Aujourd'hui, j'ai halluciné quand...

Collier de barbe, ça ne t'arrive jamais d'être choqué par un propos d'un élève? Vraiment jamais?

Collier de Barbe a écrit:Certes mais je trouve indécent que tu viennes reprocher à des élèves scolarisés en ZEP le droit de se réjouir d'un jour avoir un beau salaire.

On peut quand même regretter que les élèves concernés présentent cela comme leur unique motivation. Mais sans doute faut-il tenir pour une fatalité que des gens issus de zep n'aient d'autres considérations que matérielles et individualistes. Pour le coup, ce n'est sûrement pas stigmatisant, et ça le serait certainement d'attendre davantage.

Venu de zep ou pas, quelqu'un qui ne voit d'autre sens à sa formation que le salaire qu'elle lui promet manifeste une autre pauvreté que celle à laquelle il peut se réjouir d'échapper - et il n'y a pas de rapport aussi nécessaire que vous semblez le croire entre l'une et l'autre.

Collier de Barbe a écrit:Ecoute, relis ton premier post:
Tu dis que tu es choquée ("tu ne trouves pas les mots") parce que les élèves entrés à Sciences Po par la CEP disent aux lycéens que, grâce à l'IEP, ils toucheront de bons salaires.
Il me semble qu'un tel message peut se comprendre comme une stigmatisation (une de plus) des élèves de la CEP comme des gens avides et sans morale. D'ou ma réaction un brin irrité.
Voilà, et tant mieux si tu aides des élèves de la convention.

je n'ai pas dit "les élèves entrés à Sciences po par la CEP". j'ai évoqué un témoignage sur france inter avec des élèves qui témoignaient. Et, oui, leur témoignage m'a choquée. Et alors ?? est ce que j'ai affirmé que tous les élèves passant par la convention avaient ces motivations ? non.

Quant à la convention de mon bahut... : parmi les élèves que j'ai en cours et qui en font partie (je ne parle pas des autres, que je n'ai pas en cours), les seuls intéressés font parmi de classe moyenne à moyenne sup et pourraient à mon sens passer le concours sans le biais de la convention (étant donné le bagage socio culturel dont ils disposent). Alors tant mieux pour eux, mais bon. On peut questionner la question du périmétre de la convention. Même si je conçois le choix de ne pas discriminer selon les revenus des parents à l'intérieur même de la convention.

Hannibal a écrit:

Collier de Barbe a écrit:Certes mais je trouve indécent que tu viennes reprocher à des élèves scolarisés en ZEP le droit de se réjouir d'un jour avoir un beau salaire.

On peut quand même regretter que les élèves concernés présentent cela comme leur unique motivation. Mais sans doute faut-il tenir pour une fatalité que des gens issus de zep n'aient d'autres considérations que matérielles et individualistes. Pour le coup, ce n'est sûrement pas stigmatisant, et ça le serait certainement d'attendre davantage.

Venu de zep ou pas, quelqu'un qui ne voit d'autre sens à sa formation que le salaire qu'elle lui promet manifeste une autre pauvreté que celle à laquelle il peut se réjouir d'échapper - et il n'y a pas de rapport aussi nécessaire que vous semblez le croire entre l'une et l'autre.

voilà ce que je voulais dire.

Hannibal a écrit:On peut quand même regretter que les élèves concernés présentent cela comme leur unique motivation.

Sachant que si j'ai bien compris, cela reste à travers le prisme des media : un reportage a présenté la chose comme cela.
Cela ne veut pas dire que cela soit la motivation première et unique de tous les étudiants concernés.

holderfar a écrit:Collier de barbe, ça ne t'arrive jamais d'être choqué par un propos d'un élève? Vraiment jamais?

Tous les jours, tous les jours, bien sûr...

Je vais te raconter une anecdote amusante.
Une des fois où j'ai été invité à Sciences Po, on a rencontré un des premiers élèves sortis de l'IEP (il avait fait ses 5ans) après y être entré avec la CEP. Il était d'origine maghrébine. Il bossait déjà dans l'audit dans une grande firme de la Défense. Il en avait le costume et parlait tout comme les cadres supérieurs qu'il côtoyait chaque jour.
On s'est regardé, nous groupes de professeurs de banlieues, majoritairement d'histoire géo ou de SES, majoritairement mal fagotés (avouons-le !) majoritairement plutôt de gauche, et je me rappelle qu'avec une collègue on s'est dit sur le coup "Tout ça, pour ça?" On a travaillé à fabriquer un bon petit cadre supérieur de la finance.

Et puis, j'y ai re-réfléchi par la suite, et je me suis dit: "mais de quel droit je porte un tel jugement de valeur sur ce type?" Si c'est son projet de bosser dans la finance, tant mieux pour lui...
Notre tâche, c'est de multiplier pour nos élèves méritants les opportunités, après c'est à eux de faire leur choix.

Collier de Barbe a écrit:
Notre tâche, c'est de multiplier pour nos élèves méritants les opportunités, après c'est à eux de faire leur choix.

Oui. Et à partir du moment où ils font ce choix librement comme des gens responsables, on peut même envisager d'y trouver matière à critique. C'est moins méprisant que de les traiter en aliénés qui ne peuvent répondre ni de ce qu'ils disent ni de ce qu'ils font parce que des mécanismes sociologiques les conditionneraient de part en part, vous savez.

Soyons honnêtes. Aujourd'hui, la plupart des gosses qui choisissent une orientation le font en prenant le revenu comme critère essentiel.
Qu'ils envisagent d'être avocat, médecin, commercial, vendeur de voitures ou plombier, j'ai toujours entendu les élèves dire que le salaire était important.
Plus encore aujourd'hui que quand nous-mêmes étions élèves (j'ai 36 ans...).

On peut trouver ce critère choquant, penser que pour des filières comme médecine, droit ou Sciences Po, les étudiants ne sont poussés que par de nobles motivations... mais ce serait se mettre le doigt dans l'oeil. Les idéaux ont pris du plomb dans l'aile depuis belle lurette.

Aujourd'hui, et c'est bien normal vu le monde dans lequel ils vivent, quasiment tous nos élèves sont avides, et pas forcément de savoir...

Mais je les comprends.

@Hannibal
Je ne traite personne d'aliénés.
J'ai juste un peu de peine avec des gens comme Oiseau Phénix qui sont furax que des élèves (issus de milieu modeste, voire pauvre) puisse exprimer leur désirer de (très) bien gagner leur vie.
Qui est-on pour leur reprocher?

Je me pose une question, est-ce que nous (futurs) parents n'influons pas nous aussi et pas qu'un peu sur le choix de nos enfants en prenant en compte ce critère de rémunération...qui a son importance, non, je suis la seule à le penser ?

zouz a écrit:Je me pose une question, est-ce que nous (futurs) parents n'influons pas nous aussi et pas qu'un peu sur le choix de nos enfants en prenant en compte ce critère de rémunération...qui a son importance, non, je suis la seule à le penser ?

Je pense qu'on passe notre temps à bassiner nos élèves en leur disant que s'ils travaillent bien à l'école, ils auront un "bon métier et un bon salaire" (dit sur tous les tons, en gros), il ne faut pas s'étonner non plus.

J'ai été sensible à l’anecdote de CDB et aurais réagi pareil devant le jeune cadre de La Défense (tout ça pour ça ?), mais effectivement qui sommes-nous pour juger ?

Je me souviens d'un entretien d'évaluation avec une jeune décrocheuse et sa maman, il fallait absolument remplir des vœux dans Affelnet alors allons-y...
"Ah, je peux mettre tel et tel lycée, parce que dans ce métier on peut se faire plein de tunes."
Et la mère avait honte de sa fille dans mon bureau, et essayait de lui dire qu'il y avait d'autres motivations.
Je suis bien d'accord qu'il y a d'autres motivations, mais à ce moment-là de sa vie, c'est tout ce qui pouvait motiver cette élève décrocheuse pour la raccrocher, et quand on est en panne d'espérance, on se raccroche à ce qu'on peut.
Après, à nous d'essayer d'insuffler d'autres choses aussi, mais bon, ce n'est pas déshonorant non plus de chercher à bien gagner sa vie, notamment pour ceux qui veulent faire vivre une famille.
(Et ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, il y a d'autres critères aussi, qui me "parlent" davantage, mais qui ne parlent peut-être pas à tout le monde. Et c'est très bien comme ça, il faut de tout pour faire un monde...)

La pyramide de Maslow, ce serait hors-sujet sur une telle question, ou à votre avis, on est en plein dedans ?
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pyramide_des_besoins_de_Maslow

J'ai halluciné en voyant le nombre de post avec tout ou partie en masqué...
Ca prolifère en ce moment. C'est la nouvelle fonctionnalité à la mode ? non parce que si on veut dicuter en privé, moi ça me va, mais c'est antinomique avec un forum non ?

Collier de Barbe a écrit:@Hannibal
Je ne traite personne d'aliénés.
J'ai juste un peu de peine avec des gens comme Oiseau Phénix qui sont furax que des élèves (issus de milieu modeste, voire pauvre) puissent exprimer leur désirer de (très) bien gagner leur vie.
Qui est-on pour leur reprocher?

Nous sommes des citoyens et notre rôle est de bien rappeler que le rôle social ne se limite pas à un miroir salarial ou entrepreneurial. Que si l'on désire beaucoup de la Cité, il faut aussi être en mesure de lui apporter encore plus. Si nous aimons nos élèves, nous leur devons bien cela.

Gryphe a écrit:La pyramide de Maslow, ce serait hors-sujet sur une telle question, ou à votre avis, on est en plein dedans ?
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pyramide_des_besoins_de_Maslow

En plein de chez plein.
Et je soupçonne les rejetons actuels de vouloir aller directement à l'étage "estime de soi" (bah oui, on les cocoone bien à ce niveau là) avec tout le luxe et le confort qui va avec sans pour autant assurer les étages inférieurs. Manque de maturité sans doute, j'imagine (j'espère !) que ça viendra avec l'âge...

Il serait sans doute naïf de la nier, mais il faut être assez mesquin pour ne rien voir d'autre que la mesquinerie.
Je souhaite aux élèves de rencontrer de temps en temps un adulte qui sache leur faire voir autre chose du monde que sa laideur. Il reste, je crois, des choses à y admirer, pendant que les cyniques s'amusent à soupçonner partout la bassesse qui justifierait la leur.

Collier de barbe : qui seraient ces personnes, pour rester à l'abri de tout reproche quant à ce qu'elles disent ou font publiquement et librement ? Vous ne jugez jamais des actes et paroles d'autrui (j'aurais cru...) ? Vous refusez qu'on critique en bien ou en mal ce que vous dites ici ?

Scarabée, la citation m'est attribuée de manière erronée...
Sinon, je ne dis jamais aux élèves ou parents que c'est important pour trouver du travail plus tard, éventuellement, je leur dis qu'ils auront davantage le choix si leurs résultats sont satisfaisants...

@Hannibal: on se comprend mal. Vous avez parfaitement le droit de critiquer tant que vous voulez, ça s'appelle la discussion libre.

Je me limite à dire que moi, en tant qu'individu, je n'ai jamais manqué de rien, j'ai eu une enfance privilégiée et j'ai pu faire exactement ce que je voulais (de l'histoire).
Or je me dis que faire la morale à des jeunes (issus de familles immigrées le plus souvent, qui vivent dans des conditions souvent dures quand même, qui expérimentent ce que je n'ai jamais expérimenté, le manque, la pénurie) je peux pas venir faire le jésuite et leur interdire de dire "oui j'ai envie de gagner beaucoup d'argent".

ça n'est pas mon idéal dans l'existence. J'aurais pu faire comme pas mal de mes condisciples, aller dans une grande école de commerce (elles adorent les khâgneux) ou pire employer mon salaire de l'Ecole pour faire une grande école de commerce. Mais c'est l'histoire et l'enseignement qui m'intéresse.

Et ne vous inquiétez pas, je fais la morale à mes élèves, je les engueule quand ils veulent resquiller le RER, quand ils expriment des opinions homophobes/sexistes ou racistes et sur plein d'autres trucs...

Mais sur le fait de vouloir bien gagner leur vie, non.

zouz a écrit:Scarabée, la citation m'est attribuée de manière erronée...

C’est rétabli.

Perd-on sa vie à la gagner ? Vous avez 4 heures !

Gryphe a écrit:

Hannibal a écrit:On peut quand même regretter que les élèves concernés présentent cela comme leur unique motivation.

Sachant que si j'ai bien compris, cela reste à travers le prisme des media : un reportage a présenté la chose comme cela.
Cela ne veut pas dire que cela soit la motivation première et unique de tous les étudiants concernés.

J'ai aussi écouté l'émission et je n'ai pas perçu que l'unique motivation était l'argent. Le garçon qui relate ses deux années à Sciences Po dit " Mais faut savoir que quand t'es à Sciences Po et que tu ressors avec le diplôme en cinq ans, tu mets moins de six mois à avoir un boulot - là, il y a un long silence et il ajoute - et c'est super bien payé donc après faut voir ". Des rires se font entendre.

Il était invité dans son ancien lycée pour motiver les lycéens à s'engager, à travailler, à faire des choix, et il donne l'impression qu'en dernier argument il sort celui qui fera le plus réagir " l'argent ". Et il avait raison puisqu'il y a eu des rires et que le journaliste le fait remarquer.

Pour moi, la premier argument donné par ce garçon et qui a été gardé au montage est celui de la garantie de trouver un emploi. C'est mon interprétation à l'écoute de l'émission que l'on peut écouter sur France Inter ( Interception du dimanche 8 avril 2012 ). Les propos du garçon se situent à 29 minutes et 51 secondes

http://www.franceinter.fr/emission-interception-sciences-po-c-est-d-la-balle?&comments=votes

zouz a écrit:Sinon, je ne dis jamais aux élèves ou parents que c'est important pour trouver du travail plus tard

Et vous faites bien, parce que les élèves ont tout à gagner, y compris pour l'avenir, à se rendre compte qu'ils sont capables de trouver un intérêt intrinsèque à ce qu'ils font, et qu'ils ne sont pas des ânes qu'on mène où l'on veut avec une carotte.

autant pour moi, mais ce n'est pas la perception que j'en avais eue sur le moment. Il me semblait d'ailleurs qu'un autre témoignage m'avait frappée, mais je ne le retrouve pas

condorcet a écrit:Perd-on sa vie à la gagner ?

C'est un bon résumé de ma carrière dans l'EN.

condorcet a écrit:Perd-on sa vie à la gagner ? Vous avez 4 heures !

:lecteur:

.... quand je me suis rendu compte qu'on était de plus en plus de profs d'HGEC sur le forum

condorcet a écrit:Perd-on sa vie à la gagner ? Vous avez 4 heures !

Et quand vous aurez fini vous commenterez cette phrase de Voltaire : "Le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin."