- pailleauquebecFidèle du forum
Merci pour les références de manuels.
- MoonchildSage
cassiopella a écrit:Les notations en maths sont simples: une petite erreur dans l'exercice vaut 0 point. S'il y a 0 justification, c'est aussi 0. Si l'exercice n'est pas présenté correctement, c'est -0.5 Les critères de présentation sont très claires et objectifs, les mêmes pour tous et enseignées depuis le primaire.
.../...
A l'école il n'y a pas de point pour les exercices faits à moitié.
C'est une différence notable avec le système français où il faut désormais "valoriser toutes les pistes de recherches même non abouties", ce qui conduit à ce qu'un élève qui ne sait finalement rien faire jusqu'au bout puisse avoir plus que la moyenne.
Quand tu parles de présentation, est-ce que cela inclut aussi la rédaction et les éléments considérés comme nécessaires à une bonne justification ? Si c'est le cas, cela me semble intéressant car en France les critères de rédaction sont plus ou moins laissés à l'initiative de l'enseignant et, comme nous avons tous nos petites lubies, cela conduit parfois à des différences non négligeables dans la pratique (ce qui explique sans doute en partie les écarts observés par les études de docimologie, en admettant qu'elles soient fiables). Un système dans lequel les exigences de rédaction ont été précisément définies en amont à l'échelle nationale peut paraître rigide, mais il est certainement plus clair et plus sécurisant pour tout le monde, enseignants comme élèves.
cassiopella a écrit:Quand un élève a un 2/5 pour une matière, le conseil municipal d'éducation est prévenu et vérifie la situation. Il y a une grosse pression sur les professeurs. Il est considéré que c'est à priori la faute de l'école et de l'enseignant. Du coup, pas mal de profs mettent 3/5 comme une note finale pour les enfants qui ont entre 2/5 et 3/5 ou beaucoup de 2/5 dans l'année.
Là par contre, c'est une manière de casser le thermomètre que je préfèrerais ne pas voir
- cassiopellaNiveau 9
J'ai ajouté les plans des manuels pour les années 7-8-9.
1) Résumé des données et de l'information + dessein/tableau ou schéma si besoin.
2) Résolution avec des justifications
3) Réponse
La deuxième chose, ce sont les informations et les conditions à vérifier et mettre sur la copie en fonction des exercices. Par exemple pour les fonctions il est toujours demandé de mettre le domaine de définition et de solutions. S'il y a une fraction algébrique, toujours rappeler que le dénominateur est différent de 0 et en déduire pour quelques x elle est vraie. Certains de mes camarades détestaient cela en disant "pourquoi on doit mettre des choses évidentes?". Mais je pense qu'ils ne se rendaient pas compte que ces choses "évidentes" étaient évidentes parce qu'elles étaient constamment demandées.
Un petit exemple de comparaison. Voilà la correction de BAC S 2018: lien vers la correction. En Russie la correction de l'exo 3, partie A.1 n'aurait pas était acceptée, parce que 0 justification. Pour affirmer que les droites ne sont pas coplanaires, il faut le prouver! Même si cela se ramène à dire des choses "évidentes":
Cette pression est l'héritage directe du communisme: l'école est la deuxième famille qui a pour but d'éduquer et corriger la "mauvaise" éducation de l'enfant que certaines familles pouvaient donner. Cela existe depuis plus de 50 ans et les profs ne se plaignent pas. Le système français est à l'extrême opposé que je déplore personnellement. Je pense que c'est l'une des causes des inégalités que crée l'école française. Il faut que l'école soit à minimum responsable du niveau de l'élève.
Nivellement par le bas :| Hélas, l'université est aussi contaminée. Surtout les filières dans les petites villes: penurie des profs de maths et une façon d'avoir plus d'élèves.Moonchild a écrit:
C'est une différence notable avec le système français où il faut désormais "valoriser toutes les pistes de recherches même non abouties", ce qui conduit à ce qu'un élève qui ne sait finalement rien faire jusqu'au bout puisse avoir plus que la moyenne.
Oui. Il y a les deux. Tout d'abord chaque exercice doit comporter au moins la réponse sous la forme "Réponse: la phrase". Par exemple "Réponse: les racines de l’équation sont x1=2 et x2=3". Pour les problèmes, surtout la géométrie, il doit y avoir 3 choses:Quand tu parles de présentation, est-ce que cela inclut aussi la rédaction et les éléments considérés comme nécessaires à une bonne justification ? Si c'est le cas, cela me semble intéressant car en France les critères de rédaction sont plus ou moins laissés à l'initiative de l'enseignant et, comme nous avons tous nos petites lubies, cela conduit parfois à des différences non négligeables dans la pratique (ce qui explique sans doute en partie les écarts observés par les études de docimologie, en admettant qu'elles soient fiables). Un système dans lequel les exigences de rédaction ont été précisément définies en amont à l'échelle nationale peut paraître rigide, mais il est certainement plus clair et plus sécurisant pour tout le monde, enseignants comme élèves.
1) Résumé des données et de l'information + dessein/tableau ou schéma si besoin.
2) Résolution avec des justifications
3) Réponse
La deuxième chose, ce sont les informations et les conditions à vérifier et mettre sur la copie en fonction des exercices. Par exemple pour les fonctions il est toujours demandé de mettre le domaine de définition et de solutions. S'il y a une fraction algébrique, toujours rappeler que le dénominateur est différent de 0 et en déduire pour quelques x elle est vraie. Certains de mes camarades détestaient cela en disant "pourquoi on doit mettre des choses évidentes?". Mais je pense qu'ils ne se rendaient pas compte que ces choses "évidentes" étaient évidentes parce qu'elles étaient constamment demandées.
Un petit exemple de comparaison. Voilà la correction de BAC S 2018: lien vers la correction. En Russie la correction de l'exo 3, partie A.1 n'aurait pas était acceptée, parce que 0 justification. Pour affirmer que les droites ne sont pas coplanaires, il faut le prouver! Même si cela se ramène à dire des choses "évidentes":
Je m'excuse si le vocabulaire n'est pas exacte.Les droites AE et BC appartiennent aux plans AEHD et BFGC, respectivement. Les plans AEHD et BFGC sont des surfaces opposées d'un cube => AEHD || BFGC => les droites AE et BC ne sont pas séquentes (concourantes si vous voulez). Comme deux des hauteurs ne sont pas concourantes, l'ensemble des hauteurs ne le sont pas non plus.
Il y a la pression, certes. Mais je suis sure, que si on propose à un prof russe de choisir travailler dans un système français, il ou elle préférera d'avoir la pression + bon manuels + bon programme etc.Là par contre, c'est une manière de casser le thermomètre que je préfèrerais ne pas voircassiopella a écrit:Quand un élève a un 2/5 pour une matière, le conseil municipal d'éducation est prévenu et vérifie la situation. Il y a une grosse pression sur les professeurs. Il est considéré que c'est à priori la faute de l'école et de l'enseignant. Du coup, pas mal de profs mettent 3/5 comme une note finale pour les enfants qui ont entre 2/5 et 3/5 ou beaucoup de 2/5 dans l'année.débarquerse confirmer en France ; nous avons bien avancé dans cette direction avec le livret de compétences au collège et bientôt le contrôle continu au lycée, mais pour l'instant les pressions sur les enseignants du secondaire restent relativement informelles (même si j'ai pu observer qu'avec quelques CDE un peu plus retors que la moyenne, lorsqu'on n'a pas noté avec assez de bienveillance durant une année scolaire, on pouvait parfois avoir des surprises en découvrant son service à la rentrée suivante).
Cette pression est l'héritage directe du communisme: l'école est la deuxième famille qui a pour but d'éduquer et corriger la "mauvaise" éducation de l'enfant que certaines familles pouvaient donner. Cela existe depuis plus de 50 ans et les profs ne se plaignent pas. Le système français est à l'extrême opposé que je déplore personnellement. Je pense que c'est l'une des causes des inégalités que crée l'école française. Il faut que l'école soit à minimum responsable du niveau de l'élève.
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Moi et l'orthographe, nous ne sommes pas amis. Je corrige les erreurs dès que je les vois. Je m'excuse pour celles que je ne vois pas...
- pailleauquebecFidèle du forum
Merci pour les plans, tout cela est très intéressant.
ça s'ajoute à ma petite collection personnelle de manuels remarquables.
ça s'ajoute à ma petite collection personnelle de manuels remarquables.
- MoonchildSage
Je poursuis ici une discussion entamée dans le topic sur les nouveaux programmes de collège où elle avait tendance à être franchement hors-sujet ; elle me semble mieux placée moins décalée dans celui-ci.
Après avoir fait une brève recherche sur internet, j'ai trouvé des extraits d'un Lebossé-Hémery de troisième 1960 où il est proposé la définition suivante :
Et dans les pages suivantes, le manuel mentionne "la fonction y=f(x)" où, si j'ai bien compris, f(x) désigne une formule et non pas la fonction elle-même ; la lettre qui désigne la fonction ne serait pas f mais plutôt y (d'ailleurs je me demande comment il fallait rédiger les études simultanées de deux fonctions y=f(x) et y=g(x) ; j'imagine qu'il fallait plutôt écrire y=f(x) et z=g(x) sinon cela pouvait prêter à confusion).
Bon, si on ergote un peu, cela ne définit pas vraiment ce qu'est une une fonction en tant qu'objet mathématique mais plutôt ce que signifie "être fonction de" entre deux grandeurs numériques, cela dit je ne suis pas loin de croire que cette définition serait effectivement plus accessible pour les élèves que celle qui est donnée actuellement (ou plutôt qui n'est plus donnée, du moins pas avant le supérieur ; mais qu'Anaxagore a rencontrée en classe de première) et serait amplement suffisante et sans doute plus intuitive pour la très grande majorité des applications à la physique où à l'économie.
Mais, en toute rigueur, cette présentation et ces conventions de notation me semblent malheureusement difficilement conciliables avec la définition actuelle d'une fonction découlant du formalisme post-Bourbaki qui prévaut désormais dans le supérieur. Il s'est opéré un léger glissement : dans les manuels scolaires datant d'avant Bourbaki, une fonction semble plutôt être la grandeur obtenue à partir de la variable, tandis qu'après Bourbaki, une fonction est devenue la relation entre la variable et la grandeur obtenue ; la nuance est mince mais cependant significative en terme de notations et d'usages courants, ce qui fait que définir les fonctions comme le faisait le Lebossé-Hémery de 1960 ne serait pas loin de conduire à de nombreuses erreurs selon la norme mathématique d'aujourd'hui (en particulier dériver un nombre et non pas une fonction).
Je serais curieux de voir comment le manuel pour la première année maths-méca à l'Université de Lomonosov résout cette incompatibilité pour la partie maths pures (autrement que par un argument du style "on s'autorisera l'abus de notation suivant..."). Je parle bien du cours de maths pures car, d'après les quelques souvenirs que je garde du peu que j'en ai fait lors de mes deux premières années du supérieur, les conventions de notation en méca sont assez spécifiques et par certains aspects se rapprochent davantage de celles de la physique (si j'arrive un jour à remettre la main sur mes cours, il faudrait que je regarde s'ils ne contiennent pas des écritures qui ne sont pas très orthodoxes sur le plan mathématique).
cassiopella a écrit:Je suis très méchante de vous tendre le piège. :diable: Il y a deux jours j'ai trouvé une arme imbattable: la série de Lebossé-Hémery des années 60. La dernière proposition vient du manuel pour Terminal C. Oui exactement comme ça dans le cours sur la dérivée (juste une autre expression à la place de x²). Et pas de mot "expression" ou autres mots transitifs. En plus dans la série:Moonchild a écrit:cassiopella a écrit:Avant de répondre, j'ai une question. Est-ce que la phrase la dérivé de la fonction y=f(x)=x² est y'=f'(x)=2x est acceptable pour toi?Moonchild a écrit:
Au risque de me montrer un peu trop pointilleux, même si la nuance échappe complètement à la plupart des élèves, cette phrase me pose quand même un léger problème car f(x) n'est pas une une fonction mais l'image de x par la fonction f ; pour que la phrase soit mathématiquement correcte, à condition de ne pas être trop sourcilleux sur les quantificateurs, il aurait au moins fallu écrire :
"la dérivée de la fonction définie par f(x)=x² est définie par f'(x)=2x"
ou
"la dérivée de la fonction f telle que f(x)=x² vérifie f'(x)=2x"
Ah non... et je dirais que c'est même pire que ta première version !
- f(x)=ax+b est appelée la fonction linéaire! Aucune mention des fonctions affines!
- Pas d'antécédents/images pour les fonctions. Ces deux mots sont mentionnés uniquement dans le chapitre des applications (si ma mémoire est bonne) en 1iere ou T.
Je félicite le bon sens des auteurs. J'ai bien aimé la série. Le langage est un peu sec, mais très soigné et à la porté des élèves. Tout est expliqué. Par rapport aux manuels actuels français, c'est une merveille. Bon, il y a quelques points négatifs. J'ai trouvé les manuels pas mal spiralés pour les fonctions. Et aussi une absence total des problèmes.
Quant à certains cours d'algèbre au collège, j'ai trouvé qu'ils présentaient les choses exactement comme dans les manuels russes. Vu l'âge des manuels, plutôt l'inverse. Les soviètes se sont inspirés des manuels français et ont copié certaines parties.
Comme je ne suis pas mathématicienne, j'ai vérifié comment c'est présenté en Russie. Non, c'est vraiment cette phrase là, y compris dans le manuel récent pour la première année maths-méca à l'Université de Lomonosov (le niveau équivalent à maths ENS Ulm). Mais bon, ces mathématiciens, comme Arnold, pense que la physique et les maths vont ensemble.Au risque de me montrer un peu trop pointilleux, même si la nuance échappe complètement à la plupart des élèves, cette phrase me pose quand même un léger problème car f(x) n'est pas une une fonction mais l'image de x par la fonction f ; pour que la phrase soit mathématiquement correcte, à condition de ne pas être trop sourcilleux sur les quantificateurs, il aurait au moins fallu écrire :
"la dérivée de la fonction définie par f(x)=x² est définie par f'(x)=2x"
ou
"la dérivée de la fonction f telle que f(x)=x² vérifie f'(x)=2x"
Non, je n'avais aucune arrière pensé en donnant cet exemple et je ne pensais pas que la phrase n'était pas correcte. Et je ne pense pas que c'est un abus de langage ou une faute, puisque les grands mathématiciens utilisent ces expressions. Comme dans le Lebossé-Hémery le langage est normale, cet académisme excessive semble être assez récent en France. L'héritage des maths modernes?Mais peut-être est-ce un exemple de ce que tu reproches à l'usage français concernant le vocabulaire mathématique que tu juges trop pointu et qui tend vers une certaine forme d'académisme ; peut-être qu'à ce stade de la scolarité, en Russie vous acceptez davantage certains "abus de langage" comme la confusion entre f et f(x).
BrindIf a écrit:C'est bien ce qu'il me semblait :lol: Je n'ai lu que le manuel de 2de, mais effectivement, les fonctions y sont définies par y=formule algébrique contenant x. Je ne sais pas quand a eu lieu l'évolution en France, j'ai grandit avec le formalisme actuel et il fait davantage sens à mes yeux.cassiopella a écrit:Il y a deux jours j'ai trouvé une arme imbattable: la série de Lebossé-Hémery des années 60. La dernière proposition vient du manuel pour Terminal C.
Les fonctions affines y sont nommées "du 1er degré", j'aime bien
y' est resté, on l'emploie sans ambiguïté pour f'(x) dans les équa diff. L'énoncé ne précise même pas la notation, pourtant source de confusion pour les élèves, alors que d'autres notations usuelles sont précisées (souvent i est introduit comme le nombre complexe de module 1 et d'argument pi/2, ce qui rend très perplexes mes élèves).
Prezbo a écrit:cassiopella a écrit:
Non, je n'avais aucune arrière pensé en donnant cet exemple et je ne pensais pas que la phrase n'était pas correcte. Et je ne pense pas que c'est un abus de langage ou une faute, puisque les grands mathématiciens utilisent ces expressions. Comme dans le Lebossé-Hémery le langage est normale, cet académisme excessive semble être assez récent en France. L'héritage des maths modernes?
Je lis ce fil en diagonal et je réponds juste sur ce point : je dirais héritage de l'importance, après la guerre, du groupe Bourbaki, et de la volonté de réécrire les mathématiques à partir du formalisme ensembliste.
Le deuxième cours de l'année de mon prof de TC (1990), c'était d'expliquer qu'une fonction n'était pas une formule, et que la fonction f n'était pas f(x).
Et le premier, une introduction culturelle : l'histoire du groupe Bourbaki.
Anaxagore a écrit:Lorsque j'étais en 1ère: "une fonction est un triplet (E,F,\Gamma)".
Après avoir fait une brève recherche sur internet, j'ai trouvé des extraits d'un Lebossé-Hémery de troisième 1960 où il est proposé la définition suivante :
- Code:
Un nombre y est fonction d'un nombre variable x quand à chaque valeur de x correspond une valeur déterminée de y.
Et dans les pages suivantes, le manuel mentionne "la fonction y=f(x)" où, si j'ai bien compris, f(x) désigne une formule et non pas la fonction elle-même ; la lettre qui désigne la fonction ne serait pas f mais plutôt y (d'ailleurs je me demande comment il fallait rédiger les études simultanées de deux fonctions y=f(x) et y=g(x) ; j'imagine qu'il fallait plutôt écrire y=f(x) et z=g(x) sinon cela pouvait prêter à confusion).
Bon, si on ergote un peu, cela ne définit pas vraiment ce qu'est une une fonction en tant qu'objet mathématique mais plutôt ce que signifie "être fonction de" entre deux grandeurs numériques, cela dit je ne suis pas loin de croire que cette définition serait effectivement plus accessible pour les élèves que celle qui est donnée actuellement (ou plutôt qui n'est plus donnée, du moins pas avant le supérieur ; mais qu'Anaxagore a rencontrée en classe de première) et serait amplement suffisante et sans doute plus intuitive pour la très grande majorité des applications à la physique où à l'économie.
Mais, en toute rigueur, cette présentation et ces conventions de notation me semblent malheureusement difficilement conciliables avec la définition actuelle d'une fonction découlant du formalisme post-Bourbaki qui prévaut désormais dans le supérieur. Il s'est opéré un léger glissement : dans les manuels scolaires datant d'avant Bourbaki, une fonction semble plutôt être la grandeur obtenue à partir de la variable, tandis qu'après Bourbaki, une fonction est devenue la relation entre la variable et la grandeur obtenue ; la nuance est mince mais cependant significative en terme de notations et d'usages courants, ce qui fait que définir les fonctions comme le faisait le Lebossé-Hémery de 1960 ne serait pas loin de conduire à de nombreuses erreurs selon la norme mathématique d'aujourd'hui (en particulier dériver un nombre et non pas une fonction).
Je serais curieux de voir comment le manuel pour la première année maths-méca à l'Université de Lomonosov résout cette incompatibilité pour la partie maths pures (autrement que par un argument du style "on s'autorisera l'abus de notation suivant..."). Je parle bien du cours de maths pures car, d'après les quelques souvenirs que je garde du peu que j'en ai fait lors de mes deux premières années du supérieur, les conventions de notation en méca sont assez spécifiques et par certains aspects se rapprochent davantage de celles de la physique (si j'arrive un jour à remettre la main sur mes cours, il faudrait que je regarde s'ils ne contiennent pas des écritures qui ne sont pas très orthodoxes sur le plan mathématique).
- Manu7Expert spécialisé
J'ai vu un message qui s'alarmait du niveau en math des lycéens actuels, gare à vous, avec la dernière réforme du collège, vous allez prendre une bonne claque ! D'ici 2 ou 3 ans...
Ou alors il y a un micro-climat sur mon collège... Mais j'ai de la peine à le croire car nous sommes classés 2ème sur notre département...
Ou alors il y a un micro-climat sur mon collège... Mais j'ai de la peine à le croire car nous sommes classés 2ème sur notre département...
- BolzanoNiveau 5
Ah, la distinction entre f et f(x)...
Avant de me faire l'avocat du diable, je précise que ce n'est pas le besoin de pinailler qui demande de distinguer f de f(x), c'est celui de savoir de quoi on parle. Lorsqu'on construit les mathématiques, on est nécessairement confronté à cette question ; on construit des concepts, dont on étudie les relations, et on forme des ensembles d'objets. En ce qui concerne les fonctions, Anaxagore a tout dit : une application est un triplet formé d'une source, d'une arrivée et d'un graphe fonctionnel (je laisse de côté la nuance entre fonction et application, qui ne nous occupe pas à présent). f et f(x) ne sont pas éléments du même ensemble, ils ne sont pas la même chose. Basta.
Evidemment, le prix à payer pour avoir des définitions rigoureuses est une accumulation de précautions de langage, qui ont tendance à occulter l'essentiel, doublée d'une grande abstraction qui est pédagogiquement contre-productive puisque les concepts ne se comprennent bien que lorsqu'on peut les incarner dans une foule d'exemples. C'est bien pourquoi les traités axiomatiques descendants de type Bourbaki sont si indigestes. Ils ont été écrits par des érudits qu'une longue pratique, les ayant fait prendre le chemin inverse, du particulier au général, leur avait permis de découvrir un principe unificateur dans la multitude.
D'ailleurs à l'époque, dans la première moitié du XXe siècle, comme le fait remarquer Cassiopella, on ne s'embêtait pas avec les notations, et l'on écrivait bien volontiers "soit f(x) la fonction (où la série) définie par" Cela n'a pas empêché le foisonnement mathématique qu'a connu cette période.
Encore avant (penser à Cauchy ou pire encore Euler), on faisait de très belles mathématiques sans bien savoir ce qu'est une fonction, qu'on confondait facilement avec une courbe. A propos des courbes, l'enseignement aurait à mon avis beaucoup à gagner à retisser le lien entre la géométrie et les "expressions littérales" ("analytiques" comme on disait à l'époque si je ne me trompe pas).
Aussi, je ne suis pas vraiment choqué quand on écrit "soit la fonction définie par y=x^2" même si bien sûr je préférerais qu'on dise "soit la courbe d'équation y=x^2". Encore une fois, ces subtilités de vocabulaire ne resteront aux yeux des élèves que des caprices du professeur tant que ceux-ci n'auront pas atteint le recul suffisant pour avoir besoin de distinguer entre les concepts d'expression littérale, d'image, de fonction, de courbe, d'ensemble. Pour cela, il faut du temps et des exemples. Pour mes élèves de 2018, la priorité ne se place pas là.
Pour terminer, je voudrais faire remarquer que le calcul différentiel porte encore dans ses notations, comme une marque de naissance, cette confusion entre application et image en un point. Par exemple, que signifie dx_i ? Dans ce cas, la tradition ne nous fait-elle pas écrire d(f(x)) ce qui signifie en réalité (df)(x) ?
Lorsque f est une application de R^n dans R, ça passe encore, même si c'est affreux, car d(f(x)) n'a pas de sens, et il n'y a donc pas d'ambiguïté véritable.
Mais si f(x) est elle-même une application différentiable, alors d(f(x)) et (df)(x) désignent des objets mathématiques bien définis et distincts et les ennuis commencent (par exemple prendre f=dp_i l'application différentielle de la i-ème forme coordonnée p_i sur E=R^n, définie par p_i(x)=x_i où x=(x_1,...,x_n)\in E. On a alors f(x)=p_i et d(f(x)) est l'application qui à x associe p_i, tandis que (df)(x) est l'application linéaire nulle de E dans E* puisque f est constante).
Avant de me faire l'avocat du diable, je précise que ce n'est pas le besoin de pinailler qui demande de distinguer f de f(x), c'est celui de savoir de quoi on parle. Lorsqu'on construit les mathématiques, on est nécessairement confronté à cette question ; on construit des concepts, dont on étudie les relations, et on forme des ensembles d'objets. En ce qui concerne les fonctions, Anaxagore a tout dit : une application est un triplet formé d'une source, d'une arrivée et d'un graphe fonctionnel (je laisse de côté la nuance entre fonction et application, qui ne nous occupe pas à présent). f et f(x) ne sont pas éléments du même ensemble, ils ne sont pas la même chose. Basta.
Evidemment, le prix à payer pour avoir des définitions rigoureuses est une accumulation de précautions de langage, qui ont tendance à occulter l'essentiel, doublée d'une grande abstraction qui est pédagogiquement contre-productive puisque les concepts ne se comprennent bien que lorsqu'on peut les incarner dans une foule d'exemples. C'est bien pourquoi les traités axiomatiques descendants de type Bourbaki sont si indigestes. Ils ont été écrits par des érudits qu'une longue pratique, les ayant fait prendre le chemin inverse, du particulier au général, leur avait permis de découvrir un principe unificateur dans la multitude.
D'ailleurs à l'époque, dans la première moitié du XXe siècle, comme le fait remarquer Cassiopella, on ne s'embêtait pas avec les notations, et l'on écrivait bien volontiers "soit f(x) la fonction (où la série) définie par" Cela n'a pas empêché le foisonnement mathématique qu'a connu cette période.
Encore avant (penser à Cauchy ou pire encore Euler), on faisait de très belles mathématiques sans bien savoir ce qu'est une fonction, qu'on confondait facilement avec une courbe. A propos des courbes, l'enseignement aurait à mon avis beaucoup à gagner à retisser le lien entre la géométrie et les "expressions littérales" ("analytiques" comme on disait à l'époque si je ne me trompe pas).
Aussi, je ne suis pas vraiment choqué quand on écrit "soit la fonction définie par y=x^2" même si bien sûr je préférerais qu'on dise "soit la courbe d'équation y=x^2". Encore une fois, ces subtilités de vocabulaire ne resteront aux yeux des élèves que des caprices du professeur tant que ceux-ci n'auront pas atteint le recul suffisant pour avoir besoin de distinguer entre les concepts d'expression littérale, d'image, de fonction, de courbe, d'ensemble. Pour cela, il faut du temps et des exemples. Pour mes élèves de 2018, la priorité ne se place pas là.
Pour terminer, je voudrais faire remarquer que le calcul différentiel porte encore dans ses notations, comme une marque de naissance, cette confusion entre application et image en un point. Par exemple, que signifie dx_i ? Dans ce cas, la tradition ne nous fait-elle pas écrire d(f(x)) ce qui signifie en réalité (df)(x) ?
Lorsque f est une application de R^n dans R, ça passe encore, même si c'est affreux, car d(f(x)) n'a pas de sens, et il n'y a donc pas d'ambiguïté véritable.
Mais si f(x) est elle-même une application différentiable, alors d(f(x)) et (df)(x) désignent des objets mathématiques bien définis et distincts et les ennuis commencent (par exemple prendre f=dp_i l'application différentielle de la i-ème forme coordonnée p_i sur E=R^n, définie par p_i(x)=x_i où x=(x_1,...,x_n)\in E. On a alors f(x)=p_i et d(f(x)) est l'application qui à x associe p_i, tandis que (df)(x) est l'application linéaire nulle de E dans E* puisque f est constante).
- cassiopellaNiveau 9
Oui, quand plusieurs à la fois, c'est y, z, etc.Moonchild a écrit:
Après avoir fait une brève recherche sur internet, j'ai trouvé des extraits d'un Lebossé-Hémery de troisième 1960 où il est proposé la définition suivante :
Et dans les pages suivantes, le manuel mentionne "la fonction y=f(x)" où, si j'ai bien compris, f(x) désigne une formule et non pas la fonction elle-même ; la lettre qui désigne la fonction ne serait pas f mais plutôt y (d'ailleurs je me demande comment il fallait rédiger les études simultanées de deux fonctions y=f(x) et y=g(x) ; j'imagine qu'il fallait plutôt écrire y=f(x) et z=g(x) sinon cela pouvait prêter à confusion).
- Code:
Un nombre y est fonction d'un nombre variable x quand à chaque valeur de x correspond une valeur déterminée de y.
Sinon, si on reprend ta phrase:
Quand on dit "f de x" c'est le raccourci pour dire "image de x par la fonction f". Si on admet cela, il n'y a plus de problème, non? Parce que implicitement, quand on comprend ce que c'est une fonction, on pense à cela.car f(x) n'est pas une une fonction mais l'image de x par la fonction f
N'étant pas mathématicienne, je n'arrive pas à imaginer de quel genre d'erreurs tu parles. Un petit exemple? Par ailleurs, si on trouve qu'il est très important d'utiliser cette notation et expression, il faudra expliquer à tous les élèves le pourquoi et surtout les convaincre. Est-ce faisable? Si oui, ok. Si non, il faut ajuster le langage.
Mais, en toute rigueur, cette présentation et ces conventions de notation me semblent malheureusement difficilement conciliables avec la définition actuelle d'une fonction découlant du formalisme post-Bourbaki qui prévaut désormais dans le supérieur. Il s'est opéré un léger glissement : dans les manuels scolaires datant d'avant Bourbaki, une fonction semble plutôt être la grandeur obtenue à partir de la variable, tandis qu'après Bourbaki, une fonction est devenue la relation entre la variable et la grandeur obtenue ; la nuance est mince mais cependant significative en terme de notations et d'usages courants, ce qui fait que définir les fonctions comme le faisait le Lebossé-Hémery de 1960 ne serait pas loin de conduire à de nombreuses erreurs selon la norme mathématique d'aujourd'hui (en particulier dériver un nombre et non pas une fonction).
L’influence du groupe Bourbaki sur les russes est très très très limitée. Les mathématiciens russes n'y adhèrent pas, du tout. La vision des maths pures et des maths modernes est tout simplement autre. Du coup il n'y a pas d'incompatibilité, ni d'abus de langage. Quoique V. Arnold préférait l'approche des Bourbaki pour définir les fonctions. C'est l'une des rares choses qu'il aimait chez les Bourbaki, mais qui restaient pour lui "zanoudi". Zanoudi = quand tu dis que c'est noir/blanc la personne te dit "non, c'est dorian/albâtre".Je serais curieux de voir comment le manuel pour la première année maths-méca à l'Université de Lomonosov résout cette incompatibilité pour la partie maths pures (autrement que par un argument du style "on s'autorisera l'abus de notation suivant..."). Je parle bien du cours de maths pures car, d'après les quelques souvenirs que je garde du peu que j'en ai fait lors de mes deux premières années du supérieur, les conventions de notation en méca sont assez spécifiques et par certains aspects se rapprochent davantage de celles de la physique (si j'arrive un jour à remettre la main sur mes cours, il faudrait que je regarde s'ils ne contiennent pas des écritures qui ne sont pas très orthodoxes sur le plan mathématique).
PS Maths-méca c'est juste le nom d'une licence qui prépare les meilleurs mathématiciens russes, il y a une peu de physique/méca..
Bolzano a écrit:
Encore une fois, ces subtilités de vocabulaire ne resteront aux yeux des élèves que des caprices du professeur tant que ceux-ci n'auront pas atteint le recul suffisant pour avoir besoin de distinguer entre les concepts d'expression littérale, d'image, de fonction, de courbe, d'ensemble. Pour cela, il faut du temps et des exemples. Pour mes élèves de 2018, la priorité ne se place pas là.
Je dirais même qu'il est plus facile d'expliquer ce genre de nuances aux élèves ou étudiants qui ont déjà les bases solides.
Je me souviens de mes cours de géométrie Euclidienne. Ma prof avait dit au début que c'est une théorie ancienne et qu'il y a la "géométrie moderne" (géométrie de Lobatchevski (hyperbolique), géométrie elliptique) en donnant quelques petits exemples. Mais que le but de l'école c'est d'apprendre d'abord les bases et les choses faciles, le reste on verra plus tard (si on veut). De même pour les équations de 2 degré avec le discriminant négatif : pas de solutions dans les réels, mais on verra plus tard les nombres complexes.
C'est une façon de simplifier les choses tout en rappelant régulièrement que d'autres cas existent.
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Moi et l'orthographe, nous ne sommes pas amis. Je corrige les erreurs dès que je les vois. Je m'excuse pour celles que je ne vois pas...
- MoonchildSage
cassiopella a écrit:Sinon, si on reprend ta phrase:
Quand on dit "f de x" c'est le raccourci pour dire "image de x par la fonction f". Si on admet cela, il n'y a plus de problème, non? Parce que implicitement, quand on comprend ce que c'est une fonction, on pense à cela.car f(x) n'est pas une une fonction mais l'image de x par la fonction f
Dire "f de x" ne pose aucun problème, c'est d'ailleurs ce qu'on fait la plupart du temps et, comme tu le suggérais précédemment, on pourrait certainement s'en tenir à ça sans que cela ne crée d'incohérence dans l'enseignement. Mais encore une fois, je ne suis pas sûr que l'emploi du mot "image" soit au coeur des difficultés rencontrées par les élèves français actuels même si je crois que l'introduire en même temps que la notion de fonction numérique n'est pas forcément le meilleur choix. Le vocabulaire image/antécédent me semblait presque évident lorsqu'au collège, bien avant les fonctions, on m'a fait étudier les rudiments sur les applications (avec des schémas comportant des flèches entre des patatoïdes représentant les ensembles de départ et d'arrivée) et aussi dans le cadre des transformations du plan, mais pourtant je me souviens qu'en terminale je n'étais pas totalement sûr de savoir s'il fallait écrire f ou f(x) alors que, quand j'y repense rétrospectivement, il me semble que je ne faisais pas de confusion similaire avec les transformations géométriques ; il y a donc à mon avis une difficulté spécifique avec les fonctions numériques.
Une petite remarque au passage : si on ne définit pas le terme "image de x par la fonction f", comment justifier l'importance du "de" dans "f de x" ? Dans ce cas on pourrait aussi admettre le raccourci "f x".
cassiopella a écrit:
Mais, en toute rigueur, cette présentation et ces conventions de notation me semblent malheureusement difficilement conciliables avec la définition actuelle d'une fonction découlant du formalisme post-Bourbaki qui prévaut désormais dans le supérieur. Il s'est opéré un léger glissement : dans les manuels scolaires datant d'avant Bourbaki, une fonction semble plutôt être la grandeur obtenue à partir de la variable, tandis qu'après Bourbaki, une fonction est devenue la relation entre la variable et la grandeur obtenue ; la nuance est mince mais cependant significative en terme de notations et d'usages courants, ce qui fait que définir les fonctions comme le faisait le Lebossé-Hémery de 1960 ne serait pas loin de conduire à de nombreuses erreurs selon la norme mathématique d'aujourd'hui (en particulier dériver un nombre et non pas une fonction).
N'étant pas mathématicienne, je n'arrive pas à imaginer de quel genre d'erreurs tu parles. Un petit exemple? Par ailleurs, si on trouve qu'il est très important d'utiliser cette notation et expression, il faudra expliquer à tous les élèves le pourquoi et surtout les convaincre. Est-ce faisable? Si oui, ok. Si non, il faut ajuster le langage.
J'avais donné comme exemple de fait de dériver un nombre plutôt qu'une fonction mais, en réalité, le problème se situe en amont de la dérivation, dans un risque de confusion permanente entre nombre et fonction.
Quand on écrit la phrase "la fonction y=f(x)", le statut mathématique de la lettre y est très ambigu : elle désigne un objet mathématique qui est à la fois un nombre et une fonction. Cela ne choquera pas un physicien - surtout depuis la mécanique quantique et la dualité onde/corpuscule - mais, et c'est sans doute une approche "maths modernes", un mathématicien cherche à travailler avec des objets qui ont été classifiés selon leur "nature" (à bijection près) et de ce point de vue, on ne peut pas identifier les nombres réels avec les fonctions de R dans R.
Mon expérience personnelle en tant qu'élève suffit à me convaincre que la nuance entre f et f(x) est loin d'être simple à saisir et mon expérience ultérieure comme enseignant m'incite à penser que, comme le dit Bolzano, ce n'est sans doute pas une priorité pour les élèves de 2018 dont les lacunes se situent au niveau de notions beaucoup plus élémentaires. Une fois posé ce constat, il faut faire un choix de stratégie pédagogique.
On peut effectivement considérer que ces subtilités sont au-delà des capacités d'un collégien/lycéen ordinaire (c'est vraisemblablement le cas), puis choisir de complètement les passer sous silence et de revenir à l'ancien usage de notation "la fonction y=f(x)". La présentation serait ainsi simplifiée mais cela implique que, sur la période collège/lycée, on officialise la confusion nombre/fonction et que la notion de fonction numérique (re)devienne un concept ad hoc qu'on ne peut pas rattacher rigoureusement au concept ensembliste de fonctions. Cela aurait pour conséquence que les élèves poursuivant des études de mathématiques devraient dans le supérieur déconstruire ce qu'ils ont appris ; ce n'est pas tout-à-fait comme l'extension de R à C ou comme l'étude de géométries non euclidiennes car, dans ces exemples, on découvre un cadre mathématique plus vaste qui étend sans le détruire celui déjà connu alors que la formalisation ensembliste des fonctions oblige à abandonner l'usage "la fonction y=f(x)" à cause de la double nature de l'élément "y". Cela dit, on peut juger que le jeu en vaut la chandelle, que le concept flou de fonction numérique y=f(x) est plus parlant pour l'enseignement de masse et amplement suffisant pour les mathématiques appliquées à la physique ou à l'économie ; en revanche, bien que peu spécialiste du domaine, j'ai l'intuition que pour étudier sérieusement l'informatique, il est crucial de bien différencier la nature des objets avec lesquels on travaille. J'ajouterai que, dans le contexte français, il faudrait accompagner cette réforme d'un plan formation très clair des enseignants qui devraient eux aussi désapprendre les maths pures qui ont été la base de leur formation et reconstruire une manière d'enseigner qui soit cohérente ; le bricolage qu'on peut faire en se délestant précipitamment d'une rigueur acquise de longue date se solde souvent par une catastrophe pédagogique (c'est un peu ce qui se produit actuellement où dans le fond on conserve le concept ensembliste de fonction mais sans l'expliciter vraiment et en abordant la notion par des "activités d'approche concrètes" qui s'accorderaient beaucoup mieux avec une formalisation pré-Bourbaki) - encore qu'avec la pénurie de vocation, la question de devoir désapprendre pourrait se régler spontanément.
- MathadorEmpereur
-Pour établir la différence entre f et f(x), il faut voir des situations où la différence est importante, c'est à dire quand on compose f à droite… mais ce n'est plus au programme hormis f(ax+b) et u_{n+1}.
-Lors de l'étude des grandeurs dépendantes entre elles « comme en physique », y n'est toujours pas vraiment une fonction; par exemple, si j'étudie le mouvement de la Terre autour du Soleil (dans le référentiel héliocentrique supposé galiléen) avec les coordonnées polaires centrées au Soleil, les lois de Newton me permettent de trouver des équations différentielles entre les fonctions t → r et t → theta. Mais si j'exprime r en fonction de theta (ce qui est assez technique, et qui permet d'établir que la trajectoire est contenue dans une conique), j'obtiens une expression explicite d'une fonction theta → r, telle que la première des trois fonctions est la composée des deux autres. r est donc ici deux fonctions en même temps. C'est pourquoi l'on note dy/dt ou dy/dx plutôt que y'… (et je ne parle même pas des variable fixées en thermodynamique)
-Si l'on écrit y=f(x), on continue de désigner (par f) l'aspect actionnel de la fonction; bien sûr c'est différent si l'on dit y=x²-4x+5.
-Si je remonte un peu:
Ceci étant dit, comme je l'ai dit avant, la logique voudrait alors que l'on étudie des composées, ou au moins f(x+2) ou f(3x), en 3ème; en dehors du calcul littéral on pourrait aussi faire la table de composition de S_3 ou d'un petit groupe diédral.
-Quant à l'informatique, il me semble en effet délicat d'intégrer les fonctions informatiques dans la notion de grandeurs dépendantes, mais c'est le cas aussi pour les fonctions bourbakistes: les fonctions informatiques ont, dans la plupart des langages de programmation, une capacité à générer des effets de bord en interagissant autrement que par les variables d'entrée et de sortie (par exemple, en allant appeler la police (sortie hors variable de retour) ou en allant chercher sur Internet le nom du président des USA (entrée hors arguments)). On peut modéliser ces effets afin de se ramener aux fonctions « pures » (c'est-à-dire se comportant comme des fonctions mathématiques), mais en pratique cela a peu d'intérêt à part pour démontrer que le lambda-calcul a la puissance de calcul des langages de programmation usuels.
-Lors de l'étude des grandeurs dépendantes entre elles « comme en physique », y n'est toujours pas vraiment une fonction; par exemple, si j'étudie le mouvement de la Terre autour du Soleil (dans le référentiel héliocentrique supposé galiléen) avec les coordonnées polaires centrées au Soleil, les lois de Newton me permettent de trouver des équations différentielles entre les fonctions t → r et t → theta. Mais si j'exprime r en fonction de theta (ce qui est assez technique, et qui permet d'établir que la trajectoire est contenue dans une conique), j'obtiens une expression explicite d'une fonction theta → r, telle que la première des trois fonctions est la composée des deux autres. r est donc ici deux fonctions en même temps. C'est pourquoi l'on note dy/dt ou dy/dx plutôt que y'… (et je ne parle même pas des variable fixées en thermodynamique)
-Si l'on écrit y=f(x), on continue de désigner (par f) l'aspect actionnel de la fonction; bien sûr c'est différent si l'on dit y=x²-4x+5.
-Si je remonte un peu:
C'est une progressivité que l'on a déjà à l'intérieur du cycle 4 (grandeurs dépendantes en 5ème, fonctions en 3ème).Moonchild a écrit:Bon, si on ergote un peu, cela ne définit pas vraiment ce qu'est une une fonction en tant qu'objet mathématique mais plutôt ce que signifie "être fonction de" entre deux grandeurs numériques, cela dit je ne suis pas loin de croire que cette définition serait effectivement plus accessible pour les élèves que celle qui est donnée actuellement (ou plutôt qui n'est plus donnée, du moins pas avant le supérieur ; mais qu'Anaxagore a rencontrée en classe de première) et serait amplement suffisante et sans doute plus intuitive pour la très grande majorité des applications à la physique où à l'économie.
Ceci étant dit, comme je l'ai dit avant, la logique voudrait alors que l'on étudie des composées, ou au moins f(x+2) ou f(3x), en 3ème; en dehors du calcul littéral on pourrait aussi faire la table de composition de S_3 ou d'un petit groupe diédral.
-Quant à l'informatique, il me semble en effet délicat d'intégrer les fonctions informatiques dans la notion de grandeurs dépendantes, mais c'est le cas aussi pour les fonctions bourbakistes: les fonctions informatiques ont, dans la plupart des langages de programmation, une capacité à générer des effets de bord en interagissant autrement que par les variables d'entrée et de sortie (par exemple, en allant appeler la police (sortie hors variable de retour) ou en allant chercher sur Internet le nom du président des USA (entrée hors arguments)). On peut modéliser ces effets afin de se ramener aux fonctions « pures » (c'est-à-dire se comportant comme des fonctions mathématiques), mais en pratique cela a peu d'intérêt à part pour démontrer que le lambda-calcul a la puissance de calcul des langages de programmation usuels.
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
- xyzNiveau 2
Puisqu'on parle d'Arnold, voilà ce qu'il pensait de l'enseignement des maths en France:
http://smf4.emath.fr/Publications/Gazette/1998/78/smf_gazette_78_19-29.pdf
On s'en prend plein la figure, avec des arguments très valables. J'ai tout de suite pensé à ce texte dès que j'ai vu la discussion ici.
http://smf4.emath.fr/Publications/Gazette/1998/78/smf_gazette_78_19-29.pdf
On s'en prend plein la figure, avec des arguments très valables. J'ai tout de suite pensé à ce texte dès que j'ai vu la discussion ici.
- Manu7Expert spécialisé
Merci xyz, je ne connaissais pas ce point de vue, c'est très intéressant. Cela relativise beaucoup certaines certitudes. D'un autre côté quand des ingénieurs disent qu'ils n'utilisent pas les maths ou bien lorsque des mathématiciens pensent travailler dans un domaine totalement disjoint de la physique, on peut répondre aux deux qu'ils ont tort tout est lié.
En plus Arnold a raison, je n'ai aucune connaissance solide sur les courbes évoquées, alors qu'on peut comprendre que c'est très basique pour des étudiants étrangers. J'ai un ami chercheur (niveau international) qui travaille au CEA, il m'avait déjà fait la remarque suivante : il était étonné de constater que des collègues de l'ancien bloc soviétique visualisaient sans aucune aide informatique des équations ou formules complexes. Ils ont très facilement des ordres de grandeur très précis, alors que les français doivent prendre une calculatrice pour le moindre calcul... Je parle bien sûr de calculs très pointus (pour nous) dans le domaine de la dynamique des fluides...
En plus Arnold a raison, je n'ai aucune connaissance solide sur les courbes évoquées, alors qu'on peut comprendre que c'est très basique pour des étudiants étrangers. J'ai un ami chercheur (niveau international) qui travaille au CEA, il m'avait déjà fait la remarque suivante : il était étonné de constater que des collègues de l'ancien bloc soviétique visualisaient sans aucune aide informatique des équations ou formules complexes. Ils ont très facilement des ordres de grandeur très précis, alors que les français doivent prendre une calculatrice pour le moindre calcul... Je parle bien sûr de calculs très pointus (pour nous) dans le domaine de la dynamique des fluides...
- kaktus65Niveau 10
De toutes façons, la différence entre "f" et "f(x)" est largement passée sous la trappe au lycée. Il suffit de voir que f(x) -qui n'est qu'un nombre- est capable d'avoir des variations dans la plupart des bouquins de Term
Après, tout est question de vocabulaire, cela étant, j'ai eu le droit à cette question à l'oral du Capes : "quelle est la différence entre f et f(x) ( )". Comme quoi on attend de nous une certaine cohérence niveau vocabulaire, un mot pour telle notion. Tout se discute bien sûr.
Après, tout est question de vocabulaire, cela étant, j'ai eu le droit à cette question à l'oral du Capes : "quelle est la différence entre f et f(x) ( )". Comme quoi on attend de nous une certaine cohérence niveau vocabulaire, un mot pour telle notion. Tout se discute bien sûr.
- MoonchildSage
xyz a écrit:Puisqu'on parle d'Arnold, voilà ce qu'il pensait de l'enseignement des maths en France:
http://smf4.emath.fr/Publications/Gazette/1998/78/smf_gazette_78_19-29.pdf
On s'en prend plein la figure, avec des arguments très valables. J'ai tout de suite pensé à ce texte dès que j'ai vu la discussion ici.
A vrai dire, je ne sais pas trop quoi penser de ce texte. Certains arguments me paraissent effectivement très valables : il est difficile de ne pas regretter la perte d'une certaine intuition géométrique, on s'accordera à dénoncer les excès de l'approche axiomatique transposée à l'enseignement de base (encore que sur ce point, il ne reste plus grand chose à dénoncer) et, à un autre niveau, on peut aussi sans doute s'interroger sur le petit monde de la recherche mathématique et sa tendance à fonctionner en vase clos (ce qui est le travers de beaucoup de domaines universitaires). Cependant cet article me laisse quand même perplexe aussi bien dans sa teneur générale que dans le choix de certains exemples censés illustrer le propos.
Prenons ces quelques lignes :
Arnold a écrit:
Il nous apprenait que les intégrales de fonctions rationnelles le long de courbes algébriques s’expriment au moyen de fonctions élémentaires si la surface de Riemann correspondante est une sphère, et qu’en général elles ne s’expriment pas ainsi si le genre est supérieur, et que pour que la surface de Riemann soit une sphère il suffit qu’il existe pour une courbe de degré fixé un assez grand nombre de points doubles (qui obligent la courbe à être unicursale : on peut dessiner les points réels dans le plan projectif d’un seul trait). Ces faits en eux-mêmes excitent l’imagination, même sans aucune démonstration, et donnent une meilleure idée des mathématiques contemporaines que plusieurs volumes de Bourbaki.
Je suis certainement un inculte et un imbécile aux aptitudes limitées mais, honnêtement, loin d'exciter mon imagination cet énoncé ne provoque chez moi qu'une vaste incompréhension accompagnée d'une sorte de réflexe de fuite lié au sentiment que je suis très loin d'être en mesure de ne serait-ce qu'entrevoir ce qui est évoqué. Sauf à considérer un public déjà expert et motivé par ces questions, je doute que cette présentation soit fondamentalement plus "excitante" que l'axiomatique Bourbakiste - dont je conviens qu'elle ne l'est guère. S'imaginer susciter un enthousiasme massif par l'énoncé d'une propriété aussi ésotérique ne relève-t-il pas plus ou moins de l'illusion dans laquelle s'entretiennent certains grands esprits tellement passionnés par leur domaine d'étude qu'ils en perdent le contact avec le commun des mortels ou même avec un public constitué d'étudiants ordinaires ?
Un peu plus loin dans l'article, Arnold affirme de façon péremptoire "on ne peut pas comprendre une définition non-motivée" et il illustre son propos par trois exemples ; je reprendrai un extrait de celui concernant les groupes :
Arnold a écrit:Qu’est-ce qu’un groupe ?
Les algébristes nous enseignent que c’est un ensemble muni de deux opérations, avec une pile d’axiomes qu’on oublie facilement. Cette définition suscite naturellement une protestation : en quoi un être intelligent a-t-il besoin d’un tel couple d’opérations ? La situation est complètement différente si on ne commence pas par les groupes abstraits mais par la notion de transformation (correspondance bijective d’un ensemble dans lui-même), comme d’ailleurs ce fut le cas historiquement ; une famille de transformations d’un ensemble s’appelle un groupe si chaque fois qu’elle contient deux transformations elle contient leur composée et si chaque fois qu’elle contient une transformation elle contient son inverse. Voilà la définition complète. Les « axiomes » ne sont que les propriétés (évidentes) des groupes de transformations.
Déjà, je ne suis pas du tout convaincu que cette entrée en matière soit moins abstraite que celle par les axiomes ; en tout cas, je suis à peu près sûr qu'en démarrant ainsi, il est beaucoup moins évident de se convaincre rapidement que Z est un groupe.
Et puis je n'ai pas souvenir qu'on m'ait donné la moindre motivation à la définition de ce qu'est groupe ; pourtant je l'ai comprise sans difficulté. Mais en partant du principe que je serais sur ce plan une exception marginale, par son affirmation "on ne peut pas comprendre une définition non-motivée" Arnold donne pleinement raison aux évolutions des programmes de maths du secondaire qui demandent que chaque notion soit introduite par un problème.
De même,
Arnold a écrit:La tentative de construire des « mathématiques pures » suivant la méthode axiomatico-déductive a conduit au refus du schéma classique en physique :
— expérience-modèle-étude du modèle-conclusions-vérifications par l’expérience,
et à son remplacement par le schéma :
— définition-théorème-démonstration.
Là encore, on rejoint les préconisations pédagogique du secondaire depuis les années 90 - et encore plus celles postérieures à la publication de ce texte par la SMF en 1998.
Lors de la dernière réforme des programmes de lycée entre 2010 et 2012, j'ai beaucoup lu et entendu par diverses figures d'autorité que les mathématiques sont une science expérimentale (en particulier lorsqu'on a essayé de nous vendre l'épreuve expérimentale de maths qui depuis a tourné court).
Bien sûr, il y a eu un effondrement du niveau d'exigence, mais à en croire cet article, Arnold n'aurait-il pas approuvé l'idée de fond des réformes récentes ?
Globalement, ce texte me semble sonner surtout comme un règlement de compte avec le petit monde mathématique universitaire français et je reste très dubitatif sur ce qu'on peut en retirer concernant l'enseignement primaire et secondaire (voire à niveau bac+2). D'ailleurs si on admet l'affirmation par laquelle Arnold débute son argumentaire, à savoir que "les mathématiques font partie de la physique", alors il faut en tirer les conséquences jusqu'au bout et plaider pour la bivalence au secondaire : les enseignants de mathématiques doivent impérativement aussi être des physiciens.
kaktus65 a écrit:De toutes façons, la différence entre "f" et "f(x)" est largement passée sous la trappe au lycée. Il suffit de voir que f(x) -qui n'est qu'un nombre- est capable d'avoir des variations dans la plupart des bouquins de Term
Alors ça, dans une phrase ça me dérangerait ; en revanche, je fais partie de ceux qui acceptent et écrivent "f(x)" dans les tableaux de variations en partant du principe - discutable - qu'un tableau de variations est en fait un tableau de valeurs "stylisé" : en effet on y ajoute les extrema locaux quand il y en a (tout comme un tableau de signe est dans le fond un tableau de valeurs dont on efface les valeurs absolues).
- MathadorEmpereur
Moonchild a écrit:Arnold a écrit:Qu’est-ce qu’un groupe ?
Les algébristes nous enseignent que c’est un ensemble muni de deux opérations, avec une pile d’axiomes qu’on oublie facilement. Cette définition suscite naturellement une protestation : en quoi un être intelligent a-t-il besoin d’un tel couple d’opérations ? La situation est complètement différente si on ne commence pas par les groupes abstraits mais par la notion de transformation (correspondance bijective d’un ensemble dans lui-même), comme d’ailleurs ce fut le cas historiquement ; une famille de transformations d’un ensemble s’appelle un groupe si chaque fois qu’elle contient deux transformations elle contient leur composée et si chaque fois qu’elle contient une transformation elle contient son inverse. Voilà la définition complète. Les « axiomes » ne sont que les propriétés (évidentes) des groupes de transformations.
Déjà, je ne suis pas du tout convaincu que cette entrée en matière soit moins abstraite que celle par les axiomes ; en tout cas, je suis à peu près sûr qu'en démarrant ainsi, il est beaucoup moins évident de se convaincre rapidement que Z est un groupe.
L'idée c'est de partir d'exemples concrets de groupes: je pense ici notamment aux groupes de symétries d'une figure géométrique, pour lesquels les propriétés de stabilité par composition et réciproque sont évidentes. Il me semble plus concret de composer les symétries du losange ou de faire agir les symétries du triangle sur les sommets numérotés, plutôt que de commencer par donner la définition d'un groupe ou d'une action de groupe. Pour ce qui est de Z, comme Arnold l'a mentionné ailleurs dans le texte, la définition actionnelle du groupe ne cause pas de perte de généralité car tout groupe abstrait G, en agissant par translations à gauche sur lui-même, donne un plongement G → S(G). Pour Z, ce plongement convertit un nombre en ajout ou retrait, selon le schéma +5 → ajouter 5; -3 → retrancher 3. On notera au passage la similarité avec ce que l'on fait actuellement en 5ème…
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- MoonchildSage
Mathador a écrit:Moonchild a écrit:Arnold a écrit:Qu’est-ce qu’un groupe ?
Les algébristes nous enseignent que c’est un ensemble muni de deux opérations, avec une pile d’axiomes qu’on oublie facilement. Cette définition suscite naturellement une protestation : en quoi un être intelligent a-t-il besoin d’un tel couple d’opérations ? La situation est complètement différente si on ne commence pas par les groupes abstraits mais par la notion de transformation (correspondance bijective d’un ensemble dans lui-même), comme d’ailleurs ce fut le cas historiquement ; une famille de transformations d’un ensemble s’appelle un groupe si chaque fois qu’elle contient deux transformations elle contient leur composée et si chaque fois qu’elle contient une transformation elle contient son inverse. Voilà la définition complète. Les « axiomes » ne sont que les propriétés (évidentes) des groupes de transformations.
Déjà, je ne suis pas du tout convaincu que cette entrée en matière soit moins abstraite que celle par les axiomes ; en tout cas, je suis à peu près sûr qu'en démarrant ainsi, il est beaucoup moins évident de se convaincre rapidement que Z est un groupe.
L'idée c'est de partir d'exemples concrets de groupes: je pense ici notamment aux groupes de symétries d'une figure géométrique, pour lesquels les propriétés de stabilité par composition et réciproque sont évidentes. Il me semble plus concret de composer les symétries du losange ou de faire agir les symétries du triangle sur les sommets numérotés, plutôt que de commencer par donner la définition d'un groupe ou d'une action de groupe. Pour ce qui est de Z, comme Arnold l'a mentionné ailleurs dans le texte, la définition actionnelle du groupe ne cause pas de perte de généralité car tout groupe abstrait G, en agissant par translations à gauche sur lui-même, donne un plongement G → S(G). Pour Z, ce plongement convertit un nombre en ajout ou retrait, selon le schéma +5 → ajouter 5; -3 → retrancher 3. On notera au passage la similarité avec ce que l'on fait actuellement en 5ème…
C'est bien pour ça que j'avais dit qu'il est beaucoup moins évident de se convaincre rapidement que Z est un groupe.
D'un côté, il est quasiment immédiat que Z muni de l'addition vérifie les axiomes qui définissent un groupe ; de l'autre, pour percevoir (Z,+) comme un groupe, il ne suffit pas de l'observer tel quel, il faut encore s'imaginer Z comme agissant sur lui-même en passant par le biais d'un plongement, c'est-à-dire en ayant la vision d'un isomorphisme qui n'a pas été défini comme tel. Je trouve qu'à tout prendre, la seconde option est une approche plus abstraite même si elle part d'exemples que l'on pourrait considérer comme "concrets" car en lien avec la géométrie.
Personnellement, j'avais trouvé que la définition axiomatique des structures algébriques les plus courantes (groupe, anneau, corps) était assez parlante en elle-même : on part de la notion d'ensemble et, au fur-et-à-mesure qu'on ajoute des lois de composition interne qui vérifient certaines propriétés, on classifie les structures obtenues selon les règles algébriques élémentaires qu'elles partagent et on étudie les propriétés communes qui en découlent.
Cela me semblait même très "concret" en suivant la progression des exemples (Z,+), (Z,+,×), (Q,+,×) ; rétrospectivement, je regrette seulement qu'on ne m'ait pas parlé dès le départ des monoïdes car cela laissait (N,+) un peu seul dans son coin.
Et puis, la définition axiomatique n'exclut pas que les groupes de symétrie d'une figure ou même certains groupes de permutation apparaissent très vite comme exemples, cela peut même être utile pour illustrer la problématique de la non-commutativité.
- kaktus65Niveau 10
@Moonchild : Dans tout bon bouquin de CPGE, tu auras bien les variations de "f" et certainement pas de "f(x)" dans ton tableau. A ce moment là, autant écrire f(x)' plutôt que f'(x) (même principe)!
Après -comme je l'ai mentionné- tout se discute, mais au moins avoir une norme pour tout le monde et ce n'est pas vraiment le cas actuellement.
Après -comme je l'ai mentionné- tout se discute, mais au moins avoir une norme pour tout le monde et ce n'est pas vraiment le cas actuellement.
- MoonchildSage
kaktus65 a écrit:@Moonchild : Dans tout bon bouquin de CPGE, tu auras bien les variations de "f" et certainement pas de "f(x)" dans ton tableau. A ce moment là, autant écrire f(x)' plutôt que f'(x) (même principe)!
Après -comme je l'ai mentionné- tout se discute, mais au moins avoir une norme pour tout le monde et ce n'est pas vraiment le cas actuellement.
Mais quand dans un tableau de variations on écrit "f", cela a-t-il vraiment un sens de faire apparaître des nombres réels à l'extrémité de certaines flèches (ou parfois même par dessus - ce qui arrive souvent lorsqu'on veut par exemple visualiser une application du théorème des valeurs intermédiaires) ? A ce moment là, autant écrire que "si x=3 alors f=0" plutôt que "si x=3 alors f(x)=0" (même principe) !
L'ambiguïté vient du fait qu'un tableau de variations ne se contente pas toujours de donner exclusivement les variations de la fonction étudiée et contient généralement un mélange d'informations de nature différente.
Un compromis possible consisterait à considérer que le tableau de variations d'une fonction f traduit de manière schématique l'évolution des valeurs des images f(x) quand x augmente et alors la notation avec f(x) n'est pas du tout incohérente, elle serait même assez indiquée ; l'inconvénient est alors que la flèche vers le haut ne signifie pas littéralement "est croissante" mais plutôt "évolue en augmentant", ce qui finalement traduit quand même l'idée que la fonction est croissante sur l'intervalle considéré mais peut chez les élèves induire l'erreur "f(x) est croissante".
On peut trouver des arguments en faveur de chacune de ces deux conventions et aucune d'elles n'est pleinement satisfaisante ; la seule certitude est c'est la pire option qui a été retenue dans l'enseignement secondaire : ne pas uniformiser les pratiques et laisser chaque enseignant faire son choix dans son coin.
- MathadorEmpereur
Moonchild a écrit:Et puis, la définition axiomatique n'exclut pas que les groupes de symétrie d'une figure ou même certains groupes de permutation apparaissent très vite comme exemples, cela peut même être utile pour illustrer la problématique de la non-commutativité.
Bien sûr: après tout, S_3 ~ D_3 est le plus petit exemple de groupe non commutatif.
L'avantage dans l'ordre de présentation des choses que je citais me semble être plutôt dans la progressivité pluriannuelle: on pourrait par exemple étudier au collège D_2, S_3 ou D_4 (et mettre en contrôle des compositions de transformations), dire que c'est un groupe en expliquant pourquoi (et éventuellement demander s'ils peuvent citer un autre groupe), tout en reportant au lycée la définition générale d'un groupe (qu'il soit abstrait ou de transformations). Si l'on commence par les axiomes de groupe, un tel ordonnancement sera plus délicat.
Moonchild a écrit:Un compromis possible consisterait à considérer que le tableau de variations d'une fonction f traduit de manière schématique l'évolution des valeurs des images f(x) quand x augmente et alors la notation avec f(x) n'est pas du tout incohérente, elle serait même assez indiquée ; l'inconvénient est alors que la flèche vers le haut ne signifie pas littéralement "est croissante" mais plutôt "évolue en augmentant", ce qui finalement traduit quand même l'idée que la fonction est croissante sur l'intervalle considéré mais peut chez les élèves induire l'erreur "f(x) est croissante".
Cela me paraît relativement simple à expliciter: « f(x) augmente lorsque x augmente (puisque x augmente lorsqu'on va de gauche à droite); on peut résumer cela en disant que f (ce qui transforme x en f(x)) est croissante ». Après, si l'on veut justifier que l'on prend comme référence le fait que x augmente, il faut dégainer la vraie physique et expliquer que c'est une métaphore qui est particulièrement adaptée pour f(t) où t est le temps…
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"There are three kinds of lies: lies, damned lies, and statistics." (cité par Mark Twain)
« Vulnerasti cor meum, soror mea, sponsa; vulnerasti cor meum in uno oculorum tuorum, et in uno crine colli tui.
Quam pulchrae sunt mammae tuae, soror mea sponsa! pulchriora sunt ubera tua vino, et odor unguentorum tuorum super omnia aromata. » (Canticum Canticorum 4:9-10)
- Call_BB5ANiveau 5
Je viens de regarder dans mes anciens bouquins, il n'y a aucun tableau de variations, pas un seulkaktus65 a écrit:@Moonchild : Dans tout bon bouquin de CPGE, tu auras bien les variations de "f" et certainement pas de "f(x)" dans ton tableau.
Maintenant, je suis partisan du f(x) pour la simple raison qu'écrire x sur la première ligne du tableau n'a aucun sens si on choisit d'écrire f sur la seconde. Il n'y a en effet aucune relation entre une variable x et une fonction f qu'on peut noter tout aussi bien t |-> f(t) ou encore y |-> f(y) . C'est bien parce que le tableau de variations met en évidence certaines caractéristiques de la relation fonctionnelle qui existe entre x et f(x) que l'écriture f(x) se justifie.
- dassonNiveau 5
Bonjour,
Après lecture de ce fil où il est question de f, f(x)..., j'ai refait un programme interactif en FLASH présenté ici
https://www.youtube.com/watch?v=5BeZXoMjECQ
Dans la foulée, un programme basé sur un essai de la TESLA P85D avec de la représentation graphique, des calculs avec des vitesses... qui pourraient être développés...
https://www.youtube.com/watch?v=nVTyvna9QQI&t=196s
Une playlist d'exemples divers et variés de fonctions
https://www.youtube.com/watch?v=eTRJhiwHBWQ&list=PL6AqklWkhprogelSSUpoV8URMfb_xmm00
Les retraités n'ont plus de vacances
Après lecture de ce fil où il est question de f, f(x)..., j'ai refait un programme interactif en FLASH présenté ici
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- Pat BÉrudit
kaktus65 a écrit:@Moonchild : Dans tout bon bouquin de CPGE, tu auras bien les variations de "f" et certainement pas de "f(x)" dans ton tableau. A ce moment là, autant écrire f(x)' plutôt que f'(x) (même principe)!
Après -comme je l'ai mentionné- tout se discute, mais au moins avoir une norme pour tout le monde et ce n'est pas vraiment le cas actuellement.
Mince alors... Je suis absolument certaine d'avoir toujours écrit f(x) dans les tableaux de variation (et signe de f'(x) sur la ligne au-dessus), y compris quand j'étais élève en prépa (et dans une très bonne prépa d'ailleurs... mais c'était il y a 25 ans) ; de même, pour les courbes paramétrées, on mettait t sur une ligne et les variations de x ou de y sur une autre. Les deux lignes doivent représenter deux grandeurs liées, dont la seconde évolue en fonction de la première : f(x) évolue en fonction de x, en croissant ou en décroissant, d'où les flèches ; f(x) croît ou décroît lorsque x croit... mais c'est bien la fonction qui est dite croissante ou décroissante. Je dirais même que pour moi, c'est une hérésie d'écrire f sur la seconde ligne d'un tableau de variations : f ne dépend pas de x, c'est f(x) qui dépend de x.... (et d'ailleurs on fait bien apparaitre certaines valeurs de f(x), les extrémas)
- JPhMMDemi-dieu
Laurent Schwartz, dans Analyse I, a écrit:Il y a lieu de distinguer soigneusement f, qui désigne l'application caractérisée d'une part par son domaine de définition, son espace d'arrivée et son graphe, et f(x), qui est l'élément de F correspondant à x dans cette application. Cependant cette distinction, pour des raisons pratiques, n'est pas toujours facile à faire dans l'usage courant ! Ainsi il est incorrect (mais commode) de dire la fonction " sin x ", on devrait dire la fonction " sin ", alors que sin x est la valeur de cette fonction au point x.
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Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- JPhMMDemi-dieu
Arnold voue (vouait) une haine irrationnelle contre l'axiomatisation des mathématiques. Je n'y ai pas vu d'argument valable, seulement la tentative de justification de son propre sentiment très personnel (si personnel qu'on est bien obligé de soupçonner l'histoire d'un problème entre personnes, ou d'une rancœur liée à un événement particulier. De là à soupçonner qu'une telle haine ait pu naître du refus d'un certain groupe à l'accepter en son sein, il n'y a qu'un pas, que je ne suis pas loin de franchir). La note 5 est à ce titre TRÈS révélatrice de la haine qui l'inspire.xyz a écrit:Puisqu'on parle d'Arnold, voilà ce qu'il pensait de l'enseignement des maths en France:
http://smf4.emath.fr/Publications/Gazette/1998/78/smf_gazette_78_19-29.pdf
On s'en prend plein la figure, avec des arguments très valables. J'ai tout de suite pensé à ce texte dès que j'ai vu la discussion ici.
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Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- ben2510Expert spécialisé
"Essayer d’échapper à l’intervention de la réalité physique dans les mathématiques est une attitude sectaire et isolationniste qui détruit aux yeux de toute personne sensée l’image des mathématiques comme activité utile."
Ça me parle bien. Mais je ne suis pas très porté sur l'abstraction.
Ça me parle bien. Mais je ne suis pas très porté sur l'abstraction.
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On fait la science avec des faits, comme on fait une maison avec des pierres : mais une accumulation de faits n'est pas plus une science qu'un tas de pierres n'est une maison. Henri Poincaré La notion d'équation différentielle est le pivot de la conception scientifique du monde. Vladimir Arnold
- ycombeMonarque
La question des fondements a permis de grands progrès et elle était entièrement tournée vers la mise à plat de ce qui, dans la réalité physique, était nécessaire pour en obtenir un modèle mathématique précis (et minimal).ben2510 a écrit:"Essayer d’échapper à l’intervention de la réalité physique dans les mathématiques est une attitude sectaire et isolationniste qui détruit aux yeux de toute personne sensée l’image des mathématiques comme activité utile."
Ça me parle bien. Mais je ne suis pas très porté sur l'abstraction.
C'est bien gentil de décrire les nombres réels comme pouvant décrire le déroulé du temps (c'était l'approche de Gauss si mes souvenirs sont exacts), c'est bien mieux d'être capable de lister les axiomes qui régissent les propriétés de ces nombres.
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Assurbanipal: "Passant, mange, bois, divertis-toi ; tout le reste n’est rien".
Franck Ramus : "Les sciences de l'éducation à la française se font fort de produire un discours savant sur l'éducation, mais ce serait visiblement trop leur demander que de mettre leur discours à l'épreuve des faits".
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