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- NLM76Grand Maître
Dans "J'écris une lettre à mes parents", mes parents ne sont pas l'objet de l'écriture ; ils en sont le destinataire. "Parents" est donc complément d'attribution ou complément du destinataire du verbe "écrire".
Au plan syntaxique c'est un complément indirect du verbe, au plan sémantique, un complément du destinataire ou d'attribution. A l'intersection des deux plans, on peut s'apercevoir qu'il est pronominalisable en "lui/leur".
Je ne comprends pas qu'on analyse autrement, parce que cette analyse-là me paraît parfaitement imparable.
Au plan syntaxique c'est un complément indirect du verbe, au plan sémantique, un complément du destinataire ou d'attribution. A l'intersection des deux plans, on peut s'apercevoir qu'il est pronominalisable en "lui/leur".
Je ne comprends pas qu'on analyse autrement, parce que cette analyse-là me paraît parfaitement imparable.
_________________
Sites du grip :
- http://instruire.fr
- http://grip-editions.fr
Mon site : www.lettresclassiques.fr
«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- IphigénieProphète
De même je distinguerais:
je retire un livre de mon cartable
où le cartable est juste le lieu de l'action, et pas concerné, en quelque sorte, par l'action de retirer ou pas quelque chose: ce n'est qu'une circonstance de l'action (j'en retire un livre)
de
je retire son livre à mon frère
où le frère "subit" l'action du retrait. (je lui retire son livre). Là encore on analysait comme complément d'"attribution" (au sens de l'action est "attribuée" à c'est-à-dire liée à)
Cela dit les compléments avec tous les verbes de mouvements sont sujets à discussion sur CO ou CC dans la mesure où la destination est incluse dans l'idée du verbe: je vais à Paris.
je retire un livre de mon cartable
où le cartable est juste le lieu de l'action, et pas concerné, en quelque sorte, par l'action de retirer ou pas quelque chose: ce n'est qu'une circonstance de l'action (j'en retire un livre)
de
je retire son livre à mon frère
où le frère "subit" l'action du retrait. (je lui retire son livre). Là encore on analysait comme complément d'"attribution" (au sens de l'action est "attribuée" à c'est-à-dire liée à)
Cela dit les compléments avec tous les verbes de mouvements sont sujets à discussion sur CO ou CC dans la mesure où la destination est incluse dans l'idée du verbe: je vais à Paris.
- Fires of PompeiiGuide spirituel
NLM76 a écrit:Dans "J'écris une lettre à mes parents", mes parents ne sont pas l'objet de l'écriture ; ils en sont le destinataire. "Parents" est donc complément d'attribution ou complément du destinataire du verbe "écrire".
Au plan syntaxique c'est un complément indirect du verbe, au plan sémantique, un complément du destinataire ou d'attribution. A l'intersection des deux plans, on peut s'apercevoir qu'il est pronominalisable en "lui/leur".
Je ne comprends pas qu'on analyse autrement, parce que cette analyse-là me paraît parfaitement imparable.
Elle l'est. La latiniste et linguiste en moi dit complément d'attribution.
Mais quand tu enseignes à des collégiens tu dois parfois simplifier un peu (là tu vas me dire que ce n'est pas simplifier mais dire un truc faux, ensuite je vais te dire que ce n'est pas si faux parce que tu dis toi-même qu'au plan syntaxique c'est un complément indirect, et que si je dis à mes élèves qu'un verbe peut être à la fois complémenté directement et indirectement ils se diront que c'est illogique et ils auront raison ; bref c'est un débat que nous avons tous déjà eu ici !)...
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Je ne dirai qu'une chose : stulo plyme.
- Fires of PompeiiGuide spirituel
Iphigénie a écrit: De même je distinguerais:
je retire un livre de mon cartable
où le cartable est juste le lieu de l'action, et pas concerné, en quelque sorte, par l'action de retirer ou pas quelque chose: ce n'est qu'une circonstance de l'action (j'en retire un livre)
de
je retire son livre à mon frère
où le frère "subit" l'action du retrait. (je lui retire son livre). Là encore on analysait comme complément d'"attribution" (au sens de l'action est "attribuée" à c'est-à-dire liée à)
Cela dit les compléments avec tous les verbes de mouvements sont sujets à discussion sur CO ou CC dans la mesure où la destination est incluse dans l'idée du verbe: je vais à Paris.
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- IphigénieProphète
Je suis bien d'accord avec ce que tu dis là, FOP! je crois que vouloir aller au fond des difficultés est une raison de déroute dans les classes de primaire et collège (voire lycée: d'où le gag de la grammaire au bac...): il faut simplifier quitte, comme tu le dis à "fausser" un peu pour que ce soit limpide: ce n'est que quand c'est limpide qu'on peut montrer le fond.Fires of Pompeii a écrit:NLM76 a écrit:Dans "J'écris une lettre à mes parents", mes parents ne sont pas l'objet de l'écriture ; ils en sont le destinataire. "Parents" est donc complément d'attribution ou complément du destinataire du verbe "écrire".
Au plan syntaxique c'est un complément indirect du verbe, au plan sémantique, un complément du destinataire ou d'attribution. A l'intersection des deux plans, on peut s'apercevoir qu'il est pronominalisable en "lui/leur".
Je ne comprends pas qu'on analyse autrement, parce que cette analyse-là me paraît parfaitement imparable.
Elle l'est. La latiniste et linguiste en moi dit complément d'attribution.
Mais quand tu enseignes à des collégiens tu dois parfois simplifier un peu (là tu vas me dire que ce n'est pas simplifier mais dire un truc faux, ensuite je vais te dire que ce n'est pas si faux parce que tu dis toi-même qu'au plan syntaxique c'est un complément indirect, et que si je dis à mes élèves qu'un verbe peut être à la fois complémenté directement et indirectement ils se diront que c'est illogique et ils auront raison ; bref c'est un débat que nous avons tous déjà eu ici !)...
- NLM76Grand Maître
En effet. Mais pour ce qui est de prendre le complément d'attribution pour un complément d'objet, je pense justement que c'est point crucial, qui rend les choses obscures pour les élèves : ce n'est pas du tout limpide. Ce n'est pas une simplification, c'est un obscurcissement. (Je fais vite là, mais il faut que je reprenne absolument les termes de ce débat...)
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- Fires of PompeiiGuide spirituel
NLM76 a écrit:En effet. Mais pour ce qui est de prendre le complément d'attribution pour un complément d'objet, je pense justement que c'est point crucial, qui rend les choses obscures pour les élèves : ce n'est pas du tout limpide. Ce n'est pas une simplification, c'est un obscurcissement. (Je fais vite là, mais il faut que je reprenne absolument les termes de ce débat...)
Voilà, c'est ce que j'avais prévu
En fait, le truc qui est compliqué pour nos élèves, c'est de distinguer CC et CO (et on a vu qu'il y a des cas où c'est en effet complexe). On composer aussi avec la fonction de COS qu'ils ont effectivement apprise ou survolée et qu'encore une fois nous devons distinguer du CC.
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- Fires of PompeiiGuide spirituel
Si tu prends, par exemple, la GMF, elle te dit : "Un grand nombre de verbes se construisent ave c un objet direct et un objet indirect appelé objet second selon le modèle V- N1 - Prép - N2 [...]. La plupart de ces verbes dénotent une opération concrète ou figurée de transfert entre deux de leurs actants [...]. La tradition grammaticale appelle complément d'attribution l'objet second introduit par à, bien que ce rapport ne caractérise pas tous les objets seconds construits avec cette préposition. Plus intéressante est la classe de constructions dites datives."
Pour ma part je souscris à cette analyse.
Le concept de COS a clairement ses défauts, il mélange des choses très différentes. Mais quand tu écris une lettre à quelqu'un il y a bien ce transfert qui se fait. L'appellation COS pose un problème parce que c'est l'objet qui n'est pas clairement représenté par ce "à quelqu'un", ça je le concède tout à fait. Pour moi on a là un complément d'attribution, nettement. Un datif.
En gros, pour moi le complément d'attribution c'est ici une sous-catégorie du COI ou du COS, ça précise un peu plus l'identité de ce COS et le rapport sémantique qu'il entretient avec le verbe (rapport qui n'est pas le même si tu enlèves une épine à quelqu'un ou si tu écris une lettre à quelqu'un).
Pour ma part je souscris à cette analyse.
Le concept de COS a clairement ses défauts, il mélange des choses très différentes. Mais quand tu écris une lettre à quelqu'un il y a bien ce transfert qui se fait. L'appellation COS pose un problème parce que c'est l'objet qui n'est pas clairement représenté par ce "à quelqu'un", ça je le concède tout à fait. Pour moi on a là un complément d'attribution, nettement. Un datif.
En gros, pour moi le complément d'attribution c'est ici une sous-catégorie du COI ou du COS, ça précise un peu plus l'identité de ce COS et le rapport sémantique qu'il entretient avec le verbe (rapport qui n'est pas le même si tu enlèves une épine à quelqu'un ou si tu écris une lettre à quelqu'un).
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- IphigénieProphète
Oui c’est l’histoire d’objet second qui était censé clarifier le compl d’attribution....NLM76 a écrit:En effet. Mais pour ce qui est de prendre le complément d'attribution pour un complément d'objet, je pense justement que c'est point crucial, qui rend les choses obscures pour les élèves : ce n'est pas du tout limpide. Ce n'est pas une simplification, c'est un obscurcissement. (Je fais vite là, mais il faut que je reprenne absolument les termes de ce débat...)
- Fires of PompeiiGuide spirituel
Iphigénie a écrit:Oui c’est l’histoire d’objet second qui était censé clarifier le compl d’attribution....NLM76 a écrit:En effet. Mais pour ce qui est de prendre le complément d'attribution pour un complément d'objet, je pense justement que c'est point crucial, qui rend les choses obscures pour les élèves : ce n'est pas du tout limpide. Ce n'est pas une simplification, c'est un obscurcissement. (Je fais vite là, mais il faut que je reprenne absolument les termes de ce débat...)
C'est ça, et on apprécie le sel de cette idée :lol:
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- *Ombre*Grand sage
Nous avons régulièrement ce débat sur COI et complément d'attribution.
La notion de complément d'attribution a son intérêt, mais aussi ses limites. Elle ne permet pas d'évacuer complètement les verbes à doubles construction comme obliger qqn à qqch, où le qqn est bien l'objet de l'action et non le destinataire, et où il est impossible de faire du "à qqch" un complément d'attribution.
La notion étendue de COI a ses limites aussi, en ce qu'elle vide la notion d'objet de son sens courant pour en faire un concept purement syntaxique. Or, lier l'étude de la grammaire au sens est essentiel.
Les débats durent depuis trop longtemps, et en des sphères bien trop élevées pour que nous puissions prétendre les trancher une bonne fois pour toutes. À défaut de solution parfaite, il nous faut, en tant que pédagogues, rechercher une solution efficace.
Je dirais que cela commence par le fait de ne pas bousculer sans cesse les terminologies officielles. Comment un élève peut-il s'y retrouver si on lui parle en CM1 de prédicat, en CM2 de complément de verbe, en 6e de complément essentiel, en 5e de complément d'attribution et en 4e de COI, tout cela pour désigner la même chose ? je caricature à peine. Je crois qu'il ne nous appartient pas de réhabiliter le complément d'attribution, disparu des nomenclatures depuis trop longtemps, sous peine d'ajouter à la confusion. La seule chose à laquelle je me refuse catégoriquement, c'est l'emploi de termes qui renvoient exclusivement à des critères de distribution (complément de verbe ou essentiel) tout simplement parce que ça ne fonctionne pas. (Pour les nouveaux sur le fil, je remettrai un argumentaire plus bas, en spoiler, pour ne pas assommer ceux qui l'ont déjà lu cent fois.) Mais COD et COI sont des catégories connues de tous les enseignants (et ce sont - alléluïa - les termes officiels dans les programmes en vigueur).
Par ailleurs, je pense que la démarche de FoP est tout à fait efficace. Certes, elle est réductrice, en ramenant la notion d'objet à une simple considération syntaxique. Mais comme le disait aussi Iphigénie, l'important n'est pas de chercher une exactitude impossible, mais de former à l'analyse de façon efficace. Et lier la notion d'objet à la construction du verbe, c'est simple, et les élèves arrivent vite, ainsi, à identifier COD et COI. Le sémantisme, on le retrouve quand il faut distinguer les COI et les CC, ces derniers étant justement déterminés par leur sémantisme : le lieu, le temps, la manière...
Au contraire, la notion sémantique d'objet reste très abstraite pour les élèves et, selon mon expérience, ne les aide pas beaucoup.
Bref, parler de COD et de COI comme des compléments liés à la construction du verbe me semble efficace (ça l'est pour mes élèves, en tout cas, dans leur diversité), à condition de ne surtout pas passer par les fameux critères de distribution.
Pour ceux qui le souhaitent, un développement sur ce dernier point en spoiler.
La notion de complément d'attribution a son intérêt, mais aussi ses limites. Elle ne permet pas d'évacuer complètement les verbes à doubles construction comme obliger qqn à qqch, où le qqn est bien l'objet de l'action et non le destinataire, et où il est impossible de faire du "à qqch" un complément d'attribution.
La notion étendue de COI a ses limites aussi, en ce qu'elle vide la notion d'objet de son sens courant pour en faire un concept purement syntaxique. Or, lier l'étude de la grammaire au sens est essentiel.
Les débats durent depuis trop longtemps, et en des sphères bien trop élevées pour que nous puissions prétendre les trancher une bonne fois pour toutes. À défaut de solution parfaite, il nous faut, en tant que pédagogues, rechercher une solution efficace.
Je dirais que cela commence par le fait de ne pas bousculer sans cesse les terminologies officielles. Comment un élève peut-il s'y retrouver si on lui parle en CM1 de prédicat, en CM2 de complément de verbe, en 6e de complément essentiel, en 5e de complément d'attribution et en 4e de COI, tout cela pour désigner la même chose ? je caricature à peine. Je crois qu'il ne nous appartient pas de réhabiliter le complément d'attribution, disparu des nomenclatures depuis trop longtemps, sous peine d'ajouter à la confusion. La seule chose à laquelle je me refuse catégoriquement, c'est l'emploi de termes qui renvoient exclusivement à des critères de distribution (complément de verbe ou essentiel) tout simplement parce que ça ne fonctionne pas. (Pour les nouveaux sur le fil, je remettrai un argumentaire plus bas, en spoiler, pour ne pas assommer ceux qui l'ont déjà lu cent fois.) Mais COD et COI sont des catégories connues de tous les enseignants (et ce sont - alléluïa - les termes officiels dans les programmes en vigueur).
Par ailleurs, je pense que la démarche de FoP est tout à fait efficace. Certes, elle est réductrice, en ramenant la notion d'objet à une simple considération syntaxique. Mais comme le disait aussi Iphigénie, l'important n'est pas de chercher une exactitude impossible, mais de former à l'analyse de façon efficace. Et lier la notion d'objet à la construction du verbe, c'est simple, et les élèves arrivent vite, ainsi, à identifier COD et COI. Le sémantisme, on le retrouve quand il faut distinguer les COI et les CC, ces derniers étant justement déterminés par leur sémantisme : le lieu, le temps, la manière...
Au contraire, la notion sémantique d'objet reste très abstraite pour les élèves et, selon mon expérience, ne les aide pas beaucoup.
Bref, parler de COD et de COI comme des compléments liés à la construction du verbe me semble efficace (ça l'est pour mes élèves, en tout cas, dans leur diversité), à condition de ne surtout pas passer par les fameux critères de distribution.
Pour ceux qui le souhaitent, un développement sur ce dernier point en spoiler.
- Spoiler:
- Pourquoi l’enseignement de la grammaire à travers des critères de distribution, et par conséquent les notions de complément de phrase ou de verbe sont inefficaces
La distinction entre complément de verbe (ou encore complément essentiel) et complément de phrase (ou encore complément facultatif) se fonde sur des critères de distribution qui, s’ils ont une certaine constance, sont loin d’être toujours vrais, en particulier dans la langue littéraire, celle que la grammaire devrait permettre de comprendre et d’imiter. En conséquence, ces critères sont impropres à permettre d’identifier de façon certaine un groupe syntaxique, surtout quand on s’adresse à de jeunes enfants. En outre, les manipulations exigées par cette approche conduisent le plus souvent les élèves à s’embrouiller dans la phrase plutôt qu’à la démêler.
Cette distinction pose que les compléments du verbe sont essentiels, c’est-à-dire impossibles à supprimer ou à déplacer. On y range les COD, les COI, les attributs (qui ne sont même pas des compléments au sens strict du terme), certains compléments de lieu, de temps – rien que ça ! Et l’on explique qu'ils s'opposent aux compléments facultatifs que l’on peut, eux, supprimer ou déplacer.
Le problème, c'est que ce n'est pas vrai – pas de façon suffisamment régulière, en tout cas, pour constituer un critère d’analyse fiable.
En effet, un verbe transitif est un verbe qui PEUT se construire avec un complément d’objet, mais ce CO n'est pas toujours obligatoire, loin de là.
Ex : Je lis un livre. > Je lis. Je réfléchis à ce que tu m'as dit. > Je réfléchis.
Un très grand nombre de COD ou de COI peuvent être supprimés.
Un COI peut presque toujours être déplacé.
Ex : À cette douleur s’ajoutait l’humiliation ressentie. (Zola) > L’humiliation ressentie s’ajoutait à cette douleur.
De même l’attribut : Nombreux sont les exemples qui pourraient étayer ce propos. > Les exemples qui pourraient étayer ce propos sont nombreux.
Prenons ainsi la phrase : À son fils cadet le meunier ne laissa que son chat, et mettons-nous dans la peau d’un élève qui essaie d’identifier la fonction de « à son fils cadet » en usant des critères de distribution.
Le groupe peut parfaitement être supprimé : Le meunier ne laissa que son chat est une phrase parfaitement correcte.
De même, on peut dire indifféremment : Le meunier ne laissa à son fils cadet que son chat.
L’élève en conclura qu’il a affaire à un complément de phrase, ce qui ne veut rien dire, et lui a fait manquer l’identification d’un brave COI.
Même le COD se promène volontiers dans la langue soutenue, comme nous l'allons monter. > Même le COD se promène volontiers dans la langue soutenue, comme nous allons le monter.
Ne protestons pas que c'est rarissime : Molière le fait sans cesse, La Fontaine, Perrault aussi, et ce sont des auteurs susceptibles d’être abordés dès l’école primaire. Après tout, nous prétendons enseigner une grammaire qui permette de mieux lire, mieux comprendre...
Même le verbe aller, généralement présenté comme l’archétype du verbe qui réclame un complément essentiel de lieu, résiste à l’analyse.
"Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien, / Par la Nature, heureux - comme avec une femme." (Rimbaud)
Pardon Arthur, on peut tout aussi bien dire : Et j'irai, comme un bohémien, par la nature, loin, bien loin, heureux...
Ou : Et j'irai, par la nature, loin, bien loin, comme un bohémien...
Ou : Belle Marquise, j'irai loin, bien loin, comme un bohémien, heureux avec vos beaux yeux... (Telle est en général, à ce stade, la situation de l’élève sommé de se débrouiller avec ses manipulations…)
D’aucuns diront que ce n’est pas le complément du verbe, qui a changé de place, mais le complément de phrase. Mais comment l’élève est-il censé faire la différence, lui qui constate simplement que le complément n’est plus au même endroit ?
Allons plus loin. Aller est intransitif. S'il est presque toujours accompagné d'un complément CIRCONSTANCIEL de lieu, c'est parce qu'en général, quand on décrit son déplacement, c'est pour apporter cette information, justement, mais syntaxiquement, cela n'a rien d'obligatoire. Va, cours, vole et nous venge, déclare Don Diègue, foulant au pied les amours du Cid et le complément de verbe.
Quand je relis les pages précédentes de mon récit, je me rends compte que je vais dans les mots comme un gibier traqué, qui file vite, zig-zague, essaie de dérouter les chiens et les chasseurs lancés à sa poursuite. (Ph. Claudel). > Quand je relis les pages précédentes de mon récit, je me rends compte que je vais comme un gibier traqué, qui file vite, zig-zague, essaie de dérouter les chiens et les chasseurs lancés à sa poursuite. Cette dernière phrase est parfaitement correcte. De même que : Je suis une force qui va. (Hugo).
Première conclusion : le complément du verbe n'est ni suppressible ni déplaçable sauf lorsqu'il est suppressible ou déplaçable.
Examinons à présent le cas du complément de phrase.
Il y a plein de compléments circonstanciels impossibles à déplacer.
Il réagit normalement.
Il mourut de faim et de soif.
Partir de bonne heure nous permettra d’arriver suffisamment tôt pour travailler un peu avant la nuit. Lequel de ces soi-disant compléments de phrase peut-on séparer du verbe dont il dépend ?
Et nous ne nous étendrons pas sur les phrases complexes où la notion de complément de phrase n’a plus aucun sens, tant il est vrai que les éléments syntaxiques sont avant tout, comme on disait avant, "termes de la proposition".
Deuxième conclusion : le complément de phrase est suppressible et déplaçable sauf lorsqu'il n'est ni suppressible ni déplaçable.
D'où il apparaît que le complément essentiel est essentiel sauf s'il ne l'est pas et que le complément facultatif est facultatif sauf quand il ne l'est pas.
C'est cela que nous enseignons aux élèves depuis 25 ans. Et nous nous étonnons qu'en 3e, ils ne sachent toujours pas reconnaître un COD, mais qu'ils pataugent dans les manipulations les plus hasardeuses.
Quelques remarques encore…
La place des mots, en littérature, est régie par des règles complexes, où se mêlent impératifs syntaxiques (place du thème, évitement d’ambiguïtés, de lourdeurs…) et considérations stylistiques (mise en relief, effet d’attente…). Dès lors, les critères de distribution, vrais en théorie, sont souvent inopérants dans la réalité de la langue, concurrencés qu’ils sont par des règles supérieures.
La structure canonique sujet + verbe + complément du verbe est concurrencée par la structure, prééminente, thème + rhème, et par tous les effets stylistiques possibles.
Du point de vue de la progression thématique, un phrase comme Une sorcière vivait dans cette maison est hautement improbable, et un élève à qui on demande d’identifier le complément de phrase par simple déplacement ou suppression dans la phrase Dans cette maison vivait une sorcière peut parfaitement en avoir l’intuition et rejeter le critère de déplacement, ainsi que celui de suppression (car Une sorcière vivait. ou, a fortiori, Vivait une sorcière sonne fort étrangement à l’oreille).
En outre, n'importe quel groupe fonctionnel peut être placé, à des fins stylistiques, en début ou en fin de phrase :
- sujet : Au commencement était le verbe.
- complément d'objet (indirect) : A toi, mon fils, je donnerai mon royaume. / De ce choix dépendrait tout le reste de son existence.
- attribut du sujet : Grande était la douleur de Roland.
- complément circonstanciel : Longtemps, ils marchèrent.
Nous remarquerons enfin que ces critères de distribution suffisent à conclure que ni en ni y ne sauraient être des compléments de phrase, puisqu’en tant que pronom, ils ont une place bien définie dans la phrase – avant le verbe.
Donc, si on écrit : Il y rencontra Bérénice, y n’est pas un complément de phrase : y est littéralement adjoint au verbe (c’est pourquoi l’on parle de pronom ad-verbial).
Par contre, si on remplace le pronom par son antécédent, par exemple : Il rencontra Bérénice au bal de la Marquise d’Estampes, le groupe qui commute avec ce pronom devient, lui, un complément de phrase, rompant avec la règle qui veut qu’un groupe qui commute avec un autre occupe la même fonction.
Qu’est-ce qu’un élève est censé comprendre de toutes ces manipulations ? N’est-il pas infiniment plus simple de lui expliquer que le complément d’objet, c’est la chose dont on parle quand on peut dire quelque chose après le verbe (prendre qqch, avaler qqch) ? Que les compléments circonstanciels expriment les circonstances de l’action ?
Les critères de distribution ne sont pas des critères suffisants d’identification des groupes syntaxiques. Ils sont pourtant, à cause de notre refus d’expliquer clairement des notions, les seuls que nous donnons aux enfants depuis plus de 20 ans. Pourtant, expliquer ces notions de sorte que l’élève puisse les comprendre véritablement (et pas seulement en supputer de vagues propriétés) et les apprendre, c’est lui permettre de les faire siennes, de les intégrer pleinement, afin de pouvoir les mobiliser aisément dans le raisonnement. Au lieu de quoi, à l’heure actuelle, l’élève qui veut réfléchir sur la langue, doit perpétuellement refaire l’analyse de chaque groupe syntaxique. Cela encombre sa mémoire de travail et limite fortement ses possibilités de raisonnement, d’autant plus qu’il a moins de facilités au départ. Cette méthode renforce donc les inégalités. En outre, cette méthode coûteuse sur le plan cognitif ne permet jamais l’automatisation de la reconnaissance des groupes fonctionnels. Dès lors, l’application des règles de grammaire, en particulier en orthographe, devient impossible. Comment bien écrire au rythme de la dictée ou de l’écriture d’invention quand il faut, au fur et à mesure, se souvenir des critères de distribution de chaque groupe et se lancer dans l’analyse de la phrase que l’on est en train d’écrire ? C’est strictement impossible.
Que gagne-t-on à embrouiller ainsi avec des manipulations complexes et coûteuses sur le plan cognitif des enfants qui n’ont encore aucune base en grammaire ?
Rien, si l’on en juge par l’évolution des résultats des élèves ces 20 dernières années.
L’injonction à suivre une méthode impropre, au lieu d’aider les élèves, accentue leurs difficultés. Il est temps d’en finir avec la seule description des critères de distribution (et avec l’opposition entre compléments de verbe et compléments de phrase) et d’exiger des professeurs qu’ils fassent véritablement preuve de pédagogie, en expliquant clairement les notions (ce qui n’empêche pas d’en observer le fonctionnement), afin que l’élève puis les com-prendre, c’est-à-dire, littéralement, les intégrer, en automatiser la reconnaissance, et les mobiliser pour le raisonnement.
- AsarteLilithEsprit sacré
Bon , en fait, le datif était plus efficace en latin que la grammaire française !
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Chuis comme les plantes sans eau : sans grec ni latin, j'me dessèche.
ON DIT CHOCOLATINE, PHILISTINS !
- Theriakos96Habitué du forum
AsarteLilith a écrit:Bon , en fait, le datif était plus efficace ne latin que la grammaire française !
Je suis entièrement d'accord!
- *Ombre*Grand sage
C'est un autre système. Il ne va pas nous aider beaucoup pour analyser la syntaxe française.
- Fires of PompeiiGuide spirituel
Oui, c'est un autre système et le superposer au français n'est pas, à mon sens, efficace pour nos élèves. Tout ce que je vois, c'est que concrètement avec un système comme celui que j'évoquais et qu'Ombre valide (ce qui, à mes yeux, n'est pas rien), mes élèves parviennent à mieux saisir la syntaxe, l'organisation de la phrase. Et au passage, à saisir un peu plus finement la différence entre l'objet et la circonstance : l'objet est "intrinsèque" à l'action, il est une facette de cette action (comme le sujet), la circonstance est circum. On réfléchit sur les concepts qu'ils manipulent parfois sans les interroger.
Alors non, je ne parle pas du complément d'attribution (sauf à mes latinistes, en cours de latin), mais en attendant petit à petit ça me permet de poser avec fermeté les jalons pour tout le reste... Je fais la différence entre ma réflexion sur la grammaire et ce que j'en livre aux élèves, parce que c'est tout simplement nécessaire.
Alors non, je ne parle pas du complément d'attribution (sauf à mes latinistes, en cours de latin), mais en attendant petit à petit ça me permet de poser avec fermeté les jalons pour tout le reste... Je fais la différence entre ma réflexion sur la grammaire et ce que j'en livre aux élèves, parce que c'est tout simplement nécessaire.
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Je ne dirai qu'une chose : stulo plyme.
- DalvaVénérable
Excusez-moi d'interrompre l'échange sur COD/COI mais je reste dans le thème de la construction des verbes... Pour vérifier, dans
l'infinitif est bien attribut du sujet (malgré l'identité difficile à affirmer) ?
Pierre semble souffrir. Pierre semble vouloir du gâteau.
l'infinitif est bien attribut du sujet (malgré l'identité difficile à affirmer) ?
- IphigénieProphète
Je ne pense pas : ici le fait de « sembler » ne concerne pas Pierre qui semblerait qqch mais l’action qu’il est en train de faire: le verbe n’est qu’un auxiliaire de conjugaison en quelque sorte qui n’indique pas la ressemblance mais la probabilité ou la supposition que...
A mon avis.
A mon avis.
- DalvaVénérable
Toutes les réponses que je reçois tournent autour de cette idée que "sembler" serait un modal / auxiliaire de conjugaison.
Or je le perçois tout autant comme un modal dans "Pierre semble fatigué." que dans "Pierre semble fatiguer ses parents." si ce n'est que dans le deuxième cas, Pierre agit.
Cela ne m'aide pas pour donner une explication simple aux élèves. Ne me reste plus qu'à espérer qu'aucun élève n'aura créé un exemple de ce type...
Merci Iphigénie.
Or je le perçois tout autant comme un modal dans "Pierre semble fatigué." que dans "Pierre semble fatiguer ses parents." si ce n'est que dans le deuxième cas, Pierre agit.
Cela ne m'aide pas pour donner une explication simple aux élèves. Ne me reste plus qu'à espérer qu'aucun élève n'aura créé un exemple de ce type...
Merci Iphigénie.
- frimoussette77Guide spirituel
Pierre est souffrant = Pierre semble souffrant =attribut
Dans les cas où "semble" est utilisé comme un auxiliaire de conjugaison, tu ne peux pas le remplacer par être :
Pierre est souffrir *
Pierre est fatiguer ses parents *
Dans les cas où "semble" est utilisé comme un auxiliaire de conjugaison, tu ne peux pas le remplacer par être :
Pierre est souffrir *
Pierre est fatiguer ses parents *
- *Ombre*Grand sage
Il est vrai, Dalva, que l'emploi de sembler plutôt que d'être pose nécessairement une nuance, modalise. On pourrait d'ailleurs dire : Pierre semble être fatigué. Mais même là, fatigué, contrairement à "fatiguer ses parents", décrit non pas une action de Pierre (mise à distance par le semi-auxiliaire modal) mais un état de Pierre. Même en rétablissant le verbe être, on n'obtient pas le même rapport entre ce qui suit et le sujet.
Le plus simple, pour les élèves, me paraît de faire comme Frimoussette, c'est-à-dire bien expliquer ce que verbe d'état veut dire : comme leur nom l'indique, ils permettent d'exprimer non pas une action mais un état du sujet et, à ce titre, peuvent toujours (avec une nuance, certes) être remplacés par le verbe être. Cela permet aussi de distinguer des emplois comme Les années avaient beau passer, ils demeuraient fâchés, et Le jeune coupe demeurait rue des Oues, sur la rive droite du fleuve.
Le plus simple, pour les élèves, me paraît de faire comme Frimoussette, c'est-à-dire bien expliquer ce que verbe d'état veut dire : comme leur nom l'indique, ils permettent d'exprimer non pas une action mais un état du sujet et, à ce titre, peuvent toujours (avec une nuance, certes) être remplacés par le verbe être. Cela permet aussi de distinguer des emplois comme Les années avaient beau passer, ils demeuraient fâchés, et Le jeune coupe demeurait rue des Oues, sur la rive droite du fleuve.
- IphigénieProphète
En effet c’est mieux expliqué comme cela Frimoussette et Ombre!
- *Ombre*Grand sage
Dalva a écrit:Toutes les réponses que je reçois tournent autour de cette idée que "sembler" serait un modal / auxiliaire de conjugaison.
Or je le perçois tout autant comme un modal dans "Pierre semble fatigué." que dans "Pierre semble fatiguer ses parents." si ce n'est que dans le deuxième cas, Pierre agit.
Cela ne m'aide pas pour donner une explication simple aux élèves. Ne me reste plus qu'à espérer qu'aucun élève n'aura créé un exemple de ce type...
Merci Iphigénie.
Quand je commence la leçon sur l'attribut, je fais très vite écrire. Et non seulement je ne redoute pas que les élèves achoppent sur ce type de cas, mais je sais qu'ils vont le faire, que c'est normal, et que cela me donnera l'occasion, en expliquant pourquoi ces exemples, même s'ils utilisent "sembler" ou "demeurer", ne conviennent pas, de mieux faire concevoir la notion d'attribut : est-ce que ce qui suit le verbe dit bien comment est Pierre (ou je, ou...) ou est-ce que ça dit ce que fait Pierre (ou je, ou...) ? (Ce qu'on peut matérialiser par le signe égale quand il s'agit bien d'un attribut.) Le passage par l'erreur est intéressant : il permet de mieux cerner le concept en pointant dès le début les écueils à éviter.
- DalvaVénérable
Justement, pour tous les autres verbes j'ai pu proposer des "exemples faux" et les commenter. Il est simple d'expliquer que "demeurer" n'a pas le même sens dans les deux phrases.*Ombre* a écrit:Il est vrai, Dalva, que l'emploi de sembler plutôt que d'être pose nécessairement une nuance, modalise. On pourrait d'ailleurs dire : Pierre semble être fatigué. Mais même là, fatigué, contrairement à "fatiguer ses parents", décrit non pas une action de Pierre (mise à distance par le semi-auxiliaire modal) mais un état de Pierre. Même en rétablissant le verbe être, on n'obtient pas le même rapport entre ce qui suit et le sujet.
Le plus simple, pour les élèves, me paraît de faire comme Frimoussette, c'est-à-dire bien expliquer ce que verbe d'état veut dire : comme leur nom l'indique, ils permettent d'exprimer non pas une action mais un état du sujet et, à ce titre, peuvent toujours (avec une nuance, certes) être remplacés par le verbe être. Cela permet aussi de distinguer des emplois comme Les années avaient beau passer, ils demeuraient fâchés, et Le jeune coupe demeurait rue des Oues, sur la rive droite du fleuve.
Or je ne vois aucune différence de sens entre les deux emplois de "sembler". La différence est portée exclusivement par ce qui est ajouté.
Remplacer par "être", c'est ma première explication, oui.
Pierre semble fatigué. = Pierre est fatigué (à mes yeux). = J'ai l'impression que Pierre est fatigué.
Ah ben tiens, j'ai ma réponse !
Pierre semble fatiguer ses parents. = J'ai l'impression que Pierre fatigue ses parents.
Hop, problème résolu : "fatiguer ses parents" = COD de "sembler". Et ça, c'est un nouveau problème.
De toute façon je ne me vois pas expliquer ça à distance par écrit.
Ne t'inquiète pas, j'en étais arrivée exactement à ces conclusions avec ton intervention !Iphigénie a écrit:En effet c’est mieux expliqué comme cela Frimoussette et Ombre!
Edit : suite à ton nouveau message, Ombre, c'est exactement ce sur quoi je suis en ce moment !
Sauf qu'expliquer à l'oral, en faisant des gestes, en posant des questions, ça aide.
Tous les autres cas ont été simples à traiter, mais celui-là, non.
Je viens de trouver la solution (grâce à vous, mille mercis, discuter aide à réfléchir), mais je ne pense pas l'utiliser. Si j'arrive à parler aux élèves en direct, on verra.
- IphigénieProphète
Merci Dalva mais elles étaient plus claires: dans un cas "sembler" porte sur un état (il semble fatigué) dans l'autre il modalise une action (il semble fatiguer ses auditeurs), en effet.
- *Ombre*Grand sage
Ah ! mais je suis d'accord avec toi. Expliquer à l'oral, c'est une chose. Par écrit, c'en est une autre, bien plus compliquée.
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