- marjoDoyen
Je corrige les évaluations communes, et je commence à saturer à force de lire les termes de l'analyse de texte employés n'importe comment, notamment le verbe "décrire" à toutes les sauces ("la métaphore décrit la tristesse du narrateur"). Les élèves ne comprennent pas et n'utilisent pas correctement des termes simples tels que "désigner", "insister sur" (à la place ils utilisent "appuyer sur"). Ils écrivent "pendant le texte" ou "durant le texte" . Et je passe sur les confusions entre des termes grammaticaux essentiels tels que "conjuguer" et "s'accorder avec". Je rectifie au quotidien en classe et dans les copies aussi évidemment, mais j'ai l'impression que ça ne rentre pas. Quelqu'un a-t-il trouvé une façon efficace d'apprendre aux élèves à utiliser ce lexique correctement ? L'année dernière, j'avais fait une ou deux séances d'AP sur le sujet, mais beaucoup trop tôt dans l'année, et les élèves n'ont jamais su réinvestir ce qu'on avait fait. Je m'étais appuyée sur la partie "entraînement au brevet" du manuel Terre des Lettres. Mais peut-être est-ce illusoire de vouloir que les élèves de 3e emploient correctement ce vocabulaire, vu qu'ils ont déjà grand mal à comprendre un texte (?)
- EnnaNiveau 10
Non, je trouve que c'est une excellente idée et qu'on ne commence jamais trop tôt. Je vais faire de même mais
pour mes Spe anglais en 1ère. Je corrige des synthèses qui révèlent leur manque criant de bases dans les deux langues( version médiocre) et leur maladresse mais la bonne volonté est là. Il faut répéter, manipuler, faire apprendre par coeur aussi : quelle autre méthode?
pour mes Spe anglais en 1ère. Je corrige des synthèses qui révèlent leur manque criant de bases dans les deux langues( version médiocre) et leur maladresse mais la bonne volonté est là. Il faut répéter, manipuler, faire apprendre par coeur aussi : quelle autre méthode?
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Enna
- IphigénieProphète
J'ai l'impression que ce n'est pas le vocabulaire de l'analyse qui leur manque, mais le vocabulaire tout court, ce qui empêche l'analyse...
- EsméraldaGrand sage
Même constat. Une collègue m'a dit hier qu'elle faisait de l'initiation au commentaire composé en 3ème, j'ai cru tomber de ma chaise. Sommes-nous censés attendre cela en 3ème ?? Déjà qu'ils comprennent le texte et arrivent à rédiger des réponses un peu construite, ce serait bien. D'ailleurs, parle-t-on encore de commentaire composé en 2de ?
- NLM76Grand Maître
Difficile.marjo a écrit:Je corrige les évaluations communes, et je commence à saturer à force de lire les termes de l'analyse de texte employés n'importe comment, notamment le verbe "décrire" à toutes les sauces ("la métaphore décrit la tristesse du narrateur"). Les élèves ne comprennent pas et n'utilisent pas correctement des termes simples tels que "désigner", "insister sur" (à la place ils utilisent "appuyer sur"). Ils écrivent "pendant le texte" ou "durant le texte" . Et je passe sur les confusions entre des termes grammaticaux essentiels tels que "conjuguer" et "s'accorder avec". Je rectifie au quotidien en classe et dans les copies aussi évidemment, mais j'ai l'impression que ça ne rentre pas. Quelqu'un a-t-il trouvé une façon efficace d'apprendre aux élèves à utiliser ce lexique correctement ? L'année dernière, j'avais fait une ou deux séances d'AP sur le sujet, mais beaucoup trop tôt dans l'année, et les élèves n'ont jamais su réinvestir ce qu'on avait fait. Je m'étais appuyée sur la partie "entraînement au brevet" du manuel Terre des Lettres. Mais peut-être est-ce illusoire de vouloir que les élèves de 3e emploient correctement ce vocabulaire, vu qu'ils ont déjà grand mal à comprendre un texte (?)
J'ai le sentiment que ce problème de forme dissimule en fait des problèmes de fond majeurs.
- D'abord, beaucoup ne comprennent pas les textes qu'ils commentent. Donc ils essayent de remplir du papier avec des termes qui leur paraissent suffisamment pompeux.
- Ensuite, ceux qui comprennent les textes peinent à comprendre qu'on puisse attendre d'eux autre chose que de la paraphrase. Ils se disent qu'ils vont pouvoir satisfaire le professeur en faisant ce qu'ils arrivent à faire, et en l'agrémentant de jolis mots pompeux.
- Ajoutons aussi cette affaire importante : comme ils ne maîtrisent aucunement les notions grammaticales élémentaires (au sens où elles devraient être acquises à l'école élémentaire : indicatif, passé simple, radical, démonstratif, proposition, etc.), ils n'ont pas les moyens d'une analyse précise. Et, sous-jacent à tout cela : la faiblesse du vocabulaire général, l'absence de véritables expériences
- Enfin, et c'est là que je vais être le plus scandaleux, j'ai idée que beaucoup d'enseignants de lettres s'imaginent avoir commenté un texte, précisément de cette façon : en agrémentant la paraphrase aplatissante d'un vocabulaire technique.
Comme Iphigénie, pas trop de solution à te proposer, sinon renoncer à la prétention de la rédaction d'analyses au collège, pour assumer de demander de la paraphrase, ou des réflexions à partir du texte, ou des imitations, ou des prolongements.
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- marjoDoyen
J'ai écrit "analyse" dans mon titre, mais peut-être aurais-je dû mettre "compréhension". Je ne fais pas d'initiation au commentaire composé en 3e, ce n'est pas mon travail. Là, je parle simplement de répondre à des questions type-brevet qui sont surtout des questions de compréhension, au sens large ("expliquez la figure de style").
Pour le moment, je n'ai matériellement pas le temps de traiter cette question en classe, mais si je la garde pour la fin de l'année, ça risque de ne pas être très efficace non plus au sens où ils n'auront pas le temps d'assimiler ce qu'on aura fait pour l'examen et que ça se perdra dans les limbes des vacances d'été d'ici l'entrée au lycée.
HS : pour ma part, j’exècre profondément l'attitude qui consiste à orner son analyse littéraire de termes pompeux et à donner à fond dans le pur jargon technique. J'ai un ami qui enseigne en CPGE et qui est spécialiste de cela. J'ai déjà relu pour lui des articles et je vomis complètement ce style et cette approche. Ce n'est pas "juste" pour répondre à des exigences du concours au niveau prépa, c'est vraiment pour faire élitiste dans le mauvais sens du terme.
Pour le moment, je n'ai matériellement pas le temps de traiter cette question en classe, mais si je la garde pour la fin de l'année, ça risque de ne pas être très efficace non plus au sens où ils n'auront pas le temps d'assimiler ce qu'on aura fait pour l'examen et que ça se perdra dans les limbes des vacances d'été d'ici l'entrée au lycée.
HS : pour ma part, j’exècre profondément l'attitude qui consiste à orner son analyse littéraire de termes pompeux et à donner à fond dans le pur jargon technique. J'ai un ami qui enseigne en CPGE et qui est spécialiste de cela. J'ai déjà relu pour lui des articles et je vomis complètement ce style et cette approche. Ce n'est pas "juste" pour répondre à des exigences du concours au niveau prépa, c'est vraiment pour faire élitiste dans le mauvais sens du terme.
- NLM76Grand Maître
Je me doutais bien qu'on serait d'accord là-dessus, @marjo... Mais les questions de "compréhension" que tu évoques me paraissent singer l'analyse, puisqu'il s'agit, par exemple de métaphore. Sur la métaphore, ou on accepte qu'on est dans la paraphrase, et on se demande quel est le sens de la métaphore. Ou on est capable d'aller plus loin, et on explique pourquoi cette métaphore-là est particulièrement intéressante dans ce cas-là. Mais on ne prétend pas faire la deuxième chose en se contentant de faire la première.
Autrement dit, pour mieux comprendre : quelle question induisait de parler de métaphore ?
Autrement dit, pour mieux comprendre : quelle question induisait de parler de métaphore ?
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- AsarteLilithBon génie
Je trouve ton analyse, NLM, tout à fait juste, de même que le constat que dresse Marjo. Mais j'ai au final une grosse question, qui me pourrit mes constructions de cours: que nous demande-t-on, en fait, au collège ?
Car compréhension, n'est pas analyse littéraire il me semble : comprendre ce que dit Créon à Antigone me permet de comprendre le mouvement de la scène, et comment il le dit, mais ce n'est pas une analyse littéraire au sens lycée, non ? Or on nous demande d'analyser des textes, mais qu'est ce que cela veut dire concrètement, notamment avec les collégiens actuels ?
Car compréhension, n'est pas analyse littéraire il me semble : comprendre ce que dit Créon à Antigone me permet de comprendre le mouvement de la scène, et comment il le dit, mais ce n'est pas une analyse littéraire au sens lycée, non ? Or on nous demande d'analyser des textes, mais qu'est ce que cela veut dire concrètement, notamment avec les collégiens actuels ?
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- marjoDoyen
AsarteLilith a écrit:Je trouve ton analyse, NLM, tout à fait juste, de même que le constat que dresse Marjo. Mais j'ai au final une grosse question, qui me pourrit mes constructions de cours: que nous demande-t-on, en fait, au collège ?
Car compréhension, n'est pas analyse littéraire il me semble : comprendre ce que dit Créon à Antigone me permet de comprendre le mouvement de la scène, et comment il le dit, mais ce n'est pas une analyse littéraire au sens lycée, non ? Or on nous demande d'analyser des textes, mais qu'est ce que cela veut dire concrètement, notamment avec les collégiens actuels ?
On a discuté de ça sur ce forum il y a quelques mois, et un néo avait employé une formule que je trouve très juste : inutile de faire du "mini-lycée" au collège. Mais ça ne répond pas à ta question, que je me pose souvent. Il y a deux ans, nous avons rencontré les professeurs de lettres du lycée de secteur, qui nous ont dit à cette occasion que ce qu'elles attendaient, c'étaient des élèves qui sachent écrire correctement (orthographe, grammaire) et qui maîtrisent la construction d'un paragraphe soit de "compréhension/analyse", soit un paragraphe argumentatif. Elles nous ont dit clairement qu'elles n'avaient pas besoin qu'ils arrivent en maîtrisant toutes les figures de style, tous les registres et qu'à la rigueur, la question de la "culture littéraire" était secondaire (ce avec quoi je ne suis pas d'accord). Leurs remarques m'ont aidée à revoir mes priorités en 3e.
Ta question m'inspire une réflexion, que j'ai déjà eue plusieurs fois mais qui est HS ici : est-ce que ce qu'on demande aux élèves de 1ère pour les EAF n'est pas complètement surréaliste ? Je n'ai pas enseigné longtemps au lycée, mais j'ai pu constater à quel point les exercices proposés étaient hors de portée de la plupart des élèves. On ne faisait que du bachotage, aussi bien pour la préparation à l'oral que pour la préparation à l'écrit. Je ne vois pas bien l'intérêt de demander un commentaire construit de type universitaire sur un texte inconnu quand les 3/4 des candidats ne font que de la paraphrase et que les seuls procédés d'écriture qu'ils sont capables de trouver tout seuls sont les champs lexicaux, les comparaisons, métaphores et personnifications. A mon sens, on ferait mieux de revoir les exigences de l'épreuve un peu à la baisse et d'attendre des candidats qu'ils maîtrisent réellement l'exercice. (Je sens que je vais me faire tirer dessus à boulets rouges...)
- AsarteLilithBon génie
Mais justement, si les miens arrivent déjà a me sortir un sujet de réflexion correctement écrit ( langue correcte, structure intro- paragraphes - conclusion) et quelque chose qui ressemble à argument développé + exemple développé, je mets 14-15 ! Et ça me semble assez faible, vu qu'on fait analyse et réflexion en classe !
Je n'ai pas regardé les exigences de l'eau, mais déjà, celles des Io du collège me semblent déjà peu réalistes quand je vois chez moi que déjà, être à l'école pose problème.
Je n'ai pas regardé les exigences de l'eau, mais déjà, celles des Io du collège me semblent déjà peu réalistes quand je vois chez moi que déjà, être à l'école pose problème.
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- TangledingGrand Maître
Ca correspond à l'objectif que j'assigne à la discipline en collège, si ce n'est que de mon point de vue il ne faut pas attendre la 3e, cela se travaille dès la 6e.Il y a deux ans, nous avons rencontré les professeurs de lettres du lycée de secteur, qui nous ont dit à cette occasion que ce qu'elles attendaient, c'étaient des élèves qui sachent écrire correctement (orthographe, grammaire) et qui maîtrisent la construction d'un paragraphe soit de "compréhension/analyse", soit un paragraphe argumentatif. Elles nous ont dit clairement qu'elles n'avaient pas besoin qu'ils arrivent en maîtrisant toutes les figures de style, tous les registres et qu'à la rigueur, la question de la "culture littéraire" était secondaire (ce avec quoi je ne suis pas d'accord).
Est-ce que cela revient à faire du collège un mini lycée ?
Je dirais que c'est faire du collège la base pour que les élèves s'en sortent au lycée en français. Ça me semble très raisonnable.
Pas besoin de connaître 3000 figures de style, on peut faire une excellente analyse en connaissant bien une petite vingtaine de figures de style, le plus important est de savoir les analyser intelligemment.
L'histoire littéraire par contre me semble une nécessité dès le collège. Mais les programmes 2016 n'y aident pas.
Cela dit, franchement, les très bons élèves de collège sont tout à fait aptes à réaliser d'excellentes analyses, y compris avant la 3e. Et les élèves moyens qui s'accrochent peuvent réaliser des analyses cohérentes et bien rédigées avec suffisamment de pratique.
La question est bien de savoir ce que l'on demande aux élèves : connaître la définition de 100 figures de style ? Ou comme l'écrit justement @nlm76 : "aller plus loin, et on explique pourquoi cette métaphore-là est particulièrement intéressante dans ce cas-là"
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"Never complain, just fight."
- Plutôt que de se battre pour des miettes et des contraintes:
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- NLM76Grand Maître
Pas convaincu par ta proposition, @Tangleding. En réalité nos positions ne sont pas très éloignées, mais nous sommes quand même de part et d'autre d'une assez grosse rivière.
D'une part, ta vingtaine de figures de style à connaître, à mon avis, c'est le maximum qu'on devrait atteindre à la fin du lycée. Cela n'interdit pas de les approcher au collège; mais ça ne saurait être l'objectif principal, je pense.
Surtout, la question, c'est celle de l'ordre des choses. Je vais livrer une anecdote qui ne prouve rien, mais qui à mon sens peut faire réfléchir. Cette anecdote, que j'ai vécue hier, la plupart d'entre vous l'avez vécue d'une façon ou d'une autre assez souvent dans votre carrière.
Nous étions en séance de révision en vue d'un oral blanc la semaine prochaine. J'aide une élève à reprendre l'étude du "Pont Mirabeau" ; elle était assez désespérée, me disant ne pas savoir par quel bout prendre son travail. Pour le contexte, c'est une élève assez sérieuse, mais qui cherche à travailler en évitant au maximum la lecture qui est pour elle une véritable épreuve : elle n'arrive pas à "visualiser" ce que disent les mots, que ce soit dans un roman ou dans un poème.
Nous reprenons donc le problème que pose "Le pont Mirabeau". Bon bien sûr, ça parle du temps qui passe, des amours qui passent; mais ça en parle d'une belle façon, d'une façon qui sort de l'ordinaire, pourquoi ? Elle me dit des banalités, des platitudes sur la première strophe ; j'insiste. Oui mais pourquoi c'est beau ? Et là elle reprend le refrain et me le dit en s'accompagnant d'un mouvement de la main qui accompagne le rythme des deux heptasyllabes scandés par les quatre courtes propositions. Cette analyse, évidemment, elle ne la fait pas ; mais il a ce mouvement de la main. Il y a aussi l'idée que "c'est joli parce que ça rime". Bon; je vous fasse la façon dont je lui tire les vers du nez pour lui montrer que la rime est ici particulière, avec l'assonance de 7 -e- / -eu- (sonnE l'hEUrE / jE dEmEUrE), particulièrement douce, puis la présence des quatre courtes propositions. Elle est très contente à la fin d'avoir compris ce qui se passait, et qu'il fallait chercher "Le pourquoi du comment".
Quelle analyse j'en fais ? D'abord et avant tout qu'il est essentiel d'éduquer la sensibilité. Et comment sa sensibilité avait-elle été éduquée ? Parce que voilà cinq mois, je leur ai fait apprendre par cœur et réciter "Le pont Mirabeau". Depuis cinq mois, le poème lui a trotté dans la tête quoiqu'elle n'ait sans doute pas entendu grand-chose de mon explication en début d'année.
Ensuite, il y a la question des rimes. Pourquoi sa première analyse (c'est joli parce que ça rime) était-elle si faible ? Je pense que c'est parce qu'elle n'avait pas appris suffisamment de poèmes auparavant. En effet, il n'est pas idiot de s'émerveiller devant le fait qu'un poème rime quand on n'en connaît par coeur que deux ou trois. Quand on a appris par coeur vraiment six ou sept poèmes versifiés, qu'on s'est essayé à en écrire deux ou trois, on se rend compte que versifier est à la fois un vrai travail, et en même temps quelque chose que tout un chacun peut faire. Quand on a récité en veillant à l'expressivité cinq ou six poèmes, on commence à se rendre compte plus précisément de l'importance des sonorités. Il est ensuite beaucoup plus facile de remarquer qu'une telle assonance a quelque chose de particulier, et qu'il n'est pas impossible qu'elle soit en partie à la source de l'impression de musicalité très marquée. En tout cas, même si on ne le voit pas par soi-même, on peut entendre ce que dit le professeur quand il le montre. Quand ce travail d'éducation de la sensibilité n'a pas été fait, eh bien le travail d'analyse paraît aussi fumeux qu'oiseux, quand bien même on serait à même de le comprendre. Souvent, ceux qui le comprennent intellectuellement, sans le comprendre sensiblement sont ensuite prêts à des analyses formelles vaines, à la liste de figures de style sans queue ni tête.
Mais cette question des rimes évidemment est aussi assez technique; il faut retenir ce qu'est exactement une rime. Il y a aussi l'intérêt de savoir que l'-e final de vers de la rime féminine, en poésie classique, se prononce, contrairement à la légende urbaine. Il faut avoir compris de façon fine ce qu'est une voyelle, en réussissant à articuler voyelle orale et voyelle graphique, avoir retenu et compris la règle des -e- atones toujours prononcés sauf avant une autre voyelle. Cela encore se fait essentiellement par une éducation à la sensibilité, qui passe par une certaine technicité de la lecture expressive.
Alors évidemment, la notion d'assonance est bien pratique; il faut l'introduire à un moment ou à un autre. Sans doute au cours du collège. Mais, priorité : faire apprendre par coeur et réciter des poèmes, en faisant travailler la diction. Il faut en faire écrire. Et tout cela prend du temps, beaucoup de temps. Alors, on a le droit de fournir des outils d'analyse en passant, c'est excellent. Mais si on n'a pas eu le temps au cours du collège, ce n'est pas grave. La priorité est ailleurs.
D'une part, ta vingtaine de figures de style à connaître, à mon avis, c'est le maximum qu'on devrait atteindre à la fin du lycée. Cela n'interdit pas de les approcher au collège; mais ça ne saurait être l'objectif principal, je pense.
Surtout, la question, c'est celle de l'ordre des choses. Je vais livrer une anecdote qui ne prouve rien, mais qui à mon sens peut faire réfléchir. Cette anecdote, que j'ai vécue hier, la plupart d'entre vous l'avez vécue d'une façon ou d'une autre assez souvent dans votre carrière.
Nous étions en séance de révision en vue d'un oral blanc la semaine prochaine. J'aide une élève à reprendre l'étude du "Pont Mirabeau" ; elle était assez désespérée, me disant ne pas savoir par quel bout prendre son travail. Pour le contexte, c'est une élève assez sérieuse, mais qui cherche à travailler en évitant au maximum la lecture qui est pour elle une véritable épreuve : elle n'arrive pas à "visualiser" ce que disent les mots, que ce soit dans un roman ou dans un poème.
Nous reprenons donc le problème que pose "Le pont Mirabeau". Bon bien sûr, ça parle du temps qui passe, des amours qui passent; mais ça en parle d'une belle façon, d'une façon qui sort de l'ordinaire, pourquoi ? Elle me dit des banalités, des platitudes sur la première strophe ; j'insiste. Oui mais pourquoi c'est beau ? Et là elle reprend le refrain et me le dit en s'accompagnant d'un mouvement de la main qui accompagne le rythme des deux heptasyllabes scandés par les quatre courtes propositions. Cette analyse, évidemment, elle ne la fait pas ; mais il a ce mouvement de la main. Il y a aussi l'idée que "c'est joli parce que ça rime". Bon; je vous fasse la façon dont je lui tire les vers du nez pour lui montrer que la rime est ici particulière, avec l'assonance de 7 -e- / -eu- (sonnE l'hEUrE / jE dEmEUrE), particulièrement douce, puis la présence des quatre courtes propositions. Elle est très contente à la fin d'avoir compris ce qui se passait, et qu'il fallait chercher "Le pourquoi du comment".
Quelle analyse j'en fais ? D'abord et avant tout qu'il est essentiel d'éduquer la sensibilité. Et comment sa sensibilité avait-elle été éduquée ? Parce que voilà cinq mois, je leur ai fait apprendre par cœur et réciter "Le pont Mirabeau". Depuis cinq mois, le poème lui a trotté dans la tête quoiqu'elle n'ait sans doute pas entendu grand-chose de mon explication en début d'année.
Ensuite, il y a la question des rimes. Pourquoi sa première analyse (c'est joli parce que ça rime) était-elle si faible ? Je pense que c'est parce qu'elle n'avait pas appris suffisamment de poèmes auparavant. En effet, il n'est pas idiot de s'émerveiller devant le fait qu'un poème rime quand on n'en connaît par coeur que deux ou trois. Quand on a appris par coeur vraiment six ou sept poèmes versifiés, qu'on s'est essayé à en écrire deux ou trois, on se rend compte que versifier est à la fois un vrai travail, et en même temps quelque chose que tout un chacun peut faire. Quand on a récité en veillant à l'expressivité cinq ou six poèmes, on commence à se rendre compte plus précisément de l'importance des sonorités. Il est ensuite beaucoup plus facile de remarquer qu'une telle assonance a quelque chose de particulier, et qu'il n'est pas impossible qu'elle soit en partie à la source de l'impression de musicalité très marquée. En tout cas, même si on ne le voit pas par soi-même, on peut entendre ce que dit le professeur quand il le montre. Quand ce travail d'éducation de la sensibilité n'a pas été fait, eh bien le travail d'analyse paraît aussi fumeux qu'oiseux, quand bien même on serait à même de le comprendre. Souvent, ceux qui le comprennent intellectuellement, sans le comprendre sensiblement sont ensuite prêts à des analyses formelles vaines, à la liste de figures de style sans queue ni tête.
Mais cette question des rimes évidemment est aussi assez technique; il faut retenir ce qu'est exactement une rime. Il y a aussi l'intérêt de savoir que l'-e final de vers de la rime féminine, en poésie classique, se prononce, contrairement à la légende urbaine. Il faut avoir compris de façon fine ce qu'est une voyelle, en réussissant à articuler voyelle orale et voyelle graphique, avoir retenu et compris la règle des -e- atones toujours prononcés sauf avant une autre voyelle. Cela encore se fait essentiellement par une éducation à la sensibilité, qui passe par une certaine technicité de la lecture expressive.
Alors évidemment, la notion d'assonance est bien pratique; il faut l'introduire à un moment ou à un autre. Sans doute au cours du collège. Mais, priorité : faire apprendre par coeur et réciter des poèmes, en faisant travailler la diction. Il faut en faire écrire. Et tout cela prend du temps, beaucoup de temps. Alors, on a le droit de fournir des outils d'analyse en passant, c'est excellent. Mais si on n'a pas eu le temps au cours du collège, ce n'est pas grave. La priorité est ailleurs.
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Sites du grip :
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- TangledingGrand Maître
En collège je me contente en 6e et 5e d'attendre la maîtrise d'une petite dizaine de figures de style ou notions :
1) énumération/gradation
2) comparaison/métaphore/personnification
3) anaphore
4) hyperbole
5) antithèse
6) allitération/assonance
7) stichomythie, tirade, monologue, didascalie
Ensuite en passant on peut et on fait très souvent un sort à des trouvailles poétiques plus chiadées.
Mais surtout on ne s'intéresse jamais à une figure de style sans la faire parler en contexte pour faire parler toute l'épaisseur du texte.
Et bien sûr en général les élèves sentent sans bien savoir exprimer. L'expérience que tu relates ne me surprend pas du tout. C'est le quotidien d'un professeur de français en collège, je pense.
On travaillait en 6e (en lecture suivie uniquement) sur les métamorphoses d'Ovide dans l'abrégé des ateliers acte sud (+ de longs extraits picorés dans la traduction de Lafaye).
Une élève intervient pour dire que "ça ne se fait pas, Ovide se compare à un dieu". C'est la périphrase "dieux, auteurs de ces métamorphoses" qui a induit un peu abusivement ce commentaire, mais de fait l'élève a été sensible (y compris en raison de ses propres croyances manifestement) à l'ambition démiurgique d'Ovide...
Bien entendu les élèves y avaient été se sensibilisés lors de l'étude de la fresque de la création d'Adam avec la glorification de la main de Dieu pour représenter l'esprit insufflé à la créature.
S'entraîner à analyser, les textes, les images, c'est l'objectif de la partie littérature du cours de français en collège à mon sens. Je ne leur demande pas de réaliser un commentaire, même abrégé, mais de comprendre en profondeur ce qu'ils lisent en s'intéressant réellement à la façon dont c'est écrit, ce qui implique de prendre du temps, de la hauteur, mais aussi de rentrer dans le détail, de se confronter réellement au tissu vivant du texte.
1) énumération/gradation
2) comparaison/métaphore/personnification
3) anaphore
4) hyperbole
5) antithèse
6) allitération/assonance
7) stichomythie, tirade, monologue, didascalie
Ensuite en passant on peut et on fait très souvent un sort à des trouvailles poétiques plus chiadées.
Mais surtout on ne s'intéresse jamais à une figure de style sans la faire parler en contexte pour faire parler toute l'épaisseur du texte.
Et bien sûr en général les élèves sentent sans bien savoir exprimer. L'expérience que tu relates ne me surprend pas du tout. C'est le quotidien d'un professeur de français en collège, je pense.
On travaillait en 6e (en lecture suivie uniquement) sur les métamorphoses d'Ovide dans l'abrégé des ateliers acte sud (+ de longs extraits picorés dans la traduction de Lafaye).
Une élève intervient pour dire que "ça ne se fait pas, Ovide se compare à un dieu". C'est la périphrase "dieux, auteurs de ces métamorphoses" qui a induit un peu abusivement ce commentaire, mais de fait l'élève a été sensible (y compris en raison de ses propres croyances manifestement) à l'ambition démiurgique d'Ovide...
Bien entendu les élèves y avaient été se sensibilisés lors de l'étude de la fresque de la création d'Adam avec la glorification de la main de Dieu pour représenter l'esprit insufflé à la créature.
S'entraîner à analyser, les textes, les images, c'est l'objectif de la partie littérature du cours de français en collège à mon sens. Je ne leur demande pas de réaliser un commentaire, même abrégé, mais de comprendre en profondeur ce qu'ils lisent en s'intéressant réellement à la façon dont c'est écrit, ce qui implique de prendre du temps, de la hauteur, mais aussi de rentrer dans le détail, de se confronter réellement au tissu vivant du texte.
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- NLM76Grand Maître
Dans ton collège, cette sensibilité, c'est peut-être le quotidien. Mais ce que crois constater, dans mon lycée, c'est d'abord l'insensibilité.
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Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- TangledingGrand Maître
Je dirais qu'en collège la sensibilité est le quotidien, pas spécifiquement dans mon collège. Une des raisons pour lesquelles je reste en collège malgré le poids insupportable de la gestion de classe et de la discipline. Aussi on m'attribue depuis plusieurs années des 6e et 5e.
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"Never complain, just fight."
- Plutôt que de se battre pour des miettes et des contraintes:
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- DesolationRowEmpereur
Je peux me tromper, mais je pense qu’on peut faire une excellente analyse littéraire en connaissant moins d’une dizaine de figures de style. En tout cas, dans mes analyses à moi, si j’en utilise plus de cinq c’est qu’un moustique m’a piqué.
- TangledingGrand Maître
Tu connais moins de 5 figures de style ? Ou tu décides, tout en les connaissant et les reconnaissant dans le texte étudié, de ne pas les nommer ?
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- NLM76Grand Maître
Ecoute, je viens de faire deux explications sur Manon Lescaut, et je crois que j'ai plus ou moins évoqué une antithèse, et encore était-ce pour rassurer les élèves. Dans ces textes, s'ils cherchaient des figures de style, ils en étaient pour leurs frais.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- *Ombre*Grand sage
Personnellement, j'en ai oublié beaucoup, des figures de style, depuis l'époque du concours. Mais je ne cherche même pas à les retrouver. On se passe fort bien de l'adynaton et de la tapinose (même si celle-ci m'a toujours trop amusée pour que je l'oublie). Sans aller jusque là, si un élève a vu que les hésitations de Marianne trahissaient quelque émoi, il a vu l'essentiel, et écrire le mot aposiopèse ne rendra pas son propos plus intelligent.
Le plus important, c'est de sentir les émotions produites par le texte et de comprendre comment elles naissent.
Tu me diras que cela n'empêche pas de nommer avec exactitude les procédés utilisés à cette fin.
Mais justement, concernant les élèves que j'ai en face de moi tous les jours, je n'en suis pas si sûre.
Mes élèves ressemblent à ceux de NLM. Ils arrivent au collège en maîtrisant souvent mal la lecture. Beaucoup d'entre eux décrivent ce que dit NLM : quand ils lisent, ils ne voient rien, il n'y a aucune représentation mentale. Le texte provoque chez eux une telle sidération que, même lorsqu'ils comprennent, ils sont peu disponibles pour les émotions de ce texte, ou ne se font pas confiance, tout simplement. Dès lors, les figures de style et les champs lexicaux deviennent pour eux une bouée de sauvetage à laquelle ils s'accrochent désespérément (pour les plus scolaires. Les autres ont laissé tombé depuis longtemps et meublent avec un mélange savamment dosé de paraphrase et de charabia). La course aux figures de style est précisément ce qui leur épargne l'effort de remâcher le texte, de le goûter, le sentir.
Il me semble que l'essentiel de nos efforts devrait au contraire porter sur la saveur du texte, donc en premier lieu sa compréhension, puis l'attention à tout ce qui s'en dégage en terme de sensations.
Je suis souvent frappée par le fait que certains élèves en difficulté ont parfois des fulgurances sur un texte, parce qu'ils ont senti quelque chose, mais ils renoncent à le formuler parce que (outre qu'ils n'ont pas toujours les mots pour le faire) ils sont persuadés que ce n'est pas assez savant, pas digne d'être énoncé.
Être lecteur, c'est, dans l'ordre, comprendre, sentir (j'établis cet ordre parce que pour sentir, il faut comprendre, mais évidemment c'est simultané), et seulement bien loin derrière analyser. On a trop négligé les deux premiers points dans la formation du lecteur, ce qui donne trop souvent un formalisme dont on perçoit mal l'intérêt.
Le plus important, c'est de sentir les émotions produites par le texte et de comprendre comment elles naissent.
Tu me diras que cela n'empêche pas de nommer avec exactitude les procédés utilisés à cette fin.
Mais justement, concernant les élèves que j'ai en face de moi tous les jours, je n'en suis pas si sûre.
Mes élèves ressemblent à ceux de NLM. Ils arrivent au collège en maîtrisant souvent mal la lecture. Beaucoup d'entre eux décrivent ce que dit NLM : quand ils lisent, ils ne voient rien, il n'y a aucune représentation mentale. Le texte provoque chez eux une telle sidération que, même lorsqu'ils comprennent, ils sont peu disponibles pour les émotions de ce texte, ou ne se font pas confiance, tout simplement. Dès lors, les figures de style et les champs lexicaux deviennent pour eux une bouée de sauvetage à laquelle ils s'accrochent désespérément (pour les plus scolaires. Les autres ont laissé tombé depuis longtemps et meublent avec un mélange savamment dosé de paraphrase et de charabia). La course aux figures de style est précisément ce qui leur épargne l'effort de remâcher le texte, de le goûter, le sentir.
Il me semble que l'essentiel de nos efforts devrait au contraire porter sur la saveur du texte, donc en premier lieu sa compréhension, puis l'attention à tout ce qui s'en dégage en terme de sensations.
Je suis souvent frappée par le fait que certains élèves en difficulté ont parfois des fulgurances sur un texte, parce qu'ils ont senti quelque chose, mais ils renoncent à le formuler parce que (outre qu'ils n'ont pas toujours les mots pour le faire) ils sont persuadés que ce n'est pas assez savant, pas digne d'être énoncé.
Être lecteur, c'est, dans l'ordre, comprendre, sentir (j'établis cet ordre parce que pour sentir, il faut comprendre, mais évidemment c'est simultané), et seulement bien loin derrière analyser. On a trop négligé les deux premiers points dans la formation du lecteur, ce qui donne trop souvent un formalisme dont on perçoit mal l'intérêt.
- TangledingGrand Maître
En fait je me fiche du vocabulaire technique en soi, il ne m'intéresse que dans la mesure où il est utilisé intelligemment pour exprimer le plus clairement et le plus simplement possible la richesse de sens du texte.
Au brevet on ne demande jamais de nommer la figure de style d'ailleurs, juste de l'expliquer et d'analyser son intérêt (interprétatif).
Bref c'est un simple outil d'analyse, à condition de s'en servir correctement. Ce n'est ni bien ni mal en soi.
D'accord sur la nécessité de comprendre et sentir. Mais j'observe que le développement des capacités d'analyse enrichit la capacité de sentir.
Évidemment que quand un élève ne comprend rien à ce qu'il lit il n'est pas question de lui demander d'analyser ce qu'il ne comprend pas.
Ce que je récuse c'est l'idée répandue qui oppose l'analyse à la compréhension ou à l'émotion. L'analyse doit permettre de renforcer la compréhension/l'émotion.
Au brevet on ne demande jamais de nommer la figure de style d'ailleurs, juste de l'expliquer et d'analyser son intérêt (interprétatif).
Bref c'est un simple outil d'analyse, à condition de s'en servir correctement. Ce n'est ni bien ni mal en soi.
D'accord sur la nécessité de comprendre et sentir. Mais j'observe que le développement des capacités d'analyse enrichit la capacité de sentir.
Évidemment que quand un élève ne comprend rien à ce qu'il lit il n'est pas question de lui demander d'analyser ce qu'il ne comprend pas.
Ce que je récuse c'est l'idée répandue qui oppose l'analyse à la compréhension ou à l'émotion. L'analyse doit permettre de renforcer la compréhension/l'émotion.
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- PoméeNiveau 9
Très beau message @*Ombre*, c'est tout à fait ça.
- DesolationRowEmpereur
Tangleding a écrit:Tu connais moins de 5 figures de style ? Ou tu décides, tout en les connaissant et les reconnaissant dans le texte étudié, de ne pas les nommer ?
Si je cherche vraiment, je dois en connaître pas mal, la faute à mes études, mais en général elles ne me servent à rien. Je viens de finir d'écrire un gros volume qui consiste, en gros, uniquement en des explications de texte, et (je n'ai pas vérifié), je dois utiliser métaphore / comparaison, oxymore, chiasme, allitération et assonance, sans doute énumération. C'est tout. Le reste m'est tout à fait inutile.
Bon, parfois mon ignorance trouve ses limites. J'ai commenté avec des étudiants une page de Virgile, ce vendredi, et j'ai piteusement confondu hendiadyn et hypallage j'ai donc fait un mea culpa, en me disant que ça m'apprendrait à vouloir utiliser des termes techniques avec ma mémoire défaillante.
- IphigénieProphète
Par ma foi, il y a plus de quarante ans que je dis des tapinoses sans que j’en susse rien, et je vous suis, Ombre, le plus obligé du monde de m’avoir appris cela.
- TangledingGrand Maître
Eh bien grosso modo tu "utilises" les procédés usuels que je demande à mes 6e/5e de maîtriser. Et ça me semble très bien, j'ai aussi rarement besoin de beaucoup plus. Et elleux non plus.
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- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
*Ombre* a écrit:Personnellement, j'en ai oublié beaucoup, des figures de style, depuis l'époque du concours. Mais je ne cherche même pas à les retrouver. On se passe fort bien de l'adynaton et de la tapinose (même si celle-ci m'a toujours trop amusée pour que je l'oublie).
J'ai retenu l'épanorthose grâce à son nom fabuleux.
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