Être un prof rigoureux et avoir l'impression que les autres ne le sont pas du tout

Je ne parle pas du manque de rigueur des élèves : j'ai fini par m'y habituer et à en prendre mon parti, et puis cela fait aussi partie de nos missions que de leur apprendre à l'être.
Je parle du manque de rigueur des adultes : profs et administration. Je ne peux pas dire dans le détail tout ce qui me donne cette impression (car les exemples seraient tellement précis que je risquerais de me dévoiler ^^), mais en vrac :
- marre d'être prévenue au dernier moment (hier) qu'une sortie est organisée avec la moitié de la classe de 3e que j'ai 2H vendredi AM (et à qui j'aurais voulu rendre le brevet blanc)
- marre d'apprendre au dernier moment le nom des élèves qui partent en voyage la semaine prochaine (du coup, je perds encore la moitié des élèves dans cette même 3e : quid du brevet blanc ?)
- la date pour la soutenance du rapport de stage a changé 3 fois, et on nous a transmis deux barèmes différents
- le planning des conseils de classe, qui sont resserrés sur une seule semaine en raison des "contraintes du calendrier" nous a été transmis ce week-end, l'arrêt des notes est ce vendredi (on vient de rentrer de vacances)
- je ne comprends pas qu'il faille 3 semaines à des collègues pour corriger 20 copies de brevet blanc, ni pourquoi il faut une semaine à l'administration pour rentrer les notes et nous faire parvenir les paquets de copies de nos classes : le brevet blanc a lieu fin janvier et les élèves n'ont toujours pas récupéré leurs copies

Tout est comme ça : on est prévenus de tout au dernier moment, ou bien il y a un changement de dernière minute. Je suis quelqu'un d'organisé, qui aime planifier un minimum à l'avance. Je pensais que c'était une qualité importante pour être enseignant (même s'il faut aussi de la souplesse, j'entends bien), or je m'aperçois que les adultes autour de moi sont nombreux à ne pas avoir cette qualité. Est-ce moi qui suis trop rigide ? N'ai-je pas de chance et suis-je entourée de bras cassés ? Est-ce que c'est partout comme ça ?

C'est comme ça partout :facepalm1:
Et on peut compléter la liste :
- les documents envoyés dans le mauvais sens et illisibles ...
- les photocopies illisibles données aux élèves ...
- les consignes peu claires et qui changent ... (différences entre ce qui est noté dans l'agenda des enfants et sur le cahier de textes numériques).
- les commandes qui sont perdues ...
- l'interro orale filmée rendue à la rentrée de janvier et toujours pas notée ...

Je pense qu'au ministère, c'est pire encore.
Il suffit de se souvenir de l'épisode "changement des dates de la période de vacances".

c'est comme ça dans mon collège aussi.

C'est comme ça chez moi aussi : les sorties AS nous sont signalées le mardi pour le mercredi matin, certaines sorties de classe ne sont pas notées sur Pronotes. Cependant, je dois dire à la décharge de ma PA, qui fait le plus gros du boulot administratif, qu'elle a entendu nos doléances (au CHSCT quand même) et qu'elle essaie de prévenir plus à l'avance. Mais comme au secrétariat et à l'intendance, il n'y a pas la même efficacité, on a régulièrement des couacs.

+1
Mais j'accepte de mieux en mieux la situation en me disant que tout le monde n'a pas les mêmes qualités.

Ce sont de gros classiques, même si ton administration / direction a tout de me^me l'air moins douée que la moyenne.

Je te dirais que faute de mieux, il faut en prendre ton parti :

- marre d'être prévenue au dernier moment (hier) qu'une sortie est organisée avec la moitié de la classe de 3e que j'ai 2H vendredi AM (et à qui j'aurais voulu rendre le brevet blanc)
- marre d'apprendre au dernier moment le nom des élèves qui partent en voyage la semaine prochaine (du coup, je perds encore la moitié des élèves dans cette même 3e : quid du brevet blanc ?)

C'est pas ta faute. Les élèves rattrapent s'ils sont absents, et puis c'est tout. Ils sont tenus de le faire. S'ils ne s'y attellent pas, c’est leur problème.

- la date pour la soutenance du rapport de stage a changé 3 fois, et on nous a transmis deux barèmes différents

Tu retiens celui que tu trouves le plus pertinent.

- le planning des conseils de classe, qui sont resserrés sur une seule semaine en raison des "contraintes du calendrier" nous a été transmis ce week-end, l'arrêt des notes est ce vendredi (on vient de rentrer de vacances)

Tu fais avec les notes que tu as, les notes à venir compteront pour le 3e trimestre. Si c'est pareil au 3e trimestre, tant pis : certaines notes ne compteront pas. Ce n'est pas très grave.

- je ne comprends pas qu'il faille 3 semaines à des collègues pour corriger 20 copies de brevet blanc, ni pourquoi il faut une semaine à l'administration pour rentrer les notes et nous faire parvenir les paquets de copies de nos classes : le brevet blanc a lieu fin janvier et les élèves n'ont toujours pas récupéré leurs copies

C'est une excellent argument pour freiner les ardeurs des chefs et de certaines équipes qui cèdent à la mode des devoirs communs et de la multiplication des brevets blancs : les devoirs courants sont plus formateurs que ces épreuves si fastidieuses à organiser, car ils sont rendus et corrigés quand les élèves se souviennent un tant soit peu du chapitre étudié et de ce qui leur est passé par la tête le jour du devoir (chez nous, un seul brevet blanc en 3e, et un devoir commun dans une seule matière en 4e).

Τῶν ὄντων τὰ μέν ἐστιν ἐφʹἡμῖν, τὰ δὲ οὐκ ἐφʹἡμῖν .

Tu fais ton boulot, c'est déjà beaucoup ; tu n'as pas à te fatiguer à courir après celui des autres.

On dirait mon ancien lycée et de plus en plus mon lycée actuel ! Tout dépend de qui est à la barre (notre super pro adjoint est parti...). Mais de plus en plus, je prends de la distance et j'en prends mon parti car finalement, comme ça ne dérange personne (la direction surtout), pourquoi, je ferais de la bile pour rien ! En fait, je crois que cela vient avec l'expérience... ou plutôt les mauvaises expériences : j'ai été à deux doigts du burn-out, à la fin d'une année, complètement folle, et j'ai compris... enfin presque...

Vous me rassurez un peu : je vois que je ne suis ni trop rigide, ni particulièrement mal lotie.
Je comprends qu'il faut que je lâche du lest, et j'essaie de le faire depuis plusieurs semaines, mais depuis le retour des vacances de Noël, ces problèmes d'organisation interne ont impacté à plusieurs reprises ma propre organisation, ce qui m'insupporte au plus haut point. Mais j'ai du mal à comprendre et surtout à "pardonner" ces problèmes quand ils émanent de l'administration, alors que leur seul et unique boulot consiste justement, me semble-t-il, à prévoir, organiser et planifier ! Vous allez me rétorquer que cela n'a rien d'étonnant au vu des personnes que l'on recrute actuellement pour ces postes : j'en suis consciente. Sauf que j'en viens, suite à tous ces couacs, à mépriser complètement mes supérieurs hiérarchiques, et je crains que cela ne finisse par se voir.
Mon compagnon me dit que je vois tous ces défauts, que je ne voyais pas avant, parce que j'ai décidé de partir et que j'ai demandé une mutation à l'inter. Il a sans doute raison, mais même si j'ai la certitude de partir, l'année est encore longue, et j'ai quand même à coeur de travailler correctement avec les élèves.

C'est toujours délicat de mépriser les autres dans l'exercice de leur métier sans avoir été en situation de l'exercer. Bon, en même temps c'est un des sports humains les plus pratiqués, sinon on parlerait de quoi ?

Il faut réaliser que tout le monde a toujours l'ambition d'être plus rigoureux que les autres. Même ceux qu'on considère comme peu rigoureux doivent en penser autant de nous. Par exemple le fait de resserrer sur une seule semaine les conseils de classes en raison des "contraintes du calendrier" peut sembler une aberration (et c'en est peut-être une), mais de son côté l'administration a peut-être effectivement des contraintes que nous ne connaissons pas et qui font qu'ils s'estiment très compétents d'avoir réussi à tout caler malgré tout, ce qui peut les conduire à penser que les profs qui râlent pour ça sont vraiment des fainéants dont le seul "boulot" consiste à faire 18 pauvres heures de "cours" pour les résultats médiocres que l'on connait.

C'est la vie. Faire de son mieux sans s'occuper de juger ce que font les autres, ça peut sembler difficile, mais ça fait un bien fou.

Tamerlan a écrit:C'est toujours délicat de mépriser les autres dans l'exercice de leur métier sans avoir été en situation de l'exercer. Bon, en même temps c'est un des sports humains les plus pratiqués, sinon on parlerait de quoi ?

De Johnny Hallyday, qui aurait dit :

"Il est plus facile de paraître digne des emplois qu'on n'a pas que de ceux que l'on exerce."

Ah qu'il a dit un truc aussi profond que ça ?! Tu es sûr ?

A moins que ce ne soit La Rochefoucauld...

C'est presque pareil, sauf que La Rochefoucauld est mort alors que Johnny est pour toujours dans nos coeurs.

marjolie.june a écrit: Mais j'ai du mal à comprendre et surtout à "pardonner" ces problèmes quand ils émanent de l'administration, alors que leur seul et unique boulot consiste justement, me semble-t-il, à prévoir, organiser et planifier !  

En réalité, non, ce n'est qu'une partie du travail (35% ?). Une autre très grande partie est faite d'imprévus, de relations humaines, de problèmes de vie scolaire à gérer, de situations sociales et familiales parfois très lourdes à accompagner, de réunions incontournables (planifiées, elles, pour le coup).

Vous allez me rétorquer que cela n'a rien d'étonnant au vu des personnes que l'on recrute actuellement pour ces postes : j'en suis consciente.

On recrute qui ? (Juste pour savoir.)

Spoiler:

Mais il chantait quoi ce La Rochefoucauld ?

DesolationRow a écrit:C'est presque pareil, sauf que La Rochefoucauld est mort alors que Johnny est pour toujours dans nos coeurs.

:lol: :lol:

C'est pour cela que je confonds toujours les deux.

Gryphe a écrit:
On recrute qui ? (Juste pour savoir.)

Spoiler:

Non... d'anciens... profs ?

Et c'est agréable de se sentir mieux que les autres ?
La désorganisation est souvent assez totale, mais au final on arrive fin juin chaque année. Et puis je laisse leur désordre aux autres et m'occupe du mien (et j'ai déjà à faire). Il faut dire que des années de thérapie m'ont bien aidé à lâcher sur l'hyper contrôle. Il arrive de temps à autre que je me retrouve en situation un peu délicate à cause du désordre des autres (la dernière c'était de me retrouver à la porte de mon propre CDI parce qu'un prof s'y était installé et avait fermé derrière lui) mais après tout, c'est que le boulot et j'ai appris à mes dépends que tout ce qui n'est pas fait aujourd'hui a de forte chance de ne pas être fait demain et que, pourtant, la terre continue de tourner. Bref, à l'impossible nul n'est tenu et RAB.

Pseudo a écrit:Et c'est agréable de se sentir mieux que les autres ?
La désorganisation est souvent assez totale, mais au final on arrive fin juin chaque année. Et puis je laisse leur désordre aux autres et m'occupe du mien (et j'ai déjà à faire). Il faut dire que des années de thérapie m'ont bien aidé à lâcher sur l'hyper contrôle. Il arrive de temps à autre que je me retrouve en situation un peu délicate à cause du désordre des autres (la dernière c'était de me retrouver à la porte de mon propre CDI parce qu'un prof s'y était installé et avait fermé derrière lui) mais après tout, c'est que le boulot et j'ai appris à mes dépends que tout ce qui n'est pas fait aujourd'hui a de forte chance de ne pas être fait demain et que, pourtant, la terre continue de tourner. Bref, à l'impossible nul n'est tenu et RAB.

Oh tu es plutôt cool, moi j'aimerai déjà pouvoir y rentrer dans le CDI avec une de mes classes.

marjolie.june a écrit:
- je ne comprends pas qu'il faille 3 semaines à des collègues pour corriger 20 copies de brevet blanc, ni pourquoi il faut une semaine à l'administration pour rentrer les notes et nous faire parvenir les paquets de copies de nos classes : le brevet blanc a lieu fin janvier et les élèves n'ont toujours pas récupéré leurs copies

Je ne suis pas une machine à corriger. Je peux très bien avoir des impératifs personnels au même moment, d'autres copies plus urgentes à corriger... Je prends donc le temps qui m'est nécessaire pour venir à bout des corrections. Si nous avions moins de classes et moins d'élèves par classe, peut-être pourrait-on alors attendre de nous un rendement meilleur. Mais il faut savoir se préserver, et ce n'est pas manquer de rigueur que de ne pas se jeter, tête baissée, dans le labeur abrutissant. Si la façon de faire des collègues ne convient pas, il vaut mieux ne plus travailler avec eux. Corrige tes propres copies, tu les rendras quand tu voudras le faire.

Gryphe a écrit:
On recrute qui ? (Juste pour savoir.)

Spoiler:

Le problème, c'est surtout que c'est une équipe. Si un rouage ne fonctionne pas correctement, la machine peut gripper régulièrement. Si je résume, dans mon établissement : un cde très "relationnel", qui reçoit donc facilement les parents, gère les réunions, mais ne gère rien d'autre, une PA très organisée qui fait tous les plannings, les courriers, les infos, etc, une secrétaire qui a mis 2 ans à apprendre le métier (parce qu'elle le découvrait et parce qu'elle n'avait vraiment pas envie de s'y mettre), qui fait des fautes dans tous les courriers (donc, c'est la PA qui les fait), qui ne savait pas souvent où étaient les documents ou infos demandés, une autre secrétaire à temps partiel, discrète mais qui fait son travail (mais à temps partiel et son contrat arrive à terme), un gestionnaire qui oublie de faire les réservations, de faire signer les courriers, qui fait les comptes de façon... aléatoire. Comment voulez-vous que ça fonctionne ? Tout le monde n'est pas à mettre dans le même panier, mais la PA ne peut pas faire durablement le travail de 3 personnes.

À part ça, tes chevilles vont bien Marjolie ?

Ergo a écrit:

Gryphe a écrit:
On recrute qui ? (Juste pour savoir.)

Spoiler:

Non... d'anciens... profs ?

Les mêmes qui mettent 3 semaines à corriger 20 bacs blancs peut-être...