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philann
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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par philann Ven 20 Sep 2013 - 11:17
Al-qualam veneration 

Merci pour cette mise en perspective!!
Pour ce qui reste à l'âge adulte des connaissances apprises dans le secondaire...une simple discussion en salle des profs suffit (mes propres restes en sciences font peurs)

En revanche, je crois que la vraie différence entre aujourd'hui et "avant" (oui je sais c'est vague) c'est le mépris actuel pour la connaissance, l'anti-intellectualisme rampant (sur lequel jouent clairement nos politiques). Le fait de dévaloriser régulièrement l'effort au profit de l'actuel, du motivant, du fun...de l'intérêt à court terme de l'adolescent... (bienvenue dans le monde merveilleux des LV Rolling Eyes )

En ce sens, je crois que l'école va plus à contre-sens de la société aujourd'hui, ce qui n'est pas une situation durable à long terme.

Je crois que le mal-être de beaucoup d'entre nous (dont moi) vient de là: l'impression de remonter systématiquement la rivière à contre-courant...ou de faire du sur place, l'impression d'être systématiquement en décalage...
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cliohist
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par cliohist Ven 20 Sep 2013 - 11:56
cela pousse aussi à s'interroger sur le but de l'histoire et son rapport aux lettres.
Le jugement de Cripure porte sur une histoire au service des autres disciplines, au risque «d’une histoire serve ».
Vaut-il vraiment pour tous les étudiants d'aujourd'hui ? (en 1934 le jugement aurait-il été le même pour le lycéen champion de thème et version latine ou pour le candidat au certif ?) Tout jugement global ne prend-il pas le risque d'être excessif ?

Pour prolonger les messages précédents, il faudrait arrêter de charger la barque de l'histoire scolaire.
Un manuel d'histoire au lycée, c'est plus de 350 pages (à mémoriser ?). Si on écoutait tous les lobbies mémoriels, il faudrait au moins tripler la taille des manuels.

Pourquoi faire comme l'histoire n'existait pas après l’école et en dehors d’elle ?
Le succès public de l'histoire (ou des histoires) est réel. Pour prendre un exemple récent, Louis XIV, ce n'est pas seulement Bern et la parole des "historiens" filmés sur France 2. Pierre Goubert ou le Molière de Mnouchkine ont joué en leur temps un rôle important ; les modernistes actuels travaillent ...

Accepter que l'histoire bouge, que les historiens travaillent, cela change du faux débat entre chrono et thématique (voir l'intérêt du chapitre sur Histoire et mémoires de la 2 GM). Cela incite à sortir des lamentations, des incantations et à mettre enfin en oeuvre une vraie liberté pédagogique. Le ministère précédent cherchait à caporaliser les profs d'HG. Il devrait être possible de faire confiance à leur métier : ils sauront préférer la curiosité intellectuelle à un empilage de savoirs datant parfois du XIXe (les actuels manuels de seconde mériteraient une étude : le Moyen-Age est généralement illustré par des dessinateurs de 1850-1880).

Sortir d’une histoire figée, abandonner la nostalgie d'une histoire-bataille (voire une histoire sainte), c’est prendre conscience que les questions sont souvent plus intéressantes que les réponses (surtout quand elles sont datées et parfois fausses). Les archéologues montrent un chemin : ils avancent très prudemment leurs hypothèses (cf Le salon noir sur les Étrusques).
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par doctor who Ven 20 Sep 2013 - 14:44
Elyas a écrit:
Je peux essayer de répondre : Sans doute parce que les petits chéris de 5e sont capables de bien plus de choses que leur fainéantise naturelle ne le laisse présager.
Je ne parlais pas du contenu, qui peut naturellement être plus complexe en 5e qu'au primaire. Encore faut-il que des choses simples (ce qui ne veut pas dire fausses ou obsolètes sur le plan historiographique) aient été vues une ou deux fois, voir plus, au primaire.

Elyas a écrit:De plus, ces schémas sont ultra-réducteurs, et donc faux tant ils sont réducteurs. Ces schémas ne parlent que des seigneuries avec château. Cela évacue les seigneuries monastiques ou épiscopales, les seigneuries sans château... etc. Cela fait penser aussi que les paysans de la seigneurie sont dans un cadre strict ce qui est faux, car il y a aussi la question de la paroisse. Une seigneurie pouvait être sur plusieurs paroisses, une paroisse s'étendre sur plusieurs seigneuries, une seigneurie être tronçonnée par 2-3 paroisses qui elles-mêmes s'étendaient sur plusieurs seigneuries... Et dire cela, c'est préparer nos élèves à comprendre la Chrétienté d'Occident, la Paix de Dieu, le pouvoir de l'Eglise, enfin bref, des trucs importants, je pense !

Bref, le but du jeu est de montrer le magnifique canevas des campagnes du Bas Moyen Âge que certains de mes amis professeurs de lettres nomment bordel organisé du Moyen-Âge. Et les gamins comprennent très bien.
En quoi un schéma ou un dessin serait-il réducteur ? Je ne vois pas le lien. Normalement, si c'est bien fait, c'est au contraire un moyen de clarifier la complexité.

Elyas a écrit:Après, il y a l'épineux souci de choisir une seigneurie adaptée. Wismes pose souci mais si je ne m'égare (ce qui m'arrive souvent à force de lire des contes à mes enfants où les héros se paument systématiquement) il est aussi possible de partir d'une photographie actuelle d'une ancienne seigneurie (et il y a de superbes exemples de villages-collines autour d'une église fortifiée ou d'un château) plutôt que de documents dits d'époque mais bizarres (non, bien sûr que non, je ne pense PAS DU TOUT à Wismes...).
Après, les schémas (ou plutôt les illustrations jolies tout plein des manuels de notre enfance bénie des dieux Sleep), j'en ai une aversion toute particulière. Mais ça, c'est mon problème, je le gère comme je peux.
Partir de photo actuelles en 5e me semble effectivement très approprié. Et je trouve le dessin représentant la seigneurie de Wismes assez rédhibitoire.
En revanche, je ne peux que déplorer (au sens de regretter, et non de mépriser) ton aversion pour les illustrations didactiques, commune semble-t-il avec les concepteurs des programmes de 5e, même si évidement, tu as bien le droit de faire comme tu le veux.
Je dirais simplement qu'il ne faut pas mettre dans le même sac toutes les images des manuels d'histoire et des affiches murales d'avant les années 60 d'une part et les images d’Épinal d'autre part, même s'il y a intersection entre ces deux types de représentation.
Je trouve pour ma part que ces illustrations étaient un outil extrêmement efficace, qu'on a trop vite relégué au rang des vieilleries. En bref : elles éduquaient l’œil et les capacités d'observations ; elles permettaient une assimilation plus aisée et plus attrayante de l'étrangeté fondamentale du passé ; elles permettaient surtout d'aller vite et de multiplier les leçons sans pour autant courir le risque de l'éparpillement.

Elyas a écrit:Elyas, seulement professeur d'histoire, géographie et éducation civique (pas historien, dieu du ciel, je doute toujours de ce que je sais, je suis forcé de lire encore et toujours, j'admire les grands esprits que vous êtes tous à ne jamais douter).
Je suis seulement professeur de français, mais je doute aussi, et apprend beaucoup, à lire les topics d'histoire du forum. Mes réflexions et mes "critiques" portent toutes sur des points bien précis, sur lesquels je me suis renseigné, et qui croisent des préoccupations qui me concernent et sur lesquelles il me semble avoir une expertise minimale : la construction d'un imaginaire, l'utilisation des illustrations, la pédagogie générale.

Elyas a écrit:PS : serait-il possible que quelqu'un milite pour que les programmes abordent un peu la période entre le Ve siècle et le XIe siècle, car l'Espagne wisigothique, le traité de Verdun, l'Irlande monastique et les Vikings, c'est tout de même tout un pan de notre civilisation qui est évacué. * Elyas retourne pleurer*
Je ne sais pas si c'est ironique, mais je serais tout à fait pour : ces sujets sont passionnants. L'avantage d'une illustration bien faite, c'est que chacun d'eux est faisable assez rapidement.

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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par Robin Ven 20 Sep 2013 - 15:13
C'est la même chose en Français. Ils savent ce qu'est un schéma narratif, une situation d'énonciation, voire un modalisateur, mais ils ont beaucoup de mal (euphémisme) à situer historiquement un auteur.

Je me souviens d'une collègue en collège sidérée parce que l'inspecteur lui avait reproché de faire le lien entre la Littérature et l'Histoire en parlant des trois ordres sous l'Ancien Régime pour expliquer le Bourgeois Gentilhomme (ce qui, entre nous, allait de soi).

A l'épreuve anticipée de Français du Bac, la question de corpus porte sur trois textes ayant plus ou moins le même thème, appartenant à des époques totalement différentes (par exemple : la guerre : un extrait de la Chanson de Roland - Fabrice del Dongo à Waterloo - Un extrait du Voyage au bout de la nuit de Céline.

Comme la dimension chronologique des bons vieux Lagarde et Michard qui étudiaient la littérature par siècles (Moyen-Age, Renaissance, classicisme, XVIIIème siècle, XIXème siècle, XXème siècle) a complètement disparu, les élèves peuvent avoir l'impression (surtout s'ils ont jeté un regard distrait sur les dates) que l'auteur anonyme de la Chanson de Roland est un affreux "militariste", contrairement aux deux autres.

La dimension de la temporalité diachronique est un acquis fondamental du XIXème siècle (Michelet, etc), mais aussi Darwin, Hegel. La raison pour laquelle elle se perd serait intéressante à chercher (j'ai ma petite idée là-dessus !professeur )


Dernière édition par Robin le Ven 20 Sep 2013 - 20:56, édité 1 fois
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par Isis39 Ven 20 Sep 2013 - 15:31
Al- Qalam, veneration 
Nous n'avons plus besoin d'intervenir !
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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par doctor who Ven 20 Sep 2013 - 15:58
Robin a écrit:C'est la même chose en Français. Ils savent ce qu'est un schéma narratif, une situation d'énonciation, voire un modalisateur, mais ils ont beaucoup de mal (euphémisme) à situer historiquement un auteur.

Je me souviens d'une collègue en collège sidérée parce que l'inspecteur lui avait reproché de faire le lien entre la Littérature et l'Histoire en parlant des trois ordres sous l'Ancien Régime pour expliquer le Bourgeois Gentilhomme (ce qui, entre nous, allait de soi).

A l'épreuve anticipée de Français du Bac, la question de corpus porte sur trois textes ayant plus ou moins le même thème, appartenant à des époques totalement différentes (par exemple : la guerre : un extrait de la Chanson de Roland - Fabrice del Dongo à Waterloo - Un extrait du Voyage au bout de la nuit de Céline.

Comme la dimension chronologique des bons vieux Lagarde et Michard qui étudiaient la littérature par siècles (Moyen-Age, Renaissance, classicisme, XIXème siècle, XXème siècle) a complètement disparu, les élèves peuvent avoir l'impression (surtout s'ils ont jeté un regard distrait sur les dates) que l'auteur anonyme de la Chanson de Roland est un affreux "militariste", contrairement aux deux autres.

La dimension de la temporalité diachronique est un acquis fondamental du XIXème siècle (Michelet, etc), mais aussi Darwin, Hegel. La raison pour laquelle elle se perd serait intéressante à chercher (j'ai ma petite idée là-dessus !professeur )
Parfaitement. d'où l'intérêt pour les professeurs d'être, en partie, des auxiliaires du cours d'histoire. Ce que je fais avec grand plaisir. Je reprends, je m'appuie sur, je renvoie à, je complète.

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par kiwi Ven 20 Sep 2013 - 16:03
iphigénie a écrit:
Et ces "histoires", sont bien en fait, et néanmoins partie intégrante de l'autre Histoire, puisque c'est avec elle et sa diffusion à travers la littérature que se forgent les peuples: L'Enéide dit sans doute beaucoup de khonneries sur l'Histoire Romaine et pourtant elle a aussi fait, en quelque sorte l'Histoire de Rome et elle en fait à coup sûr "partie".

heu 
J'avoue ne pas bien comprendre. L'Enéide est étudiée, Homère est étudié au collège au moins dans les cours d'histoire (des extraits bien sûr). On peut parfaitement utiliser des sources littéraires pour construire un cours. Évidemment, l'analyse du texte ne sera pas la même qu'un professeur de lettres. Vouloir une histoire qui tende à l'objectivité ne veut pas dire qu'on évince d'un coup de baguette toutes les sources, tous les auteurs qui racontent comme tu le dis, des "khonneries" historiquement parlant. Dans mon cours sur Rome, je confronte les récits de Virgile ou de Tite-live avec les sources archéologiques. Mais la légende tient une place très importante.

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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par philann Ven 20 Sep 2013 - 16:07
doctor who a écrit:
Robin a écrit:C'est la même chose en Français. Ils savent ce qu'est un schéma narratif, une situation d'énonciation, voire un modalisateur, mais ils ont beaucoup de mal (euphémisme) à situer historiquement un auteur.

Je me souviens d'une collègue en collège sidérée parce que l'inspecteur lui avait reproché de faire le lien entre la Littérature et l'Histoire en parlant des trois ordres sous l'Ancien Régime pour expliquer le Bourgeois Gentilhomme (ce qui, entre nous, allait de soi).

A l'épreuve anticipée de Français du Bac, la question de corpus porte sur trois textes ayant plus ou moins le même thème, appartenant à des époques totalement différentes (par exemple : la guerre : un extrait de la Chanson de Roland - Fabrice del Dongo à Waterloo - Un extrait du Voyage au bout de la nuit de Céline.

Comme la dimension chronologique des bons vieux Lagarde et Michard qui étudiaient la littérature par siècles (Moyen-Age, Renaissance, classicisme, XIXème siècle, XXème siècle) a complètement disparu, les élèves peuvent avoir l'impression (surtout s'ils ont jeté un regard distrait sur les dates) que l'auteur anonyme de la Chanson de Roland est un affreux "militariste", contrairement aux deux autres.

La dimension de la temporalité diachronique est un acquis fondamental du XIXème siècle (Michelet, etc), mais aussi Darwin, Hegel. La raison pour laquelle elle se perd serait intéressante à chercher (j'ai ma petite idée là-dessus !professeur )
Parfaitement. d'où l'intérêt pour les professeurs d'être, en partie, des auxiliaires du cours d'histoire. Ce que je fais avec grand plaisir. Je reprends, je m'appuie sur, je renvoie à, je complète.
À la fac, je n'ai jamais commencer un semestre autrement que par 2 heures de contextualisation.... À quoi bon parler de l'humanisme sans avoir la moindre idée de la Renaissance ? Et j'ai longtemps reproché à mes profs de ne pas nous avoir plus éclairés sur le 17ème lorsque j'étudiais Descartes ou Leibniz !!! Il m'a fallu lire Les Lumières radicales de Jonathan Israël pour enfin en comprendre pleinement les enjeux.

L'aversion pour la chronologie, le repérage contextuel et la mise en perspective historique m'a toujours fait halluciner!! C'est se priver d'outils de compréhension indispensables. Et en ce sens, le Lagarde et Michard peut rendre de nombreux services à de jeunes étudiants pommés... un peu par notre faute...

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par kiwi Ven 20 Sep 2013 - 16:18
doctor who a écrit:[
En revanche, je ne peux que déplorer (au sens de regretter, et non de mépriser) ton aversion pour les illustrations didactiques, commune semble-t-il avec les concepteurs des programmes de 5e, même si évidement, tu as bien le droit de faire comme tu le veux.
Je dirais simplement qu'il ne faut pas mettre dans le même sac toutes les images des manuels d'histoire et des affiches murales d'avant les années 60 d'une part et les images d’Épinal d'autre part, même s'il y a intersection entre ces deux types de représentation.
Je trouve pour ma part que ces illustrations étaient un outil extrêmement efficace, qu'on a trop vite relégué au rang des vieilleries. En bref : elles éduquaient l’œil et les capacités d'observations ; elles permettaient une assimilation plus aisée et plus attrayante de l'étrangeté fondamentale du passé ; elles permettaient surtout d'aller vite et de multiplier les leçons sans pour autant courir le risque de l'éparpillement.
Je suis tout à fait d'accord avec l'idée qu'il est nécessaire de donner de l'épaisseur à une notion abstraite, de concrétiser cette notion pour les élèves. Par exemple, un texte sur la vie dans les tranchées en 3ème. C'est bien gentil, mais les élèves, ils ne savent pas, pour beaucoup, à quoi ça ressemble une tranchée. Une petite photo et hop, ils voient, il imaginent d'autant mieux les difficultés et la violence morale et physique de cette guerre. Autre exemple : Ur. Photo aérienne des vestiges. J'aime bien montrer cette fois-ci une reconstitution pour que les élèves voient à quoi ressemblait clairement une cité-état de Mésopotamie au IIIème millénaire.
Mais là où l'on n'est pas spécialement d'accord, c'est sur ta volonté d'utiliser fréquemment sinon systématiquement des dessins fictifs, comme ceux montrés plus haut, ou des reconstitutions. Je préfèrerai toujours utiliser un document iconographique source si j'en ai un à ma disposition (et que je juge que l'étude sera aisée avec les élèves). Par exemple, pourquoi montrer une image dessinée de nos jours d'un paysan travaillant dans un champs du MA, alors que j'ai les Très Riches heures du Duc de Berry à disposition? Ce document est discutable évidemment car il montre davantage la réalité des paysanneries de la fin du MA qu'aux alentours de l'An Mil, mais ça me paraîtra toujours préférable.
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par kiwi Ven 20 Sep 2013 - 16:18
Sinon complètement d'accord avec Al-Qalam.
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par doctor who Ven 20 Sep 2013 - 17:14
Je suis bien d'accord que les documents photo sont parfois très utilisables. De là à dire préférable, je ne franchirai pas le pas. Cela dépend du niveau.
Pour ce qui est des Riches heures, c'est un document très utile, mais d'autant plus utilisable qu'il se rapproche en partie de certaines caractéristiques des illustrations didactiques d'autrefois : la pluralité des plans, le foisonnement de l'image, etc.
Mais c'est Doublecasquette qui avait montré que cette image même était limitée et nettement moins dense en informations positives qu'une composition ad hoc.
J'y vois, encore une fois, une déperdition d'efficacité pédagogique et le fruit d'une sorte d'obsession des sources qui confond le plan de la recherche historique et le plan de la restitution pédagogique.

J'ajoute que je ne prône pas du tout pour le secondaire une utilisation exclusive ou majoritaire de ces illustrations, mais leur réintégration mesurée dans l'éventail des outils du professeur, d'où ils ont été bannis il y a quelques dizaines d'années. Je serais plus radical en primaire, où cet abandon a consisté selon moi à se tirer une balle dans le pied et à créer un paquet de problème pour les profs d'histoire du secondaire.

PS : on a eu exactement le même débat ici : https://www.neoprofs.org/t59590p20-histoire-une-pedagogie-par-l-observation
(Sans doute est-ce ma faute. Je radote. Mais le sujet, qui n'est pas minime pour l'école primaire, me semble être un des angles morts les plus spectaculaire de la pensée pédagogique actuelle.)

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par User5899 Ven 20 Sep 2013 - 17:28
Marcel Khrouchtchev a écrit:
Cripure a écrit:Mais cette sorte de satisfaction qui se lit à l'évocation d'une "Histoire" qui ne concerne plus que le présent a quelque chose de glaçant.
Je ne vois pas d'où vous tirez ça. Nous sommes plusieurs ici à nous intéresser prioritairement à des périodes reculées (voire très reculées, n'est-ce pas Al-Qalam Wink )

Condorcet a écrit:
   Si Louis XIV et Napoléon Ier sont nos voisins de table, j'aimerais qu'ils me tendissent qui un Champagne qui un Cognac afin que j'y puisse humecter mes lèvres. L'historien est inquiet par nature et ce doute corrosif qui accueille quelque propos qu'il prononçât a lui aussi ce relent de botrytis indésirable puisqu'il ne s'agit pas de humer un vieux liquoreux mais de donner à voir et à comprendre. L'histoire n'offre pas de certitudes mais invite chacun à se poser des questions. Vous lui en voulez beaucoup du doute qu'elle instille dans votre esprit parce qu'elle ne conforte pas vos convictions et que tel n'est pas son rôle. Le professeur n'est pas un roi thaumaturge ni un démiurge mais simplement un être qui, à partir d'un donné, tente d'en tirer le meilleur parti.  Cette (fausse) querelle des Anciens et des Modernes, cette instrumentalisation historique à des fins plus que partisanes recèlent en effet quelque chose de glaçant : au lieu de prendre le recul nécessaire à toute analyse éprise d'une quelconque ampleur, elle invite à durcir des positions, à tirer à la ligne, en un mot à refuser la complexité du réel, bref à s'ingénier à bafouer dès la première ligne les fondamentaux méthodologiques en histoire : recul, doute, contextualisation, délimitation et confrontation des sources, construction d'un discours répondant aux grandes questions qu'elles suggèrent. Al-Qalam, Isis, Kiwi ont ici et ailleurs expliqué et exposé par le menu ce que contenaient les programmes et quelles étaient leurs attitudes pédagogiques. Elles vous ont rappelé leur utilisation de la liberté pédagogique et ce, avec le dessein de conférer cohérence, clarté et ampleur aux I/O. Après, il est commode de se draper derrière le "Messieurs les censeurs, bonsoir" mais la réalité est que votre point de vue a pu être exposé, discuté, débattu à l'infini. Il l'est encore plus de crier à l'indifférence citoyenne, de taxer vos contradicteurs de mollesse idéologique sinon de les brocarder en thuriféraires de l'aporie pédagogique. Il l'est moins de regarder les vieux ennemis d'hier sous le prisme - fort contraignant - de la distance critique : les médias de masse (plus redoutables pour le cerveau qu'un Jivaro), l'histoire contemporaine (porteuse d'innombrables déceptions et dépourvue de toute profondeur braudélienne)... Ainsi les moulins de Don Quichotte (le frontispice) pourront reparaître dans les manuels sous le regard ébahi de nos têtes crépues et autres.
veneration veneration veneration 

Marie Laetitia a écrit:A choisir, je préfère - ô sacrilège - encenser Marc Bloch. Chacun ses préférences.
Et re veneration veneration veneration 

veneration veneration veneration veneration veneration veneration veneration veneration veneration veneration veneration 

Moi aussi, je sais le faire Smile
Même si je n'ai rien compris au message de Condorcet. Iphigénie est, comme d'hab, bien plus proche de l'analyse correcte de la réalité selon moi.
Sinon, ben écoutez, apparemment, tout va bien. Donc je pars en we apaisé et heureux, d'autant qu'après tout, ces questions ne me concernent pas directement. Je suis au moins rassuré de constater que les profs de lettres, eux,ne s'illusionnent pas sur l'esprit critique d'élèves perdus par des programmes débiles. Et nous continuerons à lire beaucoup de messages de satisfaction historique. Vivement demain bounce 
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par cliohist Ven 20 Sep 2013 - 17:28
De plus, ces schémas sont ultra-réducteurs, et donc faux tant ils sont réducteurs.
D'accord avec Elyas.
La citation des IO suggérait simplement qu'une directive officielle, même bien intentionnée, peut avoir des effets pervers. Les images d'Epinal ont disparu, mais les éditeurs se sont précipités vers un plan unique, celui de la seigneurie de Wismes.
http://clioweb.free.fr/dossiers/medievale/wismes/wismes.htm

Le plan a été publié en noir et blanc en 1962 par le baron Armel de Wismes dans son ouvrage Ainsi vivaient les Français, des croisades à la Troisième République : d'après les archives d'une très ancienne famille. Il ne semble pas que ce plan ait été étudié par un historien de métier. De plus le plan reproduit est tronqué, alors que le texte permettrait sans doute de le dater. D'où des indications très fluctuantes d'un manuel à l'autre. Etait-ce le résultat cherché par les concepteurs des programmes ?

Les rares plans publiés semblent tardifs : cf. Thomas Jarry, Le plan parcellaire de la plaine d'Allemagne - Fleury sur Orne - (1477). Et la lecture d'un plan parcellaire par un collégien est-elle forcément spontanée ? Le plan est-il tjs représentatif ?

une anecdote : Le Magnard (?) reproduit la vue de la baronnie de Sévérac-le-Château (1504) étudiée par Juliette Damaisy dans sa thèse (2008). Un article de la Revue historique 2009/3 est en accès payant chez Cairn. Mais Google images connaît plusieurs reproductions en accès libre, dont celle-ci :

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Severac-damasy
http://tinyurl.com/lufdnlt

Lefteris
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par Lefteris Ven 20 Sep 2013 - 17:31
iphigénie a écrit:Je crois que le débat est insoluble parce qu'en réalité, il y a deux histoires: il y a celle qui veut être une science, et il y a celle qui reste qu'on le veuille ou non un art mêlé aux autres arts, une histoire subjective avec tout ce que cela peut signifier d'erreurs au sens strict, de vérité au sens psychologique:
le professeur de lettres aurait besoin des références aussi à cette histoire que les scientifiques récusent et qui est l'histoire "d'Epinal" si j'ose dire. Et ces "histoires", sont bien en fait, et néanmoins partie intégrante de l'autre Histoire, puisque c'est avec elle et sa diffusion à travers la littérature que se forgent les peuples: L'Enéide dit sans doute beaucoup de khonneries sur l'Histoire Romaine et pourtant elle a aussi fait, en quelque sorte l'Histoire de Rome et elle en fait à coup sûr "partie".
Bref exclure l'une ou l'autre, c'est tronquer l'histoire d'une dimension essentielle, me semble-t-il, candidement parlant...
Eh oui...
La vision qu'une société a d'elle -même, les idéaux de cette société ou d'une partie d'entre elle, les symboles  et les faits magnifiés qu'elle utilise,   font partie de l'histoire. A ce titre Cincinnatus , Fabricius et autres Regulus font partie de l'histoire, quelle que soit la "réalité" de leur geste. Pareil pour Virgile...
J'ai autant l'impression de comprendre Rome en lisant la catabase que lorsque je lis une revue d'histoire ou d'archéologie (sans pour autant mépriser ces sources, que je dévore avec intérêt).

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par doublecasquette Ven 20 Sep 2013 - 17:34
doctor who a écrit:Je suis bien d'accord que les documents photo sont parfois très utilisables. De là à dire préférable, je ne franchirai pas le pas. Cela dépend du niveau.
Pour ce qui est des Riches heures, c'est un document très utile, mais d'autant plus utilisable qu'il se rapproche en partie de certaines caractéristiques des illustrations didactiques d'autrefois : la pluralité des plans, le foisonnement de l'image, etc.
Mais c'est Doublecasquette qui avait montré que cette image même était limitée et nettement moins dense en informations positives qu'une composition ad hoc.
J'y vois, encore une fois, une déperdition d'efficacité pédagogique et le fruit d'une sorte d'obsession des sources qui confond le plan de la recherche historique et le plan de la restitution pédagogique.

J'ajoute que je ne prône pas du tout pour le secondaire une utilisation exclusive ou majoritaire de ces illustrations, mais leur réintégration mesurée dans l'éventail des outils du professeur, d'où ils ont été bannis il y a quelques dizaines d'années. Je serais plus radical en primaire, où cet abandon a consisté selon moi à se tirer une balle dans le pied et à créer un paquet de problème pour les profs d'histoire du secondaire.

PS : on a eu exactement le même débat ici : https://www.neoprofs.org/t59590p20-histoire-une-pedagogie-par-l-observation
(Sans doute est-ce ma faute. Je radote. Mais le sujet, qui n'est pas minime pour l'école primaire, me semble être un des angles morts les plus spectaculaire de la pensée pédagogique actuelle.)
Pour paraphraser nos historiens: veneration veneration veneration 

Ceci étant dit et bien dit, ils vont vous répondre qu'ils ne demandent rien à l'école primaire hormis le lire-écrire ...Sad Sad ou :aa:  au choix du lecteur.
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User5899
Demi-dieu

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par User5899 Ven 20 Sep 2013 - 17:42
Isis39 a écrit:Al- Qalam, veneration 
Nous n'avons plus besoin d'intervenir !
Une démarche empreinte d'esprit critique Wink mdr
John
John
Médiateur

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par John Ven 20 Sep 2013 - 17:43
Une démarche empreinte d'esprit critique Wink mdr
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Isis39
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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par Isis39 Ven 20 Sep 2013 - 17:44
Enfin, vous n'avez pas répondu à Al-Qalam
Shajar
Shajar
Vénérable

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par Shajar Ven 20 Sep 2013 - 17:45
Pour le primaire, je suis d'accord que ces images sont d'une grande aide. Cependant, les PE peuvent aussi utiliser des représentations d'époque, d'autant que les élèves de primaire sont moins sensibles - me semble-t-il en tout cas - aux difficultés liées aux styles artistiques, et ont paradoxalement moins de mal que nous à lire ces représentations. (Combien de guide de musée ont révisé leur copie après la visite d'une classe de CE2 ? araignée )

Le problème étant qu'elles véhiculent une vision parcellaire et imaginaire du passé. A partir du collège, le travail à partir de documents ou de restitutions de situations réelles - parce que l'histoire étudie la réalité pour en tirer des modèles, éventuellement - me semble préférable. (Même si en 6e 5e, ces images doivent pouvoir aussi aider à se créer un imaginaire historique).

Il faudrait prendre en compte aussi les étapes du développement de l'enfant dans ces âges encore tendres - la conscience du passé et de la profondeur historique n'apparaît pas tout de suite, il me semble, de même que le raisonnement logique. Mais là dessus, j'avoue mon incompétence crasse. C'est dommage qu'on ne soit pas un peu formé - pour les profs de secondaire, du moins - à la manière dont se constitue l'esprit et la pensée enfantins.
Elyas
Elyas
Esprit sacré

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par Elyas Ven 20 Sep 2013 - 17:54
@ doctor who

Je suis bien conscient que des gens apprécient les illustrations et ne comprennent pas que je ne les apprécie pas.

En fait, je pensais que tu parlais des illustrations telles que celles des vieux manuels montrant une rue médiévale avec les personnages en "costume d'époque" figé dans une réalité crédible pour le spectateur. Et c'est là tout le problème, le crédible n'est pas le vrai. Des choses vraies paraîtront incrédibles (oula, le mot existe-t-il ?) alors que des faussetés seront perçues comme crédibles.

Prenons un exemple : dans le Hatier histoire de 6e, il y a une illustration de la bataille de Salamine. Elle est belle, on voit de fiers guerriers athéniens tirant à l'arc et lançant des javbelots dans leurs magnifiques armures de bronze, les Perses en robe bleu ou rouge avec des sourires crispés de méchants sans oublier le magnfiique perse en robe rouge tombant à l'eau, percé d'une flèche. Cette image me pose souci car elle ne montre pas les rameurs, les véritables responsables de la victoire, et on tombe dans le cliché du vilain perse, barbare inculte et méchant en robe. Voilà pour la magnifique illustration devant permettre de sortir de l'abstrait les élèves... No comment.

Mais je te rassure, je trouve toujours des documents d'époque illustratifs pour sortir de l'abstrait.

De plus, mon aversion vient du fait que la grande majorité des illustrations sont lénifiantes, caricaturales et souvent fausses de facto. Il n'y a que les reconstitutions que j'utilise. Je me souviens que quelqu'un a sorti des scans de vieux manuels utilisant des illustrations, j'ai eu le poil hérissé rien qu'à imaginer que des gens pensent que c'est mieux. Oui, c'est mieux pour enseigner une histoire fantasmée, raccourcie, écornée, digne des images d'Epinal.

Par exemple, je pose toujours une question à mes élèves : "quelle était la couleur de peau des esclaves en Grèce antique ?" "Noire" me crient-ils en choeur. Et là, je casse ce cliché (et j'ai déjà vu des illustrations où on voit des esclaves noirs en Grèce antique). De la même façon, les paysans sont souvent montrés comme pauvres, stupides et serviles, cultivant des céréales. Alors qu'on avait des paysans cultivant des vergers et surtout des coques pour créer du bleu dans le sud de la France (doù l'expression pays de Cocagne, cockaigne en ancien français, du nom de la coque issue d'une plante, coque qu'on pressait pour obtenir le pigment). Ces paysans étaient loin d'être pauvres.

Alors oui, je n'aime pas les illustrations car jusqu'à maintenant, aucune ne m'a paru digne d'intérêt hormis les reconstitutions.

Ce n'est pas pour rien qu'on parle d'"images" d'Epinal pour qualifier un cliché.

Après, je peux comprendre ce besoin de partager de belles images qui font rêver mais jusqu'à maintenant aucune ne m'a semblé utile.

Pour la remarque sur les programmes, je n'étais pas du tout ironique. J'en ai ras le bol de cette oppression programmatique sur l'histoire du temps présent sur laquelle on n'a aucun recul historique, au détriment de siècles entiers envoyés par le fond pour pouvoir faire cette histoire du temps présent. Toute cette période du Ve au XIe siècle est fondamentale pour comprendre le monde qui en naquit... mais on l'a oublié dans les programmes (rien sur l'Espagne wisigothique, rien sur le monachisme irlandais, rien sur les Vikings, rien sur la fin de l'Empire carolingien, presque plus rien sur Byzance d'Héraklius ou de Justinien...).

Cependant, je ne demande qu'à être convaincu pour les illustrations.

Elyas.
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cliohist
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Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par cliohist Ven 20 Sep 2013 - 18:22
Alors oui, je n'aime pas les illustrations car jusqu'à maintenant
Peut-être la différence entre l'illustration, l'image qui accompagne le texte pour faire joli, et le document visuel qui mérite analyse détaillée.

Lefteris
A ce titre Cincinnatus , Fabricius et autres Regulus font partie de l'histoire, quelle que soit la "réalité" de leur geste...
J'ai autant l'impression de comprendre Rome en lisant la catabase que lorsque je lis une revue d'histoire ou d'archéologie (sans pour autant mépriser ces sources, que je dévore avec intérêt).
Le virage culturel fait que les historiens s'intéressent à ces représentations. Avec une dérive possible : pour s'occuper des genres de Jeanne (cf le site web Musea), il vaut mieux connaître l'histoire, réelle ou mythifiée.
http://musea.univ-angers.fr/rubriques/affiche_sous_rubrique.php?ref_sous_rubrique=1

Deux suggestions, à propos des apports de l'archéologie à l'histoire des Etrusques.
- Ecouter Jean-Paul Thuillier (émérite, ULM) et Vincent Jolivet (CNRS) dans l'émission Le Salon noir (on y parle aussi lieux et dates).
http://www.franceculture.fr/emission-le-salon-noir-qui-sont-les-etrusques-2013-09-17

Ou aller, avant le 9 février, voir l'expo au musée Maillol.
« Un hymne à la vie », c'est surtout vrai pour l'aristocratie précisent les archéologues.
http://www.museemaillol.com/expositions/etrusques/presentation/
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User5899
Demi-dieu

Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 Empty Re: Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire.

par User5899 Ven 20 Sep 2013 - 19:17
John a écrit:
Une démarche empreinte d'esprit critique Winkmdr
Une réponse pleine de sens et d'intérêt.
Oui, je trouve. Et c'est pas bien d'effacer des réponses qui ne te plaisent pas mais ne contreviennent pas aux règles.
Isis39 a écrit:Enfin, vous n'avez pas répondu à Al-Qalam
Non, parce que je ne suis pas en désaccord avec ce qu'elle écrit, sauf sur un point sur lequel nous avons déjà échangé, à savoir qu'elle croit possible d'entraîner l'esprit critique à partir d'une absence de connaissances à peu près complète, alors qu'en lettres, nous savons depuis longtemps que c'est impossible. Donc, que répondre ? Je ne joue pas à qui a le dernier mot Smile


Dernière édition par Cripure le Ven 20 Sep 2013 - 21:47, édité 1 fois
doublecasquette
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par doublecasquette Ven 20 Sep 2013 - 19:33
Elyas a écrit:De la même façon, les paysans sont souvent montrés comme pauvres, stupides et serviles, cultivant des céréales. Alors qu'on avait des paysans cultivant des vergers et surtout des coques pour créer du bleu dans le sud de la France (doù l'expression pays de Cocagne, cockaigne en ancien français, du nom de la coque issue d'une plante, coque qu'on pressait pour obtenir le pigment). Ces paysans étaient loin d'être pauvres.
Tiens, j'ai appris quelque chose, moi, ce soir...

J'ai juste un petit souci... Que mangeaient-ils alors, ces cultivateurs de fruits et de coques ? Des produits d'importation ? Qui venaient d'où ? Par quels moyens de transport ? Circulant sur quel "réseau" ? Et comment payaient-ils leur nourriture ? Cela a duré de quand à quand, à peu près ? Comment s'est opérée la reconversion lorsqu'on a arrêté de cultiver ces coques ? Et, au fait, l'arbre qui les donnait, comment se nommait-il ? Et de quel type de terrain avait-il besoin ?

Shajar
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par Shajar Ven 20 Sep 2013 - 19:37
Cripure a écrit:
Isis39 a écrit:Enfin, vous n'avez pas répondu à Al-Qalam
Non, parce que je ne suis pas en désaccord avec ce qu'elle écrit, sauf sur un point sur lequel nous avons déjà échangé, à savoir qu'elle croit possible d'entraîner l'esprit critique à partir d'une absence de connaissances à peu près complète, alors qu'en lettres, nous savons depuis longtemps que c'est impossible. Donc, que répondre ? Je ne joue pas à qui a le dernier mot Smile
Vous déformez malicieusement mon propos. Mais vous êtes en veine ironique, ce soir... veneration (moi aussi je sais jouer Razz )
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InvitéO
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par InvitéO Ven 20 Sep 2013 - 19:41
Al-qalam a écrit:
Cripure a écrit:
Isis39 a écrit:Enfin, vous n'avez pas répondu à Al-Qalam
Non, parce que je ne suis pas en désaccord avec ce qu'elle écrit, sauf sur un point sur lequel nous avons déjà échangé, à savoir qu'elle croit possible d'entraîner l'esprit critique à partir d'une absence de connaissances à peu près complète, alors qu'en lettres, nous savons depuis longtemps que c'est impossible. Donc, que répondre ? Je ne joue pas à qui a le dernier mot Smile
Vous déformez malicieusement mon propos. Mais vous êtes en veine ironique, ce soir... veneration (moi aussi je sais jouer Razz)
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dandelion
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par dandelion Ven 20 Sep 2013 - 19:48
doublecasquette a écrit:
Elyas a écrit:De la même façon, les paysans sont souvent montrés comme pauvres, stupides et serviles, cultivant des céréales. Alors qu'on avait des paysans cultivant des vergers et surtout des coques pour créer du bleu dans le sud de la France (doù l'expression pays de Cocagne, cockaigne en ancien français, du nom de la coque issue d'une plante, coque qu'on pressait pour obtenir le pigment). Ces paysans étaient loin d'être pauvres.
Tiens, j'ai appris quelque chose, moi, ce soir...

J'ai juste un petit souci... Que mangeaient-ils alors, ces cultivateurs de fruits et de coques ? Des produits d'importation ? Qui venaient d'où ? Par quels moyens de transport ? Circulant sur quel "réseau" ? Et comment payaient-ils leur nourriture ? Cela a duré de quand à quand, à peu près ? Comment s'est opérée la reconversion lorsqu'on a arrêté de cultiver ces coques ? Et, au fait, l'arbre qui les donnait, comment se nommait-il ? Et de quel type de terrain avait-il besoin ?

Mais pourquoi maîtresse, pourquoi, pourquoi? DC tu vas lui faire faire des cauchemars (L'Elève qui n'en savait jamais assez...) Razz  Mais j'avais entendu quelque chose de semblable il y a peu concernant les relations donnant-donnant entre les serfs et les seigneurs (ou lu ici Supérieur : les élèves qui m'arrivent du lycée sont nuls en histoire. - Page 12 3795679266 ) qui ne correspondait pas à ce que j'avais appris à l'école. Et je suis aussi tombée en cours de route sur une émission sur la guerre du Vietnam qui ne racontait pas l'histoire (sans archives cela dit of course Rolling Eyes ) que l'on m'avait enseignée à l'époque: ils avaient des usines de crème glacée! Mais après tout cela montre juste qu'il y a eu aussi pas mal de progrès récemment, et qu'on peut toujours découvrir de nouvelles choses, surtout si l'on part sans trop d'aprioris. Apprendre l'histoire tout au long de sa vie, en voilà un projet qu'il est beau.
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