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maikreeeesse
Grand sage

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par maikreeeesse Mer 14 Déc - 10:32
NLM76 C'est ce qu'on appelle le passage de la manipulation passive à une manipulation active afin d'accéder à une symbolisation.
Manipulation passive: l’élève met 4 pommes et 3 pommes dans un panier puis va regarder et compter pour trouver le résultat.
Manipulation active: le maître met 4 pommes dans une panier non visible puis trois pommes et demande à l'élève d'anticiper le résultat (puis confrontation)
A la fin tout est "imaginé" pour parvenir au symbolisme (dont l'écriture mathématiques est une représentation).
dandelion
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Vénérable

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par dandelion Mer 14 Déc - 10:37
@lene75 La différence c’est que nous voyons le sens qu’il y a à étudier la philosophie. Et nous avons le temps de parler à nos enfants, en utilisant le même vocabulaire que les enseignants.
Pour revenir au sujet de la manipulation et de l’acquisition linguistique, en dehors de l’envahissement par les écrans (qui existaient déjà pour ma génération, il y a d’ailleurs un film antérieur à ma naissance où un instituteur arrache des antennes provoquant une amélioration des résultats), il y a eu un enfermement progressif des enfants dont l’impact est peut-être sous-estimé.
Une différence entre ma génération (née dans les années 70) et maintenant, c’est qu’il me semble que nous étions bien plus libres étant enfants. Que ce soit mon mari, vivant à Belleville, ou moi, dans la campagne près d’Aubagne, nous passions beaucoup de temps à l’extérieur de notre domicile sans nos parents (certains souvenirs me font maintenant frémir, mais bon, on roulait dans une quatre-ailes sans siège-auto, wild times).
Je trouve que cela favorisait des interactions langagières et souvent transactionnelles (un échange de billes impliquant de bien maîtriser le terme ‘assez’ et de savoir compter efficacement) mais aussi une expérience pratique. C’est par exemple grâce à d’autres enfants que j’ai appris à reconnaître le gratte-cul. Je me souviens aussi que les plus grands corrigeaient volontiers le français des plus-petits.
Mes enfants ont eu la chance de vivre un peu cela en Suisse, où l’on prenait le ‘funi’ tout seul dès six ans, mais elles ont été bien plus ‘contraintes’ tout de même. On fait par exemple beaucoup de ‘bricolages’ ou d’activités artistiques selon une méthode stricte, avec des ingrédients pré-mesurés.
A l’école aussi, nous avions plus d’activités ‘libres’.
Je me demande dans quelle mesure ces changements de mode de vie affectent les enfants d’aujourd’hui, qui vivent non seulement davantage dans les villes mais aussi moins à l’extérieur. Voit-on encore des parents mettre main un goûter puis envoyer leur enfant de primaire jouer dehors?
Il est vrai aussi que j’ai passé toute mon année de CE2, dans mon souvenir, à copier des conjugaisons, et que certains élèves de ma classe de CM2 avaient déjà redoublé deux fois.
epekeina.tes.ousias
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par epekeina.tes.ousias Mer 14 Déc - 10:53
NLM76 a écrit:
Tout à fait. Et c'est bien, me semble-t-il, ce sur quoi insistait Pauline Kergomard, et continue d'insister le Grip, avec Catherine Huby, pour le travail à mener en maternelle, où l'on veille à articuler peu à peu, de plus en plus précisément, les mots, les actes et les nombres.
De mémoire, il s'agit de mener régulièrement des petits exercices oraux qui sont en réalité des problèmes mathématiques, de travailler toutes ces notions par la pratique régulière, en particulier en grande section, où l'on commence à formaliser ces notions, à préciser le sens de ces expressions.
Et, si je me souviens convenablement de ce que Catherine Huby et Pascal Dupré, entre autres, m'ont expliqué, ce travail est trop négligé en particulier à cause de la pratique trop répandue des ateliers, où les enfants ont des "tâches" à accomplir, au fond, d'une façon toujours trop mécanique. [Il y a aussi pas mal de choses qui vont dans ce sens, de façon très méthodique et adapté à l'âge des enfants, dans le Venot, De l'écoute des sons à la lecture.]

Une hypothèse personnelle, sur le problème que pose la surcharge cognitive, quand le déchiffrage absorbe l'attention : une des solutions, c'est la lenteur, c'est prendre le temps, s'arrêter, souvent, après avoir déchiffré, ne serait-ce qu'un seul mot, au début de l'apprentissage. Déchiffrer, et prendre le temps de s'émerveiller sur ce qu'on vient de déchiffrer : imaginer, sourire, parler de ce qu'on vient d'évoquer... Donc ne pas expédier l'activité de déchiffrage, ne pas la décrocher de l'intelligence, en faisant d'une part des séances de décodage, et d'autre part des séances de "lecture". Dès qu'on décode, on lit.

Oui, Kergomard insiste sur ce point, mais tout en refusant la tendance, qui existe à son époque, consistant à "primariser" la maternelle. C'est en gros celle d'un apprentissage immédiat des lettres (méthode consécutive qui prétend commencer par l'écriture). Elle préconise, à la suite de Marie Pape-Carpantier, les causeries et les historiettes (cf. l'Ami des enfants, et la bibliothèque "rouge" chez Hachette). C'est une sorte de milieu de langue, de parole et d'histoires qui doit servir à préparer la lecture-écriture. D'où aussi l'appellation de "maternelle" et le fait de vouloir comprendre les enfants, par ex. en jouant avec eux pendant la récréation. Et de même, Kergomard prend part à la fondation d'un "laboratoire", dirait-on de nos jours, de psychologie de l'enfant. Il ne faut pas séparer les deux dimensions.

maikreeeesse a écrit:
C'est pourquoi j'ai du mal avec le mépris que certains expriment quand on parle de l'apprentissage de la lecture sur le cycle en entier. Évidemment que le déchiffrage de tous les sons doit avoir lieu en CP mais pour autant l’apprentissage de la lecture est loin d'être fini et se poursuit.
Ce que tu soulignes sur ton message précédent est également ce que je constate. Les élèves de mon secteur avec l’aide d'une bonne méthode de lecture (syllabique) lisent tous, mais les problèmes de vocabulaire, de syntaxe font qu'en CM ils chutent dans les résultat et deviennent très moyens au collège.
Focaliser sur le syllabique (indispensable) risque à mes yeux de cacher d'autres composantes et facteurs de réussite. On simplifie la discussion ce qui pourrait nous faire passer à côté de mécanismes plus complexes.

Je suis tout à fait d'accord avec toi. Le travail en maternelle est à la fois spécifique et incontournable. Ce serait une erreur que de le réduire à du décodage ou, à l'inverse, à du "bain culturel". C'est bien plus compliqué car il faut nouer les registres et les étayer les uns par les autres, tout en établissant une progressivité et en prenant en charge des écarts entre les enfants, écarts qui ne viennent pas de l'école mais viennent à l'école. C'est aussi pourquoi je reste très réticent face à certaines critiques qui me paraissent projeter sur la maternelle des exigences trop ultérieures à ce qui s'y fait, et se donnent la partie belle pour critiquer les PE.


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par NLM76 Mer 14 Déc - 10:57
dandelion a écrit:@lene75 La différence c’est que nous voyons le sens qu’il y a à étudier la philosophie. Et nous avons le temps de parler à nos enfants, en utilisant le même vocabulaire que les enseignants.
Pour revenir au sujet de la manipulation et de l’acquisition linguistique, en dehors de l’envahissement par les écrans (qui existaient déjà pour ma génération, il y a d’ailleurs un film antérieur à ma naissance où un instituteur arrache des antennes provoquant une amélioration des résultats), il y a eu un enfermement progressif des enfants dont l’impact est peut-être sous-estimé.
Une différence entre ma génération (née dans les années 70) et maintenant, c’est qu’il me semble que nous étions bien plus libres étant enfants. Que ce soit mon mari, vivant à Belleville, ou moi, dans la campagne près d’Aubagne, nous passions beaucoup de temps à l’extérieur de notre domicile sans nos parents (certains souvenirs me font maintenant frémir, mais bon, on roulait dans une quatre-ailes sans siège-auto, wild times).
Je trouve que cela favorisait des interactions langagières et souvent transactionnelles (un échange de billes impliquant de bien maîtriser le terme ‘assez’ et de savoir compter efficacement) mais aussi une expérience pratique. C’est par exemple grâce à d’autres enfants que j’ai appris à reconnaître le gratte-cul. Je me souviens aussi que les plus grands corrigeaient volontiers le français des plus-petits.
Mes enfants ont eu la chance de vivre un peu cela en Suisse, où l’on prenait le ‘funi’ tout seul dès six ans, mais elles ont été bien plus ‘contraintes’ tout de même. On fait par exemple beaucoup de ‘bricolages’ ou d’activités artistiques selon une méthode stricte, avec des ingrédients pré-mesurés.
A l’école aussi, nous avions plus d’activités ‘libres’.
Je me demande dans quelle mesure ces changements de mode de vie affectent les enfants d’aujourd’hui, qui vivent non seulement davantage dans les villes mais aussi moins à l’extérieur. Voit-on encore des parents mettre main un goûter puis envoyer leur enfant de primaire jouer dehors?
Il est vrai aussi que j’ai passé toute mon année de CE2, dans mon souvenir, à copier des conjugaisons, et que certains élèves de ma classe de CM2 avaient déjà redoublé deux fois.
Encore une fois, je vais parler de Catherine; mais tout cela est assez vrai. Et justement, ce qu'elle propose dans son livre pour une maternelle du XXIe siècle, c'est plus de la liberté, plus de découvertes et plus d'interactions langagières entre les enfants, entre les enfants et les institutrices, que dans les pratiques phagocytées par l'obsession des ateliers et des progressions rigides (par exemple, le bonhomme qu'il faudrait dessiner tous les mois ou tous les deux mois).

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Sites du grip :
  • http://instruire.fr
  • http://grip-editions.fr

Mon site : www.lettresclassiques.fr

«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
epekeina.tes.ousias
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par epekeina.tes.ousias Mer 14 Déc - 11:02
(Remarque, le coup du bonhomme, cela fait bien 20 ans que je ne l'ai pas vu dans les classes que je visite régulièrement.)

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lene75
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par lene75 Mer 14 Déc - 11:09
Il me semble tout de même qu'il y a plusieurs problèmes différents. Le Figaro vise un public qui n'est pas un public défavorisé et pointe donc, en parlant des méthodes de lecture, un problème plus spécifique : c'est la massification du problème d'accès à la lecture qui ne concerne pas (plus ?) que des populations défavorisées. Qu'est-ce qui fait que de nombreux enfants n'apprennent plus à lire correctement alors même qu'ils sont dans des milieux qui ne sont pas défavorisés, voire qu'ils sont dans des milieux favorisés ? C'est typiquement un type de population que je peux rencontrer dans mes classes : des élèves de classes moyennes, voire des enfants de cadres, nés en France, de parents francophones ayant fait des études et s'exprimant tout à fait correctement, qui vivent dans des conditions tout à fait décentes et qui pourtant sont handicapés par une lecture et une écriture défaillantes et qui, par ailleurs, ont des difficultés de mémorisation et de concentration, mais ça c'est encore un autre problème.

(Mes 3 filles ont fait le bonhomme tous les mois en maternelle, sachant qu'elles ont été scolarisées dans 3 écoles différentes... la dernière étant actuellement au CP, ce ne sont pas des pratiques très anciennes).

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Une classe, c'est comme une boîte de chocolats, on sait jamais sur quoi on va tomber...
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par Sapotille Mer 14 Déc - 11:10
Justement, puisque vous parlez de Catherine, elle a justement beaucoup de choses à vous dire !
http://doublecasquette3.eklablog.com/gs-mobiliser-le-langage-dans-toutes-ses-dimensions-5-a213532813

Extrait :

"Avec un petit peu d'avance, voilà la période 3 terminée, grâce à Laurence Pierson et Thierry Venot dont les progressions sont si bien faites qu'il me suffit de tourner les pages pour préparer les séances d'activité.

Comme pour les premières périodes (voir liens en fin d'article), je vous encourage à prendre toute liberté avec les « habillages » que je propose. Un conte, un poème, une comptine, un chant, un exercice de graphisme, une œuvre d'art à commenter, un thème d'exploration du monde, tout ceci est modulable, interchangeable, et même supprimable....

À condition que ... – car vous vous doutez bien qu'il y a une condition – à condition que, donc :

I love you  vous recherchiez avec bonne humeur et optimisme l'intérêt des enfants et non le vôtre ou celui des parents venus admirer vos œuvres et celles de votre Atsem dans votre classe, votre salle de jeux ou votre couloir

I love you vous gardiez un rythme quotidien pour les exercices de « phonologie-lecture-écriture » et ce pour toute la classe

I love you vous ne transformiez pas en étude universitaire interminable chaque œuvre littéraire que vous leur lisez

I love you vous ne passiez pas votre temps à évaluer si Meriem a retenu le sens du mot meunier « appris » dans le premier module des Musiciens de Brême, à vérifier que Léon peut re-raconter seul tout le texte du troisième module de Épaminondas ou encore si Sasha sait enfin réciter seul le poème Bonne année, de Rosemonde Gérard.

I love you vous ne vous cachiez pas sans arrêt derrière les insuffisances « des parents » lorsque les compétences relèvent clairement de votre enseignement.
Ce n'est pas parce que Mme Macmuche n'emploie jamais le passé simple que son fiston dit « Et alors,les animaux, ils se mettèrent à crier et les voleurs, ils s'enfuyèrent », c'est juste parce qu'à 5 ans et demi, on n'a pas encore assez fréquenté les œuvres littéraires classiques et ce n'est pas parce que Monsieur Dumoulin-Delarue-Dupuits arrive tous les matins en retard avec sa fillette pas coiffée que la dite fillette ne tient pas bien son crayon lorsqu'elle écrit.
Dans ces deux cas, c'est bien à l'école maternelle de faire le travail, inlassablement, avec bonne humeur et raison, et ce d'autant plus qu'elle est en « début de chaîne » et que son « public » est, familialement parlant, très éloigné de la chose scolaire ! Si elle n'y met pas tout son cœur actuellement, sans pression, sans précipitation mais sans faillir, il y a de fortes chances pour que, même au CM2, le jeune Macmuche et la petite Dumoulin-Delarue-Dupuis écrivent encore en tenant leur crayon comme un pic à glace ils s'enfuyèrent quand les animaux se mettèrent à crier."
Clecle78
Clecle78
Bon génie

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par Clecle78 Mer 14 Déc - 11:31
lene75 a écrit:J'ai pensé à vous. Pour expliquer à mes élèves comment retenir leurs cours de philo qu'ils n'arrivent pas à apprendre correctement, je leur dis que le plus efficace, c'est de discuter des sujets que nous abordons avec leurs parents. C'est le constat que j'ai fait dans des milieux favorisés. Quand les parents arrivaient enthousiastes aux réunions parents-profs en me disant "J'adore vos cours, c'est passionnant !" 🧐 ("Euh, je n'ai pas souvenir de vous avoir aperçu dans ma classe"), "On parle souvent de vos cours au dîner !", les enfants avaient immanquablement de bons résultats. Bref, lundi, je dis ça à mes élèves... je vous laisse imaginer comment ils m'ont regardée... gros blanc... j'ai essayé de me raccrocher aux branches en leur disant qu'ils pouvaient faire ça entre eux plutôt qu'avec leurs parents. Je crois que j'aurais mieux fait de me taire. Mais je crois qu’il y a quelque chose qui se joue là : les parents de mes élèves sont sans arrêt sur Pronote, ils connaissent par cœur les notes de leurs enfants, confisquent les téléphones ou privent de sorties quand elles ne sont pas bonnes, mais ils ne se préoccupent pas du tout du contenu des cours. Ils n'en parlent pas avec leurs enfants. Ça rejoint ce qui a été dit plus haut : les élèves ont du mal à voir le cours autrement qu'un truc à apprendre par cœur sans chercher à comprendre et à recracher le jour du contrôle avant de tout oublier. Apprendre ça ou autre chose leur est assez indifférent. Sauf les bons élèves et ceux qui sont accompagnés chez eux. Après je ne jette pas la pierre aux parents : c'est vraiment compliqué de tout mener de front. Je le vis moi-même en tant que mère. Mais il est indéniable que ça fait une différence dès le plus jeune âge. On m'a d'ailleurs souvent dit que les difficultés de ma fille handicapée étaient masquées dans les tests par notre investissement à la maison.
C'est exactement ce que m'avait dit ma collègue qui avait mon fils en classe. Celui-ci s'exclamait avec enthousiasme qu'on discutait beaucoup à la maison et notamment des cours. Et elle m'a rapporté le regard ahuri de certains de ses camarades qui visiblement trouvaient ça complètement exotique de parler avec les parents. Enfants, je lisais tous leurs livre, même les mangas et je regardais la télévision avec eux, même les émissions débiles qu'ils aimaient parfois. D'ailleurs on continue maintenant qu'ils sont adultes. Chaque semaine on "débriffe" les derniers films, livres, séries et même la Star academy qu'on regarde avec nostalgie.
nicole 86
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Expert spécialisé

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par nicole 86 Mer 14 Déc - 11:45
lene75 a écrit:J'ai pensé à vous. Pour expliquer à mes élèves comment retenir leurs cours de philo qu'ils n'arrivent pas à apprendre correctement, je leur dis que le plus efficace, c'est de discuter des sujets que nous abordons avec leurs parents. C'est le constat que j'ai fait dans des milieux favorisés. Quand les parents arrivaient enthousiastes aux réunions parents-profs en me disant "J'adore vos cours, c'est passionnant !" 🧐 ("Euh, je n'ai pas souvenir de vous avoir aperçu dans ma classe"), "On parle souvent de vos cours au dîner !", les enfants avaient immanquablement de bons résultats. Bref, lundi, je dis ça à mes élèves... je vous laisse imaginer comment ils m'ont regardée... gros blanc... j'ai essayé de me raccrocher aux branches en leur disant qu'ils pouvaient faire ça entre eux plutôt qu'avec leurs parents. Je crois que j'aurais mieux fait de me taire. Mais je crois qu’il y a quelque chose qui se joue là : les parents de mes élèves sont sans arrêt sur Pronote, ils connaissent par cœur les notes de leurs enfants, confisquent les téléphones ou privent de sorties quand elles ne sont pas bonnes, mais ils ne se préoccupent pas du tout du contenu des cours. Ils n'en parlent pas avec leurs enfants.

Lene, la lecture de ton message vient de raviver un souvenir douloureux. J'arrivais en lycée en seconde, je venais de découvrir La Métamorphose de Kafka, samedi soir au retour de l'internat j'ai voulu en parler à la table du dîner. La réponse de mon père (PEGC) fut : "Dans quelle équipe de foot joue-t-il ?"  Je n'ai plus jamais essayé tellement j'avais honte (cf Annie Ernaux).
LouisBarthas
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Expert

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par LouisBarthas Mer 14 Déc - 11:54
Eliette a écrit:Vos réflexions sur la compréhension me rappellent une discussion avec ma mère, qui a enseigné la lecture avec passion en grande section puis CP dans les années 70-90. C’est amusant car elle a des mots très durs contre la « syllabique » pure. Elle oppose en effet des enfants ânonnant sans fluidité ni compréhension à des enfants pour qui l’écrit oralisé faisait sens. La « globale » à ses yeux n’était pas tant reconnaître un mot à sa photo, que chercher d’abord et avant tout du sens, et du plaisir à la lecture. On a peut-être oublié le contexte et les problèmes qui a l’époque ont poussé à chercher d’autres méthodes.
C'est là l'argumentation que se repassaient les formateurs et les inspecteurs dans ces années-là, qu'ils avaient reçue dans leurs propres formations, et qu'ils rediffusaient dans les Écoles normales, les conférences pédagogiques et les stages. Si l'on voulait mener sa carrière tranquillement, sans être tancé par ces responsables, ni harcelé par les collègues - je l'ai vécu -, il suffisait de se conformer à cette doxa, sans se poser de questions. Je me souviens de mon inspecteur formateur à l'École normale, qui nous donnait l'exemple d'un élève qui, dans une école, ânonnait sans comprendre. Je me suis aperçu que tous ces gens se repassaient entre eux cet exemple.
Tout cela a depuis été balayé par la science, mais on pouvait déjà, avec un peu d'esprit critique, en déceler la contradiction : si la "syllabique" (le mot n'est déjà pas très approprié et montre bien l'incompréhension ce que qu'est l'acte de lecture) était un obstacle à la fluidité et à la compréhension - et qu'elle soit "pure" ou non ne change rien au raisonnement -, pourquoi apprend-on à lire ? Si c'est juste pour comprendre ce qui est écrit, ce n'est pas la peine d'y consacrer tant de temps. il suffit de donner à lire des phrases qui ont du sens, d'aider un peu à la compréhension, et hop ! les élèves sauront lire. Vous leur donnez aussi un dictionnaire afin de retenir tous les mots qu'ils sont capables de comprendre à leur âge, et le tour est joué. Lecture parfaite, fluide, rapide, comprise.

Voyons maintenant ce que la science a prouvé de ce qui se passe lorsqu'on lit, et qui rejette aux oubliettes de l'ignorance et de l'idéologie cette conception.
La lecture nécessite de relier les unités sonores aux graphismes qui les représentent. Contrairement à la conception des contempteurs de la "syllabique" affichée plus haut, il n'y pas de lecture possible sans traitement phonologique de l'information apportée par les lettres. Pour y parvenir, il faut à la fois être capable d'identifier leurs formes et de les orienter dans l'espace.
Or la reconnaissance des lettres nécessite une analyse visuelle fine dont seule est capable la macula de la rétine. Le champ maculaire ne peut analyser - selon les individus et les calligraphies - que 2 à 4 lettres à la fois. C'est pourquoi lorsqu'il lit l'œil doit effectuer un déplacement nommé saccade oculaire. le champ à explorer dans la lecture est couvert par la succession des saccades oculaires.
La rétine périphérique participe également à la lecture en explorant l'espace qui entoure le champ maculaire. Elle transmet des informations sur la situation des signes graphiques, la longueur des mots, les espaces qui les séparent. C'est elle qui indique au cerveau où doit commencer et finir le travail d'analyse et de synthèse destiné à mener à la compréhension du sens de chaque mot, mais elle n'intervient pas dans le processus d'identification des lettres.
Rien ne peut modifier la vitesse avec laquelle l'œil se déplace pendant la saccade d'un point à l'autre. Par contre, la durée de l'arrêt de l'œil  sur sa cible dépend de la qualité de l'information que le cerveau retire de cette pause. Des neurones « pauseurs » entrent en action pour prolonger l'immobilisation de l'œil tant que le cerveau n'a pas extrait une information suffisante de ce qu'il voit. Il peut même y avoir un retour en arrière de l'axe du regard. L'inhibition de œil  n'est levée que lorsque une information suffisante a été extraite de la pause oculaire.
Donc, la fluidité et la vitesse de la lecture sont directement liées à la rapidité de compréhension par le cerveau du contenu visuel de chaque pause oculaire.
La vision de surfaces très limitées vues de manière très précise par séquences successives est une réalité organique. La fluidité et la rapidité et la compréhension de la lecture dépendent de la tâche d'identification des formes et des sons des lettres. Plus l'identification des sons et des graphismes est courte, plus les chances de parvenir à reconnaître la signification phonologique de ces assemblages est sont grandes. C'est ce qui explique que tous les apprentis-lecteurs lisent lentement, et pourquoi l'entraînement à la prise de conscience phonologique (la "syllabique") a une importance fondamentale sur le plan pédagogique.
La lecture est impossible sans la prise de conscience phonologique, contrairement à ce que croyaient Decroly, Freinet, Foucambert, Goigoux à ses débuts. Les meilleurs lecteurs sont ceux qui lisent « lettre à lettre » (infirmation de la vision de la Grande Prêtresse Eveline Charmeux), et utilisent le moins le contexte pour découvrir le sens des mots (infirmation de la vision du Grand Prêtre Roland Goigoux).
C'est pour cela qu'il faut associer dans l'apprentissage de la lecture les trois étapes fondamentales que sont l'écoute des sons, l'écriture des lettres qui font ces sons et la compréhension des mots et des phrases. C'est cette dissociation, à l'œuvre depuis des décennies, qui a conduit au désastre actuel.

Les parents n'ont pas besoin de connaître tout cela pour aider leurs enfants à bien lire. Quelques conseils de bon sens suffisent, que confirmera l'orthophoniste sl l'enfant consulte : ne cherchez pas à faire reconnaître par votre enfant un mot du vocabulaire qui lui est connu qu'il ne sait pas décomposer en lettres. Centrez son attention sur la lettre - au besoin en cachant le restant du mot -, et faites oraliser le son produit par ces lettres ou groupes de lettres produisant un seul son. La qualité de la lecture dépend de cette rapidité d'identification et d'oralisation (combien de fois n'ai-je entendu qu'il ne fallait pas faire lire les enfants à haute voix ! C'est pour cela que tous ces gens haïssent Suzanne Borel-Maisonny, une des fondatrices, en France, de l'orthophonie, avec sa gestuelle.   furieux

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Iphigénie
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par Iphigénie Mer 14 Déc - 11:58
Nouveau message - [Le Figaro]  nicole 86
lene75 a écrit:
J'ai pensé à vous. Pour expliquer à mes élèves comment retenir leurs cours de philo qu'ils n'arrivent pas à apprendre correctement, je leur dis que le plus efficace, c'est de discuter des sujets que nous abordons avec leurs parents. C'est le constat que j'ai fait dans des milieux favorisés. Quand les parents arrivaient enthousiastes aux réunions parents-profs en me disant "J'adore vos cours, c'est passionnant !" 🧐 ("Euh, je n'ai pas souvenir de vous avoir aperçu dans ma classe"), "On parle souvent de vos cours au dîner !", les enfants avaient immanquablement de bons résultats. Bref, lundi, je dis ça à mes élèves... je vous laisse imaginer comment ils m'ont regardée... gros blanc... j'ai essayé de me raccrocher aux branches en leur disant qu'ils pouvaient faire ça entre eux plutôt qu'avec leurs parents. Je crois que j'aurais mieux fait de me taire. Mais je crois qu’il y a quelque chose qui se joue là : les parents de mes élèves sont sans arrêt sur Pronote, ils connaissent par cœur les notes de leurs enfants, confisquent les téléphones ou privent de sorties quand elles ne sont pas bonnes, mais ils ne se préoccupent pas du tout du contenu des cours. Ils n'en parlent pas avec leurs enfants.


Lene, la lecture de ton message vient de raviver un souvenir douloureux. J'arrivais en lycée en seconde, je venais de découvrir La Métamorphose de Kafka, samedi soir au retour de l'internat j'ai voulu en parler à la table du dîner. La réponse de mon père (PEGC) fut : "Dans quelle équipe de foot joue-t-il ?"  Je n'ai plus jamais essayé tellement j'avais honte (cf Annie Ernaux).
Tu es sûre qu’il ne plaisantait pas? La précision « Pegc » est un peu ….. gênante, il me semble: quand kafka a été au programme de terminale c’est le mari( pegc allemand -français) d’une copine qui m’en a le mieux parlé ainsi que de ses traducteurs- traductrices en français (« La honte » d’Annie Ernaux, cela dit j’ai toujours trouvé ce sentiment vraiment bien méprisant pour ses parents….)
nicole 86
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Expert spécialisé

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par nicole 86 Mer 14 Déc - 12:12
Iphigénie a écrit:
Nouveau message - [Le Figaro]  nicole 86
lene75 a écrit:
J'ai pensé à vous. Pour expliquer à mes élèves comment retenir leurs cours de philo qu'ils n'arrivent pas à apprendre correctement, je leur dis que le plus efficace, c'est de discuter des sujets que nous abordons avec leurs parents. C'est le constat que j'ai fait dans des milieux favorisés. Quand les parents arrivaient enthousiastes aux réunions parents-profs en me disant "J'adore vos cours, c'est passionnant !" 🧐 ("Euh, je n'ai pas souvenir de vous avoir aperçu dans ma classe"), "On parle souvent de vos cours au dîner !", les enfants avaient immanquablement de bons résultats. Bref, lundi, je dis ça à mes élèves... je vous laisse imaginer comment ils m'ont regardée... gros blanc... j'ai essayé de me raccrocher aux branches en leur disant qu'ils pouvaient faire ça entre eux plutôt qu'avec leurs parents. Je crois que j'aurais mieux fait de me taire. Mais je crois qu’il y a quelque chose qui se joue là : les parents de mes élèves sont sans arrêt sur Pronote, ils connaissent par cœur les notes de leurs enfants, confisquent les téléphones ou privent de sorties quand elles ne sont pas bonnes, mais ils ne se préoccupent pas du tout du contenu des cours. Ils n'en parlent pas avec leurs enfants.


Lene, la lecture de ton message vient de raviver un souvenir douloureux. J'arrivais en lycée en seconde, je venais de découvrir La Métamorphose de Kafka, samedi soir au retour de l'internat j'ai voulu en parler à la table du dîner. La réponse de mon père (PEGC) fut : "Dans quelle équipe de foot joue-t-il ?"  Je n'ai plus jamais essayé tellement j'avais honte (cf Annie Ernaux).
Tu es sûre qu’il ne plaisantait pas? La précision « Pegc » est un peu ….. gênante, il me semble: quand Kafka a été au programme de terminale c’est le mari( pegc allemand -français) d’une copine qui m’en a le mieux parlé ainsi que de ses traducteurs- traductrices en français (« La honte » d’Annie Ernaux, cela dit j’ai toujours trouvé ce sentiment vraiment bien méprisant pour ses parents….)

Je suis absolument certaine qu'il ne plaisantait pas, hélas !  Mais il était PEGC maths-gym. Je précise, par ailleurs, que le livre d'Annie Ernaux n'était pas encore publié.
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par epekeina.tes.ousias Mer 14 Déc - 12:14
lene75 a écrit:Il me semble tout de même qu'il y a plusieurs problèmes différents. Le Figaro vise un public qui n'est pas un public défavorisé et pointe donc, en parlant des méthodes de lecture, un problème plus spécifique : c'est la massification du problème d'accès à la lecture qui ne concerne pas (plus ?) que des populations défavorisées. Qu'est-ce qui fait que de nombreux enfants n'apprennent plus à lire correctement alors même qu'ils sont dans des milieux qui ne sont pas défavorisés, voire qu'ils sont dans des milieux favorisés ? C'est typiquement un type de population que je peux rencontrer dans mes classes : des élèves de classes moyennes, voire des enfants de cadres, nés en France, de parents francophones ayant fait des études et s'exprimant tout à fait correctement, qui vivent dans des conditions tout à fait décentes et qui pourtant sont handicapés par une lecture et une écriture défaillantes et qui, par ailleurs, ont des difficultés de mémorisation et de concentration, mais ça c'est encore un autre problème.

Question très difficile à mon sens parce qu'il n'y a probablement pas de réponse mono causale. Par ex. il existe des enfants qui acquièrent tout ce qu'il faut au CP, puis on a le sentiment qu'ils "font du sur-place". En CM, ils aiment beaucoup qu'on leur lise un livre (par exemple un morceau à chaque fin de journée), mais qui ne parviennent pas à se mettre à lire (quoi que l'on fasse). Ils savent déchiffrer, ils aiment les histoires, mais ils ne franchissent pas le cap. Pour certains, même, on a l' impression qu'ils "désapprennent". Dans certains cas, on voit que leur activité personnelle n'inclut pas de lire des livres, mais un usage d'outils numériques (audio, vidéos, jeux, tutoriels, etc.) : c'est comme si c'était une direction prise arrivé à un embranchement. Mais il n'y a pas toujours "les écrans", donc ce n'est sans doute pas une explication suffisante, et ce n'est qu'une impression. Par exemple, je serais curieux, si l'on pouvait le savoir de façon tout à fait fiable, d'apprendre s'il s'agit plus majoritairement d'élèves qui n'apprennent pas à lire, ou d'élèves qui restent bloqués à tel ou tel moment de leur scolarité, voire semblent "désapprendre" (je mets de côté la comparaison entre maintenant et avant car les différences de taux de scolarisation rendent cela difficile sur le temps long, même si je crois très probable que, sur les 25 ou 30 dernières années, cela ne soit pas reluisant).

J'ai même croisé quelques étudiants de licence qui m'ont expliqué (et c'est très difficile pour eux que de dire cela !) qu'ils ne lisaient jamais de livre (ou d'article), sauf contraints et forcés (de quoi je conclus qu'ils ne lisent pas mais restent à distance). Et ce ne sont pas nécessairement ceux dont le vocabulaire, la syntaxe ou l'orthographe sont très déficients (car cela existe), ou qui donnent une impression de limitation à l'oral. Beaucoup d'entre eux, en revanche, ont d'immenses difficultés à prendre des notes (ils veulent qu'on leur "envoie le powerpoint") et à organiser leurs idées à l'écrit ou à l'oral : au point que j'ai tendance à croire sue les deux phénomènes procèdent du même processus. C'est une acculturation qui ne s'est pas faite, au profit d'autres dispositions, le problème étant l'effet de barrage que cela crée vis-à-vis des études (lesquelles on peut toujours amenuiser pour faire semblant).

Je pense qu'à part dire que c'est le résultat général de l'ensemble des interactions entre le système scolaire (primaire et secondaire, puis universitaire) et "la société", on ne peut que très difficilement isoler certains facteurs. Et je me garderai comme de la peste d'incriminer "l'étage du dessous" (je veux dire le secondaire quand on est universitaire, le primaire quand on est dans le secondaire, le collège quand on est en lycée, la maternelle quand on est en élémentaire etc.). Un autre facteur tient peut-être à la contradiction entre massification (gestion par flux dans toute l'institution) et objurgation d'individualisation (que chaque "parcours" soit singularisé à chaque instant), ce qui est évidemment impossible à tenir simultanément, comme si l'école devait à la fois enseigner, servir de famille et de société sans pouvoir l'être, ne pas être la société tout en l'étant, etc. Et le tout dans une logique impliquant une "circulation" (passage) à marche forcée.

À chaque moment, la tentation est toujours très grande d'incriminer les enseignants ou les enfants et la jeunesse (ou les deux !). C'est d'autant plus cruel que chacun sait fort bien qu'en réalité tous subissent infiniment plus qu'ils ne décident.
Honchamp
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par Honchamp Mer 14 Déc - 13:59
nicole 86 a écrit:
Iphigénie a écrit:
Nouveau message - [Le Figaro]  nicole 86
lene75 a écrit:
J'ai pensé à vous. Pour expliquer à mes élèves comment retenir leurs cours de philo qu'ils n'arrivent pas à apprendre correctement, je leur dis que le plus efficace, c'est de discuter des sujets que nous abordons avec leurs parents. C'est le constat que j'ai fait dans des milieux favorisés. Quand les parents arrivaient enthousiastes aux réunions parents-profs en me disant "J'adore vos cours, c'est passionnant !" 🧐 ("Euh, je n'ai pas souvenir de vous avoir aperçu dans ma classe"), "On parle souvent de vos cours au dîner !", les enfants avaient immanquablement de bons résultats. Bref, lundi, je dis ça à mes élèves... je vous laisse imaginer comment ils m'ont regardée... gros blanc... j'ai essayé de me raccrocher aux branches en leur disant qu'ils pouvaient faire ça entre eux plutôt qu'avec leurs parents. Je crois que j'aurais mieux fait de me taire. Mais je crois qu’il y a quelque chose qui se joue là : les parents de mes élèves sont sans arrêt sur Pronote, ils connaissent par cœur les notes de leurs enfants, confisquent les téléphones ou privent de sorties quand elles ne sont pas bonnes, mais ils ne se préoccupent pas du tout du contenu des cours. Ils n'en parlent pas avec leurs enfants.


Lene, la lecture de ton message vient de raviver un souvenir douloureux. J'arrivais en lycée en seconde, je venais de découvrir La Métamorphose de Kafka, samedi soir au retour de l'internat j'ai voulu en parler à la table du dîner. La réponse de mon père (PEGC) fut : "Dans quelle équipe de foot joue-t-il ?"  Je n'ai plus jamais essayé tellement j'avais honte (cf Annie Ernaux).
Tu es sûre qu’il ne plaisantait pas? La précision « Pegc » est un peu ….. gênante, il me semble: quand Kafka a été au programme de terminale c’est le mari( pegc allemand -français) d’une copine qui m’en a le mieux parlé ainsi que de ses traducteurs- traductrices en français (« La honte » d’Annie Ernaux, cela dit j’ai toujours trouvé ce sentiment vraiment bien méprisant pour ses parents….)

Je suis absolument certaine qu'il ne plaisantait pas, hélas !  Mais il était PEGC maths-gym. Je précise, par ailleurs, que le livre d'Annie Ernaux n'était pas encore publié.

Mais on peut tous trouver des horreurs proférées par nos proches profs !
PEGC ou pas. Nous ne sommes pas omniscients. Nous nous cultivons tout au long de notre vie.
Certes, on peut attendre d'un prof qu'il ait un bon matelas culturel dès le départ.
Mais c'est plus facile dans certaines disciplines.

Je me rappelle un ami agrégé de Fabrication Mécanique à 23 ans, une tête, qui a ensuite fait les beaux jours des IPR pour un tas de mission. Culture G très faible. Il venait d'un milieu où cela existait à peine. Et ma mère qui disait toujours "Pour un prof, quand même, il n'a pas beaucoup de bagage" (Comprendre "bagage culturel").
Une amie certifiée de Lettres parlant à propos d'une église moderne de notre département "J'ai toujours cru que c'était une mosquée protestante...".
Et moi, je repense aux horreurs que j'ai pu dire aux élèves à certains moments en géo (quand il fallait expliquer la rotation de la terre et les saisons...)

Enfin, un jour , à la cantine, la collègue de musique parlait de "Messiaen, qui habitait à La Loeuf du Houx". A 6/7 km du collège.
Moi, je ne connaissais pas Messiaen, le compositeur -c'était de lui dont il s'agissait- j'avais 40 ans, mais avec des trous dans ma raquette culturelle. J'ai demandé en quelle classe il était... [Le Figaro] Lecture: des «pédagogies inacceptables» toujours à l’œuvre en classe de CP - Page 22 1665347707

Bref, ne jugeons pas du niveau de quelqu'un , fusse-t-il enseignant, sur ses bourdes ou ses lacunes, surtout quand elles ne sont pas dans son champ disciplinaire.

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par maikreeeesse Mer 14 Déc - 14:08
Messiaen était un enfant du pays, je me baigne tout l'été face à sa maison[Le Figaro] Lecture: des «pédagogies inacceptables» toujours à l’œuvre en classe de CP - Page 22 Maison10.
Je connaissais sa musique (les oiseaux et tout et tout) mais je n'aurais pas su écrire correctement son nom. La culture se forge tous les jours. L'important est de ne pas y voir une forme de supériorité. Normalement le professeur aime faire  partager ses connaissances, pas abaisser celui qui ne les aurait pas (encore).
Sapotille
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par Sapotille Mer 14 Déc - 14:33
maikreeeesse a écrit:
La culture se forge tous les jours. L'important est de ne pas y voir une forme de supériorité. Normalement le professeur aime faire  partager ses connaissances, pas abaisser celui qui ne les aurait pas (encore).

Quel plaisir de lire cette vérité !
Petite instit, puis PE, c'est sur Néo que je me cultive encore et toujours,  mais je suis fière de savoir qu'un de mes anciens élèves a fait des études d'histoire et est devenu conservateur du Mémorial de la Shoah du Struthof ...
Il a coutume de dire que ce sont les leçons d'histoire des classes de CE1 et CE2 avec Madame Sapotille qui l'ont passionné et motivé à choisir ces études  supérieures.
Clecle78
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par Clecle78 Mer 14 Déc - 14:48
Mon mari qui est d'origine étrangère et d'un milieu très modeste n'avait aucune culture occidentale et lu peut-être 2 ou 3 livres dans toute sa scolarité. Il serait bien en peine de savoir qui est Messiaen même si il a découvert pas mal de choses avec moi. Et franchement ça ne le perturbe pas. Son intelligence fonctionne différemment, c'est tout.
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par NLM76 Jeu 15 Déc - 10:39
Catherine Huby a écrit:
Ce n'est pas parce que Mme Macmuche n'emploie jamais le passé simple que son fiston dit « Et alors,les animaux, ils se mettèrent à crier et les voleurs, ils s'enfuyèrent », c'est juste parce qu'à 5 ans et demi, on n'a pas encore assez fréquenté les œuvres littéraires classiques et ce n'est pas parce que Monsieur Dumoulin-Delarue-Dupuits arrive tous les matins en retard avec sa fillette pas coiffée que la dite fillette ne tient pas bien son crayon lorsqu'elle écrit.
Dans ces deux cas, c'est bien à l'école maternelle de faire le travail, inlassablement, avec bonne humeur et raison, et ce d'autant plus qu'elle est en « début de chaîne » et que son « public » est, familialement parlant, très éloigné de la chose scolaire ! Si elle n'y met pas tout son cœur actuellement, sans pression, sans précipitation mais sans faillir, il y a de fortes chances pour que, même au CM2, le jeune Macmuche et la petite Dumoulin-Delarue-Dupuis écrivent encore en tenant leur crayon comme un pic à glace ils s'enfuyèrent quand les animaux se mettèrent à crier."
J'aime beaucoup.

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Sites du grip :
  • http://instruire.fr
  • http://grip-editions.fr

Mon site : www.lettresclassiques.fr

«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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par epekeina.tes.ousias Jeu 15 Déc - 10:46
NLM76 a écrit:
Catherine Huby a écrit:
Ce n'est pas parce que Mme Macmuche n'emploie jamais le passé simple que son fiston dit « Et alors,les animaux, ils se mettèrent à crier et les voleurs, ils s'enfuyèrent », c'est juste parce qu'à 5 ans et demi, on n'a pas encore assez fréquenté les œuvres littéraires classiques et ce n'est pas parce que Monsieur Dumoulin-Delarue-Dupuits arrive tous les matins en retard avec sa fillette pas coiffée que la dite fillette ne tient pas bien son crayon lorsqu'elle écrit.
Dans ces deux cas, c'est bien à l'école maternelle de faire le travail, inlassablement, avec bonne humeur et raison, et ce d'autant plus qu'elle est en « début de chaîne » et que son « public » est, familialement parlant, très éloigné de la chose scolaire ! Si elle n'y met pas tout son cœur actuellement, sans pression, sans précipitation mais sans faillir, il y a de fortes chances pour que, même au CM2, le jeune Macmuche et la petite Dumoulin-Delarue-Dupuis écrivent encore en tenant leur crayon comme un pic à glace ils s'enfuyèrent quand les animaux se mettèrent à crier."
J'aime beaucoup.

Cela étant dit, on appelait ça jadis “erreur intelligente” — cela témoigne d'une certaine perception de la structure (un irrégulier conjugué sur le modèle d'un premier groupe) — et j'avoue que j'ignorais qu'il fallait fréquenter les classiques pour connaître “se mettre à”... Razz

Tenir le crayon comme un pic à glace, c'est autre chose (et là-dessus, pour ce que je vois, les collègues de maternelle et d'élémentaire que je vois régulièrement ne laissent pas passer; cela a pu être le cas il y a des années : je ne le vois plus comme cela pouvait arriver il y a 25 ans).

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par NLM76 Jeu 15 Déc - 11:28
epekeina.tes.ousias a écrit:
NLM76 a écrit:
Catherine Huby a écrit:
Ce n'est pas parce que Mme Macmuche n'emploie jamais le passé simple que son fiston dit « Et alors,les animaux, ils se mettèrent à crier et les voleurs, ils s'enfuyèrent », c'est juste parce qu'à 5 ans et demi, on n'a pas encore assez fréquenté les œuvres littéraires classiques et ce n'est pas parce que Monsieur Dumoulin-Delarue-Dupuits arrive tous les matins en retard avec sa fillette pas coiffée que la dite fillette ne tient pas bien son crayon lorsqu'elle écrit.
Dans ces deux cas, c'est bien à l'école maternelle de faire le travail, inlassablement, avec bonne humeur et raison, et ce d'autant plus qu'elle est en « début de chaîne » et que son « public » est, familialement parlant, très éloigné de la chose scolaire ! Si elle n'y met pas tout son cœur actuellement, sans pression, sans précipitation mais sans faillir, il y a de fortes chances pour que, même au CM2, le jeune Macmuche et la petite Dumoulin-Delarue-Dupuis écrivent encore en tenant leur crayon comme un pic à glace ils s'enfuyèrent quand les animaux se mettèrent à crier."
J'aime beaucoup.

Cela étant dit, on appelait ça jadis “erreur intelligente” — cela témoigne d'une certaine perception de la structure (un irrégulier conjugué sur le modèle d'un premier groupe) — et j'avoue que j'ignorais qu'il fallait fréquenter les classiques pour connaître “se mettre à”... Razz

Tenir le crayon comme un pic à glace, c'est autre chose (et là-dessus, pour ce que je vois, les collègues de maternelle et d'élémentaire que je vois régulièrement ne laissent pas passer; cela a pu être le cas il y a des années : je ne le vois plus comme cela pouvait arriver il y a 25 ans).
Je ne vois pas où Catherine dit qu'il s'agit d'apprendre "se mettre à". D'autre part, évidemment, ni Catherine ni moi ne sommes assez sots pour ne pas voir qu'appliquer par analogie la conjugaison du 1er groupe à celle des autres groupes, pour des enfants qui apprennent à parler, est une preuve d'intelligence. En revanche, l'école fait son travail lorsqu'elle parvient à enseigner, quelque part entre la petite section et le CM2, une structuration plus complexe de la conjugaison du passé simple, de sorte que les enfants sachent dire "ils s'enfuirent", "ils se mirent à crier".
Pour ce qui est du pic à glace, tu m'en vois ravi. Pour l'instant, les jeunes gens de 16 à 17 ans que je vois en première sont encore au moins 80% à mal tenir leur stylo, et surtout, à être incapables d'écrire vite et bien sans souffrir.

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par epekeina.tes.ousias Jeu 15 Déc - 11:52
NLM76 a écrit:
Je ne vois pas où Catherine dit qu'il s'agit d'apprendre "se mettre à".

Ce n'est pas parce que Mme Macmuche n'emploie jamais le passé simple que son fiston dit « Et alors,les animaux, ils se mettèrent à crier et les voleurs, ils s'enfuyèrent », c'est juste parce qu'à 5 ans et demi, on n'a pas encore assez fréquenté les œuvres littéraires classiques

Si fiston dit “ils se mettèrent à crier” — c'est parce que… C'est seulement que le passé simple est plus rare à l'oral, j'en suis d'accord — mais ce dont je doute, c'est que “se mettre à” soit si “littéraire” et “classique” que cela.



Pour ce qui est du pic à glace, tu m'en vois ravi. Pour l'instant, les jeunes gens de 16 à 17 ans que je vois en première sont encore au moins 80% à mal tenir leur stylo, et surtout, à être incapables d'écrire vite et bien sans souffrir.

Être incapable d'écrire vite et bien, disons l'écriture fluide : pour ma part, je soupçonne que la (très forte) diminution du temps passé à copier n'y est pas pour rien. Je soupçonne moins, pour ma part, les “exercices à trous” (hantise de beaucoup : mais il y avait déjà, jadis des stencils, et on trouve des exercices avec copie complète)? Est-ce une inflation de photocopies, un surcroît de travail à l'oral ? Il est difficile de faire des hypothèses. Mais ce n'est pas parce qu'on voit des élèves de 15/16 ans ne pas être capables d'écrire rapidement et lisiblement (même chose chez des étudiants de 20/25 ans) que cela “vient” forcément du primaire : et de même l'absence parfois dramatique de maîtrise de la grammaire élémentaire (en plus d'une écriture peu lisible et déformée) que je peux trouver chez des étudiants de L3 ne vient pas nécessairement de la désinvolture ou des erreurs pédagogiques des profs de lettres dans le secondaire. Ces étudiants-là, lorsque je discute avec eux, me disent très souvent qu'ils “ont toujours été comme ça” : illusion rétrospective mise à part, et en plus de signifier qu'ils en ont conscience mais ne savent pas quoi faire pour y remédier, cela veut sans doute dire que ça leur est arrivé très tôt dans leur scolarité et qu'ils ont fait du “sur-place” ensuite (de ce point de vue).

En revanche, la mauvaise tenue et du stylo et corporelle, ça me paraît plus curieux et plus compliqué que cela : pas mal de PE, depuis (environ) 8/10 ans me disent qu'ils voient cela apparaître/réapparaître vers le CM — alors qu'auparavant, ce n'était pas le cas. Évidemment qu'ils “rectifient”, mais il n'est pas du tout évident que cela puisse suffire à enrayer le phénomène. Évidemment, je n'en fais pas une règle générale.
Mais autant j'ai pu observer, dans les années 90, des négligences sur la manière de (ne pas!) s'asseoir pour écrire, la manière de tenir le style, le cahier etc., autant je ne vois pas cela dans les classes de maternelle et de primaire que je visite régulièrement (c'est même le contraire, y compris dans deux départements réputés difficiles sur deux académies différentes). L'écriture est à l'évidence une “technique du corps” (Mauss) : il se pourrait bien que la discipline du corps soit en régression, parce que l'on y passe statistiquement moins de temps (alors que la répétition sur le temps long est l'essentiel, comme pour les gammes sur un instrument), mais aussi parce que cela n'est plus du tout valorisé sur le plan général et dans la société : “ce sont seulement les profs qui exigent cela, mais…” Il y a peut-être un quelque chose comme ça qui s'insinue chez pas mal d'élèves — et ceci quoi que les PE puissent faire.

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par Iphigénie Jeu 15 Déc - 12:00
Pour la tenue du stylo et la forme des lettres mon expérience est qu’elle a continuellement empiré ( au sens d’élèves de plus en plus nombreux à) des années 90 à 2016. Y compris des bts qui ne comprenaient pas pourquoi on ne pouvait pas rendre un devoir écrit au crayon…
Pour les exercices à  trous ( aujourd'hui sur ordinateur ) ils n’ont jamais fait progresser personne. Juste une façon de croire qu’on a travaillé alors qu’on n’a rien fait d’utile ( pour l’élève comme pour le professeur): ma fille a eu en 6/5e ( année 2000-2005)un spécialiste des photocopies à exercices à trous : ça occupait la classe des heures entières : une heure pour les faire en autonomie, une heure pour les corriger. Je ne dis pas que ce soit le cas général mais ce n’était pas non plus un cas rare.
lene75
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par lene75 Jeu 15 Déc - 12:36
J'ai en effet l'impression que la tenue du stylo redevient une préoccupation. Encore une fois dans les écoles il y aura une différence de génération suivant les PE : tout le monde ne s'y met pas en même temps. Sans surprise mes aînées qui ont subi la méthode Chut je lis ! n'ont pas appris à tenir leur stylo, tandis que ma dernière qui fait de la syllabique fait chaque jour les exercices de Laurence Pierson à l'école et en devoirs à la maison.

J'en profite pour ma part pour me rééduquer autant que possible, puisque je suis aussi de la génération "laissez-les faire comme ils veulent" malgré les protestations de ma mère. Et je viens à l'instant d'écrire sur la copie d'un élève brillantissime qui ne maîtrise ni les accords des verbes quand le sujet ne précède pas immédiatement le verbe, ni les accords de participes passés, ni l'usage des négations, ni la construction des interrogatives indirectes (ça fait beaucoup pour un excellent élève qu'on va envoyer dans une excellente classe préparatoire), ni, donc, la tenue correcte du stylo, que je lui donnerais des références d'exercices dans l'espoir d'améliorer sa graphie.
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par pseudo-intello Jeu 15 Déc - 13:33
Vos exemples de "ils se mettèrent" et le concept intelligente me rappelle que mes mômes, qui ont grandi avec nu pourcentage très élevé de livres au passé simple dans leurs bibliothèques respectives (et nous avons beaucoup de livres), à 4 ou 5 ans, en créant des histoires avec leurs jouets, racontaient ce qu'ils faisaient (s'ils jouaient les narrateurs, ce qui arrivait quelquefois, même si la plupart du temps, ils faisaient plutôt les dialogues de leurs personnages), et à chaque fois qu'ils racontaient en jouant, ils yaourtaient du passé simple. Alors oui, il y avait des "ils revenèrent" (mais pas que), mais à 5 ans, il s'agit à mon sens d'erreur intelligente. A 15, quand on a eu des cours sur le passé simple, non.

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par epekeina.tes.ousias Jeu 15 Déc - 13:50
Non, tu as raison, à 15 ans, c'est autre chose.

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par Elyas Jeu 15 Déc - 13:56
epekeina.tes.ousias a écrit:Non, tu as raison, à 15 ans, c'est autre chose.

Il faut voir aussi comment sont les conditions de cours et d'enseignement. Tout le monde n'a pas l'égalité devant l'enseignement assuré.
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