- *Ombre*Grand sage
J'ai du mal à voir dans "que" un COD de dire, si "que" est censé reprendre "une lettre". Dire une lettre ?
J'y vois soit un usage de "que" pour "dont", fréquent dans la langue classique (c'est Sévigné ?) (une lettre qui s'adressait à vous, disait-on à son sujet), soit quelque chose de proche de la construction infinitive : que l'on disait s'adresser à vous, mais mâtiné de relative.
J'y vois soit un usage de "que" pour "dont", fréquent dans la langue classique (c'est Sévigné ?) (une lettre qui s'adressait à vous, disait-on à son sujet), soit quelque chose de proche de la construction infinitive : que l'on disait s'adresser à vous, mais mâtiné de relative.
- DesolationRowEmpereur
Je ne sais pas si ça fait avancer le schmilblick, mais c'est un type de relative complexe qu'on trouve constamment en latin (... epistulam, quam [eam] tibi misisse dicebant), et fréquemment en langue classique (j'ai des exemples quelque part dans un de mes cours de thème, mais je n'ai pas mes papiers sous la main).
- InvitéInvité
Oui, j'ai pensé à l'infinitive, en effet. Mais sans infinitif.
On ne dit pas plus une lettre qu'on ne dit un homme, du reste. Cela dit, malgré la proximité syntaxique des deux phrases, autant on peut écrire "On disait l'homme (a) malade (b)", autant "on disait la lettre (a) qui s'adressait... (b)" est exclu.
Il est clair que la lettre est ce dont on parle et la relative, ce qu'on en dit. Le "que" pourrait être une sorte d'accusatif de relation...
On ne dit pas plus une lettre qu'on ne dit un homme, du reste. Cela dit, malgré la proximité syntaxique des deux phrases, autant on peut écrire "On disait l'homme (a) malade (b)", autant "on disait la lettre (a) qui s'adressait... (b)" est exclu.
Il est clair que la lettre est ce dont on parle et la relative, ce qu'on en dit. Le "que" pourrait être une sorte d'accusatif de relation...
- IphigénieProphète
et on ne pourrait pas comprendre le "que l'on disait" plutôt comme une incise, ou anticipation: une lettre (que l'on disait =disait-on, à ce que l'on disait) qui s'adressait à vous?
(le "que" n'ayant pas pour antécédent "une lettre" mais "une lettre qui s'adressait à vous")
(le "que" n'ayant pas pour antécédent "une lettre" mais "une lettre qui s'adressait à vous")
- *Ombre*Grand sage
Voilà, Iphigénie a l'explication. Ah que Mme de Lafayette, elle parle comme notre Johny.
DR, moi aussi, je vois la phrase en latin, pas de problème (pourtant, dieu sait comme mon latin est antique) mais en français, ça fait tout chose. Cela dit, ces lettrés du XVIIe étaient biberonnés au latin : n'en serait-ce pas là la trace - dont tu dis qu'elle n'es pas unique, d'ailleurs ?
DR, moi aussi, je vois la phrase en latin, pas de problème (pourtant, dieu sait comme mon latin est antique) mais en français, ça fait tout chose. Cela dit, ces lettrés du XVIIe étaient biberonnés au latin : n'en serait-ce pas là la trace - dont tu dis qu'elle n'es pas unique, d'ailleurs ?
- InvitéInvité
La différence étant qu'il n'y a pas d'infinitif dans le cas qui nous occupe.DesolationRow a écrit:Je ne sais pas si ça fait avancer le schmilblick, mais c'est un type de relative complexe qu'on trouve constamment en latin (... epistulam, quam [eam] tibi misisse dicebant), et fréquemment en langue classique (j'ai des exemples quelque part dans un de mes cours de thème, mais je n'ai pas mes papiers sous la main).
Il me semble que la phrase latine se traduit fort bien : la lettre que l'on disait t'être adressée". Ca correspondrait à "que l'on disait être adressée à Mme" mais ce n'est pas ce que nous avons.
- IphigénieProphète
un anti Johnny plutôt: lui il segmente, alors que la syntaxe de LF est englobante:*Ombre* a écrit:Voilà, Iphigénie a l'explication. Ah que Mme de Lafayette, elle parle comme notre Johny.
DR, moi aussi, je vois la phrase en latin, pas de problème (pourtant, dieu sait comme mon latin est antique) mais en français, ça fait tout chose. Cela dit, ces lettrés du XVIIe étaient biberonnés au latin : n'en serait-ce pas là la trace - dont tu dis qu'elle n'es pas unique, d'ailleurs ?
une lettre que l'on disait-- s.e [être une lettre] qui s'adressait à vous-
- DesolationRowEmpereur
Le fait que ce soit une infinitive ou une complétive n'a pas d'importance*. Quand on parle de relative complexe en latin (et je crois en français), on veut juste dire que le relatif a une fonction non déterminée par le verbe de la relative mais par le verbe d'une subordonnée (infinitive ou complétive) interne à la relative. Ici, ça se décomposerait comme ça : "cette lettre, on disait qu'elle s'adressait à vous" et hop : "cette lettre que l'on disait qu'elle s'adressait à vous". Je ne suis pas sûr d'être bien clair
* je veux dire : imaginons un auteur chrétien très très tardif qui écrit dico quia, il pourrait peut-être écrire ça : istam epistulam, quam dicebam quia tibi miserat
Même sans imaginer un auteur chrétien : pons, quem iubeo ut rescindas pourrait presque être classique. C'est le deuxième relatif qui m'ennuie. "Ce pont, que j'ordonne qu'il soit détruit", ok, mais "que j'ordonne qui soit détruit", c'est bizarre en effet
* je veux dire : imaginons un auteur chrétien très très tardif qui écrit dico quia, il pourrait peut-être écrire ça : istam epistulam, quam dicebam quia tibi miserat
Même sans imaginer un auteur chrétien : pons, quem iubeo ut rescindas pourrait presque être classique. C'est le deuxième relatif qui m'ennuie. "Ce pont, que j'ordonne qu'il soit détruit", ok, mais "que j'ordonne qui soit détruit", c'est bizarre en effet
- InvitéInvité
Ca, d'accord, c'est un cas plutôt commun, mais je ne vois pas qu'on puisse l'appliquer à la phrase de La Fayette : la seule subordonnée est une relative (qui...) dont l'antécédent est le même (lettre).DesolationRow a écrit:Le fait que ce soit une infinitive ou une complétive n'a pas d'importance*. Quand on parle de relative complexe en latin (et je crois en français), on veut juste dire que le relatif a une fonction non déterminée par le verbe de la relative mais par le verbe d'une subordonnée (infinitive ou complétive) interne à la relative. Ici, ça se décomposerait comme ça : "cette lettre, on disait qu'elle s'adressait à vous" et hop : "cette lettre que l'on disait qu'elle s'adressait à vous". Je ne suis pas sûr d'être bien clair
* je veux dire : imaginons un auteur chrétien très très tardif qui écrit dico quia, il pourrait peut-être écrire ça : istam epistulam, quam dicebam quia tibi miserat
Voilà, c'est exactement ce qui me fait rechigner.Même sans imaginer un auteur chrétien : pons, quem iubeo ut rescindas pourrait presque être classique. C'est le deuxième relatif qui m'ennuie. "Ce pont, que j'ordonne qu'il soit détruit", ok, mais "que j'ordonne qui soit détruit", c'est bizarre en effet
- User9525Niveau 8
On trouve dans le Cnrtl la confirmation: "que" relatif dit universel remplaçant "qui, dont, auquel, ..." mais l'emploi est dit populaire, donc deux relatives avec le même antécédent ?Somnium a écrit:Comme *Ombre*, j'interprète ce "que" comme un "dont".
- *Ombre*Grand sage
C'est populaire chez Céline mais classique chez Sévigné.
- NLM76Grand Maître
Spillebout, Grammaire de la langue française du XVIIe siècle p. 167 : "Les propositions relatives en cascade"
"Cet enfant sans parents qu'elle dit qu'elle a vu" (Racine)
"Et que pourra faire un époux / Que vous voulez qui soit nuit et jour avec vous ?" (La Fontaine)
"[M. de Nemours] se laissa conduire au hasard par des routes faites avec soin, qu'il jugea bien qui conduisaient vers le château." (LFayette)
Etc.
"Cet enfant sans parents qu'elle dit qu'elle a vu" (Racine)
"Et que pourra faire un époux / Que vous voulez qui soit nuit et jour avec vous ?" (La Fontaine)
"[M. de Nemours] se laissa conduire au hasard par des routes faites avec soin, qu'il jugea bien qui conduisaient vers le château." (LFayette)
Etc.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- HocamSage
En plus de tout ce qui a été dit sur le plan grammatical, auquel je souscris, on peut faire remarquer sur le plan stylistique que ce curieux qui s'insère dans une économie textuelle très tournée vers l'hypotaxe, un festival de qui-que-qui-que très Lafayette. D'une manière générale, on n'est plus à un que près dans le complexe exposé du cheminement intime sauce Princesse de Clèves.sinan a écrit:Chers collègues
Dans la phrase suivante : «Je vous en ai trop dit pour vous cacher que vous me l'avez fait connaître, et que je souffris de si cruelles peines le soir que la reine me donna cette lettre de madame de Thémines, que l'on disait qui s'adressait à vous, qu'il m'en est demeuré une idée qui me fait croire que c'est le plus grand de tous les maux. »
comment analysez-vous la proposition "qui s'adressait à vous" ? Je sèche un peu....
- User9525Niveau 8
Comme si l'hypotaxe enchâssait les secrets et les livrait un par un, dans cette cascade de "qui-que-qui-que". La cour est comme Vénus, elle fait cascader la vertu...Hocam a écrit:En plus de tout ce qui a été dit sur le plan grammatical, auquel je souscris, on peut faire remarquer sur le plan stylistique que ce curieux qui s'insère dans une économie textuelle très tournée vers l'hypotaxe, un festival de qui-que-qui-que très Lafayette. D'une manière générale, on n'est plus à un que près dans le complexe exposé du cheminement intime sauce Princesse de Clèves.sinan a écrit:Chers collègues
Dans la phrase suivante : «Je vous en ai trop dit pour vous cacher que vous me l'avez fait connaître, et que je souffris de si cruelles peines le soir que la reine me donna cette lettre de madame de Thémines, que l'on disait qui s'adressait à vous, qu'il m'en est demeuré une idée qui me fait croire que c'est le plus grand de tous les maux. »
comment analysez-vous la proposition "qui s'adressait à vous" ? Je sèche un peu....
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Traduction de Pierre Grimal des Annales de Tacite a écrit:« Il est vrai que Tibère était lent à venger ce qu’il ressentait personnellement, mais que sa générosité ne fît pas remise des crimes contre l’État. »
(Traduction de Pierre Grimal des Annales de Tacite.)
Cherchant pour mes élèves des exemples d'emplois des subjonctifs imparfaits et plus-que-parfait, je retombe sur ce cas que je ne comprends pas : pourquoi le subjonctif imparfait, ici ?
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Je comprends cela : Tibère était lent à se venger quand le crime le concernait personnellement, mais il ne l'était pas quand le crime concernait l'État. Mais je ne comprends pas ce subjonctif.
Autre cas :
Pourquoi le subjonctif imparfait n'est pas utilisé, ici ?
Autre cas :
Pierre Grimal / Tacite a écrit:Cela fit que Néron évoqua l'affaire et, Veiento ayant été convaincu, il l'expulsa d'Italie et ordonna que l'on brûle ses livres, qui furent recherchés et lus et relus aussi longtemps qu'il était dangereux de se les procurer ; puis, quand il fut permis de les posséder, on les oublia.
Pourquoi le subjonctif imparfait n'est pas utilisé, ici ?
- *Ombre*Grand sage
Ne s'agit-il pas d'une simple coquille ? Moi non plus, je ne vois pas ce que le subjonctif viendrait faire là. Je vois un passé simple.
- DeliaEsprit éclairé
Je parie sur une erreur de scanner : la machine n'a pas discriminé fit et fît.
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Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampaté Ba
- henrietteMédiateur
"fît" est obligatoirement une coquille, il ne peut y avoir de subjonctif après la principale "il est vrai que" - du reste, la première subordonnée est bien à l'indicatif.
Pour "brûle" : la concordance des temps moderne autorise le subjonctif présent là où la concordance classique veut le subjonctif imparfait.
Pour "brûle" : la concordance des temps moderne autorise le subjonctif présent là où la concordance classique veut le subjonctif imparfait.
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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
henriette a écrit:Pour "brûle" : la concordance des temps moderne autorise le subjonctif présent là où la concordance classique veut le subjonctif imparfait.
Oui, mais Pierre Grimal utilise systématiquement le subjonctif imparfait à la 3e personne du singulier. C'est peut-être un oubli.
- IphigénieProphète
Je me demande si le subjonctif présent n’indique pas qu’il donne l’ordre de brûler les livres chaque fois qu’on en trouve un ( un ordre ad vitam aeternam en quelque sorte)
Il ordonna que l'on brûle ses livres, qui furent recherchés et lus et relus aussi longtemps qu'il était dangereux de se les procurer
alors que le subj imparfait aurait pu signifier qu’on les a brûlés une fois pour toutes?
Il ordonna qu'on brûlât ses livres, et cela fut aussitôt fait, dans un grand brasier.
Je ne sais pas si je suis claire
Il ordonna que l'on brûle ses livres, qui furent recherchés et lus et relus aussi longtemps qu'il était dangereux de se les procurer
alors que le subj imparfait aurait pu signifier qu’on les a brûlés une fois pour toutes?
Il ordonna qu'on brûlât ses livres, et cela fut aussitôt fait, dans un grand brasier.
Je ne sais pas si je suis claire
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