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NLM76
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Qu'est-ce exactement qu'un bénéfice (ecclésiastique) au XVIIIe siècle Empty Qu'est-ce exactement qu'un bénéfice (ecclésiastique) au XVIIIe siècle

par NLM76 06/11/22, 11:22 am
Je revois ce mot en relisant Manon Lescaut. Et c'est une affaire qui m'a toujours paru trouble. "Faire obtenir un bénéfice..." En somme, ce que j'ai compris, c'est qu'il s'agit d'un privilège exorbitant. Les nobles peuvent se faire inscrire sur une liste par l'autorité (laquelle ?): ils ne fichent absolument rien, et on leur file de l'argent en échange d'un travail nul. Simplement un lobbying suffisant pour être inscrit sur cette liste. En somme, il s'agit d'emplois fictifs à la Pénélope Fillon. Est-ce que j'ai bon ? Ou est-ce qu'il y a quand même un semblant de donnant-donnant ?

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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
Daphné
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Demi-dieu

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par Daphné 06/11/22, 11:34 am
Tu trouveras la réponse détaillée sur Wikipédia.
Marie Laetitia
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par Marie Laetitia 06/11/22, 11:56 am
NLM76 a écrit:Je revois ce mot en relisant Manon Lescaut. Et c'est une affaire qui m'a toujours paru trouble. "Faire obtenir un bénéfice..." En somme, ce que j'ai compris, c'est qu'il s'agit d'un privilège exorbitant. Les nobles peuvent se faire inscrire sur une liste par l'autorité (laquelle ?): ils ne fichent absolument rien, et on leur file de l'argent en échange d'un travail nul. Simplement un lobbying suffisant pour être inscrit sur cette liste. En somme, il s'agit d'emplois fictifs à la Pénélope Fillon. Est-ce que j'ai bon ? Ou est-ce qu'il y a quand même un semblant de donnant-donnant ?
Qu'est-ce exactement qu'un bénéfice (ecclésiastique) au XVIIIe siècle 3110333567
Spoiler:

Un bénéfice ecclésiastique, c'est un revenu attaché à une charge ecclésiastique et tiré des biens d'Église (dîmes, seigneuries, domaines fonciers, rentes). Il assure à son détenteur des moyens d'existence, en principe, en échange d'une fonction essentielle dans la société traditionnelle médiévale et moderne, le service de Dieu et donc le service spirituel des hommes.

Donc NON, un bénéfice, ce n'est pas un privilège.

Et puis d'abord, il faut bien comprendre une chose, le "privilège", anciennement, cela correspond à des droits particuliers, attachés à des devoirs particuliers (cela signifie "loi particulière" en latin). TOUT LE MONDE EST PRIVILÉGIÉ DANS LA SOCIÉTÉ médiévale ou moderne. C'est un système socio-juridique où les individus ont tous des privilèges en échange d'un "service" rendu à la société. Même les vagabonds ont des privilèges. Sisi. Il FAUT lire les pages que Roland Mousnier a consacrées au sujet par exemple dans sa merveille Histoire des Institutions modernes.
ET PUIS, il FAUT lire, quand on veut attaquer la littérature du XVIIIe siècle, l'introduction de René Rémond à son Introduction à l'histoire de notre temps. Où il explique de manière merveilleusement claire et brève que le système social se bloque au XVIIIe siècle, à cause de la "réaction nobiliaire" (qui cherche à se protéger de la pauvreté en accaparant charges et revenus). Et à partir du moment où le système n'est plus équilibré, bam, la Révolution arrive. Qui est faite par et pour la bourgeoisie, privée précisément de revenus et de charges depuis moins d'un siècle.

Donc, depuis des siècles mais peut-être plus au XVIIIe siècle, on en arrive à la situation où des individus peu scrupuleux utilisent des bénéfices ecclésiastiques pour vivre confortablement sans service religieux effectif. Mais ce n'est pas bien vu de la population, naturellement, qui voit des vicaires et d'autres hommes d'église occuper la réalité de la charge avec très peu de revenu (pour une cure, celui qui assure la réalité du service est réduit à la "portion congrue", l'expression vient de là).

Le texte de Rémond, je le fais lire à mes 4e pour leur expliquer la Révolution. Je peux te le passer. Mais Mousnier, je ne l'ai pas, hélas, il faut le consulter en BU, je cours toujours après la belle édition de mes rêves et ces imbéciles aux PUF ont arrêté de l'imprimer.

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Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)


Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...


Et on ne dit pas "voir(e) même" mais "voire" ou "même".
Taillevent
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par Taillevent 06/11/22, 12:30 pm
On peut quand même y voir un privilège à cause d'un usage : le fait qu'un bénéfice n'implique pas forcément d'exercer réellement la charge à laquelle il est attaché. Dans nombre de cas, le titulaire du bénéfice se contente de payer (plus ou moins bien) un remplaçant qui exerce effectivement la fonction.
NLM76
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Grand Maître

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par NLM76 06/11/22, 01:36 pm
Tu sais ce qu'ils te disent les littéraires ?
Ils te disent merci pour ces intéressantes explications !
Donc, en somme, le privilège au départ, assez légitime, puisqu'il s'agit d'une véritable fonction dans la société, devient le privilège qu'abhorrent les révolutionnaires, et le mot prend le sens péjoratif qu'il a en général aujourd'hui.
Est-ce qu'en 1735, on a déjà cette tendance aux privilèges exorbitants ? C'est important pour Manon Lescaut, dont il me semble que le mépris de classe est un des ressorts essentiels. Il y a d'ailleurs aussi la question du statut de l'abbé Prévost lui-même.

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par Taillevent 06/11/22, 01:46 pm
Il a existé des sinécures (des bénéfices sans charge réelle) depuis le Moyen Âge. Néanmoins, ça semble devenir beaucoup plus un sujet de discussion vers la fin de l'époque moderne. Est-ce parce que ça se multiplie ou parce que la perception change, je ne saurais dire. Ce qui est en tout cas certain, on le voit dans beaucoup de textes, c'est que ceux qui en bénéficient n'y voient aucun problème (ben tiens !) mais que c'est un fréquent sujet d'attaque.
Marie Laetitia
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par Marie Laetitia 06/11/22, 02:30 pm
NLM76 a écrit:Tu sais ce qu'ils te disent les littéraires ?
Ils te disent merci pour ces intéressantes explications !
Donc, en somme, le privilège au départ, assez légitime, puisqu'il s'agit d'une véritable fonction dans la société, devient le privilège qu'abhorrent les révolutionnaires, et le mot prend le sens péjoratif qu'il a en général aujourd'hui.
Est-ce qu'en 1735, on a déjà cette tendance aux privilèges exorbitants ? C'est important pour Manon Lescaut, dont il me semble que le mépris de classe est un des ressorts essentiels. Il y a d'ailleurs aussi la question du statut de l'abbé Prévost lui-même.

En fait, la transformation du mot se produit au XVIIIe siècle. Les philosophes des Lumières, de ce que je sais, n'y sont pas étrangers du tout (raison pour laquelle il est fréquent qu'en lettres, vous fassiez l'erreur). C'est comme pour le glissement aristocrates/nobles...
En 1735, oui, déjà, on dénonce les privilèges de certains... Même si on en n'est pas encore à la sublime tirade de Figaro...

Non mais, envoie-moi ton mail en mp et je file le petit texte de Rémond, tu comprendras tout...

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par NLM76 06/11/22, 02:38 pm
OK. J'attends le texte de Rémond ! Mais en somme, on ne fait pas erreur quand on parle du XVIIIe siècle ? Surtout qu'en fait l'édition de Manon Lescaut que je connais n'est pas de 1735, mais de 1753.

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Iphigénie
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par Iphigénie 06/11/22, 03:21 pm
La Bruyere a un peu deja amorcé la chose, non- voire les moralistes dans leur ensemble?

'(V) Il y a même des stupides, et j’ose dire des imbéciles, qui se placent en de beaux postes, et qui savent mourir dans l’opulence, sans qu’on les doive soupçonner en nulle manière d’y avoir contribué de leur travail ou de la moindre industrie : quelqu’un les a conduits à la source d’un fleuve, ou bien le hasard seul les y a fait rencontrer ; on leur a dit : « Voulez-vous de l’eau ? puisez » ; et ils ont puisé.' ( DES BIENS DE FORTUNE)


Dernière édition par Iphigénie le 06/11/22, 03:36 pm, édité 1 fois
Gallia
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par Gallia 06/11/22, 03:33 pm
Bonjour.

Je suis la discussion avec intérêt et serais intéressée par le texte dont tu parles Marie Laetitia s'il te plaît.

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On nous apprend à désapprendre.
Marie Laetitia
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par Marie Laetitia 06/11/22, 04:00 pm
Non mais bon, autant que je mette le texte ici, de toute façon, ça tient en deux pages et demi du bouquin de poche, de mémoire, le copyright devrait être sauf.

R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution

« En dépit des distinctions tranchées dans les ordres, la société française du XVIe ou du XVIIe siècle gardait une assez grande mobilité sociale. Il n'était pas impossible à des gens doués ou fortunés de passer d'un ordre à l'autre. La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges. C'est le jour où elle se voit enfermée dans la situation inférieure qui est la sienne, que commencent à naître des aspirations proprement révolutionnaires.

La bourgeoisie se heurte alors à ce qu'on appelle la réaction nobiliaire. Réaction de défense d'un ordre qui sait ses positions menacées, voit sa fortune diminuer, et qui cherche désespérément à conserver sa prééminence traditionnelle, à préserver, parfois même à restaurer, un ordre traditionnel qui lui était avantageux. Ainsi les Parlements exigent désormais, pour acheter une charge, au moins quatre quartiers de noblesse. En 1781, dans l'armée, un règlement militaire réserve l'accès au grade d'officier à ceux qui appartiennent à la noblesse : les éléments du tiers sont confinés aux grades de sous-officiers. Tout espoir promotion est interdit.

Ces dispositions juridiques sont renforcées par les comportements spontanés. Ce n'est pas en vertu d'un texte, c'est par une réaction collective que le haut clergé se ferme totalement aux éléments originaires du tiers. Situation nouvelle : au XVIIe siècle, la plupart des prélats étaient d'origine bourgeoise ou même populaire ; à la veille de la Révolution, l'aristocratie de naissance accapare évêchés et riches abbayes.

De même pour l'exercice du pouvoir politique et l'entourage du souverain. Louis XIV s'était fait une règle de prendre pour ministres et conseillers des bourgeois ; à la fin de l'Ancien Régime, la plupart des ministres, voire des intendants, appartiennent à la noblesse. Ainsi l'aristocratie de naissance tend-elle à se réserver tout à la fois les honneurs et les avantages. Cette réaction qui lèse indirectement les intérêts de la bourgeoisie et heurte ainsi son désir de considération, est à l'origine du vif mécontentement anti-nobiliaire que la bourgeoisie manifestera aux États-généraux et dans les premières années de la Révolution.

Possible que j'ai aménagé le texte, pour le mettre grossièrement à la portée d'un 4e (en travaillant ensemble le doc pour s'assurer de sa bonne compréhension), faudrait que je reprenne mon exemplaire, ce soir.

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Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)


Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...


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Marie Laetitia
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par Marie Laetitia 06/11/22, 04:03 pm
(c'est bien pour ça que la société moderne, finalement, fonctionne bien, jusqu'au XVIIIe siècle. Quand les paysans, les nu-pieds, gauthiers, croquants, Tards-venus, pressés par les impôts, se révoltent au XVIIe siècle, ils ne demandent pas la liberté. Jamais de la vie. Ils demandent la restauration de l'ordre ancien, des privilèges de chacun. C'est radicalement différent!)

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Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...


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Camille B
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par Camille B 06/11/22, 04:12 pm
Marie Laetitia a écrit:(c'est bien pour ça que la société moderne, finalement, fonctionne bien, jusqu'au XVIIIe siècle. Quand les paysans, les nu-pieds, gauthiers, croquants, Tards-venus, pressés par les impôts, se révoltent au XVIIe siècle, ils ne demandent pas la liberté. Jamais de la vie. Ils demandent la restauration de l'ordre ancien, des privilèges de chacun. C'est radicalement différent!)

Oui c'est ce qui sous-tend même plusieurs épisodes "pré-révolutionnaires" comme la journée des Tuiles à Grenoble. Prélude à la Révolution ou fronde parlementaire et populaire pour un retour à l'ordre ancien ? Il y a de quoi débattre
sookie
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par sookie 06/11/22, 04:19 pm
Marie Laetitia a écrit:Non mais bon, autant que je mette le texte ici, de toute façon, ça tient en deux pages et demi du bouquin de poche, de mémoire, le copyright devrait être sauf.

R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution

« En dépit des distinctions tranchées dans les ordres, la société française du XVIe ou du XVIIe siècle gardait une assez grande mobilité sociale. Il n'était pas impossible à des gens doués ou fortunés de passer d'un ordre à l'autre. La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges. C'est le jour où elle se voit enfermée dans la situation inférieure qui est la sienne, que commencent à naître des aspirations proprement révolutionnaires.

La bourgeoisie se heurte alors à ce qu'on appelle la réaction nobiliaire. Réaction de défense d'un ordre qui sait ses positions menacées, voit sa fortune diminuer, et qui cherche désespérément à conserver sa prééminence traditionnelle, à préserver, parfois même à restaurer, un ordre traditionnel qui lui était avantageux. Ainsi les Parlements exigent désormais, pour acheter une charge, au moins quatre quartiers de noblesse. En 1781, dans l'armée, un règlement militaire réserve l'accès au grade d'officier à ceux qui appartiennent à la noblesse : les éléments du tiers sont confinés aux grades de sous-officiers. Tout espoir promotion est interdit.

Ces dispositions juridiques sont renforcées par les comportements spontanés. Ce n'est pas en vertu d'un texte, c'est par une réaction collective que le haut clergé se ferme totalement aux éléments originaires du tiers. Situation nouvelle : au XVIIe siècle, la plupart des prélats étaient d'origine bourgeoise ou même populaire ; à la veille de la Révolution, l'aristocratie de naissance accapare évêchés et riches abbayes.

De même pour l'exercice du pouvoir politique et l'entourage du souverain. Louis XIV s'était fait une règle de prendre pour ministres et conseillers des bourgeois ; à la fin de l'Ancien Régime, la plupart des ministres, voire des intendants, appartiennent à la noblesse. Ainsi l'aristocratie de naissance tend-elle à se réserver tout à la fois les honneurs et les avantages. Cette réaction qui lèse indirectement les intérêts de la bourgeoisie et heurte ainsi son désir de considération, est à l'origine du vif mécontentement anti-nobiliaire que la bourgeoisie manifestera aux États-généraux et dans les premières années de la Révolution.

Possible que j'ai aménagé le texte, pour le mettre grossièrement à la portée d'un 4e (en travaillant ensemble le doc pour s'assurer de sa bonne compréhension), faudrait que je reprenne mon exemplaire, ce soir.

Tu fais étudier ce texte à des 4e ? tu es dans quel type de collège ? Ce serait impossible pour moi, à moins d'y passer 3 heures .

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par NLM76 06/11/22, 04:42 pm
[quote="Marie Laetitia"]
R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution
« La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges.
Bah euh quand même, René Rémond parle bien ici des privilèges comme d'avantages assez indus, plutôt que comme des fonctions qui ont une charge et un bénéfice. Ce que je parviens à bien concevoir, c'est le privilège-fonction, avec charge et bénéfice. Quand le privilège ne correspond à aucune charge, cela me paraît être intenable à terme : l'institution n'est plus alors une véritable institution, c'est-à-dire quelque chose qui participe à faire tenir debout une société (instituere = in + statuo), mais un fil de trame qui a perdu son fil de chaîne dans une société qui se défait.

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par Taillevent 06/11/22, 04:52 pm
NLM76 a écrit:
Marie Laetitia a écrit:
R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution
« La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges.
Bah euh quand même, René Rémond parle bien ici des privilèges comme d'avantages assez indus, plutôt que comme des fonctions qui ont une charge et un bénéfice. Ce que je parviens à bien concevoir, c'est le privilège-fonction, avec charge et bénéfice. Quand le privilège ne correspond à aucune charge, cela me paraît être intenable à terme : l'institution n'est plus alors une véritable institution, c'est-à-dire quelque chose qui participe à faire tenir debout une société (instituere = in + statuo), mais un fil de trame qui a perdu son fil de chaîne dans une société qui se défait.
Il me semble aussi. De plus, s'il ne faut effectivement pas confondre bénéfice et privilège, on doit quand même observer que la critique des bénéfices et de ce qui est donné en retour n'est pas complètement nouvelle au XVIIIe siècle. Les critiques contre le clergé qui seraient indigne de sa fonction sont souvent très voisines et elles existent au moins depuis la Renaissance.
Gallia
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par Gallia 06/11/22, 05:33 pm
Merci Smile

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par Marie Laetitia 06/11/22, 06:11 pm
NLM76 a écrit:
Marie Laetitia a écrit:
R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution
« La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges.
Bah euh quand même, René Rémond parle bien ici des privilèges comme d'avantages assez indus, plutôt que comme des fonctions qui ont une charge et un bénéfice. Ce que je parviens à bien concevoir, c'est le privilège-fonction, avec charge et bénéfice. Quand le privilège ne correspond à aucune charge, cela me paraît être intenable à terme : l'institution n'est plus alors une véritable institution, c'est-à-dire quelque chose qui participe à faire tenir debout une société (instituere = in + statuo), mais un fil de trame qui a perdu son fil de chaîne dans une société qui se défait.


René Rémond était un vilain contemporanéiste. Et puis au XVIIIe siècle, la confusion est commune mais il est important de la clarifier. Lis Mousnier si tu doutes, homme de peu de foi! Razz

NLM a écrit:Ce que je parviens à bien concevoir, c'est le privilège-fonction, avec charge et bénéfice.
avec fonction et avantage, histoire de ne pas mélanger les notions. Une charge = un office dans le vocabulaire moderne. Un bénéfice = une charge ecclésiastique
Un paysan a une fonction et des avantages, comme un artisan de Paris, comme un bourgeois (habitant d'une ville) de Reims, comme un petit nobliau de Bretagne, comme un Condé, comme un curé de Sologne, comme un archevêque de Strasbourg. Ce ne sont simplement pas les mêmes.


Dernière édition par Marie Laetitia le 07/11/22, 10:22 am, édité 1 fois

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 Qu'est-ce exactement qu'un bénéfice (ecclésiastique) au XVIIIe siècle Dlb10
Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)


Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...


Et on ne dit pas "voir(e) même" mais "voire" ou "même".
Marie Laetitia
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par Marie Laetitia 06/11/22, 06:23 pm
Taillevent a écrit:Il a existé des sinécures (des bénéfices sans charge réelle) depuis le Moyen Âge. Néanmoins, ça semble devenir beaucoup plus un sujet de discussion vers la fin de l'époque moderne. Est-ce parce que ça se multiplie ou parce que la perception change, je ne saurais dire. Ce qui est en tout cas certain, on le voit dans beaucoup de textes, c'est que ceux qui en bénéficient n'y voient aucun problème (ben tiens !) mais que c'est un fréquent sujet d'attaque.
La perception change, c'est certain. Déjà on voit poindre dans la critique de l'Église catholique dès la fin du XVe siècle non pas tant une dégradation de l'état moral et spirituel du clergé qu'une plus grande exigence envers le clergé. Et ça concerne notamment la question des charges ecclésiastiques. Tiens, d'ailleurs, dans les textes laissés par les paysans révoltés du XVIIe siècle, en finir avec ceux qui détournent l'argent des bénéfices au détriment des curés, ça, ça fait partie des scandales dénoncés.
NLM: j'oubliais une chose. C'est depuis le concordat de Bologne en 1516 qu'il revient au roi de nommer aux bénéfices ecclésiastiques majeurs du royaume (évêchés et abbayes), ce qui devrait t'aider aussi à comprendre ton texte.

Iphigénie a écrit:La Bruyere a un peu deja amorcé la chose, non- voire les moralistes dans leur ensemble?

'(V) Il y a même des stupides, et j’ose dire des imbéciles, qui se placent en de beaux postes, et qui savent mourir dans l’opulence, sans qu’on les doive soupçonner en nulle manière d’y avoir contribué de leur travail ou de la moindre industrie : quelqu’un les a conduits à la source d’un fleuve, ou bien le hasard seul les y a fait rencontrer ; on leur a dit : « Voulez-vous de l’eau ? puisez » ; et ils ont puisé.' ( DES BIENS DE FORTUNE)
Oh oui! Je ne connais pas à fond La Fontaine, mais on doit aussi pouvoir trouver des allusions chez lui.
(j'adore La Bruyère)

sookie a écrit:
Marie Laetitia a écrit:Non mais bon, autant que je mette le texte ici, de toute façon, ça tient en deux pages et demi du bouquin de poche, de mémoire, le copyright devrait être sauf.

R. Rémond a écrit:Les origines de la Révolution

« En dépit des distinctions tranchées dans les ordres, la société française du XVIe ou du XVIIe siècle gardait une assez grande mobilité sociale. Il n'était pas impossible à des gens doués ou fortunés de passer d'un ordre à l'autre. La bourgeoisie a toujours vu s'ouvrir des possibilités d'accession aux ordres privilégiés, ne fût-ce que par l'achat de charges, l'entrée dans la noblesse de robe ou l'acquisition de terres dont la possession ennoblissait. Tant que jouent ces soupapes de sûreté, la bourgeoisie ne nourrit aucun dessein révolutionnaire, elle se trouve bien d'une situation qui lui laisse l'espoir d'accéder au partage des privilèges. C'est le jour où elle se voit enfermée dans la situation inférieure qui est la sienne, que commencent à naître des aspirations proprement révolutionnaires.

La bourgeoisie se heurte alors à ce qu'on appelle la réaction nobiliaire. Réaction de défense d'un ordre qui sait ses positions menacées, voit sa fortune diminuer, et qui cherche désespérément à conserver sa prééminence traditionnelle, à préserver, parfois même à restaurer, un ordre traditionnel qui lui était avantageux. Ainsi les Parlements exigent désormais, pour acheter une charge, au moins quatre quartiers de noblesse. En 1781, dans l'armée, un règlement militaire réserve l'accès au grade d'officier à ceux qui appartiennent à la noblesse : les éléments du tiers sont confinés aux grades de sous-officiers. Tout espoir promotion est interdit.

Ces dispositions juridiques sont renforcées par les comportements spontanés. Ce n'est pas en vertu d'un texte, c'est par une réaction collective que le haut clergé se ferme totalement aux éléments originaires du tiers. Situation nouvelle : au XVIIe siècle, la plupart des prélats étaient d'origine bourgeoise ou même populaire ; à la veille de la Révolution, l'aristocratie de naissance accapare évêchés et riches abbayes.

De même pour l'exercice du pouvoir politique et l'entourage du souverain. Louis XIV s'était fait une règle de prendre pour ministres et conseillers des bourgeois ; à la fin de l'Ancien Régime, la plupart des ministres, voire des intendants, appartiennent à la noblesse. Ainsi l'aristocratie de naissance tend-elle à se réserver tout à la fois les honneurs et les avantages. Cette réaction qui lèse indirectement les intérêts de la bourgeoisie et heurte ainsi son désir de considération, est à l'origine du vif mécontentement anti-nobiliaire que la bourgeoisie manifestera aux États-généraux et dans les premières années de la Révolution.

Possible que j'ai aménagé le texte, pour le mettre grossièrement à la portée d'un 4e (en travaillant ensemble le doc pour s'assurer de sa bonne compréhension), faudrait que je reprenne mon exemplaire, ce soir.

Tu fais étudier ce texte à des 4e ? tu es dans quel type de collège ? Ce serait impossible pour moi, à moins d'y passer 3 heures .

Ça dépend des classes (en ZEP, je faisais ce texte avec une très bonne classe), des années. Il est compliqué mais je le leur faire lire puis je "traduis" phrase par phrase et enfin je simplifie sous forme de schéma (avant=au XVIIe s./après= >mi-XVIIIe s.) pour traiter des causes de la Révolution française. Je veux au moins qu'ils aient été frottés de temps à autre avec des textes d'historiens, et pas seulement des textes de manuel. Je leur fais bien lire la DDHC en intégralité (et ça, pour le coup, c'est vraiment toutes les classes, quel que soit leur niveau, j'y tiens, même si le texte n'est pas simple non plus dans son genre).

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Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...


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par NLM76 06/11/22, 08:26 pm
Et au fait, qui est-ce qui paye ?
Et pour les bénéfices mineurs, qui a le pouvoir ? Dans Manon Lescaut, c'est un "prélat" qui obtient un bénéfice pour Tiberge.

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Sites du grip :
  • http://instruire.fr
  • http://grip-editions.fr

Mon site : www.lettresclassiques.fr

«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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par Marie Laetitia 06/11/22, 09:31 pm
NLM76 a écrit:Et au fait, qui est-ce qui paye ?
Et pour les bénéfices mineurs, qui a le pouvoir ? Dans Manon Lescaut, c'est un "prélat" qui obtient un bénéfice pour Tiberge.

Qui paye, l'Église avec les revenus cités précédemment.
Pour les bénéfices mineurs, je ne sais pas, je dirais au feeling que l'Église pouvait en disposer en faveur de qui elle voulait? La nomination d'un curé par ex dépendait déjà de l'évêque... donc cela devait aller ainsi pour les autres bénéfices mineurs (chanoine régulier, chapelain...).

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Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)


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par NLM76 07/11/22, 09:41 am
Bon quand même : j'essaie de comprendre le concept de "bénéfice sans charge d'âme" (s'agit-il de ce qu'on appelle des sinécures?). Qu'est-ce qu'il y a en échange du revenu ? Il me semble qu'il s'agit d'une pratique ancienne (Rabelais n'en a-t-il pas bénéficié ?) Pourquoi l'église donnerait-elle de l'argent à quelqu'un en échange de rien ? Je comprends que le rois veuillent s'assurer des affidés puissants ; est-ce exactement la même chose pour l'évêque ?

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par Iphigénie 07/11/22, 10:13 am
Tu auras (peut-être ) des renseignements en complément dans cet article du Robert
https://dictionnaire.lerobert.com/definition/benefice
( il faut aller tout en bas de la page pour avoir les sens anciens)
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par Marie Laetitia 07/11/22, 10:33 am
NLM76 a écrit:Bon quand même : j'essaie de comprendre le concept de "bénéfice sans charge d'âme" (s'agit-il de ce qu'on appelle des sinécures?). Qu'est-ce qu'il y a en échange du revenu ? Il me semble qu'il s'agit d'une pratique ancienne (Rabelais n'en a-t-il pas bénéficié ?) Pourquoi l'église donnerait-elle de l'argent à quelqu'un en échange de rien ? Je comprends que le rois veuillent s'assurer des affidés puissants ; est-ce exactement la même chose pour l'évêque ?

Bénéfice sans charge d'âme: un bénéfice qui n'est pas associé par exemple à la charge d'une paroisse (ou d'un évêché). La charge d'âmes, ou cura animarum, est ce qui définit le "curé". Parce qu'il est responsable sur son propre salut du salut de ses paroissiens.
Donc oui un bénéfice sans charge d'âme pourrait correspondre à une sinécure. En échange du revenu, par forcément grand chose. Ça peut être célébrer les messes de fondation (les messes dites à date fixe pour les morts, selon une intention, payée pour des années, d'où le mot de "fondation"). On peut imaginer toutes sortes de fonctions qui pouvaient rester théoriques. Pour Rabelais, possiblement, je ne me souviens plus.
En fait, il y a deux choses qui me dérangent un peu ou qui m'ennuient, si tu veux: j'ai l'impression que tu cherches à... juger? Or en histoire, on cherche plutôt à comprendre (comment ça fonctionnait, comment les choses étaient vues, vécus, acceptées ou non). En outre, tu travailles sur une société qui fonctionne depuis des siècles, avec des usages établis, certains vidés de leur sens. Mais la puissance de l'Église repose alors, aussi, sur ses effectifs. Et puisqu'elle bénéficie de dons qui lui permettent d'entretenir des sinécures, le système reste relativement cohérent (même si, de fait, en ayant des titulaires de bénéfice qui n'ont pas de charge d'âme et ne consacre pas leur vie à la prière et à la mortification pour le salut de tous les pécheurs, on peut considérer que le système est dévoyé... et de fait, les contemporains en sont bien conscients). Prends l'exemple de la charge de chanoine séculier: tout le monde sait que c'est une place en or, qui apporte des revenus très confortables avec une charge très très légère (la liturgie des heures dans une cathédrale, très allégée). Et qu'un chanoine ne se soucie généralement pas de mortification (le proverbe "gras comme un chanoine" parle de lui-même).

(mais je ne comprends pas ta dernière phrase)

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par Marie Laetitia 07/11/22, 10:35 am
(si tu veux tous les renseignements sur l'Église moderne, j'ai un chapitre d'ouvrage numérisé que je donne à lire à mes étudiants, qui te donnera toutes les clés. Mais là, pour le coup, il me faudra vraiment ton adresse mail)

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