- MufabGrand Maître
Corneille et Diderot...
Tu as des extraits pour mes Ce2 à me proposer ?
Tu as des extraits pour mes Ce2 à me proposer ?
- SapotilleEmpereur
Mufab a écrit:C'est bien sur Mars ?
Y'a des bibliothèques ?
Y'a des livres ?
Mufab !!!
- MufabGrand Maître
C'est qui Anaxagore ?
Un copain à Mareuil ? (Aucun des deux ne s'est présenté sur ce forum, d'ailleurs. Dispensés ? Sont-ce personnes connues ?)
J-L Delarue ?
Un copain à Mareuil ? (Aucun des deux ne s'est présenté sur ce forum, d'ailleurs. Dispensés ? Sont-ce personnes connues ?)
J-L Delarue ?
- ClarinetteGrand Maître
Muf' : inspire profondément, puis expire doucement par le nez !
- AnaxagoreGuide spirituel
C'est en rapport avec le fil?
Pour vous répondre Mufab, je n'ai pas les extraits en main, mais vous me donnez une bonne idée d'achat sur ce célèbre site de livres d'occasion.
Pour vous répondre Mufab, je n'ai pas les extraits en main, mais vous me donnez une bonne idée d'achat sur ce célèbre site de livres d'occasion.
- fugueNiveau 8
Anaxagore a écrit:C'est en rapport avec le fil?
Pour vous répondre Mufab, je n'ai pas les extraits en main, mais vous me donnez une bonne idée d'achat sur ce célèbre site de livres d'occasion.
Achat de quoi?
- MufabGrand Maître
Diderot et Corneille en Pléiade, sans doute.
Ça tombe bien, je me demandais ce que j'allais faire après le Buveur d'encre. Plein d'idées réalistes dans ce fil, c'est cool.
Ça tombe bien, je me demandais ce que j'allais faire après le Buveur d'encre. Plein d'idées réalistes dans ce fil, c'est cool.
- MufabGrand Maître
Anaxagore a écrit:Dans ce fil, il est question des textes que l'on devrait faire étudier à l'école n'est-ce pas?...et du choix de ces textes, non? Pour étudier un texte avec profit, ce dernier se doit d'être suffisamment riche. Il n'est pas question de querelles de personnes ici.
Ça devrait.
Mais relis le début, et vois comme on est passé très vite de discussions sur des textes à des attaques envers des personnes.
Et vois qui a opéré ce glissement.
Ensuite, tu reviendras faire la morale si tu veux, mais en t'adressant à qui de droit.
- MufabGrand Maître
Mufab a écrit:C'est très difficile de juger un livre sur de courts extraits.
C'est valable pour tout livre.
D'ailleurs on peut se livrer à l'exercice inverse : donnez-moi n'importe quel extrait qui vous agrée, et je descends en flèche son usage pédagogique.
Ça vous dit ?
- MufabGrand Maître
Sapotille a écrit:doublecasquette a écrit:Là, il y a deux courts extraits du Buveur d'Encre :
http://ienasse2.edres74.ac-grenoble.fr/spip.php?article400
Pour de la lecture plaisir, oui, c'est convaincant.
Ce qui signifie en creux que la lecture-plaisir n'a rien à faire à l'école : c'est ça ?
- MufabGrand Maître
Clarinette a écrit:Je n'aime pas beaucoup ce mélange de passé simple et de passé composé : exactement ce que j'interdis de faire à mes élèves.
Voilà le passage qui vaut cette remarque, je pense :
En bas se trouvait une petite salle ronde dont les parois étaient tapissées de livres. Des milliers de volumes se serraient les un contre les autre comme des petits soldats au garde-à-vous.
Etrange bibliothèque. Le garde-manger du monstre...
Quelques bougies éclairaient un cercueil en forme de stylo-plume, posé sur des trétaux. A l'interieur.. Eh bien, mon suspect ronflait.
Une couverture masquait sont corps. Seule la tête était visible, reposant sur un gros oreiller de satin. Sur sa peau de papier maché, des petites lettres semblaient incrustées comme des taches de rousseur. Je me suis approché pour mieux voir.
Brusquement, il s'est redressé et ses yeux se sont posé sur moi; fixes et injectés d'encre noire.
Mon sang se mit a bouilir. Je me suis senti tout à coup comme un enfant à la coque. Les vampires aiment-ils les mouillettes?
Clarinette, peux-tu développer l'idée que le passé composé et l'imparfait sont incompatibles ?
(Ici, le narrateur est l'enfant...)
- SapotilleEmpereur
Mufab a écrit:Sapotille a écrit:doublecasquette a écrit:Là, il y a deux courts extraits du Buveur d'Encre :
http://ienasse2.edres74.ac-grenoble.fr/spip.php?article400
Pour de la lecture plaisir, oui, c'est convaincant.
Ce qui signifie en creux que la lecture-plaisir n'a rien à faire à l'école : c'est ça ?
Mufab, je n'ai jamais, jamais dit cela !!!
Comment pourrait-on éveiller l'envie de lire sans le plaisir de lire ?
- MufabGrand Maître
Mais à quoi opposes-tu la lecture-plaisir ?
- SapotilleEmpereur
Mufab a écrit:Mais à quoi opposes-tu la lecture-plaisir ?
La lecture plaisir ne se trouve pas nécessairement dans la lecture facile !
- MufabGrand Maître
arcenciel a écrit:Juste un bon dosage des 2...
C'est quoi, la deuz' ?
- fugueNiveau 8
Mufab a écrit:Clarinette a écrit:Je n'aime pas beaucoup ce mélange de passé simple et de passé composé : exactement ce que j'interdis de faire à mes élèves.
Clarinette, peux-tu développer l'idée que le passé composé et l'imparfait sont incompatibles ?
(Ici, le narrateur est l'enfant...)
C'est vrai qu'il vaudrait mieux le passé simple à la place du passé composé.
- MufabGrand Maître
Sapotille a écrit:Mufab a écrit:Mais à quoi opposes-tu la lecture-plaisir ?
La lecture plaisir ne se trouve pas nécessairement dans la lecture facile !
Donc, en Ce2, le Buveur d'encre est une lecture "facile" ?
Qui ne nécessite aucun accompagnement, aucune explication de vocabulaire ?
Alors je raconte, en me fondant sur une expérience toute fraîche, et non sur des idées a priori fondées sur la lecture de quelques phrases.
Le chapitre 1 :
1) Difficultés de décodage rencontrées en lecture à voix haute :
"ravisent", lu "ravissent"
"invasion"
"quoi que ce soit"
"libraire", lu "librairie"
etc.
2) Difficultés en vocabulaire (expressions ayant nécessité une explication) :
"libraire"
maladie incurable"
"invasion"
"pickpoket"
"se ravisent"
"qui sait ?"
"le teint"
"ahuri"
"se livre à un curieux manège"
3) Difficultés de compréhension du sens :
- "De l'extérieur / à l'intérieur, je ressemble à ..." (puisque travail en ce moment sur le portrait)
- Passage sur les clients dans une librairie, que j'ai dû mimer.
- ensuite, certains enfants ont pensé que le père et le Buveur d'encre était une seule et même personne, car aimant tous les 2 les livres (l'un les "dévore", l'autre les "boit".)
4) Pas évident : basculement du réaliste au fantastique : à quel moment ?
Passages descriptifs : physique et moral.
- ClarinetteGrand Maître
Non, c'est l'utilisation du passé composé et du passé simple, qui ne me plaît pas. Je serine à mes élèves à longueur d'année qu'il faut soigneusement choisir son temps de narration et s'y tenir imperturbablement. Soit au présent, soit au passé. Et si c'est au passé, soit au PC, soit au PS. Mélanger les deux me paraît très maladroit.Mufab a écrit:Clarinette a écrit:Je n'aime pas beaucoup ce mélange de passé simple et de passé composé : exactement ce que j'interdis de faire à mes élèves.
Voilà le passage qui vaut cette remarque, je pense :
En bas se trouvait une petite salle ronde dont les parois étaient tapissées de livres. Des milliers de volumes se serraient les un contre les autre comme des petits soldats au garde-à-vous.
Etrange bibliothèque. Le garde-manger du monstre...
Quelques bougies éclairaient un cercueil en forme de stylo-plume, posé sur des trétaux. A l'interieur.. Eh bien, mon suspect ronflait.
Une couverture masquait sont corps. Seule la tête était visible, reposant sur un gros oreiller de satin. Sur sa peau de papier maché, des petites lettres semblaient incrustées comme des taches de rousseur. Je me suis approché pour mieux voir.
Brusquement, il s'est redressé et ses yeux se sont posé sur moi; fixes et injectés d'encre noire.
Mon sang se mit a bouilir. Je me suis senti tout à coup comme un enfant à la coque. Les vampires aiment-ils les mouillettes?
Clarinette, peux-tu développer l'idée que le passé composé et l'imparfait sont incompatibles ?
(Ici, le narrateur est l'enfant...)
Et en plus, mais c'est très personnel, je n'aime pas les récits à la première personne (tout le monde n'est pas Pagnol, hein...) parce que le langage s'en trouve souvent relâché.
- MufabGrand Maître
fugue a écrit:Mufab a écrit:Clarinette a écrit:Je n'aime pas beaucoup ce mélange de passé simple et de passé composé : exactement ce que j'interdis de faire à mes élèves.
Clarinette, peux-tu développer l'idée que le passé composé et l'imparfait sont incompatibles ?
(Ici, le narrateur est l'enfant...)
C'est vrai qu'il vaudrait mieux le passé simple à la place du passé composé.
En bas se trouvait une petite salle ronde dont les parois étaient tapissées de livres. Des milliers de volumes se serraient les un contre les autre comme des petits soldats au garde-à-vous.
Etrange bibliothèque. Le garde-manger du monstre...
Quelques bougies éclairaient un cercueil en forme de stylo-plume, posé sur des trétaux. A l'interieur.. Eh bien, mon suspect ronflait.
Une couverture masquait sont corps. Seule la tête était visible, reposant sur un gros oreiller de satin. Sur sa peau de papier maché, des petites lettres semblaient incrustées comme des taches de rousseur. Je me suis approché pour mieux voir.
Brusquement, il s'est redressé et ses yeux se sont posé sur moi; fixes et injectés d'encre noire.
Mon sang se mit a bouilir. Je me suis senti tout à coup comme un enfant à la coque. Les vampires aiment-ils les mouillettes?
Au passé simple :
En bas se trouvait une petite salle ronde dont les parois étaient tapissées de livres. Des milliers de volumes se serraient les un contre les autre comme des petits soldats au garde-à-vous.
Etrange bibliothèque. Le garde-manger du monstre...
Quelques bougies éclairaient un cercueil en forme de stylo-plume, posé sur des trétaux. A l'interieur.. Eh bien, mon suspect ronflait.
Une couverture masquait sont corps. Seule la tête était visible, reposant sur un gros oreiller de satin. Sur sa peau de papier maché, des petites lettres semblaient incrustées comme des taches de rousseur. Je m'approchai pour mieux voir.
Brusquement, il se redressa et ses yeux se posèrent sur moi; fixes et injectés d'encre noire.
Mon sang se mit a bouilir. Je me sentis tout à coup comme un enfant à la coque. Les vampires aiment-ils les mouillettes?
N'y aurait-il pas la volonté d'exprimer, par le passé composé, que l'événement passé se prolonge par des conséquences sur le présent de la narration ?
(Puisque l'enfant va attraper le virus, suite à cette visite.)
- ClarinetteGrand Maître
Quant à la place de la littérature de jeunesse, pour moi, c'est éventuellement en fond de classe, et encore, pas n'importe quoi non plus, mais pas en lecture "travail".
Déjà au CP, je me passais de littérature de jeunesse dès que je le pouvais (après avril). Nous lisions beaucoup de contes, des extraits du petit Prince...
Déjà au CP, je me passais de littérature de jeunesse dès que je le pouvais (après avril). Nous lisions beaucoup de contes, des extraits du petit Prince...
- MufabGrand Maître
Tu trouves ici le langage relâché ?Clarinette a écrit:Non, c'est l'utilisation du passé composé et du passé simple, qui ne me plaît pas. Je serine à mes élèves à longueur d'année qu'il faut soigneusement choisir son temps de narration et s'y tenir imperturbablement.Mufab a écrit:Clarinette a écrit:Je n'aime pas beaucoup ce mélange de passé simple et de passé composé : exactement ce que j'interdis de faire à mes élèves.
Voilà le passage qui vaut cette remarque, je pense :
En bas se trouvait une petite salle ronde dont les parois étaient tapissées de livres. Des milliers de volumes se serraient les un contre les autre comme des petits soldats au garde-à-vous.
Etrange bibliothèque. Le garde-manger du monstre...
Quelques bougies éclairaient un cercueil en forme de stylo-plume, posé sur des trétaux. A l'interieur.. Eh bien, mon suspect ronflait.
Une couverture masquait sont corps. Seule la tête était visible, reposant sur un gros oreiller de satin. Sur sa peau de papier maché, des petites lettres semblaient incrustées comme des taches de rousseur. Je me suis approché pour mieux voir.
Brusquement, il s'est redressé et ses yeux se sont posé sur moi; fixes et injectés d'encre noire.
Mon sang se mit a bouilir. Je me suis senti tout à coup comme un enfant à la coque. Les vampires aiment-ils les mouillettes?
Clarinette, peux-tu développer l'idée que le passé composé et l'imparfait sont incompatibles ?
(Ici, le narrateur est l'enfant...)
Aux élèves oui. Aux auteurs, ma foi...
Soit au présent, soit au passé. Et si c'est au passé, soit au PC, soit au PS. Mélanger les deux me paraît très maladroit.
Et en plus, mais c'est très personnel, je n'aime pas les récits à la première personne (tout le monde n'est pas Pagnol, hein...) parce que le langage s'en trouve souvent relâché.
- ClarinetteGrand Maître
Pour le passage cité, on peut toujours imaginer ce que l'on veut comme explication à l'utilisation des temps, mais je trouve cela maladroit. Ce n'est que mon avis, hein.
- MufabGrand Maître
Clarinette a écrit:Quant à la place de la littérature de jeunesse, pour moi, c'est éventuellement en fond de classe, et encore, pas n'importe quoi non plus, mais pas en lecture "travail".
Déjà au CP, je me passais de littérature de jeunesse dès que je le pouvais (après avril). Nous lisions beaucoup de contes, des extraits du petit Prince...
Au CP ?
Lesquels ?
- MufabGrand Maître
Du coup, je joue aussi.
(Bien sûr, j'adore ce livre. J'ai juste mis en relief quelques expressions que l'on peut trouver relâchées, en cherchant bien, et des exemples de ruptures temporelles. Sur ce dernier point, on est servi, quand même.)
Lorsque j’avais six ans j’ai vu, une fois, une magnifique image, dans un livre sur la forêt vierge qui s’appelait Histoires vécues. Ça représentait un serpent boa qui avalait un fauve. Voilà la copie du dessin.
On disait dans le livre : « Les serpents boas avalent leur proie tout entière, sans la mâcher. Ensuite ils ne peuvent plus bouger et ils dorment pendant les six mois de leur digestion ».
J’ai alors beaucoup réfléchi sur les aventures de la jungle et, à mon tour, j’ai réussi, avec un crayon de couleur, à tracer mon premier dessin. Mon dessin numéro 1. Il était comme ça :
J’ai montré mon chef-d’œuvre aux grandes personnes et je leur ai demandé si mon dessin leur faisait peur.
Elles m’ont répondu : « Pourquoi un chapeau ferait-il peur ? »
Mon dessin ne représentait pas un chapeau. Il représentait un serpent boa qui digérait un éléphant. J’ai alors dessiné l’intérieur du serpent boa, afin que les grandes personnes puissent comprendre. Elles ont toujours besoin d’explications. Mon dessin numéro 2 était comme ça :
Les grandes personnes m’ont conseillé de laisser de côté les dessins de serpents boas ouverts ou fermés, et de m’intéresser plutôt à la géographie, à l’histoire, au calcul et à la grammaire. C’est ainsi que j’ai abandonné, à l’âge de six ans, une magnifique carrière de peintre. J’avais été découragé par l’insuccès de mon dessin numéro 1 et de mon dessin numéro 2. Les grandes personnes ne comprennent jamais rien toutes seules, et c’est fatigant, pour les enfants, de toujours leur donner des explications…
J’ai donc dû choisir un autre métier et j’ai appris à piloter des avions. J’ai volé un peu partout dans le monde. Et la géographie, c’est exact, m’a beaucoup servi. Je savais reconnaître, du premier coup d’œil, la Chine de l’Arizona. C’est utile, si l’on s’est égaré pendant la nuit.
J’ai ainsi eu, au cours de ma vie, des tas de contacts avec des tas de gens sérieux. J’ai beaucoup vécu chez les grandes personnes. Je les ai vues de très près. Ça n’a pas trop amélioré mon opinion.
Quand j’en rencontrais une qui me paraissait un peu lucide, je faisais l’expérience sur elle de mon dessin n°1 que j’ai toujours conservé. Je voulais savoir si elle était vraiment compréhensive. Mais toujours elle me répondait : « C’est un chapeau. » Alors je ne lui parlais ni de serpents boas, ni de forêts vierges, ni d’étoiles. Je me mettais à sa portée. Je lui parlais de bridge, de golf, de politique et de cravates. Et la grande personne était bien contente de connaître un homme aussi raisonnable…
II
J’ai ainsi vécu seul, sans personne avec qui parler véritablement, jusqu’à une panne dans le désert du Sahara, il y a six ans. Quelque chose s’était cassé dans mon moteur. Et comme je n’avais avec moi ni mécanicien, ni passagers, je me préparai à essayer de réussir, tout seul, une réparation difficile. C’était pour moi une question de vie ou de mort. J’avais à peine de l’eau à boire pour huit jours.
Le premier soir je me suis donc endormi sur le sable à mille milles de toute terre habitée. J’étais bien plus isolé qu’un naufragé sur un radeau au milieu de l’océan. Alors vous imaginez ma surprise, au lever du jour, quand une drôle de petite voix m’a réveillé. Elle disait :…
« S’il vous plaît… dessine-moi un mouton !
— Hein !
— Dessine-moi un mouton… »
J’ai sauté sur mes pieds comme si j’avais été frappé par la foudre. J’ai bien frotté mes yeux. J’ai bien regardé. Et j’ai vu un petit bonhomme tout à fait extraordinaire qui me considérait gravement. Voilà le meilleur portrait que, plus tard, j’ai réussi à faire de lui.
Mais mon dessin, bien sûr, est beaucoup moins ravissant que le modèle. Ce n’est pas de ma faute. J’avais été découragé dans ma carrière de peintre par les grandes personnes, à l’âge de six ans, et je n’avais rien appris à dessiner, sauf les boas fermés et les boas ouverts.
Je regardai donc cette apparition avec des yeux tout ronds d’étonnement. N’oubliez pas que je me trouvais à mille milles de toute région habitée. Or mon petit bonhomme ne me semblait ni égaré, ni mort de fatigue, ni mort de faim, ni mort de soif, ni mort de peur. Il n’avait en rien l’apparence d’un enfant perdu au milieu du désert, à mille milles de toute région habitée. Quand je réussis enfin à parler, je lui dis :
« Mais qu’est-ce que tu fais là ? »
Et il me répéta alors, tout doucement, comme une chose très sérieuse :
« S’il vous plaît… dessine-moi un mouton… »
Quand le mystère est trop impressionnant, on n’ose pas désobéir. Aussi absurde que cela me semblât à mille milles de tous les endroits habités et en danger de mort, je sortis de ma poche une feuille de papier et un stylographe. Mais je me rappelai alors que j’avais surtout étudié la géographie, l’histoire, le calcul et la grammaire et je dis au petit bonhomme (avec un peu de mauvaise humeur) que je ne savais pas dessiner. Il me répondit :
« Ça ne fait rien. Dessine-moi un mouton. »
Comme je n’avais jamais dessiné un mouton je refis, pour lui, l’un des deux seuls dessins dont j’étais capable. Celui du boa fermé. Et je fus stupéfait d’entendre le petit bonhomme me répondre :
« Non ! Non ! Je ne veux pas d’un éléphant dans un boa. Un boa c’est très dangereux, et un éléphant c’est très encombrant. Chez moi c’est tout petit. J’ai besoin d’un mouton. Dessine-moi un mouton. »
Alors j’ai dessiné.
Il regarda attentivement, puis :
« Non ! Celui-là est déjà très malade. Fais-en un autre. »
Je dessinai :
Mon ami sourit gentiment, avec indulgence :
« Tu vois bien… ce n’est pas un mouton, c’est un bélier. Il a des cornes… »
Je refis donc encore mon dessin :
Mais il fut refusé, comme les précédents :
« Celui-là est trop vieux. Je veux un mouton qui vive longtemps. »
Alors, faute de patience, comme j’avais hâte de commencer le démontage de mon moteur, je griffonnai ce dessin-ci :
Et je lançai :
« Ça c’est la caisse. Le mouton que tu veux est dedans. »
Mais je fus bien surpris de voir s’illuminer le visage de mon jeune juge :
« C’est tout à fait comme ça que je le voulais ! Crois-tu qu’il faille beaucoup d’herbe à ce mouton ?
— Pourquoi ?
— Parce que chez moi c’est tout petit…
— Ça suffira sûrement. Je t’ai donné un tout petit mouton. »
Il pencha la tête vers le dessin :
« Pas si petit que ça… Tiens ! Il s’est endormi… »
Et c’est ainsi que je fis la connaissance du petit prince.
(Bien sûr, j'adore ce livre. J'ai juste mis en relief quelques expressions que l'on peut trouver relâchées, en cherchant bien, et des exemples de ruptures temporelles. Sur ce dernier point, on est servi, quand même.)
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