- IncalNiveau 2
Celadon a écrit:J'ai du mal à comprendre que seule l'idéologie néo-libérale commande des actions mortifères de cet ordre sur des millions de gens. Les décideurs doivent bien y avoir un intérêt autre, non ?
Je pense que l'on s'illusionne un peu en projetant sur les décideurs la responsabilité et/ou le bénéfice des transformations de l'Ecole.
1) La grande majorité des milieux professionnels ne s'intéresse plus autant qu'avant aux diplômes théoriques (beaucoup moins même). Un diplôme court et précis, un certain nombre de stages, et une bonne présentation de soi ("soft skills", capacité à bien présenter, à persuader, etc...) sont perçus comme bien plus cruciaux. Or l'école secondaire reste quand même sacrément cramponnée à des enseignements théoriques.
Pour les milieux professionnels plus exigeants intellectuellement (médecin, ingénieur, enseignant-chercheur, etc...), la part d'auto-formation de la part de l'apprenant est énorme en fait. Et une grande partie du cursus secondaire est dispensable selon vers quoi on s'oriente. C'est plus la méthodologie de travail (qui peut s'apprendre en tant que telle) que les contenus qui sont importants. Je suis personnellement partisan d'un entraînement plus précoce et spécialisé des élèves qui veulent s'engager dans des filières à haut niveau intellectuel.
2) Evidemment, il n'y a pas que le milieu professionnel qui est l'objectif de l'enseignement. Mais ce serait vraiment se voiler la face que de nier que les choses ont beaucoup évolué dans les soirées de Monsieur Durand : l'étalage de culture intellectuelle ou d'analyse du monde est perçu au mieux comme barbant, au pire comme suspect et condescendant. Il y a 20 ou 30 ans, la culture était un marqueur social, et il était très pertinent d'essayer d'homogénéiser le niveau des futurs adultes pour qu'ils n'en pâtissent pas. En 2020, autour d'un whisky japonais, d'une bière ipa ou d'un vin rouge servi dans un grand verre pour faire comme les New-Yorkais dans les sitcoms, on cause plutôt séries, enfants, travaux dans la maison, camping-car, maison secondaire, mariage du deuxième enfant oh la la on a eu un souci avec le traiteur (sujet variant selon la génération) ...
Je ne ferai pas l'unanimité en le pointant, mais j'ai de plus en plus l'impression que les profs sont des gens qui voudraient que leurs élèves leur ressemblent, dans leur façon "critique" de penser, ou dans leur amour de Flaubert, de Pythagore, ou de l'Empire Byzantin. L'expression d'une solitude sociale ? Ce n'est pas quelque chose que j'imagine, mais que j'entends. On déplore beaucoup, en salle des profs, on regrette, etc...
3) Il y a maintenant pas mal d'études (malheureusement payantes d'accès si on n'a pas un code d'universitaire) qui montrent de façon cohérente et consistante le profil de l'élève qui a le plus de chances de réussir. C'est brut mais c'est comme ça : un bon qi, un projet (qui peut être assez général, mais en tout cas pas "boh je vais voir"), et peu de sollicitations des profs. En gros : l'intello autonome.
En fin d'année dernière est sortie une étude portant sur plus de 2000 étudiants. Les élèves avec un bon qi ont leur réussite qui augmente avec leur travail. Les élèves avec un bas qi n'ont que peu de différences de résultats avec leur travail.
Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Alors tout ça, c'est peut-être moi qui débloque, mais malgré mon désamour total pour nos dirigeants, je reconnais un principe de réalité plus général : au-delà de l'apprentissage des "fondamentaux" (lire, écrire, compter), l'école défendue par beaucoup de profs - si j'en crois ce que j'entends en salle des profs - me semble plus tenir de l'idéologie et de l'anxiété face au changement du monde, que du sens pratique.
L'idéologie néo-libérale est profondément injuste dans le traitement des enseignants qui ont quand même été dans l'ensemble des employés loyaux et consciencieux. Mais ils n'ont par ailleurs peut-être pas tort dans leur volonté de transformer l'école, même s'ils s'y prennent assez mal (chaos total des réformes) et de manière antipathique.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
- BardamuNiveau 5
Incal a écrit:Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
- Not a PandaHabitué du forum
Bardamu a écrit:Incal a écrit:Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
Cet extrait vient de me mettre un cafard...
- AscagneGrand sage
C'est tout bonnement l'expression de la culture humaniste. Pour moi, ce n'est pas tant une question de volonté d'installer une ressemblance que le souhait de faire passer la culture générale et d'éveiller si possible la sensibilité, même si malheureusement le format et les contraintes scolaires peuvent constituer à la fois un facilitateur et un obstacle sur ce point.Incal a écrit:Je ne ferai pas l'unanimité en le pointant, mais j'ai de plus en plus l'impression que les profs sont des gens qui voudraient que leurs élèves leur ressemblent, dans leur façon "critique" de penser, ou dans leur amour de Flaubert, de Pythagore, ou de l'Empire Byzantin. L'expression d'une solitude sociale ?
- CeladonDemi-dieu
- IphigénieProphète
CausePour les milieux professionnels plus exigeants intellectuellement (médecin, ingénieur, enseignant-chercheur, etc...), la part d'auto-formation de la part de l'apprenant est énorme en fait. Et une grande partie du cursus secondaire est dispensable selon vers quoi on s'oriente. C'est plus la méthodologie de travail (qui peut s'apprendre en tant que telle) que les contenus qui sont importants. Je suis personnellement partisan d'un entraînement plus précoce et spécialisé des élèves qui veulent s'engager dans des filières à haut niveau intellectuel.
Et non pas illusion, mais constat de conséquence exact!Je pense que l'on s'illusionne un peu en projetant surles décideurs la responsabilité et/ou le bénéfice des transformations de l'Ecole
Quoique auto- formation souvent: payante, privée.
- CasparProphète
Bardamu a écrit:Incal a écrit:Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
Ok pour le constat mais que propose-t-il ?
- LefterisEsprit sacré
Pas vraiment d'accord. Devenu enseignant très tardivement, j'ai aussi le regard du citoyen- salarié -fonctionnaire que je fus, autodidacte en grande partie et baignant par loisir dans la partie de la culture que tu cites philo/histoire/ lettres. C'est un regard et un éclairage sur le monde, et quoi qu'on en pense le monde actuel, et comme enseignant je ne ne place pas la volonté de cultiver les élèves à mon image, ni à une image précise, mais de leur donner des outils intellectuels. Je n'ai d'ailleurs pas toujours fait de choix personnel entre les auteurs, les idées, les époques, et je ne joue pas Voltaire contre Rousseau, Montaigne contre Pascal, Le Renaissance contre le XIXe ou que sais-je. Je suis persuadé que le regard vaste de tout ce paysage historique, littéraire, philosophique fait apercevoir la multitude des ruisseaux qui irriguent ce que nous sommes, les oppositions, hésitations, contradictions. Je crois au contraire que cette habitude est bien plus un acte de résistance qu'un acte d'adhésion à une société qui les matraque par la culture commerciale assaisonnée d'une moraline politiquement correcte .Incal a écrit:Celadon a écrit:J'ai du mal à comprendre que seule l'idéologie néo-libérale commande des actions mortifères de cet ordre sur des millions de gens. Les décideurs doivent bien y avoir un intérêt autre, non ?
Je pense que l'on s'illusionne un peu en projetant sur les décideurs la responsabilité et/ou le bénéfice des transformations de l'Ecole.
1) La grande majorité des milieux professionnels ne s'intéresse plus autant qu'avant aux diplômes théoriques (beaucoup moins même). Un diplôme court et précis, un certain nombre de stages, et une bonne présentation de soi ("soft skills", capacité à bien présenter, à persuader, etc...) sont perçus comme bien plus cruciaux. Or l'école secondaire reste quand même sacrément cramponnée à des enseignements théoriques.
Pour les milieux professionnels plus exigeants intellectuellement (médecin, ingénieur, enseignant-chercheur, etc...), la part d'auto-formation de la part de l'apprenant est énorme en fait. Et une grande partie du cursus secondaire est dispensable selon vers quoi on s'oriente. C'est plus la méthodologie de travail (qui peut s'apprendre en tant que telle) que les contenus qui sont importants. Je suis personnellement partisan d'un entraînement plus précoce et spécialisé des élèves qui veulent s'engager dans des filières à haut niveau intellectuel.
2) Evidemment, il n'y a pas que le milieu professionnel qui est l'objectif de l'enseignement. Mais ce serait vraiment se voiler la face que de nier que les choses ont beaucoup évolué dans les soirées de Monsieur Durand : l'étalage de culture intellectuelle ou d'analyse du monde est perçu au mieux comme barbant, au pire comme suspect et condescendant. Il y a 20 ou 30 ans, la culture était un marqueur social, et il était très pertinent d'essayer d'homogénéiser le niveau des futurs adultes pour qu'ils n'en pâtissent pas. En 2020, autour d'un whisky japonais, d'une bière ipa ou d'un vin rouge servi dans un grand verre pour faire comme les New-Yorkais dans les sitcoms, on cause plutôt séries, enfants, travaux dans la maison, camping-car, maison secondaire, mariage du deuxième enfant oh la la on a eu un souci avec le traiteur (sujet variant selon la génération) ...
Je ne ferai pas l'unanimité en le pointant, mais j'ai de plus en plus l'impression que les profs sont des gens qui voudraient que leurs élèves leur ressemblent, dans leur façon "critique" de penser, ou dans leur amour de Flaubert, de Pythagore, ou de l'Empire Byzantin. L'expression d'une solitude sociale ? Ce n'est pas quelque chose que j'imagine, mais que j'entends. On déplore beaucoup, en salle des profs, on regrette, etc...
3) Il y a maintenant pas mal d'études (malheureusement payantes d'accès si on n'a pas un code d'universitaire) qui montrent de façon cohérente et consistante le profil de l'élève qui a le plus de chances de réussir. C'est brut mais c'est comme ça : un bon qi, un projet (qui peut être assez général, mais en tout cas pas "boh je vais voir"), et peu de sollicitations des profs. En gros : l'intello autonome.
En fin d'année dernière est sortie une étude portant sur plus de 2000 étudiants. Les élèves avec un bon qi ont leur réussite qui augmente avec leur travail. Les élèves avec un bas qi n'ont que peu de différences de résultats avec leur travail.
Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Alors tout ça, c'est peut-être moi qui débloque, mais malgré mon désamour total pour nos dirigeants, je reconnais un principe de réalité plus général : au-delà de l'apprentissage des "fondamentaux" (lire, écrire, compter), l'école défendue par beaucoup de profs - si j'en crois ce que j'entends en salle des profs - me semble plus tenir de l'idéologie et de l'anxiété face au changement du monde, que du sens pratique.
L'idéologie néo-libérale est profondément injuste dans le traitement des enseignants qui ont quand même été dans l'ensemble des employés loyaux et consciencieux. Mais ils n'ont par ailleurs peut-être pas tort dans leur volonté de transformer l'école, même s'ils s'y prennent assez mal (chaos total des réformes) et de manière antipathique.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
Or quand on valorise la "culture populaire", disant comme Bégaudeau que les classes populaires rejettent la culture scolaire, en sous-entendant qu'il faut leur laisser ce qu'ils aiment, on les livre à la main marchande qui les assomme littéralement, les faits consommer et les exploitera ensuite. J'en ai des classes populaires, et plus ils sont "populaires", plus ils sont esclaves : ils ont le culte du fric, de l'apparence, des marques sont passionnés par les cancans du show -biz et de la téléréalité, vivent collés aux écrans.
Le seul point où je serais d'accord, et avec Bégaudeau, c'est qu'onn'a pas toujours la maturité quand on est ado. Je m'ennuyais aussi, je traînais les pieds jusqu'au bac, n'aimant pratiquement que le sport (et encore, hors de l'école). Mais au moins j'ai acquis à mon corps défendant des bases, et quand j'ai remis (ou mis) le nez dans les Humanités, j'avais quelques outils. C'est pourquoi je combats fortement le pédagogisme, allié objectif du libéralisme économique, qui veut donner aux élèves "ce qu'ils aiment" "ce qu'ils connaissent", c'est-à-dire les chaînes mentales que leur impose l'environnement marchand dans lequel ils vivent.
_________________
"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- BalthazaardVénérable
Lefteris a écrit:Pas vraiment d'accord. Devenu enseignant très tardivement, j'ai aussi le regard du citoyen- salarié -fonctionnaire que je fus, autodidacte en grande partie et baignant par loisir dans la partie de la culture que tu cites philo/histoire/ lettres. C'est un regard et un éclairage sur le monde, et quoi qu'on en pense le monde actuel, et comme enseignant je ne ne place pas la volonté de cultiver les élèves à mon image, ni à une image précise, mais de leur donner des outils intellectuels. Je n'ai d'ailleurs pas toujours fait de choix personnel entre les auteurs, les idées, les époques, et je ne joue pas Voltaire contre Rousseau, Montaigne contre Pascal, Le Renaissance contre le XIXe ou que sais-je. Je suis persuadé que le regard vaste de tout ce paysage historique, littéraire, philosophique fait apercevoir la multitude des ruisseaux qui irriguent ce que nous sommes, les oppositions, hésitations, contradictions. Je crois au contraire que cette habitude est bien plus un acte de résistance qu'un acte d'adhésion à une société qui les matraque par la culture commerciale assaisonnée d'une moraline politiquement correcte .Incal a écrit:Celadon a écrit:J'ai du mal à comprendre que seule l'idéologie néo-libérale commande des actions mortifères de cet ordre sur des millions de gens. Les décideurs doivent bien y avoir un intérêt autre, non ?
Je pense que l'on s'illusionne un peu en projetant sur les décideurs la responsabilité et/ou le bénéfice des transformations de l'Ecole.
1) La grande majorité des milieux professionnels ne s'intéresse plus autant qu'avant aux diplômes théoriques (beaucoup moins même). Un diplôme court et précis, un certain nombre de stages, et une bonne présentation de soi ("soft skills", capacité à bien présenter, à persuader, etc...) sont perçus comme bien plus cruciaux. Or l'école secondaire reste quand même sacrément cramponnée à des enseignements théoriques.
Pour les milieux professionnels plus exigeants intellectuellement (médecin, ingénieur, enseignant-chercheur, etc...), la part d'auto-formation de la part de l'apprenant est énorme en fait. Et une grande partie du cursus secondaire est dispensable selon vers quoi on s'oriente. C'est plus la méthodologie de travail (qui peut s'apprendre en tant que telle) que les contenus qui sont importants. Je suis personnellement partisan d'un entraînement plus précoce et spécialisé des élèves qui veulent s'engager dans des filières à haut niveau intellectuel.
2) Evidemment, il n'y a pas que le milieu professionnel qui est l'objectif de l'enseignement. Mais ce serait vraiment se voiler la face que de nier que les choses ont beaucoup évolué dans les soirées de Monsieur Durand : l'étalage de culture intellectuelle ou d'analyse du monde est perçu au mieux comme barbant, au pire comme suspect et condescendant. Il y a 20 ou 30 ans, la culture était un marqueur social, et il était très pertinent d'essayer d'homogénéiser le niveau des futurs adultes pour qu'ils n'en pâtissent pas. En 2020, autour d'un whisky japonais, d'une bière ipa ou d'un vin rouge servi dans un grand verre pour faire comme les New-Yorkais dans les sitcoms, on cause plutôt séries, enfants, travaux dans la maison, camping-car, maison secondaire, mariage du deuxième enfant oh la la on a eu un souci avec le traiteur (sujet variant selon la génération) ...
Je ne ferai pas l'unanimité en le pointant, mais j'ai de plus en plus l'impression que les profs sont des gens qui voudraient que leurs élèves leur ressemblent, dans leur façon "critique" de penser, ou dans leur amour de Flaubert, de Pythagore, ou de l'Empire Byzantin. L'expression d'une solitude sociale ? Ce n'est pas quelque chose que j'imagine, mais que j'entends. On déplore beaucoup, en salle des profs, on regrette, etc...
3) Il y a maintenant pas mal d'études (malheureusement payantes d'accès si on n'a pas un code d'universitaire) qui montrent de façon cohérente et consistante le profil de l'élève qui a le plus de chances de réussir. C'est brut mais c'est comme ça : un bon qi, un projet (qui peut être assez général, mais en tout cas pas "boh je vais voir"), et peu de sollicitations des profs. En gros : l'intello autonome.
En fin d'année dernière est sortie une étude portant sur plus de 2000 étudiants. Les élèves avec un bon qi ont leur réussite qui augmente avec leur travail. Les élèves avec un bas qi n'ont que peu de différences de résultats avec leur travail.
Bref, l'école ne joue qu'un rôle mineur par rapport à ce qu'elle prétend parfois avoir, dans le destin des élèves qui sont ensuite envoyés dans le supérieur. On sait tous qu'on le sait au fond de nous, on se raccroche au cas particulier de tel élève qui s'en est sorti grâce à, mais bon, la réalité est là. L'autonomie de l'élève nous précède, comme d'autres facteurs déterminants.
Alors tout ça, c'est peut-être moi qui débloque, mais malgré mon désamour total pour nos dirigeants, je reconnais un principe de réalité plus général : au-delà de l'apprentissage des "fondamentaux" (lire, écrire, compter), l'école défendue par beaucoup de profs - si j'en crois ce que j'entends en salle des profs - me semble plus tenir de l'idéologie et de l'anxiété face au changement du monde, que du sens pratique.
L'idéologie néo-libérale est profondément injuste dans le traitement des enseignants qui ont quand même été dans l'ensemble des employés loyaux et consciencieux. Mais ils n'ont par ailleurs peut-être pas tort dans leur volonté de transformer l'école, même s'ils s'y prennent assez mal (chaos total des réformes) et de manière antipathique.
Bon, j'ai peut-être été un peu bourrin en écrivant tout ça... Tant pis, je laisse...
Or quand on valorise la "culture populaire", disant comme Bégaudeau que les classes populaires rejettent la culture scolaire, en sous-entendant qu'il faut leur laisser ce qu'ils aiment, on les livre à la main marchande qui les assomme littéralement, les faits consommer et les exploitera ensuite. J'en ai des classes populaires, et plus ils sont "populaires", plus ils sont esclaves : ils ont le culte du fric, de l'apparence, des marques sont passionnés par les cancans du show -biz et de la téléréalité, vivent collés aux écrans.
Le seul point où je serais d'accord, et avec Bégaudeau, c'est qu'onn'a pas toujours la maturité quand on est ado. Je m'ennuyais aussi, je traînais les pieds jusqu'au bac, n'aimant pratiquement que le sport (et encore, hors de l'école). Mais au moins j'ai acquis à mon corps défendant des bases, et quand j'ai remis (ou mis) le nez dans les Humanités, j'avais quelques outils. C'est pourquoi je combats fortement le pédagogisme, allié objectif du libéralisme économique, qui veut donner aux élèves "ce qu'ils aiment" "ce qu'ils connaissent", c'est-à-dire les chaînes mentales que leur impose l'environnement marchand dans lequel ils vivent.
Ça me fait penser à ce propos attribué à Pascal vis à vis de Descartes " il voudrait bien, dans toute sa philosophie, se pouvoir passer de Dieu, mais il n’a pu s’empêcher de lui faire donner une chiquenaude pour lettre le monde en mouvement" en remplaçant "dieu" par "école"
- LefterisEsprit sacré
Je suppose que tu attribues aux pédagogistes le rôle dans lequel Pascal voit Descartes. C'est quand même beaucoup d'honneur...Balthazaard a écrit:
Ça me fait penser à ce propos attribué à Pascal vis à vis de Descartes " il voudrait bien, dans toute sa philosophie, se pouvoir passer de Dieu, mais il n’a pu s’empêcher de lui faire donner une chiquenaude pour lettre le monde en mouvement" en remplaçant "dieu" par "école"
_________________
"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- MinaNiveau 10
Incal a écrit: 1) La grande majorité des milieux professionnels ne s'intéresse plus autant qu'avant aux diplômes théoriques (beaucoup moins même). Un diplôme court et précis, un certain nombre de stages, et une bonne présentation de soi ("soft skills", capacité à bien présenter, à persuader, etc...) sont perçus comme bien plus cruciaux.
Juste pour rebondir sur ce point, et pour faire part de mon expérience personnelle, qui n'a donc pas de valeur générale. Je suis en contact avec des étudiants de niveau Master qui préparent des concours de catégorie A (inspecteurs des finances publiques, de la DGCCRF, des IRA, etc.). Je suis frappée de constater leur maîtrise approximative du français (notamment à l'écrit) mais ils ont une capacité à se fondre dans ce qui est attendu pour ces concours, et surtout ils ont compris le rôle des soft skills, et c'est vraiment ça qui les départage à l'oral: la capacité à se conformer à une doxa/un environnement professionnel, à montrer qu'ils sont capables d'endosser le costume du "manager", à la fois bienveillant, mais dirigeant son équipe, et une certaine capacité à être "proactif" (je me demande toujours ce que ça veut dire).
Je ne partage pas entièrement ton constat, Incal, mais une partie, quand même. J'ai également l'impression que le fossé se creuse entre les générations...
- BalthazaardVénérable
Lefteris a écrit:Je suppose que tu attribues aux pédagogistes le rôle dans lequel Pascal voit Descartes. C'est quand même beaucoup d'honneur...Balthazaard a écrit:
Ça me fait penser à ce propos attribué à Pascal vis à vis de Descartes " il voudrait bien, dans toute sa philosophie, se pouvoir passer de Dieu, mais il n’a pu s’empêcher de lui faire donner une chiquenaude pour lettre le monde en mouvement" en remplaçant "dieu" par "école"
Une chiquenaude, par exemple dans l’œil ça peut faire mal, il y a la bonne et la mauvaise manière de la donner.
- Patience et raisonFidèle du forum
Enfin si, un cadre proactif est celui qui anticipe les problèmes potentiels d'un décision, notamment la "réticence au changement" des subalternes qui ne comprennent aussi bien que lui.
_________________
Scio me nihil scire
Ambassadeur de Sparte à Byzance.
« Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » — Henri Lacordaire
« Quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu'une oreille distraite » — Rapport du Conseil d'État de 1991, De la sécurité juridique.
"Alors n’oubliez pas : si vous voulez vraiment être productifs, apprenez à travailler avec des outils qui font gagner du temps au lieu de tout refaire à la main. Mais si votre passion, c’est de ne surtout pas utiliser de livres déjà complets, et de réécrire votre propre truc à chaque fois parce que « Je préfère utiliser mes propres outils et je n’arrive pas à utiliser ceux des autres« , alors félicitations :
Vous êtes bons pour rejoindre l’Éducation Nationale française." Odieux ***.
- TaumataoraNiveau 4
VicomteDeValmont a écrit:Grand Oral @SNESFSU@SVenetitay : « Pourquoi vous n'augmentez pas TOUS les enseignants au regard du déclassement salarial ? »
— Du pognon pour les profs! (@Ithyphallique) March 24, 2022
Représentante Macron : « Blabla.. Mieux reconnaître les missions qu'un prof accepte d'assumer au-delà de sa mission d'enseignement »
Toute honte bue ! pic.twitter.com/EW0sWaiXFQ
La rectrice Mme Julie Benetti a une réponse bien floue.
A un moment il serait interessant d'avoir une idée de la hauteur de cette "valorisation". C'est un peu comme le fameux dégel du point d'indice !
Par exemple, si l'on nous propose de prendre 4h par semaine en plus dans ce nouveau statut pour ne serait-ce que moins 500 € par mois. Juste Lol !
Je suis près à parier que cette "valorisation", sera payée moins qu'au taux horaire d'une HSE et n'excèdera même pas 10 à 15% des salaires.
Personne n'acceptera, ni les anciens, ni les nouveaux !
- tAoKHabitué du forum
En échange de ces quelques heures en plus, je pense qu'ils vont nous récompenser grassement, et peut-être même doubler la prime informatique.
- EnaecoVénérable
Taumataora a écrit:VicomteDeValmont a écrit:Grand Oral @SNESFSU@SVenetitay : « Pourquoi vous n'augmentez pas TOUS les enseignants au regard du déclassement salarial ? »
— Du pognon pour les profs! (@Ithyphallique) March 24, 2022
Représentante Macron : « Blabla.. Mieux reconnaître les missions qu'un prof accepte d'assumer au-delà de sa mission d'enseignement »
Toute honte bue ! pic.twitter.com/EW0sWaiXFQ
La rectrice Mme Julie Benetti a une réponse bien floue.
A un moment il serait interessant d'avoir une idée de la hauteur de cette "valorisation". C'est un peu comme le fameux dégel du point d'indice !
Par exemple, si l'on nous propose de prendre 4h par semaine en plus dans ce nouveau statut pour ne serait-ce que moins 500 € par mois. Juste Lol !
Je suis près à parier que cette "valorisation", sera payée moins qu'au taux horaire d'une HSE et n'excèdera même pas 10 à 15% des salaires.
Personne n'acceptera, ni les anciens, ni les nouveaux !
Concernant les remplacements, pour reprendre les mots de Julie Benetti, elle parle de "mieux rémunérer les heures de remplacements qui sont aujourd'hui rémunérées sur la base d'HS".
On peut en douter. On a pas de chiffres mais on partirait sur la base de plus qu'actuellement.
- e-WandererGrand sage
_________________
« Profitons du temps qui nous reste avant la définitive invasion de la grande muflerie du Nouveau Monde » (Huysmans)
- CasparProphète
- JennyMédiateur
Je sens par contre qu’on va souffrir.
- BoubouleDoyen
- Reine MargotDemi-dieu
Je sens que le gars qui dirigeait 4 hypermarchés pour devenir contractuel en LP éco-gestion va être déçu, je ne sais pas pourquoi...
Le Monde a écrit:« J’ai toujours eu une âme de pédagogue et je me suis fixé comme objectif, dans la vie, de transmettre », raconte Thomas, décidé à devenir enseignant. Ce quadragénaire, qui a souhaité garder l’anonymat, comme la plupart des candidats, était, il y a quelques mois encore, patron de quatre supermarchés répartis dans le Sud-Ouest. Il brigue désormais un poste d’enseignant contractuel en économie et gestion dans un lycée professionnel.
Assis face à un binôme composé d’un inspecteur pédagogique et d’un administrateur des ressources humaines, réunis à une même table pour la campagne de recrutement menée jeudi 24 mars par l’académie de Toulouse, le postulant s’est présenté, a détaillé son parcours professionnel tout en motivant son choix. « J’ai souhaité me réorienter, car je gérais 180 personnes, et les horaires étaient trop pesants, déclare l’ancien dirigeant, diplômé d’une école de commerce. Aujourd’hui, c’est une première étape. Si mon CV plaît, je passerai un entretien plus poussé. »
https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/03/24/les-enseignants-contractuels-au-secours-de-l-academie-de-toulouse_6119006_3224.html
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Quand tout va mal, quand il n'y a plus aucun espoir, il nous reste Michel Sardou
La famille Bélier
- VinZTDoyen
Caspar a écrit:Je sens que mission et pacte vont bientôt devenir mes mots préférés.
Tu veux dire que tu vas t'en emparer ?
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« Il ne faut pas croire tout ce qu'on voit sur Internet » Victor Hugo.
« Le con ne perd jamais son temps. Il perd celui des autres. » Frédéric Dard
« Ne jamais faire le jour même ce que tu peux faire faire le lendemain par quelqu'un d'autre » Pierre Dac
« Je n'ai jamais lâché prise !» Claude François
« Un économiste est un expert qui saura demain pourquoi ce qu'il avait prédit hier ne s'est pas produit aujourd'hui. » Laurence J. Peter
- CasparProphète
Ce sont deux leviers dont je vais m'emparer en effet pour implémenter mes nouvelles missions.VinZT a écrit:Caspar a écrit:Je sens que mission et pacte vont bientôt devenir mes mots préférés.
Tu veux dire que tu vas t'en emparer ?
- InvitéInvité
VinZT a écrit:Caspar a écrit:Je sens que mission et pacte vont bientôt devenir mes mots préférés.
Tu veux dire que tu vas t'en emparer ?
Et peut-être même les réinventer ?
- Ramanujan974Érudit
Reine Margot a écrit:En attendant, "job dating" pour recruter des enseignants contractuels au rectorat de l'académie de Toulouse.
Je sens que le gars qui dirigeait 4 hypermarchés pour devenir contractuel en LP éco-gestion va être déçu, je ne sais pas pourquoi...Le Monde a écrit:« J’ai toujours eu une âme de pédagogue et je me suis fixé comme objectif, dans la vie, de transmettre », raconte Thomas, décidé à devenir enseignant. Ce quadragénaire, qui a souhaité garder l’anonymat, comme la plupart des candidats, était, il y a quelques mois encore, patron de quatre supermarchés répartis dans le Sud-Ouest. Il brigue désormais un poste d’enseignant contractuel en économie et gestion dans un lycée professionnel.
Assis face à un binôme composé d’un inspecteur pédagogique et d’un administrateur des ressources humaines, réunis à une même table pour la campagne de recrutement menée jeudi 24 mars par l’académie de Toulouse, le postulant s’est présenté, a détaillé son parcours professionnel tout en motivant son choix. « J’ai souhaité me réorienter, car je gérais 180 personnes, et les horaires étaient trop pesants, déclare l’ancien dirigeant, diplômé d’une école de commerce. Aujourd’hui, c’est une première étape. Si mon CV plaît, je passerai un entretien plus poussé. »
https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/03/24/les-enseignants-contractuels-au-secours-de-l-academie-de-toulouse_6119006_3224.html
C'est d'un caricatural, ce témoignage.
J'adore la phrase pompeuse "Il brigue désormais un poste d’enseignant contractuel en économie et gestion dans un lycée professionnel", comme s'il postulait pour être ambassadeur.
- User20159Esprit éclairé
« J’ai toujours eu une âme de pédagogue et je me suis fixé comme objectif, dans la vie, de transmettre », raconte Thomas, décidé à devenir enseignant. Ce quadragénaire, qui a souhaité garder l’anonymat, comme la plupart des candidats, était, il y a quelques mois encore, patron de quatre supermarchés répartis dans le Sud-Ouest. Il brigue désormais un poste d’enseignant contractuel en économie et gestion dans un lycée professionnel.
Assis face à un binôme composé d’un inspecteur pédagogique et d’un administrateur des ressources humaines, réunis à une même table pour la campagne de recrutement menée jeudi 24 mars par l’académie de Toulouse, le postulant s’est présenté, a détaillé son parcours professionnel tout en motivant son choix. « J’ai souhaité me réorienter, car je gérais 180 personnes, et les horaires étaient trop pesants, déclare l’ancien dirigeant, diplômé d’une école de commerce. Aujourd’hui, c’est une première étape. Si mon CV plaît, je passerai un entretien plus poussé. »
Soyez charitable, le mec ne sait peut-être pas qu'il va multiplier son temps de travail réel par 4, et diviser son salaire par 3.
Pas sûr que l'âme de pédagogue suffise
J'adore la phrase pompeuse "Il brigue désormais un poste d’enseignant contractuel en économie et gestion dans un lycée professionnel", comme s'il postulait pour être ambassadeur.
Comme quoi la fonction conserve tout son prestige
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