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Article - Pourquoi j’ai démissionné de l’Éducation nationale Empty Article - Pourquoi j’ai démissionné de l’Éducation nationale

par Luigi_B Dim 11 Mar 2012 - 2:04
Dans "Le Monde des lecteurs" du 9 mars : http://mediateur.blog.lemonde.fr/2012/03/09/pourquoi-jai-demissionne-de-leducation-nationale/

Pourquoi j’ai démissionné de l’Éducation nationale?

Pourquoi j’ai démissionné de l’Éducation nationale au bout de 15 ans de service

« Vous ne savez pas noter », « ça sert à rien votre cours », « elle est folle, celle-là!», « elle me dégoûte, elle ». C’est, entre autres, ce que l’on peut entendre de la bouche d’élèves quand on travaille en lycée sensible. Évidemment, les élèves de ce type de lycée ne sont pas tous contre l’école, mais les comportements anti-scolaires sont courants, pour ne pas dire constants, voire normaux. Oui, normaux dans le sens où ils sont la norme. Et la norme est : bavarder en classe, chahuter, tricher lors des devoirs surveillés, utiliser son téléphone portable, parler de façon grossière et agressive, ne pas écouter, répondre de façon outrancière, ne pas faire ses devoirs…

Et pourtant, ce ne sont pas ces comportements qui m’ont conduite à démissionner, même si supporter quotidiennement ces avanies usent, éreintent, érodent les meilleures volontés. Au fond, les élèves de zone sensible se retrouvent dans des ghettos sociaux et souvent ethniques lire le livre d'Agnès Van Zanten, L’école de la périphérie , «PUF», 2001 , qui ne sont guère différents de leur quartier. D’ailleurs, ils ne font pas toujours, pour ne pas dire pas du tout, la différence. Si leurs attitudes ne sont pas excusables, car ils font finalement le choix, tout en étant au lycée, d’œuvrer contre l’enseignement, sont-ils réellement à blâmer ? Après tout, on leur fait croire qu’ils ont les capacités de réussir au lycée et d’avoir leur baccalauréat, et avec ce dernier en poche, qu’ils vont trouver un travail correctement rémunéré. Et le pire, la majorité des élèves aura son baccalauréat (pour le reste, c’est autre chose, la sélection étant repoussée). Les élèves sont-ils meilleurs qu’il y a plus de dix ans, quand j’ai commencé à enseigner en lycée sensible ? Non. Il suffit de casser le thermomètre, autrement dit de modifier les modalités d’évaluation, d’atténuer les exigences, de ne pas tenir compte de l’orthographe ni de la syntaxe… On fabrique des élèves bons nulle part : ni dans les travaux intellectuels, qui répugnent aux élèves d’ailleurs («beurk, un livre ! »… sans compter le plagiat éhonté sur internet), ni dans les activités de service du fait de leur comportement pour le moins inadéquat, ni dans les travaux manuels, puisqu’on leur a fait croire que ces derniers étaient médiocres ou ne menaient à rien. Mais tout va bien dans le meilleur des mondes, car si la situation perdure et se dégrade, ce n’est pas du fait de la simple inertie du système.

L’objectif n’est plus d’éduquer, d’instruire, de préparer à des formations supérieures ou à un métier, notamment en lycée sensible. L’objectif est de « faire garderie », éviter que ces jeunes d’origine populaire ne tiennent les murs et ne se livrent à la délinquance. Puis, cela sera toujours moins de jeunes inscrits au chômage tant qu’ils sont scolarisés. Que cela se passe bien ou mal en classe, que les cours soient bien préparés ou pas, peu importe ; il suffit juste d’éviter que cela ne s’ébruite, notamment dans les médias. Ce ne sont pas les parents qui se plaindront : ils attendent du lycée que l’on éduque leurs enfants et peu viennent aux réunions. Les enseignants ? Il n’y a pas de collectif ; le corps professoral est atomisé. Quatre catégories d’attitudes sont repérables (Albert O. Hirschman, Exit, voice, loyalty , 1970) : la défection (par la mutation, les arrêts longue maladie, la démission), la prise de parole (elle a peu d’effets tant elle est minoritaire), la résignation et la loyauté. Et la loyauté, dans un lycée sensible, est grassement rémunérée, grâce aux heures supplémentaires qu’il est possible de faire. Une manne dont ne se prive pas la Direction, qui suit parfaitement l’adage « diviser pour mieux régner ». Et la réforme du lycée, qui réduit les heures disciplinaires, a davantage exacerbé les querelles et la chasse aux heures.

Et le Savoir ? Comme m’a répondu un inspecteur : « cela fait depuis longtemps que l’école n’instruit plus : c’est aux élèves de construire leurs savoirs ». Ce qui compte maintenant ? Les compétences, y compris extrascolaires. La réforme écorne un peu plus les disciplines, par une diminution des horaires et une réécriture des programmes, contestée d’ailleurs ; à la place, des heures d’aide personnalisée, qui n’ont rien de personnalisées ni ne relèvent de l’aide auprès des élèves. Car ces heures sont imposées et on les remplit pour occuper les élèves, bien trop nombreux pour que l’on puisse réellement apporter un soutien quelconque et avec le mot d’ordre : « surtout pas de disciplinaire ni d’aide aux devoirs ! ». Mais cela fait toujours des heures en plus pour les professeurs volontaires…

Si des enseignants essaient de faire honnêtement leur métier, et il y en a, ils œuvrent dans un ensemble qui manque cruellement de professionnalisme. D’ailleurs, les professionnels disparaissent : les conseillers d’orientation, les documentalistes… les soutiens auprès des élèves sont souvent confiés à des étudiants, sous contrat d’assistance pédagogique, qui n’ont aucune formation en la matière. Les enseignants prennent en charge de plus en plus de tâches, pour lesquelles ils ne sont pas formés, et sont seuls face aux difficultés qu’ils peuvent rencontrer en classe, ou dans la préparation des cours et l’élaboration de projet. Mais, de toute façon, demande-t-on aux professeurs d’enseigner ? Inutile d’avoir des professionnels, autant supprimer leur formation… Si j’ai démissionné, c’est parce que j’aime mon métier. Or, en France, dans le système actuel, cela devient de plus en plus difficile et surtout non exigé de le faire. Et « une société qui n’enseigne pas est une société qui ne s’aime pas » Charles Péguy (Pour la rentrée). Et qui n’aime pas son école.
Sophie Maunier, Roubaix (Nord)

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par Ergo Dim 11 Mar 2012 - 8:00
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par Celadon Dim 11 Mar 2012 - 8:25
Elle a tout dit, Sophie. J'espère qu'elle trouvera un boulot à la hauteur de ses ambitions parce que concernant celui qu'elle quitte, côté ambitions...
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par kensington Dim 11 Mar 2012 - 8:37
Bravo Sophie!

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par Thalia de G Dim 11 Mar 2012 - 8:56
Magnifique, lucide... et désespérant.
Lise avait choisi une autre issue. Sad

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Soleil noir de mes mélancolies.
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par Blan6ine Dim 11 Mar 2012 - 8:58
Elle met le doigt là où ça fait mal.
J'espère pour elle qu'elle va ailleurs trouver une voie où ses idéaux et son éthique seront moins souillés.
Et pourtant, quelle autre solution qu'y croire et persévérer, s'appuyer sur ses valeurs et ses principes? Tenir, tant que c'est possible...
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par menerve Dim 11 Mar 2012 - 9:15
Oui encore faut-il la trouver cette autre voie et pouvoir en vivre.....

Mais elle a bien résumé la situation!
Roumégueur Ier
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par Roumégueur Ier Dim 11 Mar 2012 - 9:22
Désespérant, tout est fait pour nous pousser vers la porte et c'est encore mieux si c'est de notre plein gré! La multiplication de tâches chronophages et de réunions inutiles nous éloignent du coeur de notre métier : transmettre un savoir. Et le pire, ce sont les livrets de compétence et leurs 97 items, divisés en pléthore de sous-items : combien d'heures pour les remplir, pour combien en plus sur le salaire? Zéro! Rappelons que ce livret n'est qu'un outil qui nous est proposé, il n'a rien d'obligatoire, seul le socle commun est obligatoire : libre à l'enseignant de l'évaluer comme il le souhaite. Au fait, ceux qui ne valident pas ce livret, doit-on dire qu'ils sont incompétents? Déjà?
De même, l'école du socle, basée sur des contrats d'objectif, n'est qu'une préconisation de la circulaire de rentrée 2011 : les enseignants peuvent refuser cette expérimentation en demandant aux inspecteurs les moyens horaires et financiers qui devraient accompagner ces écoles hybrides. Moyens qui n'existent pas...
Nous avons souvent ce sentiment confus de faire acte de 'résistance' en ne démissionnant pas, en se disant que cela ne pourra pas être pire, qu'un jour tout ira mieux, mais vu le débat des politiques sur l'école qui chaque jour montrent combien ils méconnaissent le sujet, il vaut mieux prendre les choses en main et ne compter que sur nous-mêmes!
Pour finir, quelqu'un aurait des données fiables sur le taux de démission des stagiaires?
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par Pryneia Dim 11 Mar 2012 - 9:26
C'est si triste... J'espère que Sophie saura rebondir. Pour l'instant, ce métier me plaît encore, malgré tout, mais j'ai déjà sérieusement envisagé une reconversion.

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par Lédissé Dim 11 Mar 2012 - 9:52
Eh oui, malheureusement c'est tout à fait ça.
Comment faire prendre conscience aux parents que l'école - et donc l'avenir - de leurs enfants est sacrifiée ? Quelle "prise de parole" sera efficace ? Arrivera un moment où il sera trop tard, même s'il venait au pouvoir un gouvernement conscient de la catastrophe et de bonne volonté, pour redresser la barre, parce que les nouvelles générations, si mal instruites, ne pourront même pas fournir le quota de professeurs nécessaire pour instruire les suivantes...

Je sais très bien déjà que je ne ferai pas ce métier jusqu'à la retraite. Je n'ai pas la force d'âme ni la résistance nécessaires dans les conditions qui sont les nôtres.

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par Celadon Dim 11 Mar 2012 - 9:59
Je ne suis pas certaine que le problème se posera en ces termes Lady C car ceux qui seront chargés de juger si le futur prof est compétent ou pas auront un niveau extrêmement différent du nôtre, et donc... d'ailleurs on recrute aujourd'hui des gens dont on n'aurait jamais voulu comme enseignants il y a une dizaine d'années. Que sera-ce dans 10 ans ? Dans 20 ans ? Si la médiocrité du niveau se généralise comme cela semble être le cas, où placera-t-on la différence entre les formateurs et les formatés ?
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par Lédissé Dim 11 Mar 2012 - 10:04
Oui, en fait c'est ça que je voulais dire : on recrutera bien des professeurs, mais arriveront-ils à redresser le niveau, étant eux-mêmes extrêmement mal formés...

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par Luigi_B Dim 11 Mar 2012 - 10:24
Si déjà on n'arrive plus à recruter en nombre suffisant des professeurs pour des postes pourtant toujours moins nombreux au concours, et qu'en plus ceux qui ont déjà été recrutés démissionnent... cafe

En fait voici la seule vraie question que je me pose en lisant cette tribune, à laquelle je souscris presque entièrement : pourquoi ne démissionné-je pas moi-même ?

Après des années de pain de noir, j'ai obtenu un bon poste dans un lycée privilégié et jusqu'ici protégé des réformes par un chef d'établissement que j'estimais, un ancien professeur et un esprit libre. Je me pose de nouveau à la question depuis que la direction a récemment changé dans le sens d'une chatellisation accélérée et que la réforme de l'évaluation va lui donner tout pouvoir sur moi.

Avec cette réforme ubuesque nous allons perdre la seule chose qui nous restait encore, notre liberté pédagogique et notre indépendance. Allez je me cite moi-même :
Les professeurs bénéficient en effet dans notre pays, et depuis trop longtemps, d’une insupportable liberté de conscience et de parole. Ne se croient-ils pas naïvement investis d’une mission supérieure au service de la nation, d’une vocation, celle d’apporter le savoir à tous ? Sous ce prétexte pathétique, ces derniers intellectuels ont l’impudence de juger du bien-fondé des réformes ministérielles, de les dénoncer, voire même de se révolter contre la main qui les nourrit !

Or, à la vérité, qu’est-ce qu’un enseignant peut bien connaître à l’enseignement ? Tous nos graves docteurs en sciences de l’éducation, qui travaillent depuis si longtemps dans les caves du ministère, connaissent bien mieux les exigences du métier et savent bien mieux comment lutter contre l’échec scolaire à moindre coût. Pourquoi, à titre d’exemple, la mise en place de l’accompagnement personnalisé au lycée rencontre-t-elle tant de mauvaise volonté, au prétexte que la personnalisation se fait par groupes de vingt élèves ou plus, que le professeur accompagne les élèves dans des disciplines qu’il ne connaît pas, que cet accompagnement non évalué se fait au détriment d’heures de cours judicieusement supprimées, ou que sais-je encore ? Mauvaise foi que tout cela, et néanmoins une telle inertie nuit à l’application effective et rapide de cette admirable réforme. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de cette déplorable indépendance et liberté d’esprit des professeurs qui n’a que trop duré.

Grâce à la réforme de l’évaluation des enseignants le chef d’établissement pourra non seulement créer une saine émulation entre les professeurs sous son autorité, récompensant à sa discrétion non pas ceux qui lui paraissent bien travailler, mais ceux qui lui donneront l'impression de travailler mieux que les autres. Mais surtout, dans un esprit de féodalité toute moderne, l’avancement des professeurs sera désormais conditionné à une sujétion absolue au chef d’établissement, lui-même soumis au rectorat, lui-même soumis au ministère. Ainsi le Ministre de l’Éducation nationale pourra-t-il enfin être ainsi assuré de la loyauté sans faille de tous les professeurs de ce pays pour appliquer, dans l'unanimité et l'enthousiasme, les nouvelles réformes à venir, sans plus craindre les invariables grèves, la contestation ou même la mauvaise volonté. N'est-ce pas un progrès remarquable pour l'école (et le Ministre) ?

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par lalilala Dim 11 Mar 2012 - 10:27
kensington a écrit:Bravo Sophie!

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par Lédissé Dim 11 Mar 2012 - 10:32
Luigi_B a écrit:

Avec cette réforme ubuesque nous allons perdre la seule chose qui nous restait encore, notre liberté pédagogique et notre indépendance. Allez je me cite moi-même :
Les professeurs bénéficient en effet dans notre pays, et depuis trop longtemps, d’une insupportable liberté de conscience et de parole. Ne se croient-ils pas naïvement investis d’une mission supérieure au service de la nation, d’une vocation, celle d’apporter le savoir à tous ? Sous ce prétexte pathétique, ces derniers intellectuels ont l’impudence de juger du bien-fondé des réformes ministérielles, de les dénoncer, voire même de se révolter contre la main qui les nourrit !

Or, à la vérité, qu’est-ce qu’un enseignant peut bien connaître à l’enseignement ? Tous nos graves docteurs en sciences de l’éducation, qui travaillent depuis si longtemps dans les caves du ministère, connaissent bien mieux les exigences du métier et savent bien mieux comment lutter contre l’échec scolaire à moindre coût. Pourquoi, à titre d’exemple, la mise en place de l’accompagnement personnalisé au lycée rencontre-t-elle tant de mauvaise volonté, au prétexte que la personnalisation se fait par groupes de vingt élèves ou plus, que le professeur accompagne les élèves dans des disciplines qu’il ne connaît pas, que cet accompagnement non évalué se fait au détriment d’heures de cours judicieusement supprimées, ou que sais-je encore ? Mauvaise foi que tout cela, et néanmoins une telle inertie nuit à l’application effective et rapide de cette admirable réforme. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de cette déplorable indépendance et liberté d’esprit des professeurs qui n’a que trop duré.

Grâce à la réforme de l’évaluation des enseignants le chef d’établissement pourra non seulement créer une saine émulation entre les professeurs sous son autorité, récompensant à sa discrétion non pas ceux qui lui paraissent bien travailler, mais ceux qui lui donneront l'impression de travailler mieux que les autres. Mais surtout, dans un esprit de féodalité toute moderne, l’avancement des professeurs sera désormais conditionné à une sujétion absolue au chef d’établissement, lui-même soumis au rectorat, lui-même soumis au ministère. Ainsi le Ministre de l’Éducation nationale pourra-t-il enfin être ainsi assuré de la loyauté sans faille de tous les professeurs de ce pays pour appliquer, dans l'unanimité et l'enthousiasme, les nouvelles réformes à venir, sans plus craindre les invariables grèves, la contestation ou même la mauvaise volonté. N'est-ce pas un progrès remarquable pour l'école (et le Ministre) ?

Je ne pourrais pas être plus d'accord...

Spoiler:

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par pitchounette Dim 11 Mar 2012 - 10:32
Pryneia a écrit:C'est si triste... J'espère que Sophie saura rebondir. Pour l'instant, ce métier me plaît encore, malgré tout, mais j'ai déjà sérieusement envisagé une reconversion.
Je partage ton avis pour Sophie
L'idée de la reconversion approche aussi de plus en plus pour moi car je n'aurais pas la force mentale et physique de refaire une année comme je vis

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par lalilala Dim 11 Mar 2012 - 10:40
Pareil. J'attends juste une situation plus stable pour tenter...

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par WonderWoman Dim 11 Mar 2012 - 11:39
lalilala a écrit:
kensington a écrit:Bravo Sophie!

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j'ai la chance d'avoir une double formation et d'avoir une peut être porte de sortie.
j'y travaille.
et pourtant, dieu sait que je suis attachée à l'enseignement. mais à un moment donné, même quand on y est attaché, il faut être réaliste. Les conditions qui nous sont imposés, à nous, jeunes profs (quoi que pour ceux qui ont un peu d'ancienneté, ça ne doit pas être beaucoup mieux), nous empêchent de faire notre métier correctement.

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par Jane Dim 11 Mar 2012 - 12:23
lalilala a écrit:
kensington a écrit:Bravo Sophie!

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Hé hé, moi je suis en pleine cogitation de reconversion... rien de très précis mais tout devient moins flou. En tous cas, la suite se fera sans moi, reste juste à savoir quand je rendrai mon tablier.
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par MelanieSLB Dim 11 Mar 2012 - 12:32
Pareil, et ça me brise le coeur d'en être déjà à penser reconversion alors que ce métier, je l'ai dans la peau. Je n'ai jamis voulu faire autre chose, et j'ai bien du mal à savoir quoi faire d'autre, mais si je tiens à ma vie, va falloir que je trouve dans les 5 à 10 ans maxi.

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La réforme du collège en clair : www.reformeducollege.fr .

Et pour ceux qui voudraient en comprendre quelques fondements idéologiques:
De l’école, Jean-Claude Milner, visionnaire en 1984 (ça ne s'invente pas!) de ce qui nous arrive: "On ne dira pas que les enseignants sont l'appendice inutile d'une institution dangereuse et presque criminelle; on dira seulement qu'ils doivent devenir Autres: animateurs, éducateurs, grands frères, nourrices, etc. La liste est variable. Que, par là, les enseignants cessent d’être ce qu'ils doivent être, c'est encore une fois sortir de la question. On ne dira pas que les enseignants n'ont pas à exister, mais qu'ils ont à exister Autrement. Que cette Autre existence consiste à renoncer à soi-même pour disparaître dans la nuit éducative et s'y frotter, tous corps et tous esprits confondus, avec les partenaires de l'acte éducatif - manutentionnaires, parents, élèves, etc. -, seul un méchant pourrait en prendre ombrage." (page 24)
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par Invité Dim 11 Mar 2012 - 12:48
Re: Article - Pourquoi j’ai démissionné de l’Éducation nationale
par LadyC Aujourd'hui à 10:04

Oui, en fait c'est ça que je voulais dire : on recrutera bien des professeurs, mais arriveront-ils à redresser le niveau, étant eux-mêmes extrêmement mal formés...

C'est LA question que nous nous posons futurs professeurs et lire vos messages est assez angoissant 😢
Pour ma part c'est le métier que j'ai toujours voulu faire. J'ai organisé toute ma scolarité pour être professeur des écoles et quand j'entends parler les profs autour de moi je me dis :"est ce que je fais le bon choix ?" Mais les moments de doute sont vite effacés (pour le moment ???) chaque fois qu'on nous propose des stages ! Je suis consciente qu'un stage de 3 semaines ne reflète pas la totale vérité mais je veux garder un peu d'espoir ... à tort ou à raison ...
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par MelanieSLB Dim 11 Mar 2012 - 12:59
Chagirl95, même si je pense à me reconvertir, je ne regretterai jamais d'avoir aidé Augustin et Gianni à aimer l'anglais, d'avoir redonné confiance à Charlotte, d'avoir encouragé Marie et Géraldine à aller le plus loin possible, d'avoir fait prendre conscience à Norman et Vital des limites à ne pas dépasser, d'avoir encouragé Laura, Marine, Marie, Estelle à re-considérer leur position sur l'anglais, de pousser Johanna à apprendre toujours plus, d'avoir permis à Manon de se décoincer à l'oral, et d'avoir aidé une autre Manon à remettre de l'ordre dans sa vie en lui apprenant ce qu'était le respect, d'avoir fait comprendre à Alex et Olivia qu'on ne peut pas travailler à leur place, d'avoir donné le goût des LV à Cairion et Jamie... Et je peux continuer comme ça pendant plusieurs dizaines de lignes. Ça vaut toujours le coup. Faut juste ne pas s'oublier.

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Et pour ceux qui voudraient en comprendre quelques fondements idéologiques:
De l’école, Jean-Claude Milner, visionnaire en 1984 (ça ne s'invente pas!) de ce qui nous arrive: "On ne dira pas que les enseignants sont l'appendice inutile d'une institution dangereuse et presque criminelle; on dira seulement qu'ils doivent devenir Autres: animateurs, éducateurs, grands frères, nourrices, etc. La liste est variable. Que, par là, les enseignants cessent d’être ce qu'ils doivent être, c'est encore une fois sortir de la question. On ne dira pas que les enseignants n'ont pas à exister, mais qu'ils ont à exister Autrement. Que cette Autre existence consiste à renoncer à soi-même pour disparaître dans la nuit éducative et s'y frotter, tous corps et tous esprits confondus, avec les partenaires de l'acte éducatif - manutentionnaires, parents, élèves, etc. -, seul un méchant pourrait en prendre ombrage." (page 24)
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par Jane Dim 11 Mar 2012 - 13:03
Or on s'oublie; et quand on est arrivé au bout de notre semaine de boulot, il y a toujours un bouffon pour nous envoyer dans les gencives qu'on est des glandeurs. 😢
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par lalilala Dim 11 Mar 2012 - 13:05
voilà...et puis le mépris des supérieurs, et puis les sacrifices (vie perso) etc.

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par Mufab Dim 11 Mar 2012 - 13:07
Chagirl, j'ai un très mauvais souvenir de ces stages en responsabilité, alors que, recrutée sur liste supp', j'avais eu ma classe à moi pendant un an... Et j'ai compris là que je ne pourrais pas être remplaçante.
Donc si tu t'éclates lors de ces stages (peu valorisants, et hyper fliqués, j'ai trouvé), il y a de grandes chances pour que tu sois réellement faite pour ça.

D'autre part, je suis bien dans ma classe qu'à partir du moment où j'y suis relativement libre : libre de passer plus de temps sur ceci plutôt que sur cela, libre (ou obligée ?) de laisser tomber une partie du programme parce que la course contre la montre, le vu-vite-fait-du-moment-que-c'est-vu, et le saucissonnement de la journée ne me semblent pas correspondre au rythme d'apprentissage de jeunes enfants, libre de leur ménager des pauses (exposé, illustrations de poésie...) dans la journée.
En fait, je me dis que je ne suis pas dans les clous, que ma prochaine inspection risque d'être une cata parce que je n'arrive pas à les faire auto-construire leur savoir, que je n'arrive pas à assumer l'ensemble des disciplines pour lesquelles je me suis finalement engagée, que je suis bien médiocre... mais que, jusqu'à ce que l'on me vire, c'est moi, et moi seule, qui passerai la journée et l'année avec ces mômes, que ce ne sera ni l'IEN, ni le CPC, ni même le super-collègue-qui-arrive-à-tout-faire, ni les parents jamais en manque de conseils pédagogiques, ni les profs de collège (désolée...) qui se demandent bien ce que l'on a foutu en élémentaire à part de la pâte à sel et du tri sélectif, et que finalement, je ne m'en tire pas trop mal, que je fais avec ce que je suis, avec mes défauts et mes qualités, sans vouloir épater les parents ou me déculpabiliser avec de super projets qui en jettent, alors que dans le même temps la moitié de la classe ne sait pas faire une soustraction ou reconnaître le nom du verbe...
Et c'est là-dessus qu'il faut s'appuyer : même si l'on ne se sent pas au top, que l'on est infiniment, chacun, critiquable sur tel et tel aspect de la polyvalence ou de la démarche pédagogique attendue, on gère, on donne, on fait, on est là.
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