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- maduNiveau 8
Eloah a écrit:Ma question est sans doute naïve mais tant pis : si on impose à un élève non lecteur / pas très lecteur de lire un roman et qu'on n'y consacre qu'un quart d'heure chaque semaine, combien de temps lui faudra-t-il pour terminer son roman ?? et, surtout, au vu du rythme de lecture et de compréhension d'un collégien lambda, lit-il assez pendant ce 1/4 d'heure pour construire du sens, s'en souvenir la semaine suivante et avoir envie de reprendre sa lecture ?
J’imagine que c’est pour cette raison que la plupart des établissements proposent des temps de lecture qui se suivent (vingt minutes par jour sur une semaine dans mon établissement, ça laisse le temps de s’installer dans la lecture).
Le dispositif a ses défauts, moi-même qui le « défends » un peu ici je n’en suis pas fan. Mais il a le mérite de proposer à nos élèves, constamment happés par les écrans, un temps dédié à la lecture.
- ylmExpert spécialisé
Je ne pense pas, ça serait illogique, quel rapport avec le fait qu'il n'enseigne pas les mathématiques ?mafalda16 a écrit:DR sous-entend très gentiment que tu as des goûts discutables.
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The life of man, solitary, poor, nasty, brutish and short.
Thomas Hobbes
- valleExpert spécialisé
@ylm, ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut comprendre la phrase...
J'ai toujours un peu de mal avec ce type de discours :
Sur la suite : c'est faux. Si c'était vrai, il suffirait de "créer l'occasion d'une lecture choisie" pour qu'ils arrêtent de peiner à lire les œuvres proposées en cours de français ?? Je ne savais pas que la solution était si simple !!
Sur la 3e phrase, tu attaques un problème inexistant : personne ne trouve du mal à ce qu'un élève lise un manga si cela lui apporte plaisir. En tout cas, en suivant ton argument, cet élève qui prend du plaisir à lire du manga lors du 1/4 d'heure devra ensuite être amené par ses enseignants à lire autre chose... dans le cadre que le collège propose pour la lecture, c'est-à-dire le 1/4 d'heure, non ?
J'ai toujours un peu de mal avec ce type de discours :
Sur la première phrase : alors on fait quoi ? Si un élève refuse de lire la consigne d'un problème de maths, on lui dit "ah oui, si tu n'en as pas envie, cela n' pas de sens" ? Pareil pour toute lecture. En français, en HG, en LV, en SVT, etc., les élèves doivent lire. Se contenter de dire "pas de sens si pas de plaisir" empêche tout travail didactique.Eloah a écrit:Lire sans envie ni plaisir n'a ni sens ni intérêt. C'est justement parce que certains élèves n'ont jamais eu l'occasion de découvrir cette envie et ce plaisir d'une lecture choisie par et pour eux qu'ils peinent tant à lire les œuvres proposées en cours de français. Si lire un manga apporte du plaisir, je ne vois pas où est le mal. A nous, enseignants, d'amener ensuite l'élève a prendre plaisir à lire autre chose.
Sur la suite : c'est faux. Si c'était vrai, il suffirait de "créer l'occasion d'une lecture choisie" pour qu'ils arrêtent de peiner à lire les œuvres proposées en cours de français ?? Je ne savais pas que la solution était si simple !!
Sur la 3e phrase, tu attaques un problème inexistant : personne ne trouve du mal à ce qu'un élève lise un manga si cela lui apporte plaisir. En tout cas, en suivant ton argument, cet élève qui prend du plaisir à lire du manga lors du 1/4 d'heure devra ensuite être amené par ses enseignants à lire autre chose... dans le cadre que le collège propose pour la lecture, c'est-à-dire le 1/4 d'heure, non ?
- ylmExpert spécialisé
C'est dans quel sens alors ?valle a écrit:@ylm, ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut comprendre la phrase...
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- valleExpert spécialisé
C'est-à-dire, le sens de la phrase est bien celui donné par @mafalda16, mais ta lecture doit être retournée de 180°.ylm a écrit:C'est dans quel sens alors ?valle a écrit:@ylm, ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut comprendre la phrase...
Je ne sais pas si le fil est le lieu le plus opportun pour cette explication de texte ;-)
- LordAnthonyNiveau 6
Concernant les mangas, au delà de toute considération littéraire et selon l'orthophoniste de mon fils (ça vaut ce que ça vaut, moi je vous retranscris ça pêlemêle) la lecture "à l'envers" des mangas peut faire beaucoup de dégâts chez les enfants qui ne lisent quasiment que ça.
- DalvarNiveau 6
LordAnthony a écrit:Concernant les mangas, au delà de toute considération littéraire et selon l'orthophoniste de mon fils (ça vaut ce que ça vaut, moi je vous retranscris ça pêlemêle) la lecture "à l'envers" des mangas peut faire beaucoup de dégâts chez les enfants qui ne lisent quasiment que ça.
ça me fait penser que sur les RS quand les gens font des petites bandes dessinées (pas spécialement en style manga) une fois sur deux les bulles sont pas dans le bon ordre, les cases se lisent bien de gauche à droite, à l'occidentale, par contre une fois sur deux il faut lire la bulle à droite avant celle à gauche, c'est peut-être dû à l'influence des mangas.
- PrezboGrand Maître
valle a écrit:@ylm, ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut comprendre la phrase...
J'ai toujours un peu de mal avec ce type de discours :Sur la première phrase : alors on fait quoi ? Si un élève refuse de lire la consigne d'un problème de maths, on lui dit "ah oui, si tu n'en as pas envie, cela n' pas de sens" ? Pareil pour toute lecture. En français, en HG, en LV, en SVT, etc., les élèves doivent lire. Se contenter de dire "pas de sens si pas de plaisir" empêche tout travail didactique.Eloah a écrit:Lire sans envie ni plaisir n'a ni sens ni intérêt. C'est justement parce que certains élèves n'ont jamais eu l'occasion de découvrir cette envie et ce plaisir d'une lecture choisie par et pour eux qu'ils peinent tant à lire les œuvres proposées en cours de français. Si lire un manga apporte du plaisir, je ne vois pas où est le mal. A nous, enseignants, d'amener ensuite l'élève a prendre plaisir à lire autre chose.
Sur la suite : c'est faux. Si c'était vrai, il suffirait de "créer l'occasion d'une lecture choisie" pour qu'ils arrêtent de peiner à lire les œuvres proposées en cours de français ?? Je ne savais pas que la solution était si simple !!
Sur la 3e phrase, tu attaques un problème inexistant : personne ne trouve du mal à ce qu'un élève lise un manga si cela lui apporte plaisir. En tout cas, en suivant ton argument, cet élève qui prend du plaisir à lire du manga lors du 1/4 d'heure devra ensuite être amené par ses enseignants à lire autre chose... dans le cadre que le collège propose pour la lecture, c'est-à-dire le 1/4 d'heure, non ?
Non, il devra être amené à lire autre chose...dans le cadre du cours de français.
En fait, je crois que le problème est celui posé par Hocam : l'idée en gros du 1/4 d'heure de lecture, c'était d'amener les élèves à fréquenter les livres par la lecture plaisir, en espérant que cela rende plus facile par la suite la lecture imposée dans le cadre scolaire. Ce que semble confirmer le fait que les enfants gros lecteurs, et habitués aux livres dans le cadre familial, sont généralement bons élèves.
Problème, les livres faisant le gros de la consommation adolescente actuelle ne coïncident pas avec les goûts et les espérances des enseignants (quelle surprise). Effectivement, les mangas vont être dominants, et on a plus de chance de voir apparaître Mortelle Adèle ou, si on impose un roman, le club des Cinq (mettons Geronimo Stilton voir Harry Potter dans un bon jour), que Maupassant, Hugo ou même Dumas. D'où la tentation implicite chez certains collègues d'en revenir à un dispositif plus proche de la lecture cursive. Mais c'est confondre les objectifs et c'est par essence conflictuel.
- BaldredSage
LordAnthony a écrit:Concernant les mangas, au delà de toute considération littéraire et selon l'orthophoniste de mon fils (ça vaut ce que ça vaut, moi je vous retranscris ça pêlemêle) la lecture "à l'envers" des mangas peut faire beaucoup de dégâts chez les enfants qui ne lisent quasiment que ça.
Mouais, ca vaudrait le coup de lui demander ses sources, et quels dégats sur quels enfants, parce que sinon c'est un peu comme mes "bons" pères qui voyaient Satan dans Pif Gadget...
- PrezboGrand Maître
Baldred a écrit:LordAnthony a écrit:Concernant les mangas, au delà de toute considération littéraire et selon l'orthophoniste de mon fils (ça vaut ce que ça vaut, moi je vous retranscris ça pêlemêle) la lecture "à l'envers" des mangas peut faire beaucoup de dégâts chez les enfants qui ne lisent quasiment que ça.
Mouais, ca vaudrait le coup de lui demander ses sources, et quels dégats sur quels enfants, parce que sinon c'est un peu comme mes "bons" pères qui voyaient Satan dans Pif Gadget...
N'exagérons pas : ce n'était pas satanique, c'était juste communiste.
- BaldredSage
Ce n'est pas contradictoire, et pour l'abbé B. C'était : "une oeuvre de Satan". Mais sinon je suis d'accord avec toi, certains curés de Stan exagéraient parfois un peu trop dans certains domaines...Prezbo a écrit:Baldred a écrit:LordAnthony a écrit:Concernant les mangas, au delà de toute considération littéraire et selon l'orthophoniste de mon fils (ça vaut ce que ça vaut, moi je vous retranscris ça pêlemêle) la lecture "à l'envers" des mangas peut faire beaucoup de dégâts chez les enfants qui ne lisent quasiment que ça.
Mouais, ca vaudrait le coup de lui demander ses sources, et quels dégats sur quels enfants, parce que sinon c'est un peu comme mes "bons" pères qui voyaient Satan dans Pif Gadget...
N'exagérons pas : ce n'était pas satanique, c'était juste communiste.
- IridianeFidèle du forum
C’est rigolo en te lisant Baldred j’ai pris conscience de la proximité graphique entre « satan » et « Stan »… coïncidence ? Je ne crois pas !
- AngeleneNiveau 5
Hocam a écrit:Ah, et ils n'ont pas des cours de français pour ça ? « Ils n'accèdent jamais à quoi que ce soit d'un peu symbolique » : jamais, même en classe ?Angelene a écrit:
Ils peuvent lire du mangas quand ils veulent, mais tous les jours en cours ça pose question. Pareil à mon avis pour tout ce qui est documentaire. C'est bien d'en lire, mais s'ils ne lisent que ça, ils n'accèdent jamais à quoi que ce soit d'un peu symbolique par exemple. L'implicite par exemple, dont nous avons tant besoin dans la vie, ne se trouve vraiment que dans les textes de fiction.
Tu crois vraiment que le cours de français suffit à pallier la chute généralisée de la lecture? Les horaires ont même baissé depuis l'époque où les élèves lisaient chez eux... Aujourd'hui c'est le seul moment où ils sont face à un texte, mais ça ne peut pas suffire.
- AngeleneNiveau 5
Eloah a écrit:Ma question est sans doute naïve mais tant pis : si on impose à un élève non lecteur / pas très lecteur de lire un roman et qu'on n'y consacre qu'un quart d'heure chaque semaine, combien de temps lui faudra-t-il pour terminer son roman ?? et, surtout, au vu du rythme de lecture et de compréhension d'un collégien lambda, lit-il assez pendant ce 1/4 d'heure pour construire du sens, s'en souvenir la semaine suivante et avoir envie de reprendre sa lecture ?
Pour moi, en tant que prof doc, il faut d'abord susciter l'envie et la curiosité avant d'imposer une lecture. Lire sans envie ni plaisir n'a ni sens ni intérêt. C'est justement parce que certains élèves n'ont jamais eu l'occasion de découvrir cette envie et ce plaisir d'une lecture choisie par et pour eux qu'ils peinent tant à lire les œuvres proposées en cours de français. Si lire un manga apporte du plaisir, je ne vois pas où est le mal. A nous, enseignants, d'amener ensuite l'élève a prendre plaisir à lire autre chose.
Chez nous c'est tous les jours justement. D'Où le problème: ça fait 1H15 consacrée à One Piece pour des élèves qui veulent aller au lycée général... Dans le cas d'1/4 d'heure semaine on ne s'interrogerait pas autant franchement...
Et bien sûr jamais nous n'attendons qu'ils lisent des classiques sur ce temps-là.
- DesolationRowEmpereur
ylm a écrit:
Pour moi la plus grande œuvre, tous domaines artistiques considérés, de ces 25 dernières années (et de tous les temps) est un manga, One Piece.
En fait, je n'entendais pas développer davantage, mais puisque tu insistes
Je voulais dire que certes tous les goûts, même les plus évidemment discutables, sont dans la nature, mais que la phrase graissée ci-dessus est ridicule - tout autant que si j'écrivais, par exemple, que la Revanche de l'Ombre Jaune, Le club des cinq prépare son goûter, Friends ou Mr. Tambourine Man étaient les oeuvres les plus significatives des cinquante dernières années (et de tous les temps) - alors que je ne remettrais certes pas en cause leur valeur individuelle, qui est grande. En ce sens il est bon que le programme d'histoire de l'art et de littérature soit laissé à l'appréciation de ceux qui ont une idée au moins vague de ce que sont l'histoire de l'art et la littérature - tout comme on ne me demande pas s'il est vraiment utile de faire étudier les équations de second degré.
- Patience et raisonFidèle du forum
Mortelle Adèle, Le club des Cinq et Benjamin Stilton, on est d'accord, c'est pour le 1/4 de lecture en école élémentaire?
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Scio me nihil scire
Ambassadeur de Sparte à Byzance.
« Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » — Henri Lacordaire
« Quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu'une oreille distraite » — Rapport du Conseil d'État de 1991, De la sécurité juridique.
"Alors n’oubliez pas : si vous voulez vraiment être productifs, apprenez à travailler avec des outils qui font gagner du temps au lieu de tout refaire à la main. Mais si votre passion, c’est de ne surtout pas utiliser de livres déjà complets, et de réécrire votre propre truc à chaque fois parce que « Je préfère utiliser mes propres outils et je n’arrive pas à utiliser ceux des autres« , alors félicitations :
Vous êtes bons pour rejoindre l’Éducation Nationale française." Odieux ***.
- *Ombre*Grand sage
Entre One piece et Hugo en cursive autonome, il y a peut-être un entre-deux que l'on peut raisonnablement viser avec des collégiens ? Pourquoi donner immédiatement dans la caricature ?
Penser que l'on passera magiquement, par la pure vertu du plaisir (dont l'élève a bien conscience qu'il porte sur un objet précis, non interchangeable), de la lecture du manga à celled'Hugo d'un roman jeunesse de facture honorable, c'est un vœu pieux, voire, depuis le temps qu'on voit que ça ne marche pas, une bêtise.
Les élèves ne lisent pas parce qu'ils ne savent pas lire. Je caricature un peu, mais c'est ce mécanisme qui est à l'oeuvre, Desmurget l'explique très bien. Et ils ne savent pas lire parce qu'ils ne lisent pas, parce que le hiatus se creuse année après année entre leurs capacités de lecteur et les écrits qui pourraient parler à leur âge. C'est ainsi qu'on se retrouve avec Max et Lili en Quatrième. Et c'est le serpent qui se mord la queue.
Si l'on veut briser le cercle maléfique, on n'y arrivera pas avec des mangas. Un manga ne permet pas d'intégrer les éléments de la langue écrite présents dans un roman quelconque (même très quelconque), dans une consigne d'exercice, un texte documentaire ou de réflexion, un écrit de la vie courante... Il ne permet pas à l'élève de progresser dans la compréhension ni la maîtrise de la langue, tout simplement parce qu'il ne mobilise pas cette langue écrite (sauf comme retranscription d'un oral forcément limité).
Nous aussi, nous avons commencé par miser sur l'entraînement d'un quart d'heure lecture quotidien. Mais nous avons vite compris que sans un minimum de cadrage, nous n'arriverions à rien. Les équipes de français ont constitué des caisses de cursives variées, avec des textes de tous les niveaux : en Sixième, par exemple, on y trouve aussi bien les romans d'aventures de Bottero, épais volumes à la plume soignée, que des classiques accessibles comme L'Enfant et la rivière, les récits de la mythologie racontés et illustrés par Yvan Pommeaux (que nous réservons en priorité à nos dyslexiques), de petits policiers faciles à lire, des récits humoristiques comme La Balade de Cornebique de Mourlevat... Honnêtement, la qualité est très hétérogène, mais ce sont déjà des récits suffisamment écrits pour nourrir les élèves dans ce domaine. Nous, professeurs de Lettres, distribuons les livres, les présentons, les faisons tourner, mettons la pression aux élèves pour qu'ils en lisent au moins un par mois (nous échangeons les caisses entre classe à chaque période) en arguant du fait que, quand on lit un quart d'heure par jour, on n'a aucun mal à finir un livre en un mois. Je ne prétends pas que cela fait des miracles avec tous les élèves - il y en aura toujours qui ne liront rien, et nous n'y pouvons pas grand chose - mais cela en nourrit tout de même suffisamment pour que cela en vaille la peine.
Dans certaines classes avec beaucoup d'élèves en difficulté, ou tout simplement avec un climat peu propice au déroulement serein du quart d'heure lecture, nous avons décidé, en accord avec la direction, de transformer ce temps de lecture personnelle en temps d'écoute d'un beau récit ; audio-livre diffusé en épisode, textes enregistré, voire lecture professorale... J'en ai bien un ou deux qui dorment vaguement, pendant ce temps, mais pour les autres, c'est toujours un moment qu'ils apprécient, et je vois qu'ils sont attentifs parce que, parfois, ils ont des questions (alors que c'est de la lecture plaisir : je ne leur en pose aucune, on écoute une histoire, c'est tout), et quand un événement fait que ce temps saute, ils râlent.
Imposer des titres précis, vouloir à toute force faire boire 100% des ânes qui n'ont pas soif, exiger des pratiques uniformes quels que soient le public et les situations, c'est dans doute une bêtise. Mais je pense aussi qu'il entre pleinement dans nos missions de permettre aux élèves de devenir capables de lire, de tout lire, ou le plus possible, et que c'est seulement en les confrontant à la langue écrite qu'on y parvient. Tâtonner, rectifier, aménager ce temps pour qu'il soit le plus adapté possible à la réalité des élèves, c'est nécessaire. Mais se mentir en continuant de prétendre, contre les faits, que la lecture des mangas mènera un jour nos élèves à la lecture de toutes sortes de textes, ou refuser de les nourrir intellectuellement au nom de la prééminence supposée du plaisir sur toute autre considération, je pense que c'est un grave renoncement, dont nous souffrons à terme presque autant que les élèves.
Penser que l'on passera magiquement, par la pure vertu du plaisir (dont l'élève a bien conscience qu'il porte sur un objet précis, non interchangeable), de la lecture du manga à celle
Les élèves ne lisent pas parce qu'ils ne savent pas lire. Je caricature un peu, mais c'est ce mécanisme qui est à l'oeuvre, Desmurget l'explique très bien. Et ils ne savent pas lire parce qu'ils ne lisent pas, parce que le hiatus se creuse année après année entre leurs capacités de lecteur et les écrits qui pourraient parler à leur âge. C'est ainsi qu'on se retrouve avec Max et Lili en Quatrième. Et c'est le serpent qui se mord la queue.
Si l'on veut briser le cercle maléfique, on n'y arrivera pas avec des mangas. Un manga ne permet pas d'intégrer les éléments de la langue écrite présents dans un roman quelconque (même très quelconque), dans une consigne d'exercice, un texte documentaire ou de réflexion, un écrit de la vie courante... Il ne permet pas à l'élève de progresser dans la compréhension ni la maîtrise de la langue, tout simplement parce qu'il ne mobilise pas cette langue écrite (sauf comme retranscription d'un oral forcément limité).
Nous aussi, nous avons commencé par miser sur l'entraînement d'un quart d'heure lecture quotidien. Mais nous avons vite compris que sans un minimum de cadrage, nous n'arriverions à rien. Les équipes de français ont constitué des caisses de cursives variées, avec des textes de tous les niveaux : en Sixième, par exemple, on y trouve aussi bien les romans d'aventures de Bottero, épais volumes à la plume soignée, que des classiques accessibles comme L'Enfant et la rivière, les récits de la mythologie racontés et illustrés par Yvan Pommeaux (que nous réservons en priorité à nos dyslexiques), de petits policiers faciles à lire, des récits humoristiques comme La Balade de Cornebique de Mourlevat... Honnêtement, la qualité est très hétérogène, mais ce sont déjà des récits suffisamment écrits pour nourrir les élèves dans ce domaine. Nous, professeurs de Lettres, distribuons les livres, les présentons, les faisons tourner, mettons la pression aux élèves pour qu'ils en lisent au moins un par mois (nous échangeons les caisses entre classe à chaque période) en arguant du fait que, quand on lit un quart d'heure par jour, on n'a aucun mal à finir un livre en un mois. Je ne prétends pas que cela fait des miracles avec tous les élèves - il y en aura toujours qui ne liront rien, et nous n'y pouvons pas grand chose - mais cela en nourrit tout de même suffisamment pour que cela en vaille la peine.
Dans certaines classes avec beaucoup d'élèves en difficulté, ou tout simplement avec un climat peu propice au déroulement serein du quart d'heure lecture, nous avons décidé, en accord avec la direction, de transformer ce temps de lecture personnelle en temps d'écoute d'un beau récit ; audio-livre diffusé en épisode, textes enregistré, voire lecture professorale... J'en ai bien un ou deux qui dorment vaguement, pendant ce temps, mais pour les autres, c'est toujours un moment qu'ils apprécient, et je vois qu'ils sont attentifs parce que, parfois, ils ont des questions (alors que c'est de la lecture plaisir : je ne leur en pose aucune, on écoute une histoire, c'est tout), et quand un événement fait que ce temps saute, ils râlent.
Imposer des titres précis, vouloir à toute force faire boire 100% des ânes qui n'ont pas soif, exiger des pratiques uniformes quels que soient le public et les situations, c'est dans doute une bêtise. Mais je pense aussi qu'il entre pleinement dans nos missions de permettre aux élèves de devenir capables de lire, de tout lire, ou le plus possible, et que c'est seulement en les confrontant à la langue écrite qu'on y parvient. Tâtonner, rectifier, aménager ce temps pour qu'il soit le plus adapté possible à la réalité des élèves, c'est nécessaire. Mais se mentir en continuant de prétendre, contre les faits, que la lecture des mangas mènera un jour nos élèves à la lecture de toutes sortes de textes, ou refuser de les nourrir intellectuellement au nom de la prééminence supposée du plaisir sur toute autre considération, je pense que c'est un grave renoncement, dont nous souffrons à terme presque autant que les élèves.
- CasparProphète
Ce n'est pas tout à fait le même dispositif mais je me rappelle avoir visité un établissement en Angleterre où le règlement stipulait que les élèves devaient avoir un livre (autre que les manuels) en cas de temps mort, professeur absent, devoirs finis etc mais je ne sais pas de quelle façon c'était appliqué.
- AngeleneNiveau 5
Je suis en totalement en accord avec tout ce que tu dis. Ils n'accèderont jamais au plaisir de lire un roman s'ils n'y sont confrontés que dans le cours de français où il n'ont pas le choix du titre en plus. C'est un peu comme la course: il paraît qu'il faut courir plusieurs mois avant de commencer à apprécier vraiment. Et s'ils ne prennent jamais plaisir à lire, ils ne lisent pas, et le niveau global baisse drastiquement.
Et je maintiens que ce temps a été faussement imaginé au départ comme un temps uniquement récréatif. C'est un détour pour mener élèves au texte. A l'échelle nationale, il s'agit de rehausser le niveau de toute une génération. Bien sûr qu'il faut leur dire que c'est pour le plaisir et non pour accroître leur vocabulaire, mais ne soyons pas dupes...
Et je maintiens que ce temps a été faussement imaginé au départ comme un temps uniquement récréatif. C'est un détour pour mener élèves au texte. A l'échelle nationale, il s'agit de rehausser le niveau de toute une génération. Bien sûr qu'il faut leur dire que c'est pour le plaisir et non pour accroître leur vocabulaire, mais ne soyons pas dupes...
- ylmExpert spécialisé
Donc j'avais bien compris. Ton raisonnement est illogique (pour rester poli).DesolationRow a écrit:ylm a écrit:
Pour moi la plus grande œuvre, tous domaines artistiques considérés, de ces 25 dernières années (et de tous les temps) est un manga, One Piece.
En fait, je n'entendais pas développer davantage, mais puisque tu insistes
Je voulais dire que certes tous les goûts, même les plus évidemment discutables, sont dans la nature, mais que la phrase graissée ci-dessus est ridicule - tout autant que si j'écrivais, par exemple, que la Revanche de l'Ombre Jaune, Le club des cinq prépare son goûter, Friends ou Mr. Tambourine Man étaient les oeuvres les plus significatives des cinquante dernières années (et de tous les temps) - alors que je ne remettrais certes pas en cause leur valeur individuelle, qui est grande. En ce sens il est bon que le programme d'histoire de l'art et de littérature soit laissé à l'appréciation de ceux qui ont une idée au moins vague de ce que sont l'histoire de l'art et la littérature - tout comme on ne me demande pas s'il est vraiment utile de faire étudier les équations de second degré.
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Thomas Hobbes
- DesolationRowEmpereur
ylm a écrit:Donc j'avais bien compris. Ton raisonnement est illogique (pour rester poli).DesolationRow a écrit:ylm a écrit:
Pour moi la plus grande œuvre, tous domaines artistiques considérés, de ces 25 dernières années (et de tous les temps) est un manga, One Piece.
En fait, je n'entendais pas développer davantage, mais puisque tu insistes
Je voulais dire que certes tous les goûts, même les plus évidemment discutables, sont dans la nature, mais que la phrase graissée ci-dessus est ridicule - tout autant que si j'écrivais, par exemple, que la Revanche de l'Ombre Jaune, Le club des cinq prépare son goûter, Friends ou Mr. Tambourine Man étaient les oeuvres les plus significatives des cinquante dernières années (et de tous les temps) - alors que je ne remettrais certes pas en cause leur valeur individuelle, qui est grande. En ce sens il est bon que le programme d'histoire de l'art et de littérature soit laissé à l'appréciation de ceux qui ont une idée au moins vague de ce que sont l'histoire de l'art et la littérature - tout comme on ne me demande pas s'il est vraiment utile de faire étudier les équations de second degré.
Tu as raison, j'aurais directement dû écrire que tu avais dit une considérable sottise. Mon urbanité me perdra.
- ylmExpert spécialisé
Si tu étais vraiment urbain (et lucide) tu aurais écrit "je pense que tu as écrit une considérable sottise".DesolationRow a écrit:ylm a écrit:Donc j'avais bien compris. Ton raisonnement est illogique (pour rester poli).DesolationRow a écrit:ylm a écrit:
Pour moi la plus grande œuvre, tous domaines artistiques considérés, de ces 25 dernières années (et de tous les temps) est un manga, One Piece.
En fait, je n'entendais pas développer davantage, mais puisque tu insistes
Je voulais dire que certes tous les goûts, même les plus évidemment discutables, sont dans la nature, mais que la phrase graissée ci-dessus est ridicule - tout autant que si j'écrivais, par exemple, que la Revanche de l'Ombre Jaune, Le club des cinq prépare son goûter, Friends ou Mr. Tambourine Man étaient les oeuvres les plus significatives des cinquante dernières années (et de tous les temps) - alors que je ne remettrais certes pas en cause leur valeur individuelle, qui est grande. En ce sens il est bon que le programme d'histoire de l'art et de littérature soit laissé à l'appréciation de ceux qui ont une idée au moins vague de ce que sont l'histoire de l'art et la littérature - tout comme on ne me demande pas s'il est vraiment utile de faire étudier les équations de second degré.
Tu as raison, j'aurais directement dû écrire que tu avais dit une considérable sottise. Mon urbanité me perdra.
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- PrezboGrand Maître
*Ombre* a écrit:Entre One piece et Hugo en cursive autonome, il y a peut-être un entre-deux que l'on peut raisonnablement viser avec des collégiens ? Pourquoi donner immédiatement dans la caricature ?
Penser que l'on passera magiquement, par la pure vertu du plaisir (dont l'élève a bien conscience qu'il porte sur un objet précis, non interchangeable), de la lecture du manga à celled'Hugod'un roman jeunesse de facture honorable, c'est un vœu pieux, voire, depuis le temps qu'on voit que ça ne marche pas, une bêtise.
Les élèves ne lisent pas parce qu'ils ne savent pas lire. Je caricature un peu, mais c'est ce mécanisme qui est à l'oeuvre, Desmurget l'explique très bien. Et ils ne savent pas lire parce qu'ils ne lisent pas, parce que le hiatus se creuse année après année entre leurs capacités de lecteur et les écrits qui pourraient parler à leur âge. C'est ainsi qu'on se retrouve avec Max et Lili en Quatrième. Et c'est le serpent qui se mord la queue.
Si l'on veut briser le cercle maléfique, on n'y arrivera pas avec des mangas. Un manga ne permet pas d'intégrer les éléments de la langue écrite présents dans un roman quelconque (même très quelconque), dans une consigne d'exercice, un texte documentaire ou de réflexion, un écrit de la vie courante... Il ne permet pas à l'élève de progresser dans la compréhension ni la maîtrise de la langue, tout simplement parce qu'il ne mobilise pas cette langue écrite (sauf comme retranscription d'un oral forcément limité).
Nous aussi, nous avons commencé par miser sur l'entraînement d'un quart d'heure lecture quotidien. Mais nous avons vite compris que sans un minimum de cadrage, nous n'arriverions à rien. Les équipes de français ont constitué des caisses de cursives variées, avec des textes de tous les niveaux : en Sixième, par exemple, on y trouve aussi bien les romans d'aventures de Bottero, épais volumes à la plume soignée, que des classiques accessibles comme L'Enfant et la rivière, les récits de la mythologie racontés et illustrés par Yvan Pommeaux (que nous réservons en priorité à nos dyslexiques), de petits policiers faciles à lire, des récits humoristiques comme La Balade de Cornebique de Mourlevat... Honnêtement, la qualité est très hétérogène, mais ce sont déjà des récits suffisamment écrits pour nourrir les élèves dans ce domaine. Nous, professeurs de Lettres, distribuons les livres, les présentons, les faisons tourner, mettons la pression aux élèves pour qu'ils en lisent au moins un par mois (nous échangeons les caisses entre classe à chaque période) en arguant du fait que, quand on lit un quart d'heure par jour, on n'a aucun mal à finir un livre en un mois. Je ne prétends pas que cela fait des miracles avec tous les élèves - il y en aura toujours qui ne liront rien, et nous n'y pouvons pas grand chose - mais cela en nourrit tout de même suffisamment pour que cela en vaille la peine.
Dans certaines classes avec beaucoup d'élèves en difficulté, ou tout simplement avec un climat peu propice au déroulement serein du quart d'heure lecture, nous avons décidé, en accord avec la direction, de transformer ce temps de lecture personnelle en temps d'écoute d'un beau récit ; audio-livre diffusé en épisode, textes enregistré, voire lecture professorale... J'en ai bien un ou deux qui dorment vaguement, pendant ce temps, mais pour les autres, c'est toujours un moment qu'ils apprécient, et je vois qu'ils sont attentifs parce que, parfois, ils ont des questions (alors que c'est de la lecture plaisir : je ne leur en pose aucune, on écoute une histoire, c'est tout), et quand un événement fait que ce temps saute, ils râlent.
Imposer des titres précis, vouloir à toute force faire boire 100% des ânes qui n'ont pas soif, exiger des pratiques uniformes quels que soient le public et les situations, c'est dans doute une bêtise. Mais je pense aussi qu'il entre pleinement dans nos missions de permettre aux élèves de devenir capables de lire, de tout lire, ou le plus possible, et que c'est seulement en les confrontant à la langue écrite qu'on y parvient. Tâtonner, rectifier, aménager ce temps pour qu'il soit le plus adapté possible à la réalité des élèves, c'est nécessaire. Mais se mentir en continuant de prétendre, contre les faits, que la lecture des mangas mènera un jour nos élèves à la lecture de toutes sortes de textes, ou refuser de les nourrir intellectuellement au nom de la prééminence supposée du plaisir sur toute autre considération, je pense que c'est un grave renoncement, dont nous souffrons à terme presque autant que les élèves.
A vrai dire, je pense que personne ne prétend qu'un manga nourrit l'apprentissage de la langue autant qu'un roman, ni qu'il faut privilégier "prééminence supposée du plaisir sur toute autre considération", cela me semble s'inventer des ennemis imaginaires.
Sur le fond, je crois qu'on a fait le tour : il y a une opposition au principe du quart d'heure de lecture dans ses présupposés rappelés grosso-modo comme Hocam, au profit d'un dispositif plus classique et plus proches des lectures cursives. La question que je me poserais, et je ne prétends pas avoir la réponse, est de savoir si les élèves qui ne liront que des mangas si on leur laisse le choix vont vraiment lire un roman si on leur impose une liste, s'ils en tireront quelque chose et s'ils passeront ensuite à plus exigeant. Il me semble qu'il y a là débat, mais on en revient à la question de l'âne qui n'a pas soif : se mettra-t-il à avoir soif si on le force à boire régulièrement ?
- BaldredSage
Iridiane a écrit:C’est rigolo en te lisant Baldred j’ai pris conscience de la proximité graphique entre « satan » et « Stan »… coïncidence ? Je ne crois pas !
Si elle n'était que graphique...
- HocamSage
Ben ce n'est pas ce que je dis, en fait. Je ne dis pas que ça suffit, je réponds à ton « jamais » qui me paraît assez peu flatteur pour la matière que tu enseignes, et accessoirement la mienne également. Ah oui, parce qu'il faudrait quand même rappeler qu'on a un peu notre mot à dire aussi sur ce sujet, enseignants de LV : il peut nous arriver — folle idée ! — de faire lire, de faire écrire, de « faire accéder à l'implicite », et plus si affinités... Le quart d'heure lecture, pardon, mais c'est autre chose.Angelene a écrit:Hocam a écrit:Ah, et ils n'ont pas des cours de français pour ça ? « Ils n'accèdent jamais à quoi que ce soit d'un peu symbolique » : jamais, même en classe ?Angelene a écrit:
Ils peuvent lire du mangas quand ils veulent, mais tous les jours en cours ça pose question. Pareil à mon avis pour tout ce qui est documentaire. C'est bien d'en lire, mais s'ils ne lisent que ça, ils n'accèdent jamais à quoi que ce soit d'un peu symbolique par exemple. L'implicite par exemple, dont nous avons tant besoin dans la vie, ne se trouve vraiment que dans les textes de fiction.
Tu crois vraiment que le cours de français suffit à pallier la chute généralisée de la lecture?
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