- ZybulkaHabitué du forum
Je pense que c'est aussi lié à une transformation souterraine mais bien réelle de notre métier (et je n'ai pas envie d'être à horizon 10 ans quand ça aura abouti...) : le fait d'automatiser le travail d'enseignement sous forme de cases à cocher, de procédures à accomplir, de normes à remplir, d'items à valider, a pour but de rendre le métier accessible au premier jobdateur venu. Plus d'autonomie, plus de réflexion, plus d'analyse, plus de conception : c'est plus facile de recruter de simples exécutants... Et je pense effectivement que les ipr auront toute leur part à jouer dans cette évolution...epekeina.tes.ousias a écrit:Cela ne signifie pas nécessairement leur fausseté, mais cela implique qu'il s'agit de normes imposées et de prescriptions dont la force ne laisse guère d'autonomie aux profs.
- MajuFidèle du forum
"Notoirement connue comme incompétente" par qui ? En se basant sur quoi ? Comme tu le dis toi même, il est difficile, sans assister régulièrement aux cours, d'avoir une vision exacte du travail d'un collègue. Même chose d'ailleurs pour les "collègues très investis". Quant au fait de faire entrer des arrêts fréquents dans les critères d'une incompétence présumée, je trouve cela très déplacé.Ishkar a écrit:.Mais c'est assez paradoxal de me dire que j'ai déjà bossé avec une collègue de lettres qui faisait réellement tout un cours sur Mario Kart et qui était notoirement connue comme incompétente en se foutant de son boulot (en arrêt très souvent également), tandis que j'ai déjà vu des collègues très investis avoir droit à des inspections assez mitigées
Je partage tout à fait cet avis. C'est une évolution voulue du métier.Zybulka a écrit:Je pense que c'est aussi lié à une transformation souterraine mais bien réelle de notre métier (et je n'ai pas envie d'être à horizon 10 ans quand ça aura abouti...) : le fait d'automatiser le travail d'enseignement sous forme de cases à cocher, de procédures à accomplir, de normes à remplir, d'items à valider, a pour but de rendre le métier accessible au premier jobdateur venu. Plus d'autonomie, plus de réflexion, plus d'analyse, plus de conception : c'est plus facile de recruter de simples exécutants... Et je pense effectivement que les ipr auront toute leur part à jouer dans cette évolution...
- ZybulkaHabitué du forum
Mais même en admettant que ce soit le cas : en quoi est-ce important d'avoir une vision objective de la qualité du travail des profs ?Ishkar a écrit:Concernant la pertinence de l'évaluation, elle me semble très faible dans le cadre de "Une visite une fois tous les 3 ans" et même une fois par an. Je pense qu'il est extrêmement chronophage mais relativement pertinent de faire, comme un tuteur de stage, des visites assez régulières. Si tu regardes le boulot d'un prof toutes les 2/3 semaines, l'évolution de sa séquence, de son rapport aux élèves, de l'appropriation de ceux-ci, etc., là, tu peux avoir une vision à peu près objective de la qualité du travail.
Quel rapportIshkar a écrit:j'ai déjà bossé avec une collègue de lettres qui faisait réellement tout un cours sur Mario Kart et qui était notoirement connue comme incompétente en se foutant de son boulot (en arrêt très souvent également), tandis que j'ai déjà vu des collègues très investis avoir droit à des inspections assez mitigées car eux n'entraient pas totalement dans ce qui était attendu.
- TangledingGrand Maître
En fait il peut y avoir un rapport... Mais inversé. A savoir qu'un professeur ayant des difficultés et non accompagné subit de ce fait des risques pour sa santé.
L'institution aurait donc une responsabilité assez probable. De ce que je vois à l'EN le principe c'est de s'occuper du problème quand c'est trop tard.
Cela étant on parle d'une portion assez faible du corps enseignant.
Si ce n'est que le fait de laisser l'enseignant seul face aux difficultés est à peu près une constante de l'institution, même quand ces difficultés ne sont pas au niveau d'alerte critique.
Plus largement on pourrait parler de l'absence de politique de prévention, à des degrés divers, qu'il s'agisse des difficultés professionnelles ou des risques pour la santé liés au travail, de façon générale.
L'institution aurait donc une responsabilité assez probable. De ce que je vois à l'EN le principe c'est de s'occuper du problème quand c'est trop tard.
Cela étant on parle d'une portion assez faible du corps enseignant.
Si ce n'est que le fait de laisser l'enseignant seul face aux difficultés est à peu près une constante de l'institution, même quand ces difficultés ne sont pas au niveau d'alerte critique.
Plus largement on pourrait parler de l'absence de politique de prévention, à des degrés divers, qu'il s'agisse des difficultés professionnelles ou des risques pour la santé liés au travail, de façon générale.
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- IshkarNiveau 6
Jenny a écrit:Ishkar a écrit:Pour rebondir sur ce que je dis, rien que la question de gestion de classe : inspecté tous les 3 ans, tu sais que même une classe un peu chiante va probablement se tenir correctement.
Pas forcément. Il y a des classes moins sympas que d'autres.
Une inspection tous les mois, c'est infaisable. Tu imagines le nombre d'inspecteurs qu'il faudrait ?
Pas forcément, mais généralement, le fait qu'il y ait un inspecteur dans la salle modifie quand même la dynamique du cours et peut supprimer certaines problématiques. J'ai été inspecté une seule fois quand je bossais dans un lycée d'une ville où les collèges sont REP +, et le CR d'inspection revenait sur des détails assez peu pertinents à mes yeux, en mettant de côté tout l'aspect gestion de classe, celle-ci ayant été facilitée car il y avait une inspection.
Je précise que j'avais un assez bon relationnel avec les élèves, et j'ai pu le voir en les recroisant pour certains par la suite, mais que j'ai eu de grosses difficultés à les adapter aux exigences du lycée et à mes propres exigences. Et donc, le "contexte de l'inspection" a totalement mis de côté cette problématique, car même ceux qui, hors inspection, auraient été compliqués à mettre au travail, ils ont joué le jeu. Et à la sortie, j'ai eu de multiples conseils sur quasiment tout sauf ce qui était le réel défi d'une bonne pratique dans cet établissement.
Et je sais pertinemment que ce que je proposais est impossible à réaliser, mon propos a peut-être manqué de clarté. Je voulais simplement souligner qu'une évaluation qui aurait vraiment du sens, ça serait celle du cours de tous les jours, le cours du quotidien, avec ses problématiques réelles, que ce soit en gestion de classe, un vidéo-proj qui ne s'allume pas car on n'a pas anticipé exprès, au cas où, la salle où ça n'arrive jamais, sans le cours spécifiquement fait pour que l'inspecteur soit satisfait, etc. Mais comme on ne peut pas avoir ces conditions réelles, on fait une évaluation de temps en temps qui, je trouve, n'a pas grand intérêt. C'est pour moi comme si une fois tous les 5 ans tu faisais venir un nutritionniste en lui montrant ton repas du jour et en le vendant au sein d'une semaine de repas que tu peux un peu embellir par rapport à la réalité.
- IshkarNiveau 6
Maju a écrit:"Notoirement connue comme incompétente" par qui ? En se basant sur quoi ? Comme tu le dis toi même, il est difficile, sans assister régulièrement aux cours, d'avoir une vision exacte du travail d'un collègue. Même chose d'ailleurs pour les "collègues très investis". Quant au fait de faire entrer des arrêts fréquents dans les critères d'une incompétence présumée, je trouve cela très déplacé.Ishkar a écrit:.Mais c'est assez paradoxal de me dire que j'ai déjà bossé avec une collègue de lettres qui faisait réellement tout un cours sur Mario Kart et qui était notoirement connue comme incompétente en se foutant de son boulot (en arrêt très souvent également), tandis que j'ai déjà vu des collègues très investis avoir droit à des inspections assez mitigéesJe partage tout à fait cet avis. C'est une évolution voulue du métier.Zybulka a écrit:Je pense que c'est aussi lié à une transformation souterraine mais bien réelle de notre métier (et je n'ai pas envie d'être à horizon 10 ans quand ça aura abouti...) : le fait d'automatiser le travail d'enseignement sous forme de cases à cocher, de procédures à accomplir, de normes à remplir, d'items à valider, a pour but de rendre le métier accessible au premier jobdateur venu. Plus d'autonomie, plus de réflexion, plus d'analyse, plus de conception : c'est plus facile de recruter de simples exécutants... Et je pense effectivement que les ipr auront toute leur part à jouer dans cette évolution...
Par tout le monde. Dans un établissement où une ou un collègue exerce depuis certaines années, tu vois bien quand tu récupères ses élèves l'année d'après si tu as eu des cours ou non. J'avais une prof au collège dont le cours était dicté, de A à Z, sans question possible, en te disant "Maintenant on saute une ligne et on fait un alinéa de 2 carreaux" pendant 1 heure. En contrôle, tu devais faire du mot à mot, sinon tu n'avais pas les points. En tant qu'élèves, on savait qu'elle était mauvaise enseignante, et je me doute que ses collègues le réalisaient aussi.
Pour en revenir à mes moutons, quand les élèves ne savent jamais rien du programme de l'année passée, quand il n'y a aucune base méthodologique, quand tu dois faire de l'AP avec ses classes, que tu regardes leur classeur et que le cours portait sur des jeux vidéos avec une prise de note quasiment absente même chez les bons élèves, il y a un truc qui cloche. Je ne voulais pas lancer un débat sur cette collègue Je pense simplement qu'il y a toujours un très faible pourcentage de profs qui, pour X raisons, sont totalement déconnectés de leur boulot et je pense qu'on peut objectivement le dire.
Pour les arrêts fréquents, quand tu sais qu'ils sont bidonnés et ne correspondent pas à une réelle détresse, je vois assez peu en quoi c'est déplacé. Un collègue qui se met en arrêt 3 mois pour une invention de racisme de la part d'un autre collègue (totalement fausse), plaidant à son médecin une détresse inexistante et forçant d'autres collègues chaque année à reprendre quelques cours pour ne pas défavoriser ses élèves, c'est moyen. Après, peut-être que c'est une façade, qu'au fond, il y a une détresse énorme, etc. Sans être psychologue, j'ai quand même déjà vu des collègues usés, qui tentaient et n'en pouvaient plus, et, que ce soit sur mes boulots étudiants ou en tant qu'enseignant, rencontré de rares personnes qui s'en foutent objectivement et qui veulent juste en faire le moins possible. Et tu le sens dans le comportement comme dans les remarques déplacées dans la manière de parler d'autres collègues ou des élèves, etc. Bref, ça n'a pas grand intérêt, je dérive du sujet. J'ai rencontré en 7 ans une collègue qui me semblait vraiment mauvaise dans sa pratique et s'en foutait totalement, et que l'évaluation ne posait pas réellement problème, tandis que d'autres collègues plus investis peuvent se trouver contestés car ne sachant pas autant rentrer dans les cases quand il le faut.
Zybulka : Je ne dis pas, du tout, qu'il faut forcément une vision objective de la qualité du travail des profs. Je tenais surtout à souligner que sans méthode qui serait extrêmement chronophage et impossible à mettre en place par quelqu'un dont ça serait le boulot, il est impossible, de toute façon, d'évaluer réellement la qualité du boulot d'un prof.
Pour les arrêts j'ai répondu, quand sur 500 collègues j'en rencontre une qui cherche objectivement à se mettre en arrêt de façon systématique pour une broutille, je considère que ça fait partie d'une compétence. Si demain tu as la flemme de bosser et as un médecin complaisant qui te permet de le faire, c'est une mauvaise pratique pro.
- IphigénieProphète
Apparemment ça se teste déjà depuis fort longtemps: j’ai dû déjà raconter que j’avais été approchée quand j’enseignais en bts par la fac locale( via mon cde) qui cherchait quelqu’un pour assurer des cours de remise à niveau dans je ne sais plus quel cadre : j’étais allée voir de quoi il s’agissait et je suis tombée sur une collègue, jeune vacataire, qui m’a expliqué que je ne devais pas m’inquiéter du niveau, vu que c’était très facile, qu’on recevait un dossier avec des batteries d’exercices et qu’il suffisait de surveiller que les étudiants les fassent devant toi. Le tout payé au lance pierre: j’ai effectivement reçu ces fameux dossiers d’exercices plus ou moins bien foutus mais plutôt moins. Et j’ai bien sûr expliqué à mon proviseur que cela ne m’intéressait pas et n’était pas destiné à des professeurs réellement mais plutôt à des surveillants, en somme.Zybulka a écrit:Je pense que c'est aussi lié à une transformation souterraine mais bien réelle de notre métier (et je n'ai pas envie d'être à horizon 10 ans quand ça aura abouti...) : le fait d'automatiser le travail d'enseignement sous forme de cases à cocher, de procédures à accomplir, de normes à remplir, d'items à valider, a pour but de rendre le métier accessible au premier jobdateur venu. Plus d'autonomie, plus de réflexion, plus d'analyse, plus de conception : c'est plus facile de recruter de simples exécutants... Et je pense effectivement que les ipr auront toute leur part à jouer dans cette évolution...
Mais voilà
Je me dis avec le recul que les tests stupides qu’on a dû faire en seconde pendant quelques années sous le prétexte de l’innovation de l’usine à gaz des « modules » servaient à la direction prospectives et évaluations à essayer de mettre au point justement des batteries de ce genre. Teste par les professeurs à échelle nationale ca s’est révélé profondément inefficace, inadapté et inevaluable réellement mais je ne doute pas que ça n’a pas découragé de l’idée.
En fait c’est étonnant qu’on manque de gaz, rien qu’avec les innovations en lettres depuis trente ans, on a pourtant dû fournir pas mal d’usines.
- IshkarNiveau 6
Tangleding a écrit:En fait il peut y avoir un rapport... Mais inversé. A savoir qu'un professeur ayant des difficultés et non accompagné subit de ce fait des risques pour sa santé.
L'institution aurait donc une responsabilité assez probable. De ce que je vois à l'EN le principe c'est de s'occuper du problème quand c'est trop tard.
Cela étant on parle d'une portion assez faible du corps enseignant.
Si ce n'est que le fait de laisser l'enseignant seul face aux difficultés est à peu près une constante de l'institution, même quand ces difficultés ne sont pas au niveau d'alerte critique.
Plus largement on pourrait parler de l'absence de politique de prévention, à des degrés divers, qu'il s'agisse des difficultés professionnelles ou des risques pour la santé liés au travail, de façon générale.
Je suis bien d'accord avec ça. Après je ne sais pas comment l'on pourrait modifier les choses. Je suis étonné en tant qu'ex-contractuel de voir par exemple qu'à moins de demander les choses moi-même, niveau formation, on ne me proposait rien. Pareil pour aller voir le cours de collègues et autres. Je suppose qu'une fois titularisé, c'est pareil une fois l'année de stage passée.
Par contre, en stage, tu es alternant pour être formé, tu as un tuteur qui vient voir tes cours et inversement, etc. Je suis étonné que même par pure vision "Comment rendre les profs plus efficace", l'EN n'ait jamais envisagé un truc, dans le contrat des profs eux-mêmes, consistant à des cours en binôme ou des visites officielles pour voir ce qui se fait ailleurs, etc.
- TangledingGrand Maître
Je ne suis pas de ton avis. En inspection les inspecteurs de bonne foi cernent assez vite la nature de mes difficultés et je n'ai pas trop de problème à établir le diagnostic de mon côté. Même si la classe est parfois plus engagée que durant d'autres cours, plus calme parfois. Par contre c'est du côté des solutions d'accompagnement et de formation proposée que ça laisse à désirer. Ça fait deux fois que des inspecteurs/inspectrices différent-es aboutissent à la même conclusion (à laquelle je suis arrivé tout seul sans les attendre, du reste) qu'iels me disent : on va vous proposer du "cousu main" et ensuite soit j'ai le droit à une formation non disciplinaire inadaptée, soit à une formation disciplinaire d'intérêt très limité, soit à un-e inspecteur-trice qui passe à autre chose.
Ce n'est pas un problème de personne, c'étaient des IPR tout à fait professionnels, mais il y a un problème structurel.
En fait les inspecteurs savent repérer (et promouvoir quand iels acceptent de rentrer dans le moule) les excellent-es enseignant-es. Ils interviennent aussi quand la situation est critique - quand il est trop tard.
Mais il n'y a pas grand chose d'adapté pour les professeurs lambda. Or ce sont évidemment les plus nombreux.
Ce n'est pas un problème de personne, c'étaient des IPR tout à fait professionnels, mais il y a un problème structurel.
En fait les inspecteurs savent repérer (et promouvoir quand iels acceptent de rentrer dans le moule) les excellent-es enseignant-es. Ils interviennent aussi quand la situation est critique - quand il est trop tard.
Mais il n'y a pas grand chose d'adapté pour les professeurs lambda. Or ce sont évidemment les plus nombreux.
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- LagomorpheFidèle du forum
Ishkar a écrit:Concernant la pertinence de l'évaluation, elle me semble très faible dans le cadre de "Une visite une fois tous les 3 ans" et même une fois par an. Je pense qu'il est extrêmement chronophage mais relativement pertinent de faire, comme un tuteur de stage, des visites assez régulières. Si tu regardes le boulot d'un prof toutes les 2/3 semaines, l'évolution de sa séquence, de son rapport aux élèves, de l'appropriation de ceux-ci, etc., là, tu peux avoir une vision à peu près objective de la qualité du travail.
Ah bon ? Et sur quels critères ? On peut changer à loisir la fréquence des inspections, ça n'enlèvera rien au fait qu'il n'existe aucune définition claire d'un travail de qualité.
Ishkar a écrit:Si ce n'est pas autant régulier, l'évaluation consistera principalement à essayer de rentrer dans les cases demandées en modifiant un peu nos pratiques d'enseignement pour le jour J, et basta. Ce qui n'est pas bien compliqué à faire en pratique, puisque les élèves en général jouent le jeu
Paradoxalement, par expérience, ça peut aussi être totalement contre-productif. J'ai été inspecté avec une classe adorable, manifestement bien plus stressée que moi par la présence de l'inspecteur - un membre de la secte "tout le savoir doit venir de l'apprenant", tendance Inquisition espagnole. La classe était si exceptionnellement calme, silencieuse, policée que ça s'est retourné contre moi : "absence de bruit pédagogique", "le professeur impose un déroulé", bla bla bla.
Modifier un poil nos pratiques pour le jour J, on l'a tous plus ou moins fait, et je trouve qu'il y a là un avantage évident: une fois qu'on est rentré à peu près dans les cases ledit jour J, on a la paix pour les suivants et on peut enseigner d'une manière dont on sait qu'elle fonctionne. Même si elle n'entre pas dans les cases de la petite grille personnelle et étriquée de l'IPR.
Ishkar a écrit:Je ne sais pas ce qui se fait ailleurs en Europe, mais ce que j'ai toujours trouvé frappant, c'est l'absence quasiment totale d'aide et d'observation du moment que, de l'extérieur, on entre à peu près dans les bonnes cases. Tu peux très bien faire n'importe quoi dans ton boulot, être au contraire extrêmement compétent, ou encore en perdition totale à ne pas trouver de solution, si tu ne sollicites personne, on ne viendra ni t'évaluer, ni te conseiller. Je ne dis pas que c'est toujours négatif, je précise, car ça peut vite devenir du flicage.
Malheureusement, la plupart des appels à l'aide se transforment en dispositifs d'accompagnement qui s'apparentent à des sanctions déguisées. Oh bien sûr, on vous promet aide et conseils pertinents sans jugement, mais dans la réalité ce que j'ai connu était bien une sanction pour non conformité idéologique et manque de souplesse d'échine - et a bien été présentée comme telle par un CDE un peu trop sincère. Tout accompagnement se termine d'ailleurs par un rapport de l'accompagnant sur l'accompagné, jamais l'inverse. Et des HSE pour l'accompagnant, jamais l'accompagné.
Ishkar a écrit:Mais c'est assez paradoxal de me dire que j'ai déjà bossé avec une collègue de lettres qui faisait réellement tout un cours sur Mario Kart et qui était notoirement connue comme incompétente en se foutant de son boulot (en arrêt très souvent également), tandis que j'ai déjà vu des collègues très investis avoir droit à des inspections assez mitigées car eux n'entraient pas totalement dans ce qui était attendu.
Houlà...qu'est-ce qu'on doit dire dans mon dos, moi qui ose passer un ou deux épisodes de séries tv médicales par an à mes élèves (en lien avec les programmes, et dans l'optique de leur faire comprendre que ce qu'ils apprennent correspond à des cas concrets de la vraie vie, et accessoirement que le vocabulaire médical et le fonctionnement d'une pathologie et d'un traitement accessible à leur niveau). Quant aux arrêts maladie de mes collègues, n'étant pas médecin et encore moins leur médecin, je me garderais bien de porter un jugement sur leur pertinence médicale; je m'interdis même tout commentaire, en fait, et je ne vois pas ce que ça vient faire dans le débat, la santé est affaire privée. De même, à moins qu'un collègue ne me l'affirme explicitement, je ne me permettrais pas de juger qu'il "se fout de son boulot": je ne suis pas télépathe.
Quoi qu'il en soi, même en admettant qu'un collègue mérite de la part de ses pairs (qui outrepassent ainsi leurs prérogatives) un tel jugement à l'emporte-pièce, s'il parvient à avoir la paix en se fatiguant le moins possible et en exploitant les failles d'un système d'évaluation pourri, j'aurais presque une forme d'admiration pour ses qualités de stratège. L'EN récolte ce qu'elle a semé.
Le vrai problème dans ce qui est évoqué ici n'est pas que l'inspection oublie de s'acharner sur des collègues que certains se permettent de juger incompétents: de toute façon, on manque d'enseignants, on va bien être obligé de maintenir de plus en plus en poste des gens qui ne donneront pas entière satisfaction. Le vrai problème est que des collègues très investis écopent de rapports mitigés voire pire. Sur la base de critères flous, voire carrément frappés d'inexistence officielle en dehors de la tête d'un IPR déconnecté des réalités. Une piste pourrait être de les obliger à justifier chaque élément d'un rapport en citant un texte réglementaire... Mais savoir qu'un collègue que je jugerais personnellement pas top s'est fait plus descendre que moi, ça ne m'apportera aucune satisfaction. J'ai dû naître sans la perversion adéquate.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Zybulka a écrit:Je pense que c'est aussi lié à une transformation souterraine mais bien réelle de notre métier (et je n'ai pas envie d'être à horizon 10 ans quand ça aura abouti...) : le fait d'automatiser le travail d'enseignement sous forme de cases à cocher, de procédures à accomplir, de normes à remplir, d'items à valider, a pour but de rendre le métier accessible au premier jobdateur venu. Plus d'autonomie, plus de réflexion, plus d'analyse, plus de conception : c'est plus facile de recruter de simples exécutants... Et je pense effectivement que les ipr auront toute leur part à jouer dans cette évolution...epekeina.tes.ousias a écrit:Cela ne signifie pas nécessairement leur fausseté, mais cela implique qu'il s'agit de normes imposées et de prescriptions dont la force ne laisse guère d'autonomie aux profs.
Oui. Et ça, c'est le processus même de l'approche par les compétences qui consiste en une politique générale de l'OCDE, de l'Europe et de ses “membres”: la transcription dans une soi-disant pédagogie des exigences d'une formation et d'une flexibilisation des individus, tenus pour des centres de ressources personnelles, par une nouvelle gestion ou gouvernance des populations. Les corps d'inspection sont eux-mêmes pris dans cette logique de pouvoir et font l'objet du même type de pressions que celles qu'ils ont à exercer.
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Si tu vales valeo.
- ZybulkaHabitué du forum
Je me dis chaque année quand je récupère mes propres élèves que leur prof de l'année d'avant devait être vraiment nulle ("ah nan madame on n'a JAMAIS fait ça !").Ishkar a écrit: Dans un établissement où une ou un collègue exerce depuis certaines années, tu vois bien quand tu récupères ses élèves l'année d'après si tu as eu des cours ou non.
Ben bingo, la voilà la solution !! Plutôt que de rajouter du boulot aux cde, faisons évaluer les profs par les élèves ou par les collègues !Ishkar a écrit:En tant qu'élèves, on savait qu'elle était mauvaise enseignante, et je me doute que ses collègues le réalisaient aussi.
J'ai l'impression que dans le supérieur, on a déjà sauté le pas : les MCF ne font plus d'enseignement mais de la gestion de ressources humaines. Leur job, c'est de concevoir des cours qui pourront être faits clés en main par des vacataires bon marché qu'ils et elles auront la charge de recruter et de coordonner... Vive l'autonomie des universités... Et c'est la même chose qui se profile dans le secondaireIphigénie a écrit:Apparemment ça se teste déjà depuis fort longtemps: j’ai dû déjà raconter que j’avais été approchée quand j’enseignais en bts par la fac locale( via mon cde) qui cherchait quelqu’un pour assurer des cours de remise à niveau dans je ne sais plus quel cadre : j’étais allée voir de quoi il s’agissait et je suis tombée sur une collègue, jeune vacataire, qui m’a expliqué que je ne devais pas m’inquiéter du niveau, vu que c’était très facile, qu’on recevait un dossier avec des batteries d’exercices et qu’il suffisait de surveiller que les étudiants les fassent devant toi.
epekeina.tes.ousias a écrit:Oui. Et ça, c'est le processus même de l'approche par les compétences qui consiste en une politique générale de l'OCDE, de l'Europe et de ses “membres”: la transcription dans une soi-disant pédagogie des exigences d'une formation et d'une flexibilisation des individus, tenus pour des centres de ressources personnelles, par une nouvelle gestion ou gouvernance des populations.
Je crois qu'on n'a pas assez mesuré à quel point l'évaluation par compétence était une forme d'entrisme du capitalisme managérial dans l'éducnat...
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Oui, c'est ce qui s'est passé, je pense.
(Sinon: “les MCF ne font plus d'enseignement mais de la gestion de ressources humaines”, comme s'ils avaient décidé de ne plus faire cours et de recruter des vacataires…… Au passage, ça n'est ni mon cas ni celui des collègues que je fréquente; on fait tous cours et aucun d'entre nous n'a le pouvoir des créer des postes, à peine celui de les réclamer. Généraliser, c'est toujours la tendance à laquelle on cède quand on est dans la panade: le seul problème, c'est que ça ne fait que le jeu du pouvoir en place. Mais certes, ça pourrait être pire: j'imagine bien la bordée que prendrait un MCF ou un PU s'il osait écrire que “les profs du secondaire ou du primaire ne font plus cours” où se contentent de gérer les ressources humaines et les vacataires!)
(Sinon: “les MCF ne font plus d'enseignement mais de la gestion de ressources humaines”, comme s'ils avaient décidé de ne plus faire cours et de recruter des vacataires…… Au passage, ça n'est ni mon cas ni celui des collègues que je fréquente; on fait tous cours et aucun d'entre nous n'a le pouvoir des créer des postes, à peine celui de les réclamer. Généraliser, c'est toujours la tendance à laquelle on cède quand on est dans la panade: le seul problème, c'est que ça ne fait que le jeu du pouvoir en place. Mais certes, ça pourrait être pire: j'imagine bien la bordée que prendrait un MCF ou un PU s'il osait écrire que “les profs du secondaire ou du primaire ne font plus cours” où se contentent de gérer les ressources humaines et les vacataires!)
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Si tu vales valeo.
- ZybulkaHabitué du forum
Ce n'est pas du tout ce que je voulais dire, je reformule : j'ai l'impression que de plus en plus, on demande aux MCF non plus de faire cours mais de recruter des vacataires et de les coordonner (de la même façon que sur la partie recherche, de moins en moins de temps est dévolu à la recherche même, remplacé par le temps passé à trouver des financements pour pouvoir bosser). C'est en tout cas ce que je constate chez beaucoup d'ami·es dans le métier. Mais pour être sûre d'être tout à fait claire, pas une seule seconde je n'ai envisagé de le reprocher aux collègues : c'est clairement l'institution qui les place dans ce rôle par souci d'économie et d'"optimisation des ressources humaines"...
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Il est vrai qu'“on” le leur demande: mais, à ma connaissance, ils ont parfaitement le moyen de refuser, car il leur suffit de dire non. Le problème, c'est que pour eux comme pour tout le monde ou presque, ça a l'air si difficile de dire non… Et j'ajoute que “on”, ce sont les équipes présidentielles d'U., c'est-à-dire… des MCF et des PU dans la majorité des cas, les mêmes que ceux de la CPU/“France Universités”… À ceux-là, j'ai pas mal de reproches à faire. Mais, pour ce que j'en vois, ça suscite de plus en plus le refus (voire plus).
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Si tu vales valeo.
- Mateo_13Niveau 5
Bonjour,
pour apprendre à dire non, on peut s'inspirer de la réponse d'un inspecteur à l'un de ses supérieurs :
"Vous devez accepter cette mission"
"Non"
"Vous ne pouvez pas refuser"
"Si, vous voyez, je viens de le faire"
;-)
Amicalement,
pour apprendre à dire non, on peut s'inspirer de la réponse d'un inspecteur à l'un de ses supérieurs :
"Vous devez accepter cette mission"
"Non"
"Vous ne pouvez pas refuser"
"Si, vous voyez, je viens de le faire"
;-)
Amicalement,
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Mateo.
https://mathagora2022.wordpress.com/
- IshkarNiveau 6
Je fais de mon téléphone donc rapidement : loin de moins l'idée de dire que l'on doit sanctionner certains collègues, nous-mêmes les évaluer, les évaluer tout court, etc.
Je trouve néanmoins paradoxal de faire passer pour quasiment une perversité le fait d'émettre un jugement sur un collègue. Notre métier consiste à former, et souvent à noter. Et que l'on soit à l'EN ou ailleurs, on a tous déjà bossé avec des collègues très investis et qui rendent le boulot plaisants, et d'autres qui le sont moins.
Je suis en lettres, je me permets de dire qu'un ou une collègue ne donnant que des questions à partir des textes du manuel, semaine après semaine et mois après mois, c'est "moins bien" que quelqu'un variant plus les activités. Je me permets de dire, aussi, que si ce collègue te dit qu'il multiplie les arrêts par manque d'envie de bosser, sans problème particulier, c'est pas top.
Je suis peut être encore jeune et naïf mais ce corporatisme parfois excessif me fait rire. C'est tout de même différent de demander des sanctions (ce que je ne fais pas) que de simplement relever, sur un forum anonyme, qu'on peut parfois trouver des collègues qui s'en foutent de leur boulot.
Je me suis déjà retrouvé en PP avec un élève qui me demandaient pourquoi tel prof, en conflit avec tous les collègues pour des propos inventés, lui avait mis des notes tout le trimestre alors qu'il avait été absent pour maladie. Le fin mot de l'histoire était que les notes étaient rentrées totalement au hasard pour les élèves absents. Ai-je le droit et la perversion de dire que c'est problématique, quelles que soient les raisons ?
La question se pose aussi dans d'autres métiers d'ailleurs. La police a une formation très courte en France et on peut voir des dérives. Est-ce qu'un membre de la police doit défendre son collègue, coûte que coûte, par corporatisme, ou peut-il estimer qu'il y a des problèmes ?
Encore une fois, je parle ici simplement d'un forum anonyme avec un jugement qui ne porte pas à conséquence. Si je propose une séquence qui semble pourrie, j'ose espérer que des collègues peuvent, anonymement, me dire ce qu'ils changeraient. Ma réaction serait bien différente s'il s'agissait de ma paie.
J'ai soulevé initialement ce point car il me semble compliqué, dans un contexte de faible partage institutionnalisé de pratiques, avec de rares inspections, de pouvoir être évalué ou conseillé de manière neutre. Comme dit plus haut (désolé sur téléphone je ne vois plus les messages précédents), ça devient vite une sanction, donc on va préférer rester dans les clous, ce qui est dommage. L'inspection fonctionne sur le même principe.
Je trouve néanmoins paradoxal de faire passer pour quasiment une perversité le fait d'émettre un jugement sur un collègue. Notre métier consiste à former, et souvent à noter. Et que l'on soit à l'EN ou ailleurs, on a tous déjà bossé avec des collègues très investis et qui rendent le boulot plaisants, et d'autres qui le sont moins.
Je suis en lettres, je me permets de dire qu'un ou une collègue ne donnant que des questions à partir des textes du manuel, semaine après semaine et mois après mois, c'est "moins bien" que quelqu'un variant plus les activités. Je me permets de dire, aussi, que si ce collègue te dit qu'il multiplie les arrêts par manque d'envie de bosser, sans problème particulier, c'est pas top.
Je suis peut être encore jeune et naïf mais ce corporatisme parfois excessif me fait rire. C'est tout de même différent de demander des sanctions (ce que je ne fais pas) que de simplement relever, sur un forum anonyme, qu'on peut parfois trouver des collègues qui s'en foutent de leur boulot.
Je me suis déjà retrouvé en PP avec un élève qui me demandaient pourquoi tel prof, en conflit avec tous les collègues pour des propos inventés, lui avait mis des notes tout le trimestre alors qu'il avait été absent pour maladie. Le fin mot de l'histoire était que les notes étaient rentrées totalement au hasard pour les élèves absents. Ai-je le droit et la perversion de dire que c'est problématique, quelles que soient les raisons ?
La question se pose aussi dans d'autres métiers d'ailleurs. La police a une formation très courte en France et on peut voir des dérives. Est-ce qu'un membre de la police doit défendre son collègue, coûte que coûte, par corporatisme, ou peut-il estimer qu'il y a des problèmes ?
Encore une fois, je parle ici simplement d'un forum anonyme avec un jugement qui ne porte pas à conséquence. Si je propose une séquence qui semble pourrie, j'ose espérer que des collègues peuvent, anonymement, me dire ce qu'ils changeraient. Ma réaction serait bien différente s'il s'agissait de ma paie.
J'ai soulevé initialement ce point car il me semble compliqué, dans un contexte de faible partage institutionnalisé de pratiques, avec de rares inspections, de pouvoir être évalué ou conseillé de manière neutre. Comme dit plus haut (désolé sur téléphone je ne vois plus les messages précédents), ça devient vite une sanction, donc on va préférer rester dans les clous, ce qui est dommage. L'inspection fonctionne sur le même principe.
- MatteoNiveau 10
Il y a des milliers de configurations qui peuvent pousser quelqu'un à dire qu'il s'arrête "pour rien". Certaines pour se protéger du regard d'autrui, d'autres par ce que ça fait partie de la maladie en tant que tel. Parfois juste pour envoyer balader les indiscrets qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas. Le médecin est seul juge sauf à promouvoir la rumeur comme mode d'évaluation et je suis assez consterné que la chasse aux arrêts maladie puisse autant animer dans un ministère où on a vite fait de se prendre un coup sans raison profonde.
Si les manuels "ne varient pas assez les activités" il faut le dire aux IPR qui les écrivent qu'on mette ça dans leur évaluation.
Si les manuels "ne varient pas assez les activités" il faut le dire aux IPR qui les écrivent qu'on mette ça dans leur évaluation.
- Clecle78Bon génie
Comment reconnaître le bon prof du mauvais prof ?Je conseille de s'inspirer de la méthode des Inconnus pour le chasseur...
- IshkarNiveau 6
Matteo a écrit:Il y a des milliers de configurations qui peuvent pousser quelqu'un à dire qu'il s'arrête "pour rien". Certaines pour se protéger du regard d'autrui, d'autres par ce que ça fait partie de la maladie en tant que tel. Parfois juste pour envoyer balader les indiscrets qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas. Le médecin est seul juge sauf à promouvoir la rumeur comme mode d'évaluation et je suis assez consterné que la chasse aux arrêts maladie puisse autant animer dans un ministère où on a vite fait de se prendre un coup sans raison profonde.
Si les manuels "ne varient pas assez les activités" il faut le dire aux IPR qui les écrivent qu'on mette ça dans leur évaluation.
Bien sûr. Et il peut simplement y avoir des collègues très investis et quelques-uns qui s'en foutent. Comme de partout, dans tous les métiers, et tous les domaines. Et j'en ai même rencontré moins dans l'EN que dans les boulots étudiants, car l'accès difficile à l'EN a pour conséquence, je trouve, beaucoup de collègues très investis et moins souvent en arrêt que dans d'autres secteurs, par rapport à ailleurs.
Je n'ai pas envie de deriver du sujet initial. Je trouve ça dingue de devoir autant justifier une critique pour concrètement deux cas de figure en 7 ans de prof qui étaient totalement en roue-libre.
Et oui, si tu veux, le problème c'est le manuel et les IPR. Pour ma part, étant têtu, je vais rester sur mon impression qu'un enseignant prenant les textes quasiment au hasard au moment de faire cours, pour ensuite dire "Faites les questions" avant de transmettre le corrigé du livret enseignant, ça reste, pour des raisons qui lui sont propres, sûrement un moins bon enseignant que quelqu'un sélectionnant avec plus de soin ses textes, sachant les présenter, susciter des questionnements, etc.
Ça ne change rien au fait que je ne propose rien concernant "Comment bien évaluer", mais j'ai à l'origine simplement pris ces exemples un peu extrêmes pour souligner que si, tu peux, si tu y passes un minimum de temps (que l'EN n'a pas), un minimum évaluer le travail de quelqu'un. Ou tout du moins différencier celui qui essaie de faire les choses bien quitte à se planter, et celui qui n'essaie pas. Ce qui ne veut pas dire que l'institution doit évaluer, sanctionner ou valoriser dans l'absolu. Mais que je sache, un tuteur par exemple, il est bien capable d'à peu près avoir un début d'avis sur la compétence d'un stagiaire, non ? Si l'on mettait un observateur tous les jours en classe (ce que je ne souhaite évidemment pas), on pourrait juger aussi, non ?
Que l'institution n'ait pas les moyens de faire les choses bien et ainsi qu'on refuse le principe d'une évaluation, aucun souci, ça se défend parfaitement. Faire comme si c'est, à considérer des moyens illimitées, parfaitement impossible, je suis moins d'accord.
Et je trouve, personnellement, que dans une équipe disciplinaire, à défaut de savoir qui est un bon (d'office à mettre en italique du téléphone) prof, tu peux quand même avoir quelques pistes sur ceux qui sont plus en difficulté. Et si, malheureusement, ça découle plus sur un jugement négatif que des aides, c'est gênant, mais dans un monde idéal et théorique, ça serait bien de pouvoir se dire "On peut les aider", plutôt que de sous-entendre que derrière des notes mises à des élèves non-presents ou des textes piochés par hasard il y a une compétence que je rate car je ne peux pas tout savoir (ce qui est vrai).
Et pour prendre mon cas personnel, j'aimerais bien pouvoir me dire que l'équivalent d'un tuteur bienveillant puisse se prolonger sur le reste d'une carrière si je le souhaitais.
- MathadorEmpereur
Ishkar a écrit:Et pour prendre mon cas personnel, j'aimerais bien pouvoir me dire que l'équivalent d'un tuteur bienveillant puisse se prolonger sur le reste d'une carrière si je le souhaitais.
La bienveillance et l'EN ça fait deux.
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
- LeclochardEmpereur
Ishkar, cher collègue de lettres, je pense que tu te méprends sur celui que tu juges aussi durement : à un moment donné, on en a assez; on est fatigués du métier, de la hiérarchie, des élèves, des autres, du boulot; on a enseigné pour la 302ème les fables ou les Fourberies; on a plein de raisons d’être lassé (pb perso, mutation, salaire trop bas, absence de reconnaissance..)- deux chemins s’offrent alors à nous : soit on quitte l’éducation nationale soit on s’adapte (temps partiel, techniques qui permettent d’économiser de l’énergie ou du temps). Arrête de juger les collègues. Fais ce que tu penses juste et… surtout reviens dans dix ou quinze ans, nous raconter tes réussites herculéennes ou comment toi aussi, tu t’es adapté.
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Quelqu'un s'assoit à l'ombre aujourd'hui parce que quelqu'un d'autre a planté un arbre il y a longtemps. (W.B)
- LagomorpheFidèle du forum
Ishkar a écrit:Je trouve néanmoins paradoxal de faire passer pour quasiment une perversité le fait d'émettre un jugement sur un collègue.
C'est moi qui ai utilisé ce terme, je crois. Parce qu'autant chacun à le droit de penser que ses propres choix pédagogiques sont préférables à ceux d'autrui (logique, sinon on calquerait le collègue), autant je ne vois pas ce qu'apporte un jugement négatif à celui qui le porte. Il n'y a rien à gagner à débiner un collègue, même quand on est sincèrement convaincu qu'il bosse mal. Même si je démontrais par A+B d'une manière (que j'estime) incontestable que mon collègue Machin est un gros nul, mon propre salaire n'augmenterait pas d'un centime. Pourquoi donc m'épuiser à une telle démonstration que personne ne m'a demandé ? Pour le plaisir de dire du mal ? Pour me rassurer moi-même sur ma propre valeur ? Nous ne sommes pas en concurrence les uns avec les autres. Porter des jugements sur le travail des uns et des autres me paraît donc parfaitement dépourvu d'intérêt, sauf à aimer persifler sur autrui ou avoir besoin de se rassurer au dépens d'autrui.
Ishkar a écrit:on a tous déjà bossé avec des collègues très investis et qui rendent le boulot plaisants, et d'autres qui le sont moins.
Je crois comprendre que tu poses des équivalences sur la base d'apparences qui peuvent être trompeuses :
- collègue très investi = collègue qui travaille beaucoup = bon professeur. La dernière équivalence n'est pas démontrée. Un collègue peut être très efficace sans passer des heures à préparer ses cours / corriger. Ce qu'un professeur apporte à ses élèves ne se mesure pas en heures de préparation. J'ai connu plusieurs collègues diablement efficaces, franchement brillants avec les élèves, qui les faisaient remarquablement progresser et maîtriser les programmes, et qui me semblaient pourtant ne pas en fiche une rame. Du moins pour ce que je pouvais constater, au lycée. Je ne les espionnais pas chez eux. Je pouvais toutefois constater que le matériel qu'ils fournissaient aux élèves (documents, exos, sujets d'évaluations) ne témoignaient pas d'un travail de préparation acharné: des photocop' de bouquins, pas toujours du nouveau programme d'ailleurs, des annales, rien de très créatifs, des mises en pages approximatives. Et pourtant, ces collègues étaient bons, très bons, là où c'est important: devant les élèves. Il ne me serait pas venu à l'esprit d'émettre un jugement négatif sur leur travail.
Au pire, un cri de rage face à l'injustice: pour faire un boulot correct, moi il me faut des heures de préparations, des docs taillés au cordeau, des exos de secours au cas où je finis trop tôt. J'ai besoin de ça, ça me motive et ça me rassure. Mais je ne suis pas né avec le gène de l'efficacité professorale, c'est trop injuste, mais c'est pas la faute de mes collègues brillants.
Inversement, quand des collègues me voient corriger des copies, ils hallucinent devant ma rapidité. Bah oui: pour moi le travail se fait en amont, avec un barème précis et très détaillé tenant compte autant que faire se peut de toutes les erreurs prévisibles et incluant les conseils ad hoc pour ne plus les refaire. Il en résulte que je prends rarement la peine d'écrire une appréciation générale sur la première page de la copie: il y a quatre pages de barèmes à l'intérieur, cémoiquiléfait, où il faut regarder ce qui est fluoté - et encore j'essaye de ne pas abuser du stabilo pour ne pas noyer l'élève. Mais un maniaque du stylo rouge sur les copies peut à première vue me prendre pour un fumiste qui s'en contrefiche de ce que produisent ses élèves et qui pose vite fait une note au pif.
- collègue qui travaille peu = collègue qui s'en fout = mauvais professeur. Pour moi, rien ne permet de déduire ce qui se passe dans la tête d'un collègue. Parmi les brillants-efficaces dont je parle ci-dessus, certains étaient incroyablement coulants, à les entendre jamais rien n'était grave, leur présence aux réunions et aux conseils de classe aléatoire. On aurait pu en déduire que leur boulot n'était guère une priorité pour eux...jusqu'à ce qu'on en vienne à discuter avec eux de nos élèves qu'ils ont eu l'année passée, et dont ils savaient tout, les forces, les faiblesses, le caractère, limite à voir ton sujet et à en déduire la note qu'aura telle élève. Je croirai qu'un collègue se fout de son boulot quand il me le soutiendra sans ambiguïté puis abandonnera son poste, pas avant et pas sur une impression personnelle.
- collègue très investi = collègue qui rend le boulot plaisant. Je ne sais pas si tu parles du point de vue des élèves (boulot plaisant=cours intéressant) ou de celui des collègues (boulot plaisant=interactions agréables au sein de l'équipe), mais dans les deux cas je trouve le raccourci erroné. J'ai connu en tant qu'élève des professeurs débarquant avec une liasse de polys qui a dû leur demander des dizaines d'heures de préparation, mais dont le laïus m'intéressait autant que la mécanique quantique passionne une étoile de mer. Et en tant que professeur des collègues gros bosseurs parfaitement odieux - souvent parce que convaincus qu'ils étaient meilleurs que les autres eut égard à leur investissement tonitruant.
Ishkar a écrit:Je me suis déjà retrouvé en PP avec un élève qui me demandaient pourquoi tel prof, en conflit avec tous les collègues pour des propos inventés, lui avait mis des notes tout le trimestre alors qu'il avait été absent pour maladie. Le fin mot de l'histoire était que les notes étaient rentrées totalement au hasard pour les élèves absents. Ai-je le droit et la perversion de dire que c'est problématique, quelles que soient les raisons ?
Là c'est différent: si c'est avéré, c'est une faute professionnelle objective, pas un sentiment subjectif sur la valeur du travail d'un collègue. Et il serait regrettable que l'évaluation de ce collègue n'en tienne pas compte...mais si ça perdure, que ça se sait, et que rien ne change, c'est bien le signe que l'évaluation des enseignants déconne dans les grandes largeurs.
Ce qui revient un peu à ce que je disais en début de fil: à part des aspects techniques très concrets et objectivement évaluables, qui devraient être évalués mais ne le sont en pratique jamais, notre métier implique un rapport humain, une souplesse et une liberté d'usage de notre temps de travail hors la classe qui ne permet pas d'apprécier objectivement la "valeur" (en euros) d'un professeur. D'où mon souhait de déconnecter évaluation subjective et rémunération.
- ZybulkaHabitué du forum
En fait, ce qu'on est plusieurs, je crois, à essayer de te dire, c'est que tu es en plein dans le mille du sujet initial : tes posts illustrent parfaitement la petitcheffisation en marche dans l'éducnat, qui fait qu'il n'y a plus besoin de corps d'inspection puisque les collègues se chargent très bien de juger ce qui se passe dans le cours des autres profs. Il y a aujourd'hui une pression insidieuse qui ne vient plus nécessairement de la hiérarchie mais qui s'est horizontalisée (du fait d'un système de management particulièrement toxique qui vise à mettre les personnels en concurrence les uns avec les autres et dans lequel on se charge d'inspecter, de contrôler, d'évaluer, de critiquer le travail de nos propres collègues).Ishkar a écrit:Je n'ai pas envie de deriver du sujet initial.
On s'en rend d'ailleurs compte en tendant l'oreille en salle des profs, où il y a de plus en plus d'autojustifications ("je ne serai pas là demain parce que je garde mon fils malade, mais c'est exceptionnel parce que mon mari ne pouvait pas faire de télétravail parce qu'il est en déplacement" / "j'ai été absent mais je vais rattraper mon cours, j'avais rdv pour un examen médical et il n'y avait pas de place en dehors des heures de boulot" / "j'ai passé un film à mes élèves mais c'est pour prolonger l'étude de la séquence sur tel bouquin"...), avec ce "mais" systématique qui anticipe sur les éventuels reproches qu'on a peur de se prendre, tacitement ou pas...
Dans ces conditions, ça me paraît indispensable de refuser d'assumer ce rôle que l'institution essaie de nous faire jouer, et d'être là exclusivement en soutien de nos collègues (donc juste un petit mot sympa en cas d'arrêt maladie, ou bien si on le sent, proposer un coup de main, pour mutualiser le boulot de préparation, pour prendre un·e élève pénible de temps en temps...).
- Clecle78Bon génie
En France on a tendance à confondre quantité et qualité. Et il faut se plaindre constamment d'être accablé de travail sous peine d'être considéré comme un je m'en foutiste. Ceci dit j'avais un collègue qui passait son temps à se plaindre de ses copies et du temps fou qu'il passait à les corriger. Je le plaignais jusqu'à ce qu'il ait mes enfants et que je constate que ces copies consistaient systématiquement en un QCM de 10 questions. Ça me faisait bien rire (un peu jaune) ensuite quand je l'entendais râler en salle des profs.
- MathadorEmpereur
Au moins quand je faisais des QCM j'avais l'honnêteté de dire (en SDP, pas devant les élèves) que j'augmentais mon salaire horaire avec.
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
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