Les mises à jour du site "Vive la vie moderne !" de Luigi B.

Je lis avec intérêt.

Certaines des discussions savantes que Luigi_B décortique ici (numérique, informatique, digital, etc.) me font parfois penser un peu à http://www.legorafi.fr/2014/09/10/le-digital-planneur-echoue-a-expliquer-le-brand-content-au-responsable-user-experience/ et notamment à la dernière phrase de cette actu (au sujet de l'action du Ministère).

:lol!:

Sacré boulot, Luigi!

Bon, en raison de ce passage au vitriol de l'article, je suis invité par Xavier Niel pour visiter l'école "42". Je vous tiendrai au courant.

Un exemple de célébration de "42" dans les médias qui m'avait particulièrement consterné : https://www.dailymotion.com/video/x18aktd_c-dans-l-air-formons-nous-des-cancres-11-12-13_tv

La discussion ici : https://www.neoprofs.org/t69467-11122013-c-est-dans-l-air-sur-l-education-en-france-avec-yves-calvi-invites-catherine-moisan-loys-bonod-herve-jean-le-niger-et-martine-daoust

Extrêmement intéressant! On suit!

Tiens, un argument a visitatione. Très intéressant oui

C'est classe de sa part. À comparer avec le mépris de certains twittos...

Bon, la visite de "42" était plutôt sympathique mais un peu téléguidée, sur le mode visite pour journalistes. Sur l'école elle-même ou son fonctionnement, je n'ai pas appris grand chose que je ne connaissais déjà par les reportages, les articles et surtout la lecture de blogs d'étudiants de l'école.

J'ai pu discuter franchement avec Kwame Yamgnane, co-fondateur de l'école, un colosse assez impressionnant. La discussion a été intéressante, même si elle a été courte.

Face à mes reproches qui critiquaient le discours des dirigeants de "42" à l'encontre de l'école, M. Yamgnane a tâché de modérer ses propos en mettant sur les compte des journalistes beaucoup d'approximations : c'est sans doute en partie vrai, les journalistes aimant à trouver dans "42" le modèle de la modernité pédagogique pour l'école publique. Il a ainsi contesté les deux citations que j'ai faites de lui (et que je n'ai pas inventées !), et déclaré également qu'il ne pensait pas que "42" avait vocation à lutter contre le décrochage à la place de l'école. Il a reconnu volontiers que "l'ouverture" de l'école "42" était beaucoup plus relative que celle de l'école publique, celle-ci n'excluant personne. Il a bien voulu entendre également que la scolarité obligatoire n'avait pas de vocation professionnelle. J'ai essayé de le convaincre que ses opinions sur l'école en général, qui devait selon lui, changer de pédagogie ("42" est partenaire du CRI de François Taddei), ne pouvaient s'appuyer sur l'exemple de "42", dont le public est un peu différent : très homogène, très motivé, sélectionné et souvent âgé (jusqu'à... 30 ans).

J'ai d'ailleurs du mal à comprendre pourquoi ce qui est critiqué dans l'école (une certaine sélection à partir de la 3e, les rythmes scolaires, des examens etc.) est célébré par les médias chez "42" alors que c'est bien pire : on y pratique les travaux d'intérêt généraux, les zéros automatiques, les notes négatives pour fraude (-42 évidemment), la sélection est drastique (80% des candidats éliminés en pré-selection à distance et 2/3 des candidats restants éliminés en sélection sur place pendant trois semaines 7j/7 et 15h/j lors des "piscines" l'été). Quand j'ai insisté sur l'homogénéité (visible) du public de "42", après un certain déni, sa réponse en forme de boutade a été assez éloquente : on a quand même besoin de recruter des gens qui sachent compter jusqu'à deux (pour faire du binaire)...

Enfin notre discussion sur la programmation conçue comme un art, c'est-à-dire une apprentissage (sans nécessité de bases théoriques), n'a pas pu avoir lieu, malheureusement.

Dans les anecdotes, la salle des profs est assez bizarre : des colonnes de résultats automatiques défilant sur des dizaines d'écrans, certains membres du staff dormant sur un énorme pouf, d'autres jouant à un jeu vidéo sur un écran plus que géant, une terrasse ensoleillé avec des élèves faisant des pompes en guise de punition, un jacuzzi inoccupé, un dortoir minuscule pour les enseignants faisant penser à un sous-marin. Les étudiants qui passent les tests d'entrée pendant les "piscines" travaillent un peu n'importe quand. Une salle au rez-de-chaussé, avec d'immenses baies vitrées ensoleillées et, la nuit, des néons permanents, est réservée aux dormeurs qui s'installent à toute heure et s'efforcent de dormir à même le sol, dans le bruit des claquements de porte, sur le matelas qu'ils ont apporté. La promiscuité et le manque d'hygiène élémentaire sont étonnants dans un lieu aussi moderne, tout de béton et de verre. M. Yamgnane a reconnu que c'était l'impensé de cette école, en quelque sorte, au moins pour les "piscines" de l'été.

A titre personnel je suis assez convaincu que les étudiants qui entrent dans cette école pourront en retirer quelque chose. Il faut en effet être assez vif et très motivé pour y entrer. Mais il s'agit en effet de former des informaticiens un peu particuliers, des bidouilleurs de sites ou d'applications, pas des ingénieurs fabriquant des avions ou s'assurant de la sécurité des systèmes informatiques.

Anecdote : un candidat, devant nous, consultait Wikipédia pour découvrir à toute vitesse la notion de factorielle ou - plus sûrement - pour utiliser le tableau des valeurs illustrant la notion... sans vraiment la comprendre. Un bon résumé d'une certaine vision de l'enseignement, en somme.

L'article est désormais téléchargeable sous forme de livre numérique (167 pages en pdf) : http://www.laviemoderne.net/grandes-autopsies/88-in-coda-venenum

Bernard Stiegler a écrit:Nous sommes en guerre [...] et, quand on est en guerre, il faut former des combattants.

Les vidéos du colloque d'avril 2014 sur les enfants et les écrans sont désormais disponibles. S'il ne faut en regarder qu'une, je recommande l'intervention de Bernard Stiegler (une trentaine de minutes), qu'il a lui-même intitulé, non sans un certain alarmisme : "Le massacre des innocents". Pour lui, les enfants sont abandonnés à eux-mêmes et le philosophe fait l'analogie avec l'enfant sauvage. Il règle également son compte à la Petite Poucette de Michel Serres.

Ces interventions sont en effet alarmistes.
Comment va-t-on faire quand les élèves vont avoir les moyens de posséder une montre connectée ? Comment va-t-on pouvoir solliciter leur attention et éviter les décrochages constants sur Internet et les réseaux sociaux ? Le combat me semble perdu d'avance et actuellement, je ne vois pas comment on va pouvoir enseigner.

Vivivava a écrit:Ces interventions sont en effet alarmistes.
Comment va-t-on faire quand les élèves vont avoir les moyens de posséder une montre connectée ? Comment va-t-on pouvoir solliciter leur attention et éviter les décrochages constants sur Internet et les réseaux sociaux ? Le combat me semble perdu d'avance et actuellement, je ne vois pas comment on va pouvoir enseigner.

Tu le mets au futur?

Luigi_B a écrit:
Anecdote : un candidat, devant nous, consultait Wikipédia pour découvrir à toute vitesse la notion de factorielle ou - plus sûrement - pour utiliser le tableau des valeurs illustrant la notion... sans vraiment la comprendre. Un bon résumé d'une certaine vision de l'enseignement, en somme.

C'est typiquement l'exemple bateau pour étudier la programmation récursive.

Ce qui me rappelle qu'un de mes premiers programmes (que j'avais fait pour m'amuser sur l'ordinateur paternel) consistait à calculer des factorielles et les afficher en triangle, comme dans un article sur la question (je l'ai retrouvé: Ces étranges factorielles, de Martin Gardner, dans Math'festival, 1981), en basic. En reprogrammant les multiplications d'entiers stockés en tableau, dans les années 80 je ne connaissais pas de librairies pour gérer les entiers de taille arbitraire. Et je ne l'avais pas fait en récursif, à l'époque je ne savais même pas que ça existait.

Pas encore tout écouté, mais c'est vraiment intéressant. Moi qui dit tout le temps qu'il n'y a pas de mutation génétique et que si un élève n'apprend pas, c'est à cause de sa paresse, je suis stupéfait de ce que j'entends de la part de spécialistes. Les dégats causés par les non-apprentissages , à cause des écrans qui  ne sollicitent que le cerveau reptilien et atrophie tout le reste (je résume avec mes propres mots ) seraient quasi irréparables !

D'ailleurs, certaines interventions d’atrophiés au début semùblent le confirmer : contre-sens total sur les propos de Stiegler , ils ne voyaient pas très bien qui était massacré, ils pensaient au jeu vidéo  (:lol:  ou    ? )

Merci Luigi de nous informer autant . Là je comprends pourquoi tu n'as pas le temps de te raser.


Important : le témoignage d'une intervenante sur Sopra consulting me semble intéressant. Cette boîte de réorganisation de sociétés et d'administration et de management , qui met en oeuvre l'ENT , et cherche à transformer le service public en "réponse à la clientèle avec "obligation de résultat" mérite à mon sens un fil séparé. C'était de la fiction, Big Brother ?

Lefteris a écrit:Important : le témoignage d'une intervenante  sur Sopra consulting me semble intéressant. Cette boîte de réorganisation de sociétés et d'administration et de management  , qui met en oeuvre l'ENT ,  et cherche à transformer le service public en   "réponse à la clientèle avec "obligation de résultat" mérite à mon sens un fil séparé. C'était de la fiction, Big Brother ?

Sur cette question : http://www.questionsdeclasses.org/?L-Espace-Numerique-de-Travail

Certains d'entre vous ont peut-être entendu parler de Béatrice Mabilon-Bonfils et François Durpaire, invités dans toutes les radios publiques en cette rentrée 2014 pour leur livre La Fin de l'école, un ouvrage dont l'indigence intellectuelle n'honore pas les PUF.

Plus intéressant. Sur la suggestion d'un collègue du forum, j'ai mené une petite investigation sur la page Wikipédia de l'un des auteurs : eh bien, on dirait que quelqu'un a pris en charge une petite wikipédicure.

"Wikipédicure - La "co-construction du savoir" par l'exemple"

C'te scud

Et en plus, je vous dispense d'acheter et de lire le livre ! :lol:

Faux : je m'étais auto-dispensé depuis un bout de temps

Luigi_B a écrit:

Lefteris a écrit:Important : le témoignage d'une intervenante  sur Sopra consulting me semble intéressant. Cette boîte de réorganisation de sociétés et d'administration et de management  , qui met en oeuvre l'ENT ,  et cherche à transformer le service public en   "réponse à la clientèle avec "obligation de résultat" mérite à mon sens un fil séparé. C'était de la fiction, Big Brother ?

Sur cette question : http://www.questionsdeclasses.org/?L-Espace-Numerique-de-Travail

Merci, je l'ai déjà transmis à un certain nombre de collègues. Rien qu'en allant sur le site de Sopra Consulting, je faisais  une analyse similaire (d'où ma remarque plus haut). Ne serait-ce que le langage, qui me faisait dresser les cheveux sur la tête

Finalement j'ai changé le titre de l'article : la pratique de la "wikipédicure" me semble promise à un grand avenir.

Petite pensée pour tous les collègues qui se réunissent pour repenser les programmes et le socle. Songez qu'il y a aussi la réforme de l'évaluation... mais quelque chose me dit que la Conférence atteindra bien son but : "Jury crashé".

Luigi_B a écrit:Petite pensée pour tous les collègues qui se réunissent pour repenser les programmes et le socle. Songez qu'il y a aussi la réforme de l'évaluation... mais quelque chose me dit que la Conférence atteindra bien son but : "Jury crashé".

Bien vu ! Je le dis d'autant plus volontiers que j'ai constaté la même chose… et même pire ! Communiqué à venir demain…

Je me suis contenté d'étudier la liste des professeurs du secondaire mais il faudrait effectivement tout creuser.

A noter qu'aujourd'hui le "Café pédagogique" se félicite ingénument du choix des professeurs : c'est tout dire !

François Jarraud a écrit:Plusieurs enseignants, comme Fabien Audy et Marie-Camille Coudert, sont bien connus des lecteurs du Café pédagogique.

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2014/10/15102014Article635489543756819856.aspx

Et le communiqué bien punchy du lapin qui ne veut pas devenir pâté de lapin : "Conférence sur l'évaluation : la mascarade"