Assassinat de notre collègue Samuel Paty

La rectrice de la région Normandie parle d'acte de barbarie et nous invite à participer aux hommages qui seront rendus au collègue.
NB : à Caen, ce sera place de la République à 15h.

Cléopatra2 a écrit:Les professeurs d'HG de Créteil ont reçu un mail de leurs IPR. Où il est question, je cite de "la terrible agression" de notre collègue. J'ai répondu qu'il s'agissait d'un assassinat et non d'une agression. Quelle honte.

Oui et encore tu pèses tes mots.

Environ 100 personnes dans ma petite ville, sachant qu'il y avait deux autres rassemblements organisés dans mon département : c'est plutôt pas mal. Par contre, sur la 15 d'établissements (collèges / lycées) du coin, seulement deux cde ... il ne commencerait pas là, le soutien ?
Certains passants nous ont interpelés, puis, une fois renseignés, soutenus.

Je viens de lire tout le fil. Rien à ajouter.

Je pleure pour Samuel, avec sa famille, avec ses collègues.

Demain, rassemblement à Mulhouse à 15h place de la Réunion.

Rien à ajouter non plus, je suis anéantie. A Limoges, en Haute-Vienne, rassemblement à 15h place de la République.

Je suis particulièrement exaspéré par l'insistance, mise dans les médias et par nombre de commentateurs, sur la question de la formation des enseignants.

Comme si c'était le sujet ?

Agrippina furiosa a écrit:Environ 100 personnes dans ma petite ville, sachant qu'il y avait deux autres rassemblements organisés dans mon département : c'est plutôt pas mal. Par contre, sur la 15 d'établissements (collèges / lycées) du coin, seulement deux cde ... il ne commencerait pas là, le soutien ?
Certains passants nous ont interpelés, puis, une fois renseignés, soutenus.

Environ 150 personnes sur la place, malgré l'absence de préparation, et des passants qui se sont arrêtés sur la rue commerçante adjacente, se joignant à nous pour la minute de silence.

La nausée.

Je ne « redescends » pas.
C’est horrible.

kero a écrit:Je suis particulièrement exaspéré par l'insistance, mise dans les médias et par nombre de commentateurs, sur la question de la formation des enseignants.
Comme si c'était le sujet ?

Ce n'est pas le sujet tu as raison.
Mais pour de gens non formés au (vrai) journalisme, l'idée de la formation n'est pas mauvaise (pour eux).

Cette personne était formée, à l'épreuve, avait fait ses preuves, faisait son travail et nous n'avons pas à juger de lui.

Le problème est bien plus profond.
J'ai appris que nous étions dans la même université et sans doute dans les mêmes amphis ensemble (sans nous connaître). Cela me fout plus au fond encore.

Shajar a écrit:Ce matin, j'ai comme certains eu des élèves. C'était presque irréel.
Tous n'avaient pas entendu parler de l'attentat, mais il me semblait important qu'ils puissent s'exprimer dans le cadre d'un cours plutôt que de découvrir et de commenter cela entre eux.
Mes élèves sont en large partie musulmans. Évidemment, ils m'ont sorti, sans méchanceté mais avec conviction, les choses habituelles : "Charlie, ils l'avaient cherché quand même", "la liberté d'expression s'arrête quand on offense quelqu'un", etc. Évidemment, on a réfléchi, déconstruit, remis en perspective.
Mais ce qui m'a frappée, c'est que ces élèves ont fait tous et immédiatement une différence très nette entre les caricaturistes et Samuel Paty. Un professeur qui fait son cours, pour eux, c'est un personnage intouchable. Aucun n'a cautionné de la moindre manière cet acte affreux, qui les a beaucoup choqués.
Et bêtement, je me dis qu'il y a quand même beaucoup d'espoir pour ces jeunes qui, mine de rien, croient en nous, en l'école et en la République (la vraie). On leur donne un monde pas facile, mais ils en feront peut-être quelque chose de bien.

Cléopatra, j'ai été tout aussi outrée de ce message minimaliste et de pure forme.

Elyas, toutes mes condoléances à toi. Franchement, déconnecte-toi de ces fichus réseaux quelques temps, ce n'est pas la peine de lire des choses qui te font mal.

J'ai quand même beaucoup de mal à me réjouir que des élèves puissent justifier le crime de dessinateurs, au pretexte, que le prof, lui, serait sacré :/

D'autant plus de mal, que je n'ai aucune peine à imaginer qu'ils auraient sans doute tenu un autre discours s'ils avaient visité les locaux de dessinateurs de presse.

Je trouve, absolument tout, de déprimant dans ton message: la manipulation des adultes (on n'invente pas les phrases que tu décris, quand on est un gosse), notre persistance (et la mienne aussi hein), à encore et toujours, vouloir arrondir les angles (alors que ça ne mériterait que colère et sanction) et notre tellement grand espoir de s'en sortir qu'on en vient à dire des choses assez ignobles ("c'est cool, ils ont bien différentié les caricaturistes (décimés en masse) et les profs (décimés un par un?)")

Mon message n'est pas une critique du tien, nullement, comme je dis, j'aurai pu écrire le même. Je le trouve d'une tristesse inouïe et personnellement, tout espoir m'a abandonné. "Ils ne passeront pas", ils sont déjà passés en fait. La preuve.

Entièrement d'accord: ils sont déjà passés. Pour moi, cela date d'une quinzaine d'années environ; une génération.

15h place de la mairie de Chalon sur Saône demain.

Le procureur antiterroriste s'est exprimé, de manière factuelle et précise :
intervention du procureur antiterroriste

Guermantes729 a écrit:"Ils ne passeront pas", ils sont déjà passés en fait. La preuve.

C'est ce que j'ai pensé hier soir en entendant E. Macron.

Thalia de G a écrit:

Guermantes729 a écrit:"Ils ne passeront pas", ils sont déjà passés en fait. La preuve.

C'est ce que j'ai pensé hier soir en entendant E. Macron.

Exactement. Merah, c'était en 2012. Je suis très pessimiste quant à l'avenir du pays.

Tous ces rassemblements, les marches blanches ... Tout sera oublié d'ici 15 jours, tout comme l'ont été les X victimes d'attentats de fanatiques. Et comme d'habitude, on ne mettra pas le doigt sur les causes de ce déchainement de violence, rien ne sera fait. Jusqu'à la prochaine victime.

zigmag17 a écrit:Entièrement d'accord: ils sont déjà passés. Pour moi, cela date d'une quinzaine d'années environ; une génération.

Ne renonçons pas pour autant. Ne serait-ce que pour notre collègue, qu'il ne soit pas mort en vain.

Shajar a écrit:Ce matin, j'ai comme certains eu des élèves. C'était presque irréel.
Tous n'avaient pas entendu parler de l'attentat, mais il me semblait important qu'ils puissent s'exprimer dans le cadre d'un cours plutôt que de découvrir et de commenter cela entre eux.
Mes élèves sont en large partie musulmans. Évidemment, ils m'ont sorti, sans méchanceté mais avec conviction, les choses habituelles : "Charlie, ils l'avaient cherché quand même", "la liberté d'expression s'arrête quand on offense quelqu'un", etc. Évidemment, on a réfléchi, déconstruit, remis en perspective.
Mais ce qui m'a frappée, c'est que ces élèves ont fait tous et immédiatement une différence très nette entre les caricaturistes et Samuel Paty. Un professeur qui fait son cours, pour eux, c'est un personnage intouchable. Aucun n'a cautionné de la moindre manière cet acte affreux, qui les a beaucoup choqués.
Et bêtement, je me dis qu'il y a quand même beaucoup d'espoir pour ces jeunes qui, mine de rien, croient en nous, en l'école et en la République (la vraie). On leur donne un monde pas facile, mais ils en feront peut-être quelque chose de bien.

Cléopatra, j'ai été tout aussi outrée de ce message minimaliste et de pure forme.

Elyas, toutes mes condoléances à toi. Franchement, déconnecte-toi de ces fichus réseaux quelques temps, ce n'est pas la peine de lire des choses qui te font mal.

Je ne vois pas beaucoup d'espoir en des gens qui disent que les uns l'ont cherché et que pour l'autre ce n'est pas juste.
L'espoir, peut-être... dire que de simples dessinateurs l'ont cherché.
Et dire qu'un prof, parce qu'il est prof, a le droit de défendre des dessinateurs qui eux, pour la liberté d'expression "l'ont cherché"....
Il faut qu'on se déconnecte de ce monde de merde, mais ces gamins il faut aussi qu'ils se déconnectent de leur monde sectaire.

Euphémia a écrit:

zigmag17 a écrit:Entièrement d'accord: ils sont déjà passés. Pour moi, cela date d'une quinzaine d'années environ; une génération.

Ne renonçons pas pour autant. Ne serait-ce que pour notre collègue, qu'il ne soit pas mort en vain.

D'accord aussi. Mon pessimisme ne me fera malgré tout pas renoncer, au contraire.

Hommage à Samuel Paty sur la page d'accueil de Neo.

Dans le jt de France 2, intervention de JM Blanquer. Même si on n'adhère pas complètement à tout son propos, au moins il n'a pas insinué que Samuel l'avait bien cherché.

Euphémia a écrit:

zigmag17 a écrit:Entièrement d'accord: ils sont déjà passés. Pour moi, cela date d'une quinzaine d'années environ; une génération.

Ne renonçons pas pour autant. Ne serait-ce que pour notre collègue, qu'il ne soit pas mort en vain.

Un peu de soutien effectif au quotidien de la hiérarchie , avec une ligne claire du gouvernement sur ces sujets, me permettrait de reprendre mon souffle là où je l'ai laissé: en 2015, quand l'abjection est entrée dans nos vies -pourtant je ne connais aucune victime, directement ou indirectement, des attentats parisiens- et que toutes les larmes de rage, de compassion, de révolte et de terreur ont été versées. Cet incommensurable chagrin pour la mise à mal et les tentatives de destruction de notre liberté, de l'humanisme et de l'insouciance, est toujours là, enfoui.
Je ne renonce pas mais je ne crois pas vraiment à la victoire de la Lumière, sauf à y employer de vrais moyens institutionnels pour nous aider à combattre l'obscurantisme, dans nos classes et en-dehors. Nous sommes trop seuls, toujours.
Trop de peine et de dégoût ce soir.

Jacq a écrit:

kero a écrit:Je suis particulièrement exaspéré par l'insistance, mise dans les médias et par nombre de commentateurs, sur la question de la formation des enseignants.
Comme si c'était le sujet ?

Ce n'est pas le sujet tu as raison.
Mais pour de gens non formés au (vrai) journalisme, l'idée de la formation n'est pas mauvaise (pour eux).

Cette personne était formée, à l'épreuve, avait fait ses preuves, faisait son travail et nous n'avons pas à juger de lui.

Le problème est bien plus profond.
J'ai appris que nous étions dans la même université et sans doute dans les mêmes amphis ensemble (sans nous connaître). Cela me fout plus au fond encore.

Le problème est bien là Jacq : entre la différence de perception que nous avons, nous enseignants, du crime et celle qu'ont les journalistes. Ils ne (se) posent jamais les bonnes questions soit parce qu'ils en sont intellectuellement incapables, soit parce que leur formatage d'esprit est trop important, soit par malhonnêteté intellectuelle. Le bilan est qu'ils donnent l'impression d'être çà côté de la plaque .

Poser le problème de la formation des enseignants tend implicitement, insidieusement, à affirmer que les enseignants français et (donc Samuel) ne sont pas capables d'aborder le problème de la liberté d'expression avec les élèves alors que c'est évidemment faux. Enchaîner ensuite sur la "culpabilité" de Samuel , il n'y a qu'un pas, que certains journalistes des chaînes d'info, à travers leurs questions orientées ,ont désormais franchi. C'est de cette différence de perception entre regard extérieur (journalistes) et regard intérieur (enseignants ) que naît aussi le malaise et la colère. Car au final , le "grand public" ne retiendra que la vision formatée des chaînes info de cet événement monstrueux. Et évidemment que cela nous fait tous souffrir.

Se poserait par contre le problème de la formation intellectuelle des journalistes français, mais ça, c'est un autre sujet qu'il ne convient pas de développer je pense sur ce fil.

Et courage à toi Jacq Je souffre sincèrement avec toi.

Blanquer aurait eu mauvaise grâce à insinuer que Samuel l'avait bien cherché, d'une part après le discours de Macron il n'aurait pas osé, d'autre part il doit être au courant des derniers développements de l'enquête qui ne doivent pas être réjouissants.
En revanche, Delahousse a bien évité de lui parler du recteur Morvan qu'il a viré en 2007 car il refusait la création d'une école islamiste en lien avec Al Kaïda...

gauvain31 a écrit:

Jacq a écrit:

kero a écrit:Je suis particulièrement exaspéré par l'insistance, mise dans les médias et par nombre de commentateurs, sur la question de la formation des enseignants.
Comme si c'était le sujet ?

Ce n'est pas le sujet tu as raison.
Mais pour de gens non formés au (vrai) journalisme, l'idée de la formation n'est pas mauvaise (pour eux).

Cette personne était formée, à l'épreuve, avait fait ses preuves, faisait son travail et nous n'avons pas à juger de lui.

Le problème est bien plus profond.
J'ai appris que nous étions dans la même université et sans doute dans les mêmes amphis ensemble (sans nous connaître). Cela me fout plus au fond encore.

Le problème est bien là Jacq :  entre la différence de  perception que nous  avons, nous enseignants, du crime et celle qu'ont les journalistes. Ils ne (se) posent jamais les bonnes questions soit parce qu'ils en sont intellectuellement incapables, soit parce que leur formatage d'esprit est trop important, soit par malhonnêteté intellectuelle. Le bilan est qu'ils donnent l'impression d'être çà côté de la plaque .

Poser le problème de la formation des enseignants tend implicitement, insidieusement, à affirmer que les enseignants français et (donc Samuel) ne sont  pas capables d'aborder le problème de la liberté d'expression avec les élèves alors que c'est évidemment faux. Enchaîner ensuite sur la "culpabilité" de Samuel , il n'y a qu'un pas, que certains journalistes des chaînes d'info, à travers leurs questions orientées ,ont désormais franchi.  C'est de cette différence de perception entre regard extérieur (journalistes) et regard intérieur (enseignants ) que naît aussi le malaise et la colère. Car au final , le "grand public" ne retiendra que la vision formatée des chaînes info de cet événement monstrueux. Et évidemment que cela nous fait tous souffrir.

Se poserait par contre le problème de la formation intellectuelle des journalistes français, mais ça, c'est un autre sujet qu'il ne convient pas de développer je pense sur ce fil.

Et courage à toi Jacq  Je souffre sincèrement avec toi.

Il faut que je quitte ce sujet pour l'instant car, en même temps que ma peine grandit ma colère grandit elle aussi (pas contre vous, mais pour le temps perdu, qui ne date pas d'une 15ne d'années).
Et pour l'instant je ne veux rester que sur la peine et l'hommage mérité pour cet homme honnête.
Aussi je vais me taire.
Ou du moins essayer.
De sincères amitiés à tous ceux qui sont dans la douleur et qui ont eu le privilège de le connaître.

Les journalistes mettent la formation sur le tapis parce que c'est rassurant: " si l'on forme bien les enseignants, ils pourront faire leur métier sans risquer de se faire agresser/tuer"." C'est "juste" une question de formation"
Parce que l'alternative : "Un enseignant bien formé à ces questions, qui faisait ce cours depuis des années, a été tué parce qu'aujourd'hui, en France, l'enseignement de la laïcité face à certains publics peut constituer une mise en danger de celui qui s'efforce de bien le faire" est beaucoup trop terrifiante pour qu'ils puissent l'envisager. C'est pour cela qu'aux yeux de certains il faut que notre collègue soit responsable. Parce que sinon cela signifie bien que notre société a basculé et les conséquences sont bien trop graves pour qu'il y ait le début du commencement d'une prise de conscience.

Ponocrates a écrit:Les journalistes mettent la formation sur le tapis parce que c'est rassurant: " si l'on forme bien les enseignants, ils pourront faire leur métier sans risquer de se faire agresser/tuer"." C'est "juste" une question de formation"
Parce que l'alternative : "Un enseignant bien formé à ces questions, qui faisait ce cours depuis des années, a été tué parce qu'aujourd'hui, en France, l'enseignement de la laïcité face à certains publics peut constituer une mise en danger de celui qui s'efforce de bien le faire" est beaucoup trop terrifiante pour qu'ils puissent l'envisager. C'est pour cela qu'aux yeux de certains il faut que notre collègue soit responsable. Parce que sinon cela signifie bien que notre société a basculé et les conséquences sont bien trop graves pour qu'il y ait le début du commencement d'une prise de conscience.

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