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- NoukaExpert
J'ai encore besoin de votre aide. La prof de mon fils propose la problématique suivante : "Comment Des Grieux exploite-t-il la rhétorique afin de défendre son mode de vie libertin et son amour pour Manon ?" et les mouvements suivants :
- Réquisitoire contre la vertu religieuse
- Eloge de l'amour pour Manon
- Comparaison des 2 bonheurs
- Réponse de Tiberge
NLM76, selon le plan de ton analyse, on pourrait arriver aux mouvements suivants (qui s'appuient sur la construction de l'argumentation de Des Grieux) mais cela donne 4 mouvements totalement déséquilibrés (est-ce important ?) :
- 2 premières phrases : introduction : Réfutation de la thèse de Tiberge (énoncée avant le passage)
- Développement : son amour pour Manon mène au bonheur (discours rhétorique bien construit / sophisme)
- Conclusion : L'amour charnel mène au bonheur bien plus que la foi
- Réaction de Tiberge
Je n'aime pas ces formulations...
Qu'en pensez-vous ?
- Réquisitoire contre la vertu religieuse
- Eloge de l'amour pour Manon
- Comparaison des 2 bonheurs
- Réponse de Tiberge
NLM76, selon le plan de ton analyse, on pourrait arriver aux mouvements suivants (qui s'appuient sur la construction de l'argumentation de Des Grieux) mais cela donne 4 mouvements totalement déséquilibrés (est-ce important ?) :
- 2 premières phrases : introduction : Réfutation de la thèse de Tiberge (énoncée avant le passage)
- Développement : son amour pour Manon mène au bonheur (discours rhétorique bien construit / sophisme)
- Conclusion : L'amour charnel mène au bonheur bien plus que la foi
- Réaction de Tiberge
Je n'aime pas ces formulations...
Qu'en pensez-vous ?
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En disponibilité
- NLM76Grand Maître
A titre personnel, je n'aime pas du tout la question que formule la collègue. Je trouve qu'elle ne veut rien dire, et qu'elle ne pose pas le problème littéraire que nous devons résoudre. Fondamentalement, la question c'est de savoir pourquoi ce discours est si saisissant, scandaleux, stupéfiant, aussi bien pour Tiberge que pour le lecteur.
Maintenant, venons-en au plan du texte. La difficulté que nous trouvons ici me donne du grain à moudre pour écarter l'expression "les mouvements du texte", et lui préférer "le mouvement du texte", ou "le plan du texte". En effet l'idée de parler du "mouvement" du texte, plutôt que de "plan" a dû émerger dans les années 1970, afin de signifier qu'un texte littéraire n'était pas organisé de façon rigide, scolaire, mais qu'il avançait selon sa propre logique — qu'il ne devait pas forcément être découpé en trois parties, trois sous-parties, et ce d'autant plus que ce n'est, le plus souvent, qu'un extrait découpé de façon plus ou moins arbitraire par un professeur. Le mouvement du texte, c'est la façon dont le texte avance ; et cette façon peut être complexe, sinueuse. Il ne s'agit pas de réduire le texte à un plan en n parties équilibrées, en n "mouvements". C'est d'ailleurs ce que dit le document rédigé en 2019 par l'IG, qu'on trouve [url=eduscol.education.fr/document/24373]ici[/url] :
Je ne pense pas qu'on puisse considérer vraiment le début comme un "réquisitoire" contre la vertu religieuse, ça ne l'est que par ricochet. Il faut d'autre part absolument montrer l'articulation logique du discours de Grieux, sans quoi on en revient aux lectures tabulaires qui écrasent le texte, et contre lesquelles le choix de l'explication linéaire voulait lutter. En l'occurrence, il faut absolument montrer le fond paradoxal du raisonnement de Grieux : l'idée selon laquelle la souffrance est une bonne chose. Le paradoxe insoutenable, il finit par le soutenir !
Je défends maintenant un peu mon plan en vert ("apparemment, vous avez raison (de vouloir me faire fuir la souffrance) ; en réalité, j'ai raison d'aimer Manon, bien que j'en souffre, puisque les saints eux-même souffrent ; et même j'ai davantage raison que les vertueux de choisir cette façon de souffrir"). En effet, il fait apparaître un enjeu essentiel du passage : le problème de l'articulation entre la foi et la raison, avec pour tiers terme ici la question de la passion, au sens propre comme au sens restreint.
Maintenant, venons-en au plan du texte. La difficulté que nous trouvons ici me donne du grain à moudre pour écarter l'expression "les mouvements du texte", et lui préférer "le mouvement du texte", ou "le plan du texte". En effet l'idée de parler du "mouvement" du texte, plutôt que de "plan" a dû émerger dans les années 1970, afin de signifier qu'un texte littéraire n'était pas organisé de façon rigide, scolaire, mais qu'il avançait selon sa propre logique — qu'il ne devait pas forcément être découpé en trois parties, trois sous-parties, et ce d'autant plus que ce n'est, le plus souvent, qu'un extrait découpé de façon plus ou moins arbitraire par un professeur. Le mouvement du texte, c'est la façon dont le texte avance ; et cette façon peut être complexe, sinueuse. Il ne s'agit pas de réduire le texte à un plan en n parties équilibrées, en n "mouvements". C'est d'ailleurs ce que dit le document rédigé en 2019 par l'IG, qu'on trouve [url=eduscol.education.fr/document/24373]ici[/url] :
En l'occurrence, s'appuyer sur le mouvement réel du texte permettrait de problématiser encore plus justement l'explication. En effet, le mouvement général du texte, en deux parties : le discours de Grieux, puis la réaction horrifiée de Tiberge, nous donne la clé de lecture, puisque Tiberge lui-même interprète le discours, en affirmant que c'est d'une part un discours sophistique, et d'autre part un discours monstrueux. Autrement dit, en expliquant le texte, il faudra montrer d'une part pourquoi il est scandaleux, et d'autre part dans quelle mesure il est sophistique. Suivre le mouvement du texte en l'espèce, c'est le renverser : prendre le temps de commenter son second paragraphe en introduction, puis passer au discours de Grieux dans le corps de l'explication. On peut, avant de s'y lancer, donner le mouvement, le plan de ce discours, soit selon les trois parties que j'ai proposées (introduction, développement, pointe), soit en négligeant l'amorce, en trois autres parties (puisque le bonheur qu'on tire de la vertu passe par la souffrance, j'ai le droit moi aussi de chercher le bonheur dans l'amour en passant par la souffrance ; et en plus j'ai davantage raison que les vertueux, puisque le bonheur que j'atteins est bien réel).Eduscol a écrit:Une fois la lecture et la contextualisation rapidement opérées, il convient que le lecteur puisse identifier ce qui donne son unité au passage choisi : son thème, ce dont il parle (un personnage, un événement, une idée...), et la forme plus ou moins codifiée (une anecdote, un portrait, un sonnet,...) qu’il choisit de mettre en place pour parler de cela.
Le mouvement qui anime cette forme peut ensuite être rapidement décrit pour rendre compte des différents temps du passage : cela permet de préciser un peu la description synthétique qui a été faite initialement.
Je ne pense pas qu'on puisse considérer vraiment le début comme un "réquisitoire" contre la vertu religieuse, ça ne l'est que par ricochet. Il faut d'autre part absolument montrer l'articulation logique du discours de Grieux, sans quoi on en revient aux lectures tabulaires qui écrasent le texte, et contre lesquelles le choix de l'explication linéaire voulait lutter. En l'occurrence, il faut absolument montrer le fond paradoxal du raisonnement de Grieux : l'idée selon laquelle la souffrance est une bonne chose. Le paradoxe insoutenable, il finit par le soutenir !
Je défends maintenant un peu mon plan en vert ("apparemment, vous avez raison (de vouloir me faire fuir la souffrance) ; en réalité, j'ai raison d'aimer Manon, bien que j'en souffre, puisque les saints eux-même souffrent ; et même j'ai davantage raison que les vertueux de choisir cette façon de souffrir"). En effet, il fait apparaître un enjeu essentiel du passage : le problème de l'articulation entre la foi et la raison, avec pour tiers terme ici la question de la passion, au sens propre comme au sens restreint.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- e-WandererGrand sage
Je trouve que les réactions de Tiberge ont un grand intérêt, si on veut regarder ce texte sous un angle rhétorique, puisque c'est ce que propose le professeur du fils de Nouka.NLM76 a écrit:Ah là là malheureuse... J'ai du travail administratif, et vous me tentez avec du travail intéressant. Voilà ; je viens de passer une heure et demie à faire autre chose que ce que je dois.
- https://www.lettresclassiques.fr/2024/03/22/un-discours-libertin/
Ce passage est vraiment incroyable. Cela dit, si je le faisais avec mes élèves, sans doute ne donnerais-je pas le second paragraphe, qui décrit la réaction de Tiberge. Il y a vraiment déjà trop à dire sur le discours lui-même. Maintenant c'est vrai que la présence de Tiberge donne une couleur supplémentaire au discours : j'ai l'impression de voir en Tiberge la même réaction qu'Hippolyte face à Phèdre dans "Oui, prince, je languis, je brûle pour Thésée..."
@cléo : le discours de Grieux n'est pas pure raison ; il paraît quand même essentiel d'en faire apparaître les éléments sophistiques, ou en tout cas spécieux, même si l'on n'adopte pas un point de vue chrétien.
Le premier paragraphe ("l'aveu", dans ton découpage) correspond à une forme d'exorde. Exorde indirect (insinuatio en latin), c'est-à-dire prononcé face à un auditoire supposé hostile : d'où les circonvolutions de la double négation ("Ce n’est pas à vos yeux, cher ami, lui dis-je, que je veux paraître ce que je ne suis point") et l'insistance sur la franchise ("je lui ouvris mon cœur sans réserve", dans la bribe de discours narrativisé qui introduit le discours direct en en soulignant l'intention rhétorique).
DG insiste très fortement sur la dimension éthique du propos : rien de surprenant, c'est typiquement dans l'exorde qu'on construit par le discours l'image de soi que l'on veut imposer. Si on reprend la grille aristotélicienne de l'ethos, cela repose sur trois pôles : la prudence (au sens ancien : le prudent prend les décisions en connaissance de cause, il a une claire vue de l'expérience du passé comme des événements à venir, vertu du conseiller par excellence), la vertu et la bienveillance (= montrer à l'interlocuteur qu'on est dans le même camp que lui). Or ici, il est évident que DG a un gros problème, puisqu'il s'agit précisément de faire l'aveu qu'il n'est pas vertueux ! Il compense donc en mettant en avant la franchise (ce qui relève ici des valeurs de l'amitié – avatar de la bienveillance : je suis dans le même camp que toi, donc je ne cherche pas à te tromper, je suis dans la sincérité et la transparence). Tiberge, qui est tout sauf un idiot, comprend immédiatement l'intention, et insiste, lui, sur le 3e pôle : DG se rend coupable car non seulement il cède à la passion amoureuse, mais il le fait en connaissance de cause, en libertin. DG a la hauteur de vue nécessaire pour être conscient des enjeux (les qualités du "prudent", qui n'est pas dupe des apparences) mais choisit "volontairement" de se méconduire. On lui reproche moins de ne pas être vertueux (puisqu'il l'avoue lui-même) que de pécher en connaissance de cause. Le vrai libertin ne pèche pas par aveuglement ou par défaut de prudence mais précisément parce qu'il est un esprit fort (voir Don Juan chez Mozart : "Pentiti – No !").
Ce qui est assez fort, c'est que c'est l'intervention de Tiberge qui rétrospectivement transforme l'aveu en exorde ! DG aurait pu s'en tenir là, pour sa part, mais effectivement, ce sont précisément les reproches de Tiberge qui le conduisent à développer l'argumentation du libertin.
La deuxième intervention de Tiberge est également très éclairante : il n'est pas seulement un faire-valoir passif qui réagirait aux propos de DG, il est aussi un véritable analyste ! Il décrypte avec une grande précision l'intention rhétorique du propos de DG. C'est lui qui emploie le terme technique adéquat pour qualifier le discours de DG, celui de "comparaison" (ce n'est pas seulement un type d'argument, c'est ici un véritable genre du discours argumentatif : comparaison, au sens de "parallèle" : il y a de très nombreux relais dans le propos de DG : "égal, semblable à, etc."). Et une nouvelle fois, c'est sa réaction qui relance l'argumentation de DG en évoquant le "terme des peines" du libertin. C'est précisément le point qu'examine ensuite DG : "Jugeons-en par l’effet" (c'est techniquement le lieu (argument-type) de la cause et des effets, parmi la liste canonique d'Aristote des lieux).
Ce ne sont que quelques remarques rapides. Pour traiter de façon vraiment sérieuse la question de l'ancrage rhétorique du discours de DG, il faudrait reprendre de façon méthodique et détaillée (à partir d'Aphtonios) la technique de l'exercice scolaire du parallèle, qui fait partie de la liste canonique des progymnasmata. Avec ensuite comme problématique évidente de voir comment Prévost adapte ces recettes de la rhétorique d'école au contexte romanesque : la façon dont les interventions de Tiberge, du point de vue de la vraisemblance narrative, relancent ou légitiment la poursuite du discours de DG, à la manière d'une sorte d'accoucheur des esprits qui déclenche une argumentation que lui-même trouve scandaleuse. Il y a un côté cathartique dans cette façon, pour les deux personnages, de crever l'abcès en duo, et la psychologie de Tiberge n'est pas le point le moins intéressant du roman : on retrouve souvent chez lui une curiosité assez étonnante pour les désordres du corps et de l'esprit ! Il y a d'ailleurs une forme d'humour dans la dichotomie présentée par Prévost entre les capacités analytiques immédiates de Tiberge, sa finesse, son recul, et d'autre part le côté comique du personnage qui "recule de deux pas" comme s'il avait vu le diable, son effarement etc. Il faudrait aussi insister sur la façon dont DG détourne le lexique religieux (technique habituelle du discours libertin) : voir par exemple le mot espérance. Bref, ce ne sont pas les pistes qui manquent !
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« Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde » (Huysmans)
- NLM76Grand Maître
N'écoutez pas @e-wanderer ! Il est complètement shooté à l'Aphthonios.
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- NoukaExpert
D’autant que cela dépasse mes compétences là
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- e-WandererGrand sage
Les vaches ont bien leur fièvre aphteuse , je ne vois pas pourquoi je n'aurais pas droit à une petite fièvre aphtonieuse !NLM76 a écrit:N'écoutez pas @e-wanderer ! Il est complètement shooté à l'Aphthonios.
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« Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde » (Huysmans)
- NoukaExpert
Je vous ai lus avec attention. C'est très intéressant. Ca donne envie de pousser l'analyse même si je crois que je vais perdre mon fils... ! Je vais faire au mieux.
Par contre, je n'arrive pas à formuler une problématique qui convienne.
Par contre, je n'arrive pas à formuler une problématique qui convienne.
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- NLM76Grand Maître
La "problématique", on s'en tape un peu.
La question c'est de savoir pourquoi ce texte est intéressant.
Il n'y a quasi aucune corrélation entre la qualité de la problématisation en tête de l'explication et l'explication elle-même. On a souvent une problématisation toute moisie suivie d'une assez bonne explication, ou une bonne problématisation suivie d'une explication toute moisie.
La question c'est de savoir pourquoi ce texte est intéressant.
Il n'y a quasi aucune corrélation entre la qualité de la problématisation en tête de l'explication et l'explication elle-même. On a souvent une problématisation toute moisie suivie d'une assez bonne explication, ou une bonne problématisation suivie d'une explication toute moisie.
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- NoukaExpert
Quelques jours plus tard, texte analysé, je voudrais vous remercier pour votre aide précieuse.
Il me reste la lettre 81 des Liaisons dangereuses à analyser avec lui et ce sera terminé pour le roman.
Mon fils aimerait profiter des vacances pour s’entrainer au commentaire composé sur un extrait de roman. Auriez-vous un texte à me/lui proposer ?
Il me reste la lettre 81 des Liaisons dangereuses à analyser avec lui et ce sera terminé pour le roman.
Mon fils aimerait profiter des vacances pour s’entrainer au commentaire composé sur un extrait de roman. Auriez-vous un texte à me/lui proposer ?
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- NLM76Grand Maître
J'ai donné le sujet sur "Naki le kourouma" à mes élèves. Je pense que c'est un bon entraînement. Je l'ai mis là, avec un début de corrigé :
- https://www.lettresclassiques.fr/2024/02/19/kessel-naki-le-kourouma/
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- NLM76Grand Maître
Je ne sais pas ce que fiche mon précédent message sur ce fil...
Je me remets dans Manon Lescaut. Et, relisant les premières pages, je m'intéresse à l'ordre de Malte. C'est une sacrée affaire que cet ordre de Malte !
1500 chevaliers triés sur le volet : noblesse et argent.
Plusieurs années de "Couvent", c'est-à-dire à Malte.
Un service véritablement militaire, qui tourne souvent à la pure piraterie.
Un véritable Etat qui a une certaine importance dans la géopolitique européenne et méditerranéenne.
Encore une fois, ce n'est pas n'importe qui que ce des Grieux.
Je me remets dans Manon Lescaut. Et, relisant les premières pages, je m'intéresse à l'ordre de Malte. C'est une sacrée affaire que cet ordre de Malte !
1500 chevaliers triés sur le volet : noblesse et argent.
Plusieurs années de "Couvent", c'est-à-dire à Malte.
Un service véritablement militaire, qui tourne souvent à la pure piraterie.
Un véritable Etat qui a une certaine importance dans la géopolitique européenne et méditerranéenne.
Encore une fois, ce n'est pas n'importe qui que ce des Grieux.
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- ElaïnaDevin
Oui l'ordre de Malte c'est très sérieux, même si au XVIIIe siècle l'ordre de Malte a un peu perdu de sa superbe, parce que l'empire ottoman ne fait plus tellement peur.
Il y a une grosse quinzaine d'années, il y avait eu une super expo aux Invalides sur les chevaliers de Malte, le catalogue d'expo valait le détour.
Après, quand on est chevalier de Malte, la vie militaire n'est pas forcément très longue : la plupart ne fait que les deux années de caravanes, c'est-à-dire le stage militaire. C'est là que c'est dangereux et qu'on peut être fait prisonnier par les Barbaresques. Beaucoup se débrouillent ensuite pour récupérer une commanderie et ne plus trop se fouler.
Il y a une grosse quinzaine d'années, il y avait eu une super expo aux Invalides sur les chevaliers de Malte, le catalogue d'expo valait le détour.
Après, quand on est chevalier de Malte, la vie militaire n'est pas forcément très longue : la plupart ne fait que les deux années de caravanes, c'est-à-dire le stage militaire. C'est là que c'est dangereux et qu'on peut être fait prisonnier par les Barbaresques. Beaucoup se débrouillent ensuite pour récupérer une commanderie et ne plus trop se fouler.
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It took me forty years to realize this. But for guys like us... our lives aren't really our own. There's always someone new to help. Someone we need to protect. These past few years, I fought that fate with all I had. But I'm done fighting. It's time I accept the hand I was dealt. Too many people depend on us. Their dreams depend on us.
Kiryu Kazuma inYakuza 4 Remastered
Ma page Facebook https://www.facebook.com/Lire-le-Japon-106902051582639
- roxanneOracle
Est-ce que certains auraient ou sauraient où trouver le livre : L'Abbé Prévost, Manon Lescaut, 40 questions, 40 réponses, 4 études
De Nadine Labory
Editions Ellipses
Sur La Princesse de Clèves, je m'étais inspirée des questions (chaque élève devait travailler sur une question) et ça avait bien permis de faire le tour du livre, mais celui-là semble indisponible partout..
De Nadine Labory
Editions Ellipses
Sur La Princesse de Clèves, je m'étais inspirée des questions (chaque élève devait travailler sur une question) et ça avait bien permis de faire le tour du livre, mais celui-là semble indisponible partout..
- NLM76Grand Maître
Placé une explication de texte calibrée en 10 minutes sur "Grieux prend l'initiative", passage où Grieux décide d'utiliser M. de T. ... et Manon comme appât.
Remarques de méthode sur l'utilité de s'entraîner et de s'enregistrer. Exemple de notes préparatoires minimalistes.
Remarques de méthode sur l'utilité de s'entraîner et de s'enregistrer. Exemple de notes préparatoires minimalistes.
- https://www.lettresclassiques.fr/2024/10/17/grieux-prend-linitiative/
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- NLM76Grand Maître
Comme j'essaie de lire Hélisenne de Crenne, une chose me frappe : un lien très fort entre Les angoisses amoureuses de ladite Hélisenne, La princesse de Clèves, et Manon Lescaut. Et ce lien, je le vois d'abord dans l'âge très jeune auquel les trois héroïnes sont, pour dire les choses crument, dépucelées. L'héroïne d'Hélisenne, mariée, très jeune, avant ses quinze ans, dit clairement n'avoir pas de plaisir, et même souffrir dans le lit conjugal. Il est clair que la princesse de Clèves, à quinze ans, se donne consciencieusement à son mari, mais n'éprouve pas de désir à son égard... et j'en déduis qu'elle n'éprouve pas non plus de plaisir, et je dirais que ce n'est pas seulement parce que ce n'est pas le bon mari, mais aussi et d'abord parce qu'il lui est donné trop tôt. Manon a au plus seize ans quand elle rencontre Grieux, et il est évident qu'elle a déjà été dépucelée auparavant, vraisemblablement avant sa puberté physiologique. Le livre semble sous-entendre que c'est elle qui se serait adonnée à son "penchant vers le plaisir" ; mais le fait que Lescaut propose de suite à Grieux de la prostituer laisse quand même à penser que ce sont entre autres les hommes "de sa famille" qui l'ont poussée à "accorder" ses faveurs très tôt, avant que sa puberté physiologique et morale fût accomplie, avant, comme nous dirions aujourd'hui, qu'elle ait pu donner un consentement libre et éclairé ; beaucoup d'indices même convergent vers l'hypothèse de l'inceste, que j'ai déjà évoquée.
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- ElaïnaDevin
Ah ben oui, ça, le problème du mariage très jeune dans la haute société de l'époque moderne, ça donne régulièrement ce genre de choses. On peut penser au couple Louis XIII et Anne d'Autriche. On a beaucoup glosé sur la personnalité du roi (qui était sûrement un gros relou par ailleurs, mais c'est un autre problème) pour expliquer la catastrophe conjugale, mais enfin, obliger deux ados manifestement timides et encore assez bébés à consommer un mariage, c'était pas l'idée du siècle. Pour autant ces mariages n'étaient pas forcément bien vus socialement, et restent l'exception (l'âge au mariage étant plus volontiers vers les 25 ans voire plus suivant les régions).
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- NLM76Grand Maître
Mais ce serait moins l'exception dans la haute aristocratie ? Et ce serait plus prégnant à l'époque moderne qu'au Moyen Âge ?Elaïna a écrit:Ah ben oui, ça, le problème du mariage très jeune dans la haute société de l'époque moderne, ça donne régulièrement ce genre de choses. On peut penser au couple Louis XIII et Anne d'Autriche. On a beaucoup glosé sur la personnalité du roi (qui était sûrement un gros relou par ailleurs, mais c'est un autre problème) pour expliquer la catastrophe conjugale, mais enfin, obliger deux ados manifestement timides et encore assez bébés à consommer un mariage, c'était pas l'idée du siècle. Pour autant ces mariages n'étaient pas forcément bien vus socialement, et restent l'exception (l'âge au mariage étant plus volontiers vers les 25 ans voire plus suivant les régions).
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- ElaïnaDevin
Les mariages précoces sont relativement courants dans la haute société au moyen-âge et à l'époque moderne. Mais en général quand on marie des adolescents c'est qu'il y a une raison derrière. Pour te donner un exemple, dans ma thèse qui étudie une famille noble de la Renaissance à la Révolution, sur plusieurs dizaines de couples étudiés, je n'en ai qu'un seul où la fiancée a certainement moins de vingt ans et c'est dans un contexte d'extinction de branche, où le père de la mariée se dépêche de marier sa fille pour transmettre sa charge à son gendre. Tous les autres ont au moins 20 ans (garçons comme filles), voire plutôt 25. Louis XIII et Anne d'Autriche c'est un mariage politique bien sûr.
Inversement tu as des cas, même au moyen-âge, où les pères ne marient pas leurs filles : pas envie de se coltiner les gendres potentiellement relous, pas envie de les voir partir, aussi, sûrement. Comme par exemple Charlemagne ou Louis XV.
En fait l'âge au mariage (et inversement le non mariage) s'expliquent à chaque fois par des raisons multiples mais il est sûr que le mariage précoce n'est pas la norme, ni au moyen-âge ni à l'époque moderne : de mémoire, il y a des régions au XVIIIe siècle où l'âge moyen au mariage frôle les 29 ans pour les femmes comme pour les hommes, donc le mariage d'une gamine de 15 ans est clairement une anomalie.
Inversement tu as des cas, même au moyen-âge, où les pères ne marient pas leurs filles : pas envie de se coltiner les gendres potentiellement relous, pas envie de les voir partir, aussi, sûrement. Comme par exemple Charlemagne ou Louis XV.
En fait l'âge au mariage (et inversement le non mariage) s'expliquent à chaque fois par des raisons multiples mais il est sûr que le mariage précoce n'est pas la norme, ni au moyen-âge ni à l'époque moderne : de mémoire, il y a des régions au XVIIIe siècle où l'âge moyen au mariage frôle les 29 ans pour les femmes comme pour les hommes, donc le mariage d'une gamine de 15 ans est clairement une anomalie.
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It took me forty years to realize this. But for guys like us... our lives aren't really our own. There's always someone new to help. Someone we need to protect. These past few years, I fought that fate with all I had. But I'm done fighting. It's time I accept the hand I was dealt. Too many people depend on us. Their dreams depend on us.
Kiryu Kazuma inYakuza 4 Remastered
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- IphigénieProphète
En tout cas dans ma région du sud-est et dans les zones rurales et non urbaines, il n’est pas rare de voir des mariages très très précoces ( entre 11 et 15) en milieu populaire mais aussi la petite bourgeoisie pour les filles, au XVIIe siècle- même si effectivement la norme semble être entre 2O et 30, parfois même un peu plus . Mais ce n’est pas la France à cette époque ( sinon par intermittence).
- ElaïnaDevin
Ce n'est pas rare en effet, mais ce n'est pas la majorité. Après clairement il y a eu une vague de mariages précoces (avant 20 ans) à la fin du XVIe siècle mais sous le règne de Louis XIII l'âge au mariage recule (en ville comme à la campagne, ça a été bien étudié) et à l'époque de Manon Lescaut, se marier avant 20 ans c'est vraiment rare.
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- NLM76Grand Maître
Reste aussi à savoir comment s'articule cet âge au mariage et la question de la sexualité. Si les filles se marient à 25 ans, comment font-elles auparavant ? Filles-mères, enfants exposés, avortements, contraception — j'ai cru comprendre que le coitus interruptus, quoique moqué aujourd'hui pour sa relative inefficacité en était l'une des formes les plus importantes —, abstinence ?
L'autre face de cette affaire, qui concerne particulièrement Manon Lescaut, c'est celle des prostituées et des courtisanes.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- ElaïnaDevin
ça dépend des siècles. Au XVIe siècle, les conceptions hors mariage ne sont pas rares, j'avais un pote qui avait trouvé des contrats devant notaire où des types qui avaient fait un enfant à une jeune femme sans avoir prévu de se marier avec s'engageaient à, en gros, payer pour la naissance du bébé et mettre la fille en apprentissage pour lui donner une situation. De fait les tribunaux ecclésiastiques ne sont pas tellement tendres avec les hommes qui font des bébés aux dames et puis se tirent derrière. Et ce n'est pas si grave d'être fille-mère avant le XIXe siècle.
Enfants exposés non, il y a des abandons mais c'est généralement en temps de crise. Par exemple à Paris pendant la Fronde, Vincent de Paul essaie de lutter contre ça, mais le problème ce n'est pas d'avoir des enfants hors mariage, c'est de ne plus pouvoir les nourrir à cause de la cherté de la nourriture pendant la guerre civile.
Puis le concile de Trente passe par là et à partir du XVIIe siècle il semblerait qu'en effet le choix soit l'abstinence hors mariage au fur et à mesure que les gens intègrent le discours sur l'amour dans le mariage et la sexualité dans l'amour.
Sur toutes ces questions je recommande vraiment la synthèse d'André Burguière sur Le mariage et l'amour en Occident.
Je connais moins bien cette question de la prostitution.
Enfants exposés non, il y a des abandons mais c'est généralement en temps de crise. Par exemple à Paris pendant la Fronde, Vincent de Paul essaie de lutter contre ça, mais le problème ce n'est pas d'avoir des enfants hors mariage, c'est de ne plus pouvoir les nourrir à cause de la cherté de la nourriture pendant la guerre civile.
Puis le concile de Trente passe par là et à partir du XVIIe siècle il semblerait qu'en effet le choix soit l'abstinence hors mariage au fur et à mesure que les gens intègrent le discours sur l'amour dans le mariage et la sexualité dans l'amour.
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