quand ils viennent d'être titularisés, quand je les revois.
Je crois donc qu'il y a une très forte pression institutionnelle (qui se renforce continument depuis plus de 30 ans) qui contribue à fragiliser fortement les personnes — ce qui est à la fois extrêmement nocifs sur le plan personnel, et totalement contreproductif sur le plan de l'institution, qui a besoin de “bons profs”, de gens qui ont la vocation: or, pour ceux que je connais, très massivement, ils ont cette “vocation”! La bonne question ça me semble: qu'est-ce que c'est que cette organisation du travail qui est capable de faire autant souffrir les gens qu'elle devrait accueillir et faire travailler dans les meilleures conditions possibles?
Cdlt
Comme prof, quand j'ai débuté, je pouvais avoir des doutes: stagiaire, en pleine période de “massification”, puis “titulaire d'une zone de remplacement” (je n'ai jamais su si j'étais sous-prof ou super-élève, et pareil pendant mon service militaire, passé en Lycée avec des “enfants de troupe”). Mais pas vraiment ce sentiment d'imposture: plutôt le contraire, même, quelque chose comme “c'est déjà pas facile de faire cours, donc je suis seul maître dans ma classe”. Sentiment dont je constate la présence chez pas mal de collègues, parfois âgés, souvent plus jeunes. Quand je discute avec eux, j'essaie toujours de leur dire que quand on a des diplômes, ça n'est jamais par hasard: on a été “jugé” pendant ses études, par des gens dont c'est le métier, on a passé des concours “à la loyale” (à peu près le même stylo, le même temps, les mêmes sujets, etc.) et on les a eu. C'est quand même une preuve, qui ne dépend pas de nous, et une preuve par le fait. Et c'est pareil quand on fait cours: d'une part, ça ne s'apprend pas en quelques semaines, mais sur la durée (on gagne en efficacité avec le temps), d'autre part, on a des élèves ou des étudiants, et on “voit” tout de même que la classe tourne. Je ne suis absolument pas certain que ça soit “efficace”, car il faut du temps et du travail pour surmonter des problèmes personnels: mais je reste convaincu qu'on n'est pas bien placé pour “se juger soi-même”, c'est plutôt l'institution et le travail qui font ce travail.
Du coup, je me demande si le “flottement” dans la qualité des diplômes, d'une part, (je veux dire: le discours idéologique sur “tout ça ne vaut plus rien, la société a changé, ça n'est pas la vraie vie, le savoir est ailleurs, pas besoin de profs pour apprendre”, etc.), et, pire encore, l'idéologie de “l'approche par les compétences” (un individu est un “centre de ressources” qu'il est chargé de “valoriser”: donc il est totalement responsable) qui tombe sur la tête des nouveaux profs (comme si on devenait un “professionnel de l'enseignement” en quelques mois/semaines, surtout vu les conditions faites alors!) n'y est pas pour une large part: c'est épuisant de devoir sans arrêt “faire ses preuves” sans aucune assurance, car ça revient à dépendre d'une sorte de “cadre” censément possédé par certains (des supérieurs hiérarchiques, dans la plupart des cas, comme par hasard) et sur lequel on n'a aucune prise, voir auquel on n'a aucun accès… Je ne perds jamais une occasion de tenir ce discours à mes stagiaires quand ils débutent, quand ils progressent, quand ils viennent d'être titularisés, quand je les revois.
Je crois donc qu'il y a une très forte pression institutionnelle (qui se renforce continument depuis plus de 30 ans) qui contribue à fragiliser fortement les personnes — ce qui est à la fois extrêmement nocifs sur le plan personnel, et totalement contreproductif sur le plan de l'institution, qui a besoin de “bons profs”, de gens qui ont la vocation: or, pour ceux que je connais, très massivement, ils ont cette “vocation”! La bonne question ça me semble: qu'est-ce que c'est que cette organisation du travail qui est capable de faire autant souffrir les gens qu'elle devrait accueillir et faire travailler dans les meilleures conditions possibles?
Cdlt
- OrlandaFidèle du forum
Je ne ressens pas ce sentiment d'imposture face aux élèves quand il s'agit de mes connaissances. Le niveau des lycéens est si bas désormais que je me sens même confortable à ce niveau, je continue de me former, de lire sérieusement à côté...Parfois, j'ignore quelque chose, mais je le prends bien, cela ne me fige pas d'angoisse. Quand un élève me signale une faute au tableau, je me dis que oui, écrire et parler en même temps tout en surveillant les bavards, cela peut faire oublier un "s".
Si je devais enseigner en CPGE ou à un niveau supérieur, ce qui me ferait du bien, je crois que des angoisses de ce genre pourraient surgir, et pour moi ce serait très bon signe.
En revanche, je le ressens pour tout ce qui concerne l'aspect "social" du métier. Il ne naît pas tant du fait de me sentir peu légitime, mais plutôt peu intéressée, voire franchement ennuyée, par tous les aspects non disciplinaires du métier. Mener une séance d'orientation avec les élèves, gérer la vie du groupe - conflits, rendez-vous avec les parents, problèmes psychologiques -, assister à une réunion dont je ne comprends pas l'enjeu, subir une formation pédagogique niaise du style "Les dys et vous": dans ces moments-là, il m'arrive de sortir de mon corps, réellement. Au point que quand de gentils élèves viennent me remercier à la fin de l'année pour mon "enthousiasme" ou mon "implication", je me dis que je joue une bien vilaine comédie, et qu'elle ne saurait être durable. Il m'est même arrivé de penser: "Si vous saviez comme au fond je m'en f***...".
Les seuls moments où je me sens à ma place, c'est quand je leur parle de littérature. Et cela tend à devenir rare , hélas.
Si je devais enseigner en CPGE ou à un niveau supérieur, ce qui me ferait du bien, je crois que des angoisses de ce genre pourraient surgir, et pour moi ce serait très bon signe.
En revanche, je le ressens pour tout ce qui concerne l'aspect "social" du métier. Il ne naît pas tant du fait de me sentir peu légitime, mais plutôt peu intéressée, voire franchement ennuyée, par tous les aspects non disciplinaires du métier. Mener une séance d'orientation avec les élèves, gérer la vie du groupe - conflits, rendez-vous avec les parents, problèmes psychologiques -, assister à une réunion dont je ne comprends pas l'enjeu, subir une formation pédagogique niaise du style "Les dys et vous": dans ces moments-là, il m'arrive de sortir de mon corps, réellement. Au point que quand de gentils élèves viennent me remercier à la fin de l'année pour mon "enthousiasme" ou mon "implication", je me dis que je joue une bien vilaine comédie, et qu'elle ne saurait être durable. Il m'est même arrivé de penser: "Si vous saviez comme au fond je m'en f***...".
Les seuls moments où je me sens à ma place, c'est quand je leur parle de littérature. Et cela tend à devenir rare , hélas.
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"Nous vivons à une époque où l'ignorance n'a plus honte d'elle-même". Robert Musil
- ElaïnaDevin
Même sentiment Orlanda.
Légitime sur le plan disciplinaire, sans aucun doute.
Je suis PP, parce qu'on ne me laisse pas trop le choix (en gros, c'est la condition pour que soit signée ma demande d'autorisation de cumul, "vous comprenez madame il faut aussi montrer votre engagement au lycée avant de vous laisser aller faire autre chose..."). Cela m'ennuie profondément. D'ailleurs j'explique souvent aux parents, en réunion de début d'année, que je n'ai aucune légitimité à "faire de l'orientation" avec leurs enfants, ne souhaitant en aucun cas m'immiscer dans les vies des élèves. Je suis là pour donner un niveau, pas remplacer un PsyEn, ou les parents, ou un curé, ou un psy. Au demeurant je suis admirative de voir tous ces collègues PP "mener des séances d'orientation", connaître les douze milliards de formations possibles autour du lycée, conseiller tel ou tel cursus. Je ne m'en sens pas la force.
Légitime sur le plan disciplinaire, sans aucun doute.
Je suis PP, parce qu'on ne me laisse pas trop le choix (en gros, c'est la condition pour que soit signée ma demande d'autorisation de cumul, "vous comprenez madame il faut aussi montrer votre engagement au lycée avant de vous laisser aller faire autre chose..."). Cela m'ennuie profondément. D'ailleurs j'explique souvent aux parents, en réunion de début d'année, que je n'ai aucune légitimité à "faire de l'orientation" avec leurs enfants, ne souhaitant en aucun cas m'immiscer dans les vies des élèves. Je suis là pour donner un niveau, pas remplacer un PsyEn, ou les parents, ou un curé, ou un psy. Au demeurant je suis admirative de voir tous ces collègues PP "mener des séances d'orientation", connaître les douze milliards de formations possibles autour du lycée, conseiller tel ou tel cursus. Je ne m'en sens pas la force.
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It took me forty years to realize this. But for guys like us... our lives aren't really our own. There's always someone new to help. Someone we need to protect. These past few years, I fought that fate with all I had. But I'm done fighting. It's time I accept the hand I was dealt. Too many people depend on us. Their dreams depend on us.
Kiryu Kazuma inYakuza 4 Remastered
Ma page Facebook https://www.facebook.com/Lire-le-Japon-106902051582639
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Elaïna a écrit:Même sentiment Orlanda.
Légitime sur le plan disciplinaire, sans aucun doute.
Je suis PP, parce qu'on ne me laisse pas trop le choix (en gros, c'est la condition pour que soit signée ma demande d'autorisation de cumul, "vous comprenez madame il faut aussi montrer votre engagement au lycée avant de vous laisser aller faire autre chose..."). Cela m'ennuie profondément. D'ailleurs j'explique souvent aux parents, en réunion de début d'année, que je n'ai aucune légitimité à "faire de l'orientation" avec leurs enfants, ne souhaitant en aucun cas m'immiscer dans les vies des élèves. Je suis là pour donner un niveau, pas remplacer un PsyEn, ou les parents, ou un curé, ou un psy. Au demeurant je suis admirative de voir tous ces collègues PP "mener des séances d'orientation", connaître les douze milliards de formations possibles autour du lycée, conseiller tel ou tel cursus. Je ne m'en sens pas la force.
Je me permets tout de même une question: est-ce que c'est vraiment un sentiment d'imposture, ou le sentiment d'une carence? Ou est-ce que ça n'est pas plutôt le résultat d'une pression idéologique totalement illégitime?
Qu'un prof puisse donner un conseil, soit à propos de sa propre discipline, soit, après un conseil de classe, et après avoir entendu l'avis de tous ses collègues, ça, je le conçois. De là à prétendre qu'il devrait être un “spécialiste de l'orientation”, capable de “remplir une mission de première importance”, de faire la preuve de sa “compétence”, etc., il y a une marge, un écart, voire un gouffre! Ça se sent d'ailleurs dans ce que tu expliques, à raison et à juste titre: le discours culpabilisant du genre “vous devez montrer votre engagement” est, à mon avis, totalement odieux! Et — relativement — récent: je peux témoigner que ce genre de choses n'existait pas quand j'ai débuté! Au contraire, le fait de poursuivre ses études, de passer l'agrég, de faire une thèse etc. n'était pas du tout mal considéré, pas plus que donner des cours “ailleurs” (certains des amis avaient le courage d'aller travailler dans les prisons): à l'époque c'était vu, perçu et exprimé comme un “plus”! Alors c'est possible que j'aie été “privilégié”, et que mon expérience de l'époque ait été minoritaire (j'en doute car on était assez peu de stagiaires, puis même de titulaires dans mon académie pour avoir l'occasion d'échanger nos impressions): mais je peux témoigner que ce type de discours infantilisant et culpabilisant n'aurait pas été employé, et, mieux encore, que ça n'aurait pas été toléré au début des années 80.
Il me semble que c'est vers la fin des années 90, au début des années 2000 que ce discours, en fait cette idéologie “entreprenariale” à base de “motivation”, d'“engagement” a commencé à se répandre: l'un de mes amis proches avait (c'est son expression) commis l'erreur de devenir inspecteur — à l'époque, il avait été “formé” au schtroumfoscope de Poitiers, par des “managers” qui leur parlait ce langage, celui du client, de la performance, de l'engagement, etc. Et il avait encore eu la “liberté” de les interpeler et de les critiquer à haute voix.
Donc, pas étonnant que tu trouves ça ennuyeux: ça n'est tout simplement pas notre métier — et je trouve totalement illégitime les pressions hiérarchiques, pour ne pas dire plus, exercées sur les profs de ce point de vue! Pour ma part, je ne dirais jamais “illégitime” pour faire cela: je dirais plutôt “ça n'est pas mon métier”! Et là, quand tu dis que tu n'es ni psyEN, ni parent, ni curé, ni psy, j'abonde totalement dans ton sens! C'est peut-être justement le fait de désorganiser systématiquement le travail des profs, de leur imposer une multitude de “tâches” , de “responsabilités”, de “devoirs”, sous couvert d'une idéologie des “compétences” et de “l'État employeur” qui culpabilise nombre de collègues et leur fait violence en leur imposant ce “sentiment d'imposture” ou “d'illégitimité”. Je trouve ça, pour ma part, profondément inquiétant, pour dire le moins.
Cdlt
- ElaïnaDevin
Pour te répondre en quelques détails
- depuis que j'enseigne dans le secondaire, il m'a été reproché plusieurs fois en vrac de n'avoir pas fait de "vrai" stage (j'ai fait la formation des allocataires moniteurs, le machin bidon du CIES), et surtout, de la part d'une IA-IPR, d'aller "m'enrichir dans le supérieur" en faisant des colles au détriment de mes élèves de lycée (ce reproche étant fondé sur mes photocopies de travers, et le fait que j'utilise les manuels, preuves que je ne préparais pas mes cours selon elle).
- il m'a été plusieurs fois fait remarquer par certaines personnes qu'on ne signerait mon autorisation de cumul qu'en échange d'un "engagement", notamment la charge de PP de seconde.
Pour le reste c'est un mélange des deux. Je ne me sens pas armée pour "faire de l'orientation", parce que je maîtrise mal les arcanes du post-bac sorti de ce que je connais bien (la prépa, les grandes écoles et la fac), et aussi parce que j'ai peine à m'enthousiasmer pour les cursus très en vogue par chez nous, à savoir l'école de commerce d'à côté dans laquelle on est pris du moment qu'on fait le chèque de trente mille balles. Et enfin, parce que je m'en fous un peu au fond. Mon métier, c'est de faire passer des connaissances et des compétences (lire, décrypter, analyser). A tous, qu'ils se destinent à la foutue école de commerce à trente mille balles, ou à un métier manuel. Leur avenir ça les regarde, au fond ça ne me regarde pas. Je ne comprends pas du tout les collègues qui s'impliquent autant dans l'orientation de leurs élèves (multiples RDV avec les élèves, les parents, multiples séances à zyeuter avec eux les douze mille formations possibles, entretiens personnalisés à gogo), mis à part pour la question du niveau requis pour suivre dans la classe supérieure : en quoi ça les regarde ? On dirait qu'ils font une affaire personnelle de l'orientation de chaque ado qu'ils ont dans leur classe. Pour moi c'est de l'intrusion dans leur vie privée. Moi j'ai bien assez à faire avec l'orientation de mes propres mioches. Je ne demanderai jamais à leur PP d'intervenir dans leur vie privée.
- depuis que j'enseigne dans le secondaire, il m'a été reproché plusieurs fois en vrac de n'avoir pas fait de "vrai" stage (j'ai fait la formation des allocataires moniteurs, le machin bidon du CIES), et surtout, de la part d'une IA-IPR, d'aller "m'enrichir dans le supérieur" en faisant des colles au détriment de mes élèves de lycée (ce reproche étant fondé sur mes photocopies de travers, et le fait que j'utilise les manuels, preuves que je ne préparais pas mes cours selon elle).
- il m'a été plusieurs fois fait remarquer par certaines personnes qu'on ne signerait mon autorisation de cumul qu'en échange d'un "engagement", notamment la charge de PP de seconde.
Pour le reste c'est un mélange des deux. Je ne me sens pas armée pour "faire de l'orientation", parce que je maîtrise mal les arcanes du post-bac sorti de ce que je connais bien (la prépa, les grandes écoles et la fac), et aussi parce que j'ai peine à m'enthousiasmer pour les cursus très en vogue par chez nous, à savoir l'école de commerce d'à côté dans laquelle on est pris du moment qu'on fait le chèque de trente mille balles. Et enfin, parce que je m'en fous un peu au fond. Mon métier, c'est de faire passer des connaissances et des compétences (lire, décrypter, analyser). A tous, qu'ils se destinent à la foutue école de commerce à trente mille balles, ou à un métier manuel. Leur avenir ça les regarde, au fond ça ne me regarde pas. Je ne comprends pas du tout les collègues qui s'impliquent autant dans l'orientation de leurs élèves (multiples RDV avec les élèves, les parents, multiples séances à zyeuter avec eux les douze mille formations possibles, entretiens personnalisés à gogo), mis à part pour la question du niveau requis pour suivre dans la classe supérieure : en quoi ça les regarde ? On dirait qu'ils font une affaire personnelle de l'orientation de chaque ado qu'ils ont dans leur classe. Pour moi c'est de l'intrusion dans leur vie privée. Moi j'ai bien assez à faire avec l'orientation de mes propres mioches. Je ne demanderai jamais à leur PP d'intervenir dans leur vie privée.
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- epekeina.tes.ousiasModérateur
Qu'est-ce que ça m'agace, nom de nom, cette espèce de discours de flic — celui de cette IA-IPR dont tu parles! Comme si vouloir gagner sa vie était devenu un délit, une activité répréhensible! C'est vraiment le genre d'attitude qui remet celle qui le tient à sa place: dans le cloaque des petits chefs, qui sont là pour relayer le pouvoir vertical de leurs chefs — c'est carrément minable.
Surtout que “s'enrichir dans le supérieur”……… À part fonder une entreprise de machine à café ou de photocopies, je vois mal comment s'enrichir là-dedans!
Ça me rappelle une réunion de labo où l'on a vu débarquer un [modéré], qui nous a servi son discours de manager sur “l'évolution du contexte de la recherche” et qui nous disait, à la fois qu'on devait désormais se concevoir comme “travaillant dans un secteur concurrentiel à l'échelle française et européenne” et “en même temps” (tiens donc!) comme devant nous “orienter vers la création de partenariat nationaux et internationaux”… Celui-là, je lui suis rentré dedans au bout d'un quart d'heure, en lui disant que d'une part on ne pouvait pas être à la fois “concurrents et partenaires”, sauf dans certains groupes industriels et financiers qui pratiquent l'entente illicite, et d'autre part, que son discours typique des entreprises, de la concurrence et son idéologie libérale n'avait rien à faire dans une université. Et vu qu'il a cru malin de répondre que j'allais devoir “m'adapter à la modernité”, je lui ai rétorqué qu'il n'était pas mon supérieur hiérarchique et que, s'il trouvait très bien de se vendre pour relayer une idéologie douteuse, c'était son affaire — et j'ai terminé en lui demandant si au moins ça lui rapportait assez d'argent et si ça valait la peine. Et entre les deux, mes collègues ont évidemment pris parti et lui sont également rentrés dedans: on a tous cru qu'il allait pleurer!
Cdlt
Surtout que “s'enrichir dans le supérieur”……… À part fonder une entreprise de machine à café ou de photocopies, je vois mal comment s'enrichir là-dedans!
Ça me rappelle une réunion de labo où l'on a vu débarquer un [modéré], qui nous a servi son discours de manager sur “l'évolution du contexte de la recherche” et qui nous disait, à la fois qu'on devait désormais se concevoir comme “travaillant dans un secteur concurrentiel à l'échelle française et européenne” et “en même temps” (tiens donc!) comme devant nous “orienter vers la création de partenariat nationaux et internationaux”… Celui-là, je lui suis rentré dedans au bout d'un quart d'heure, en lui disant que d'une part on ne pouvait pas être à la fois “concurrents et partenaires”, sauf dans certains groupes industriels et financiers qui pratiquent l'entente illicite, et d'autre part, que son discours typique des entreprises, de la concurrence et son idéologie libérale n'avait rien à faire dans une université. Et vu qu'il a cru malin de répondre que j'allais devoir “m'adapter à la modernité”, je lui ai rétorqué qu'il n'était pas mon supérieur hiérarchique et que, s'il trouvait très bien de se vendre pour relayer une idéologie douteuse, c'était son affaire — et j'ai terminé en lui demandant si au moins ça lui rapportait assez d'argent et si ça valait la peine. Et entre les deux, mes collègues ont évidemment pris parti et lui sont également rentrés dedans: on a tous cru qu'il allait pleurer!
Cdlt
- Cléopatra2Guide spirituel
J'ai très souvent le sentiment d'imposture. Pas trop devant les élèves, mais devant mes collègues, qui sont objectivement pour certains très brillants, ou même en lisant les fils disciplinaires sur Néo. J'ai eu l'agreg interne mais je suis infoutue à présent de lire sérieusement un bouquin d'histoire et de me rappeler des détails précis ne serait-ce que 2 jours après. Je suis aussi infoutue de donner une référence bibliographique sérieuse sur un point précis. Quand je vois certains au point à la fois sur les références pédagogiques, mais aussi scientifiques (pas sur tout mais au moins sur quelques périodes), qui trouvent encore le temps de lire aussi pour leur loisir d'autres trucs, je ne me sens pas à ma place.
- ElbertaHabitué du forum
Oui. Je viens du premier degré et ce sentiment ne me lâche pas.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Cléopatra2 a écrit:J'ai très souvent le sentiment d'imposture. Pas trop devant les élèves, mais devant mes collègues, qui sont objectivement pour certains très brillants, ou même en lisant les fils disciplinaires sur Néo. J'ai eu l'agreg interne mais je suis infoutue à présent de lire sérieusement un bouquin d'histoire et de me rappeler des détails précis ne serait-ce que 2 jours après. Je suis aussi infoutue de donner une référence bibliographique sérieuse sur un point précis. Quand je vois certains au point à la fois sur les références pédagogiques, mais aussi scientifiques (pas sur tout mais au moins sur quelques périodes), qui trouvent encore le temps de lire aussi pour leur loisir d'autres trucs, je ne me sens pas à ma place.
Je ne partage plus ce sentiment, mais je suis tout aussi impressionné par la quantité de choses que certaines personnes arrivent à faire, en plus de s'adonner à des activités futiles. Meilleure mémoire ? Besoins en sommeil plus limités ? Drogue ?
- MathadorEmpereur
Dis-tu cela parce que ces personnes sont stupéfiantes ?Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Je ne partage plus ce sentiment, mais je suis tout aussi impressionné par la quantité de choses que certaines personnes arrivent à faire, en plus de s'adonner à des activités futiles. Meilleure mémoire ? Besoins en sommeil plus limités ? Drogue ?
:dehors2:
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
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- epekeina.tes.ousiasModérateur
Elberta a écrit:Oui. Je viens du premier degré et ce sentiment ne me lâche pas.
Ou alors, certains ont plus besoin de rêver, d'imaginer et de prendre leur temps…
L'exemple donné ci-dessus de la lecture des livres “érudits” (ou disons plutôt spécialisés, universitaires, disciplinaires). J'en lis — mais contrairement à il y a trente ans, je ne peux plus me “contenter” de les lire pour les retenir (maintenant je prends des notes, dans le livre la plupart du temps): baisse de mémoire? ou bien plutôt le fait (que je dois reconnaître) que je m'en foute un peu (je veux dire: encore plus qu'il y a trente ans)?
En tout cas, lire ce type de livres, ça peut être très utile, voire indispensable: si on a un diplôme à préparer, un concours à passer, etc. Ça peut être aussi très agréable, si ça porte sur un thème pour lequel on éprouve un fort intérêt. Mais en quoi est-ce que ça serait une preuve d'intelligence ou d'inintelligence? Pour ma part, je connais des “crétins érudits” (et j'espère, sans en être certain, ne pas en faire partie!), et aussi des gens très intelligents mais sans la collection typique de diplômes, qui accompagnerait la chose…
Il y a aussi la question du “parcours”. En quoi le fait d'être instit demanderait moins “d'intelligence” que celui d'être prof de fac? Que ça ne demande pas les mêmes études, les mêmes diplômes (le plus souvent), le même type de travail, d'accord: c'est un fait évident (dans notre réalité institutionnelle). Ça n'empêche que je connais pas mal d'instits qui “comprennent les enfants” (mettons de maternelle) avec une “intelligence” très élevée, et que peu de gens, à ma connaissance, possèdent (et que beaucoup devraient leur envier!). J'en ai même connu qui avaient cette capacité, “dès le départ” (tout bien réfléchi, ça n'est pas étonnant, si l'on admet que c'est une “intelligence” qui engage la personnalité entière). Alors mettons que les uns n'aient pas lu Heidegger ou Proust ou Duby ou Barthes etc., et que d'autres les aient lus: ça change quoi?
Que la “valorisation sociale” des fonctions et des positions ne soit pas la même (quoique… prof de fac, de nos jours… à part… chez les profs en général…), c'est sans doute vrai. D'ailleurs, c'est une très vieille histoire que celle de la coupure entre premier degré et second degré/université — que l'on retrouve, soit dit en passant, dans une différence très sensible de rémunération qui pénalise injustement les premiers. Mais je continue à ne pas voir du tout en quoi ça devrait nécessairement qualifier des personnes: il me semble douteux que ça dise quoi que ce soit de leurs qualités réelles…
Cdlt
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Je ne partage plus ce sentiment, mais je suis tout aussi impressionné par la quantité de choses que certaines personnes arrivent à faire, en plus de s'adonner à des activités futiles. Meilleure mémoire ? Besoins en sommeil plus limités ? Drogue ?
Bah… Dans mon cas, ça relève de la névrose obsessionnelle ou compulsive: pas moyen d'éviter de lire! Pas besoin de drogue — mais je ne suis pas certain que ça coûte moins cher!
- BorgesianaNiveau 3
Je partage le même sentiment que Cléopatra2. Je ne me sens pas légitime auprès de mes collègues, j'ai toujours l'impression d'en savoir beaucoup moins qu'eux. Je ne me sens pas légitime non plus face aux parents... Ce qui me pose beaucoup de problèmes car j'ai du mal avec le face à face, type les rencontres parents-profs ou les appels téléphoniques. Surtout que je suis très jeune et physiquement je n'ai aucune légitime :'D. Bref, je ne sais pas si c'est l'âge ou les années de carrières qui conditionnent ce sentiment mais ça peut être déstabilisant, surtout lorsqu'il y a un incident en classe où l'élève remet en cause votre job... Comme ce qui s'est passé cet après-midi... Alors il faut se forger une belle carapace pour faire face et garder la tête haute parce qu'on est "profs" et qu'on a un statut à tenir. D'ailleurs, dès que je dis que je suis prof, j'ai l'impression que les gens s'attendent à ce que je récite l'encyclopédie ou que je discute avec eux de tous les derniers débats mondiaux... Ou pas. C'est pas parce que je suis prof que je suis Einstein. C'est lourd à endosser !
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T1
- SeiGrand Maître
Pfff... mon sentiment revient !
C'est infernal !
Alors qu'objectivement, ça se passe bien dans mes classes depuis la rentrée (enfin, je crois) et que je suis très heureuse avec les élèves. C'est fou cette peur d'être jugée !
Bon, j'ai investigué et on va me donner les contacts de deux psys dans ma ville.
C'est infernal !
Alors qu'objectivement, ça se passe bien dans mes classes depuis la rentrée (enfin, je crois) et que je suis très heureuse avec les élèves. C'est fou cette peur d'être jugée !
Bon, j'ai investigué et on va me donner les contacts de deux psys dans ma ville.
- ElaïnaDevin
Courage.
Quelques remarques.
- d'une, a priori, il y a quand même de fortes chances pour que tu en saches plus dans ta matière que les élèves. Bon, y'aura toujours un petit malin qui voudra te prendre en défaut, mais ça, c'est pas grave : tu dis "je ne sais pas mais je pourrai chercher pour vous si vous voulez" et tu passes à la suite. Il y a quelques jours un première relou voulait absolument me coincer sur la victoire de Valmy (et pourquoi tel général, et pourquoi on a gagné etc), je me suis contentée de lui faire remarquer que non, je n'étais pas une pro de l'histoire militaire, et que par contre je pourrai faire une recherche pour lui s'il voulait, ça l'a dégonflé très vite.
- pour les élèves, t'es prof, t'es dans le club des vieux croûtons. Pas la peine de chercher plus loin. En fait, tu t'aperçois très vite qu'ils ne se rendent pas forcément compte précisément de ton âge. Je leur dis souvent des trucs du genre "alors moi j'ai connu ça [la guerre du Golfe, le 11 septembre], parce que je suis vieille", ce qui les amuse beaucoup. Leur grand jeu ensuite c'est d'essayer de savoir quel âge j'ai - même si parfois c'est vexant : une fois, l'un d'eux, pensant bien faire, me dit "rho madame vous êtes pas vieille, enfin, vous avez quoi, 38 ans ?" (bah non petit jocrisse, 35 ! nanmého !). Evidemment j'en fais des caisses sur mon grand âge et tout va bien.
- pour les parents : cherche pas, ça saoule tout le monde de recevoir des parents, de leur parler etc.
- pour les collègues : je pense que l'important c'est d'être capable d'être à l'écoute des autres. Moi tu sais je me sens parfois un peu isolée quand en sdp mes collègues racontent qu'elles sont allées voir un film turc existentialiste, quand moi j'aimerais avoir un collègue pour parler un peu jeux vidéo. Mais j'ai aussi des collègues avec qui évoquer mes perversions (Walter Scott par exemple) et certains doivent aussi se sentir bien seuls quand nous parlons. On est parfois le plouc des uns comme l'intello des autres. Ne t'en fais pas, tu vas bien finir par trouver des collègues sympas et pas prise de tête pour deux sous.
Quelques remarques.
- d'une, a priori, il y a quand même de fortes chances pour que tu en saches plus dans ta matière que les élèves. Bon, y'aura toujours un petit malin qui voudra te prendre en défaut, mais ça, c'est pas grave : tu dis "je ne sais pas mais je pourrai chercher pour vous si vous voulez" et tu passes à la suite. Il y a quelques jours un première relou voulait absolument me coincer sur la victoire de Valmy (et pourquoi tel général, et pourquoi on a gagné etc), je me suis contentée de lui faire remarquer que non, je n'étais pas une pro de l'histoire militaire, et que par contre je pourrai faire une recherche pour lui s'il voulait, ça l'a dégonflé très vite.
- pour les élèves, t'es prof, t'es dans le club des vieux croûtons. Pas la peine de chercher plus loin. En fait, tu t'aperçois très vite qu'ils ne se rendent pas forcément compte précisément de ton âge. Je leur dis souvent des trucs du genre "alors moi j'ai connu ça [la guerre du Golfe, le 11 septembre], parce que je suis vieille", ce qui les amuse beaucoup. Leur grand jeu ensuite c'est d'essayer de savoir quel âge j'ai - même si parfois c'est vexant : une fois, l'un d'eux, pensant bien faire, me dit "rho madame vous êtes pas vieille, enfin, vous avez quoi, 38 ans ?" (bah non petit jocrisse, 35 ! nanmého !). Evidemment j'en fais des caisses sur mon grand âge et tout va bien.
- pour les parents : cherche pas, ça saoule tout le monde de recevoir des parents, de leur parler etc.
- pour les collègues : je pense que l'important c'est d'être capable d'être à l'écoute des autres. Moi tu sais je me sens parfois un peu isolée quand en sdp mes collègues racontent qu'elles sont allées voir un film turc existentialiste, quand moi j'aimerais avoir un collègue pour parler un peu jeux vidéo. Mais j'ai aussi des collègues avec qui évoquer mes perversions (Walter Scott par exemple) et certains doivent aussi se sentir bien seuls quand nous parlons. On est parfois le plouc des uns comme l'intello des autres. Ne t'en fais pas, tu vas bien finir par trouver des collègues sympas et pas prise de tête pour deux sous.
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It took me forty years to realize this. But for guys like us... our lives aren't really our own. There's always someone new to help. Someone we need to protect. These past few years, I fought that fate with all I had. But I'm done fighting. It's time I accept the hand I was dealt. Too many people depend on us. Their dreams depend on us.
Kiryu Kazuma inYakuza 4 Remastered
Ma page Facebook https://www.facebook.com/Lire-le-Japon-106902051582639
- SeiGrand Maître
Merci Elaïna (enfin, si c'est bien à moi que tu t'adressais).
Bon, j'ai des 6e, donc ça va, je sais que j'ai un niveau au-dessus. Il m'est arrivé une fois de vraiment complexer sur mon niveau, quand j'étais stagiaire, mais c'était dans une classe de 1re, tous musiciens parisiens qui me paraissaient avoir un niveau de dingue. En fait, j'ai été "rassurée" dès les premiers devoirs. C'était toute une attitude qui m'impressionnait, parce qu'ils venaient d'un monde que je ne connaissais pas vraiment.
Non, moi, ce qui me terrifie, ce sont plutôt les chefs et parfois les collègues quand je suis amenée à partager mon travail, par exemple. C'est névrotique (j'espère), mais j'ai toujours l'impression qu'on va me virer.
Bon, j'ai des 6e, donc ça va, je sais que j'ai un niveau au-dessus. Il m'est arrivé une fois de vraiment complexer sur mon niveau, quand j'étais stagiaire, mais c'était dans une classe de 1re, tous musiciens parisiens qui me paraissaient avoir un niveau de dingue. En fait, j'ai été "rassurée" dès les premiers devoirs. C'était toute une attitude qui m'impressionnait, parce qu'ils venaient d'un monde que je ne connaissais pas vraiment.
Non, moi, ce qui me terrifie, ce sont plutôt les chefs et parfois les collègues quand je suis amenée à partager mon travail, par exemple. C'est névrotique (j'espère), mais j'ai toujours l'impression qu'on va me virer.
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"Humanité, humanité, engeance de crocodile."
- BorgesianaNiveau 3
Elaïna a écrit:Courage.
Quelques remarques.
- d'une, a priori, il y a quand même de fortes chances pour que tu en saches plus dans ta matière que les élèves. Bon, y'aura toujours un petit malin qui voudra te prendre en défaut, mais ça, c'est pas grave : tu dis "je ne sais pas mais je pourrai chercher pour vous si vous voulez" et tu passes à la suite. Il y a quelques jours un première relou voulait absolument me coincer sur la victoire de Valmy (et pourquoi tel général, et pourquoi on a gagné etc), je me suis contentée de lui faire remarquer que non, je n'étais pas une pro de l'histoire militaire, et que par contre je pourrai faire une recherche pour lui s'il voulait, ça l'a dégonflé très vite.
- pour les élèves, t'es prof, t'es dans le club des vieux croûtons. Pas la peine de chercher plus loin. En fait, tu t'aperçois très vite qu'ils ne se rendent pas forcément compte précisément de ton âge. Je leur dis souvent des trucs du genre "alors moi j'ai connu ça [la guerre du Golfe, le 11 septembre], parce que je suis vieille", ce qui les amuse beaucoup. Leur grand jeu ensuite c'est d'essayer de savoir quel âge j'ai - même si parfois c'est vexant : une fois, l'un d'eux, pensant bien faire, me dit "rho madame vous êtes pas vieille, enfin, vous avez quoi, 38 ans ?" (bah non petit jocrisse, 35 ! nanmého !). Evidemment j'en fais des caisses sur mon grand âge et tout va bien.
- pour les parents : cherche pas, ça saoule tout le monde de recevoir des parents, de leur parler etc.
- pour les collègues : je pense que l'important c'est d'être capable d'être à l'écoute des autres. Moi tu sais je me sens parfois un peu isolée quand en sdp mes collègues racontent qu'elles sont allées voir un film turc existentialiste, quand moi j'aimerais avoir un collègue pour parler un peu jeux vidéo. Mais j'ai aussi des collègues avec qui évoquer mes perversions (Walter Scott par exemple) et certains doivent aussi se sentir bien seuls quand nous parlons. On est parfois le plouc des uns comme l'intello des autres. Ne t'en fais pas, tu vas bien finir par trouver des collègues sympas et pas prise de tête pour deux sous.
J'imagine que ce message s'adressait à moi.
Merci Elaïna d'avoir pris le temps de me rassurer sur tous points ! Je suis T1 et j'ai eu une année de stage difficile donc j'ai encore du mal à prendre mes marques et me dire que je suis légitime.
Ton message m'a fait très plaisir.
Bonne soirée
- SeiGrand Maître
Oups, je me suis trompée ! Pardon Elaïna et Borgesiana !
C'est vrai que le message d'Elaïna a beaucoup plus de sens en réponse à ton message, Borgesiana. ; )
Bon, tu te doutes que je n'ai aucun conseil à donner, mais je compatis et suis ravie qu'Elaïna ait pu t'apporter du réconfort !
C'est vrai que le message d'Elaïna a beaucoup plus de sens en réponse à ton message, Borgesiana. ; )
Bon, tu te doutes que je n'ai aucun conseil à donner, mais je compatis et suis ravie qu'Elaïna ait pu t'apporter du réconfort !
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"Humanité, humanité, engeance de crocodile."
- DanskaProphète
En soi, le message d'Elaïna pouvait répondre à toutes les deux à la fois, et à bien d'autres au passage
@Sei, si tu souffres de la situation même en sachant que ton sentiment est irrationnel, recourir à un psy est une bonne idée, au moins pour poser le problème avant de tenter d'y remédier. Parce que les arguments rationnels ne te serviront pas à grand-chose, si ton impression persistante est plus profonde ou ne vient pas directement du travail. En tout cas, courage à toi, ça ne doit pas être évident de continuer à assurer ses cours dans ces conditions.
@Sei, si tu souffres de la situation même en sachant que ton sentiment est irrationnel, recourir à un psy est une bonne idée, au moins pour poser le problème avant de tenter d'y remédier. Parce que les arguments rationnels ne te serviront pas à grand-chose, si ton impression persistante est plus profonde ou ne vient pas directement du travail. En tout cas, courage à toi, ça ne doit pas être évident de continuer à assurer ses cours dans ces conditions.
- BorgesianaNiveau 3
Sei a écrit:Oups, je me suis trompée ! Pardon Elaïna et Borgesiana !
C'est vrai que le message d'Elaïna a beaucoup plus de sens en réponse à ton message, Borgesiana. ; )
Bon, tu te doutes que je n'ai aucun conseil à donner, mais je compatis et suis ravie qu'Elaïna ait pu t'apporter du réconfort !
Aucun souci très chère ! Je partage
- Prof célibataire (mais pas seulement?)... vous ruminez chez vous quand vous avez une classe pénible?
- Sondage : Quelle est la pire incivilité ou violence que vous ayez subie depuis que vous enseignez ?
- Choisissez-vous les niveaux dans lesquels vous enseignez?
- Pour vous qui ont été les ministres de l'EN les plus désastreux depuis que vous enseignez ?
- Que répondez-vous quand on vous dit que les profs devraient prévenir les élèves quand ils font grève ?
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