Agrégation externe de philosophie 2016 - Sujets

Oui, de très beaux sujets. Je pense même que, pour qui avait bossé sérieusement, ce sont des sujets assez rassurants.

Texte passionnant (quoique étant anti-spinoziste j'ai du mal à m'y intéresser réellement sinon pour le critiquer) mais difficile, très difficile même.
Je ne suis définitivement pas spinoziste mais je suis loin encore de pouvoir vraiment réfûter ses écrits en disant clairement les points de divergence entre lui et moi.
Cette expérience d'éternité faite en immanence repose au fond sur une pétition de principes intellectualiste mais pourtant il y a bien une forme de Foi (qu'il est difficile de définir).
J'ai pu réfléchir un peu malgré la quasi absence de sommeil et de nourriture ces deux derniers jours : ma molaire à fistulé pendant l'épreuve et ma bouche s'est partiellement remplie de pus ce qui m'a apporté un grand soulagement et du coup j'ai pu profiter de l'épreuve.

J'ai presque expérimenté et senti que j'étais éternel! :p

Le secret pour comprendre ce texte, c'est d'accéder au troisième genre de connaissance.

Oui, tout repose sur ce paradoxe et il y a un vrai problème inhérent au fait de commenter ce à quoi on n'a accès que par Ouïe-dire.

En tout cas, il était évident que la phrase "nous sentons et savons d'expérience que nous sommes éternels" devait être considérée comme pivot de tout le texte, voire même de l'Éthique, puisque c'est je crois la première fois que Spinoza dans ce livre se réfère à l'expérience pour appuyer son discours. Il était de plus étrange que cette phrase suivait le constat que nous n'avions pas d'expérience de notre existence avant le corps, puisque nous n'en n'avions pas de souvenirs. Il y avait clairement exposé là deux niveaux d'expérience, caractérisés chacun par un certain mode de connaissance. C'est donc un point de basculement qu'il fallait selon moi signaler.

Recherche d'une origine précédant l'existence matérielle dans la philosophie qui est toute entière cette révélation de l'origine perdue dans laquelle la puissance d'être/d'exister prend sa source.

Paul Dedalus a écrit:Recherche d'une origine précédant l'existence matérielle dans la philosophie qui est toute entière cette révélation de l'origine perdue dans laquelle la puissance d'être/d'exister prend sa source.

Et vice versa.

Oui voilà, le système spinoziste est plein de corrélation. Mais je t'avoue que j'ai du mal à consentir à l'idée.
Et pourtant si on rentre dans la logique de Spinoza, on ne peut qu'être d'accord.
J'ai trouvé que sa philosophie était un passage en force plus qu'un tour de force.

J'ai mes introductions, plans et conclusions de mes copies en brouillon. Je les posterais bien ici, mais je crains que ce soit risqué (si un correcteur de l'agreg traîne par ici, par exemple).

Leclochard a écrit:L'objet de la réflexion comme objet de réflexion ! Le jury a de l'humour. Un peu comme l'année où il donnait "la méthode" comme sujet d'une dissertation.
L'an prochain, ce sera "l'évaluation", "le savoir" ou "la compétence".

"La dissertation".

En plein dans le sujet :

J'ai d'ailleurs fait ma première partie sur Platon.

Levincent a écrit:J'ai mes introductions, plans et conclusions de mes copies en brouillon. Je les posterais bien ici, mais je crains que ce soit risqué (si un correcteur de l'agreg traîne par ici, par exemple).

Au pif je dirais que c'est peu probable, mais je comprends cette réserve. Et c'est bien aussi d'oublier les épreuves passées dans la préparation des futures, notamment dans l'intervalle qui sépare des résultats d'admissibilité (et, comme on te le souhaite évidemment, d'admission).

PauvreYorick a écrit:

Levincent a écrit:J'ai mes introductions, plans et conclusions de mes copies en brouillon. Je les posterais bien ici, mais je crains que ce soit risqué (si un correcteur de l'agreg traîne par ici, par exemple).

Au pif je dirais que c'est peu probable, mais je comprends cette réserve. Et c'est bien aussi d'oublier les épreuves passées dans la préparation des futures, notamment dans l'intervalle qui sépare des résultats d'admissibilité (et, comme on te le souhaite évidemment, d'admission).

C'est la voix de la sagesse qui parle. En fait je suis sorti des épreuves avec une bonne crève et je fais de ces rêves fiévreux où des images reviennent en boucle dans la tête. Et ces images, c'est justement, depuis jeudi, des plans de dissertation, des textes de Spinoza, des introductions (c'est dire si mon cerveau a été bien traumatisé par ces trois jours). J'espérais me débarrasser de cela en postant une partie de mon travail, mais si j'attends de guérir c'est bien aussi.

Manifestement les concours sont toujours aussi éprouvants, on y laisse des plumes ou des dents...
Savez-vous quand sont publiés les programmes pour l'année prochaine, que ce soit pour l'agrégation interne ou l'agrégation externe.
Je suis un peu hors sujet, mais il ne me semblait pas opportun d'ouvrir une nouvelle discussion pour ça.
Merci.
H.

L'année dernière, c'est sorti mi-avril. Il me semble que ça ne sort jamais beaucoup plus tôt, mais parfois plus tard (jusqu'à juin/juillet).

Dès qu'ils seront publiés, quelqu'un qui surveille le SIAC2 (peut-être un autre, peut-être moi) s'empressera d'en faire part ici même.

Est-ce que les notes et le classement provisoire sont donnés avec les résultats d'admissibilité, ou faut-il attendre les résultats d'admission ?

Levincent a écrit:Est-ce que les notes et le classement provisoire sont donnés avec les résultats d'admissibilité, ou faut-il attendre les résultats d'admission ?

Pour les admissibles, il faut attendre ! Les notes ne sont communiquées qu'aux non-admissibles. Patience ... :lol:

Ruthven a écrit:

Levincent a écrit:Est-ce que les notes et le classement provisoire sont donnés avec les résultats d'admissibilité, ou faut-il attendre les résultats d'admission ?

Pour les admissibles, il faut attendre ! Les notes ne sont communiquées qu'aux non-admissibles. Patience ... :lol:

Je vois. C'est plutôt une bonne chose de ne pas savoir ses notes si l'on est admissible, car de trop bonnes notes à l'écrit peuvent encourager certains à se reposer sur leurs lauriers.

Levincent a écrit: C'est plutôt une bonne chose de ne pas savoir ses notes si l'on est admissible, car de trop bonnes notes à l'écrit peuvent encourager certains à se reposer sur leurs lauriers.

ou de trop mauvaises en décourager d'autres...

Mais ce genre de considérations philanthropiques me semble très éloigné des principes de l'agrégation : on se doit de concourir à l'aveugle.
A défaut de bander les yeux de la justice on occulte ceux des candidats.

diabole a écrit:

Levincent a écrit: C'est plutôt une bonne chose de ne pas savoir ses notes si l'on est admissible, car de trop bonnes notes à l'écrit peuvent encourager certains à se reposer sur leurs lauriers.

ou de trop mauvaises en décourager d'autres...

Mais ce genre de considérations philanthropiques me semble très éloigné des principes de l'agrégation : on se doit de concourir à l'aveugle.
A défaut de bander les yeux de la justice on occulte ceux des candidats.

Très juste. Donner les notes, c'est décourager certains sélectionnés du second tour, et se priver de potentiels lauréats car l'oral est aussi décisif que l'écrit.

Paul Dedalus a écrit:Je ne suis définitivement pas spinoziste mais je suis loin encore de pouvoir vraiment réfûter ses écrits en disant clairement les points de divergence entre lui et moi.

Bon, ça va, il peut encore dormir quelque temps avant de s'inquiéter, alors :lol:

Je viens d'éditer le premier message de ce fil pour y introduire le texte de Spinoza.

Levincent a écrit:Je viens d'éditer le premier message de ce fil pour y introduire le texte de Spinoza.

Qu'est-ce qu'une scolie ?
Son raisonnement est vertigineux et audacieux. J'ai imprimé le texte. Il cherche à prouver qu'il reste "quelque chose" de nous après la mort.

Leclochard a écrit:
Qu'est-ce qu'une scolie ?

C'est un commentaire qui sert à Spinoza à ajouter une précision supplémentaire à son discours. Comme il fait le choix d'exposer celui-ci de manière géométrique (Proposition 1, Démonstration, Proposition 2, Démonstration, etc.), il recourt à ce moyen pour casser la rigidité induite par cette forme et passer à des considérations plus particulières, à traiter de cas pratiques et concrets, ou encore à répondre à d'éventuelles objections. Ici, par exemple, le scolie sert initialement à répondre à l'objection à laquelle s'expose la démonstration, à savoir que si notre esprit, ou une partie de celui-ci est éternel, alors nous devrions avoir des souvenirs remontant à avant la naissance du corps. Et effectivement la réponse de Spinoza est audacieuse, car il ne se contente pas de démontrer que l'objection est inopérante (en effet elle ne part pas du principe que le temps et l'éternité sont essentiellement distincts), mais de plus il en appelle au témoignage de l'expérience, ce qui paraît à première vue contradictoire, puisque c'est précisément de l'expérience que semble venir l'objection principale à sa proposition. Mais Spinoza a à l'esprit un autre mode d'expérience que celui de l'expérience commune s'appuyant sur l'imagination, dont le souvenir est une modalité : il s'agit de voir avec "les yeux de l'esprit", avec lesquels l'esprit "sent" les vérités aussi bien que le corps sent les choses extérieures. Spinoza développe en effet, dans la partie 2 de l'Éthique (prop. 40, scolie 2), une classification des connaissances selon trois genres. Le premier genre correspond à l'opinion et à l'imagination, et est source d'erreur, et le troisième genre, le plus élevé, est la connaissance directe, intuitive, de l'essence des choses. C'est en l'occurrence à une connaissance du troisième genre qu'appartient l'expérience de l'éternité de notre esprit que Spinoza décrit, et c'est ce qui donne cet aspect vertigineux au texte. C'est Deleuze qui remarquait dans la cinquième partie de l'Éthique un phénomène "d'accélération" des démonstrations, signe qu'elles étaient écrites sous le troisième genre de connaissance. L'exposé à ce stade n'est plus seulement une construction intellectuelle méthodique, mais se compose de vraies fulgurations que Spinoza intègre à son système pour le parachever.

Merci beaucoup pour ton explication. Je suis content de l'avoir appris.
J'ai été étonné aussi qu'il réfère à l'expérience comme preuve parce que justement, comme tu le précises, au sens ordinaire, elle ne prouve rien en l'occurrence. "Nous sentons et savons d'expérience que nous sommes éternels". Voilà une pensée qu'un enfant réfuterait.
Sa démarche donne l'apparence de la rigueur. Elle offre un cadre à la pensée. Maintenant, je ne sais pas si elle est suffisante pour le conduire vers le vrai.
Peut-être que je dis une bêtise mais je n'ai pas l'impression qu'il définisse exactement ce qui reste une fois le corps disparu. Les expressions "quelque chose" ou "une manière de pensée précise" sont très vagues. J'ai l'impression qu'il raisonne sans pouvoir expliquer concrètement de quoi il s'agit. Peut-on se représenter de quoi il parle ?