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- JohnMédiateur
L'Académie française écrit à Najat Vallaud-Belkacem :
Najat Vallaud-Belkacem répond à l'Académie française :
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/education/article/2016/02/16/orthographe-mme-vallaud-belkacem-fait-part-de-son-etonnement-a-l-academie-francaise_4865910_1473685.html#2SeUdmGxIPgqBjOv.99
«Au moment où le ministère de l'Éducation nationale décide de mettre en application les rectifications orthographiques recommandées par le Conseil supérieur de la langue française et publiées par le Journal officiel le 6 décembre 1990, qui serviront de référence dès la prochaine rentrée scolaire pour l'enseignement de l'orthographe dans les collèges, l'Académie française, dans sa séance du 11 février 2016, tient à rappeler la position qui a été la sienne lors de l'adoption de ces recommandations.
Par trois textes successifs, l'Académie française s'est exprimée sur ce sujet.
Dans sa séance du 16 novembre 1989, confrontée à un projet de simplification de l'orthographe, elle a adopté à l'unanimité une déclaration qui rappelait fermement son opposition à toute modification autoritaire de l'orthographe. L'Académie a réaffirmé qu'il n'appartient ni au pouvoir politique ni à l'administration de légiférer ou de réglementer en matière de langage, l'usage, législateur suprême, rendant seul compte des évolutions naturelles de la langue, qui attestent sa vitalité propre.
Sans se montrer fermée à certains ajustements ou tolérances, l'Académie s'est donc prononcée en faveur du maintien de l'orthographe d'usage, conseillant «de laisser au temps le soin de la modifier selon un processus naturel d'évolution» qui ne porte pas atteinte au génie de la langue et ne rende pas plus difficile d'accès l'héritage culturel.
Après qu'eut été constitué un groupe d'étude sur cette question au sein du Conseil supérieur de la langue française, l'Académie, sollicitée de rendre un avis, et informée des seuls principes guidant l'action de cet organisme - refus de toute imposition autoritaire de normes graphiques et sanction de l'usage pour les rectifications proposées -, a voté à l'unanimité dans sa séance du 3 mai 1990 un second texte, marquant son accord avec les lignes directrices du projet en préparation. C'est cet accord, voté en l'absence de tout texte et ne portant que sur des principes, qui est invoqué aujourd'hui comme une approbation des directives devant entrer en application dans l'enseignement secondaire à partir de la prochaine rentrée.
L'Académie s'interroge sur les raisons de l'exhumation par le ministère de l'Éducation nationale d'un projet vieux d'un quart de siècle et qui, à quelques exceptions près, n'a pas reçu la sanction de l'usage. Plus que la maîtrise de l'orthographe, défaillante, c'est la connaissance même des structures de la langue et des règles élémentaires de la grammaire qui fait complètement défaut à un nombre croissant d'élèves, comme le montrent les enquêtes internationales menées ces dernières années, qui, toutes, attestent le net recul de la France par rapport à d'autres pays européens dans le domaine de la langue.
En conclusion, pour l'Académie, il est urgent d'engager dès l'enseignement primaire le redressement souhaité par tant de nos concitoyens, en rétablissant les conditions d'une vraie transmission du savoir. Tel est l'enjeu d'une réforme véritable de notre système éducatif, qui placerait de nouveau l'acquisition et la maîtrise des connaissances au cœur de ses préoccupations, et dont des dispositions incidentes ne permettent pas de se dispenser.»
Najat Vallaud-Belkacem répond à l'Académie française :
« C’est avec intérêt, mais également avec un certain étonnement que j’ai pris connaissance de votre réaction publique aux nouveaux programmes de la scolarité obligatoire, publiés le 26 novembre 2015 − vous critiquez notamment la référence, pourtant identique à celle de 2008, aux rectifications de l’orthographe proposées par le Conseil supérieur de la langue française », écrit Mme Vallaud-Belkacem dans cette missive, datée du lundi 15 février et rendue publique mardi 16 février.
« Etonnement renforcé par le fait que ces rectifications sont intégrées dans la neuvième édition du dictionnaire de l’Académie française et que l’Académie, pourtant contactée par le Conseil supérieur des programmes cet été, n’a pas fait de remarque quant à la présence de cette référence. »
Selon la ministre de l’éducation nationale, le secrétaire perpétuel de l’époque, Maurice Druon, avait affirmé que le rapport du Conseil supérieur de la langue française sur les rectifications de l’orthographe « avait été approuvé à l’unanimité par l’Académie ».
Et la publication, en 2008, des programmes de l’enseignement de français au collège faisant référence à ces « rectifications de l’orthographe », « approuvées par l’Académie française », « n’a pas suscité, à ma connaissance, de démenti de la part de l’Académie », insiste la ministre. Et de conclure :
« Eu égard à la mission de défense et d’illustration de la langue française assignée à l’Académie, je vous serais reconnaissante de bien vouloir me faire part de toute évolution de la position de votre institution quant aux rectifications orthographiques, afin que les acteurs concernés puissent en tenir compte à l’avenir. »
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/education/article/2016/02/16/orthographe-mme-vallaud-belkacem-fait-part-de-son-etonnement-a-l-academie-francaise_4865910_1473685.html#2SeUdmGxIPgqBjOv.99
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- RoninMonarque
Comment ? une bande d'inconnus ose dire non à sa Sainteté du sourire ? qu'on leur coupe la tête !!!
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- Marcel KhrouchtchevEnchanteur
Le coup de la référence à 2008 est quand même assez bien envoyé (si c'est avéré), puisque le ministre de l'époque était Darcos qui, désormais, est un Immortel du haut de son oeuvre indispensable.
- Ma'amÉrudit
En tout cas c'est vrai pour les programmes du primaire. Il est précisé dans les programmes 2008 : "L'orthographe révisée est la référence". Mais très peu de manuels sont écrits en orthographe révisée et notamment pour les verbes en -eler et -eter, c'est l'ancienne règle (la vraie ) qui y est expliquée.
- moonieNiveau 9
Quoi qu'on en dise, c'est l'Académie Française qui doit faire autorité dans la matière. Un gouvernement n' a pas à légiférer sur de tels changements orthographiques.
- Marcel KhrouchtchevEnchanteur
moonie a écrit:Quoi qu'on en dise, c'est l'Académie Française qui doit faire autorité dans la matière. Un gouvernement n' a pas à légiférer sur de tels changements orthographiques.
On se demande comment font les langues qui n'ont pas d'académie!
En tout cas, bien d'accord pour dire que ça ne devrait pas être du domaine de l'Etat!
- Marie LaetitiaBon génie
Ronin a écrit:Comment ? une bande d'inconnus ose dire non à sa Sainteté du sourire ? qu'on leur coupe la tête !!!
c'est pas comme qu'il faut dire, mais...
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Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)
Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...
Et on ne dit pas "voir(e) même" mais "voire" ou "même".
- User5899Demi-dieu
Rappelons que cette mention a été portée sans le moindre fondement et demeure donc, de fait, lettre morte. Tout ce qu'on peut dire à propos de cette mention est que la démagogie ministérielle est bien identique, que le ministre soit de drauche ou de groite.maîtresse a écrit:En tout cas c'est vrai pour les programmes du primaire. Il est précisé dans les programmes 2008 : "L'orthographe révisée est la référence".
- Marcel KhrouchtchevEnchanteur
Cripure a écrit:Rappelons que cette mention a été portée sans le moindre fondement et demeure donc, de fait, lettre morte. Tout ce qu'on peut dire à propos de cette mention est que la démagogie ministérielle est bien identique, que le ministre soit de drauche ou de groite.maîtresse a écrit:En tout cas c'est vrai pour les programmes du primaire. Il est précisé dans les programmes 2008 : "L'orthographe révisée est la référence".
La seule différence est que NVB ne finira pas à l'Académie
- User5899Demi-dieu
Elles se réfèrent à l'usage et les Etats peuvent y décréter certaines modifications.Marcel Khrouchtchev a écrit:moonie a écrit:Quoi qu'on en dise, c'est l'Académie Française qui doit faire autorité dans la matière. Un gouvernement n' a pas à légiférer sur de tels changements orthographiques.
On se demande comment font les langues qui n'ont pas d'académie!
Les "modifications" de 90 n'ont jamais été avalisées par l'usage et elles se révèlent nocives pour toute personne hors EN.
Cher Marcel, concernant le futur de Belkacem, je vous trouve d'un optimisme déraisonnable
Mon propos est surtout de pointer du doigt le fait que le ministre ne décide de rien et que ce sont les bureaux du ministère qui n'en font qu'à leur tête en l'absence de tout chef qui puisse les mettre au pas.
- e-WandererGrand sage
Je ne trouve pas qu'il y soit plus mal à sa place que beaucoup d'autres : on peut chercher longtemps les grands écrivains sous la Coupole, de nos jours ! Ils existent, mais ils ne sont pas académiciens. L'Académie compte quelques belles mécaniques intellectuelles, comme Fumaroli, mais surtout beaucoup de "généralistes" de la culture ou de figures politico-mondaines. En ce sens, Darcos, qui a une thèse sur Ovide, qui scande (scandait ?) le latin à vue, qui a une solide culture en musique ou en histoire de l'art, y a largement plus sa place qu'une bonne vingtaine d'autres, à commencer par VGE.Marcel Khrouchtchev a écrit:Le coup de la référence à 2008 est quand même assez bien envoyé (si c'est avéré), puisque le ministre de l'époque était Darcos qui, désormais, est un Immortel du haut de son oeuvre indispensable.
http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/les-quarante-aujourdhui
- Marcel KhrouchtchevEnchanteur
Ou même Nora pour cibler ma discipline, on est d'accord. Je reconnais que j'ai été trop sarcastique, mais ça me fait beaucoup rire cette histoire de textes de 2008, il ne doit quand même pas se sentir très à l'aise.
- OsmieSage
Marcel Khrouchtchev a écrit:Cripure a écrit:Rappelons que cette mention a été portée sans le moindre fondement et demeure donc, de fait, lettre morte. Tout ce qu'on peut dire à propos de cette mention est que la démagogie ministérielle est bien identique, que le ministre soit de drauche ou de groite.maîtresse a écrit:En tout cas c'est vrai pour les programmes du primaire. Il est précisé dans les programmes 2008 : "L'orthographe révisée est la référence".
La seule différence est que NVB ne finira pas à l'Académie
Gisard est bien en train d'y finir, et ce n'est pas son chef-d’œuvre Le Passage qui a dû lui ouvrir les portes !
- JaneMonarque
De toute façon, ce sont les profs qui auront le dernier mot, et en particulier les profs de français :diable: La guéguerre occupationnelle menée par le ministère et NVB détourne l'attention sur de faux problèmes.
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"Il n'est pas une vérité qui ne porte avec elle son amertume." (A. Camus)
- OlympiasProphète
Jane a écrit:De toute façon, ce sont les profs qui auront le dernier mot, et en particulier les profs de français :diable: La guéguerre occupationnelle menée par le ministère et NVB détourne l'attention sur de faux problèmes.
- ElyasEsprit sacré
On est tout de même dans un débat insensé, du même type que le débat sur le sexe des anges alors que le monde meurt de faim.
Honnêtement, nous devons être le seul pays à imposer par le haut des changements institutionnels sur la langue que nous parlons et écrivons tout en méprisant les usages réels de la langue. Je prends pour acte la réapparition des temps surcomposés dans le langage de tous les jours par chez moi. Un truc ahurissant mais que j'adore. Si on arrêtait un peu les décrets, les ordres et les lois sur la langue pour la laisser vivre, ça irait mieux.
Ensuite, si les gens pouvaient enfin réaffirmer l'importance de la concordance des temps et l'enseigner, merci ! Là, c'est un problème de logique et de sens qui appauvrit notre langue et donc la réflexion dans notre langue. L'accent circonflexe, que j'aime et utilise, c'est vraiment dérisoire comme bataille sociétale. On rêve !
Honnêtement, nous devons être le seul pays à imposer par le haut des changements institutionnels sur la langue que nous parlons et écrivons tout en méprisant les usages réels de la langue. Je prends pour acte la réapparition des temps surcomposés dans le langage de tous les jours par chez moi. Un truc ahurissant mais que j'adore. Si on arrêtait un peu les décrets, les ordres et les lois sur la langue pour la laisser vivre, ça irait mieux.
Ensuite, si les gens pouvaient enfin réaffirmer l'importance de la concordance des temps et l'enseigner, merci ! Là, c'est un problème de logique et de sens qui appauvrit notre langue et donc la réflexion dans notre langue. L'accent circonflexe, que j'aime et utilise, c'est vraiment dérisoire comme bataille sociétale. On rêve !
- DaphnéDemi-dieu
Jane a écrit:De toute façon, ce sont les profs qui auront le dernier mot, et en particulier les profs de français :diable: La guéguerre occupationnelle menée par le ministère et NVB détourne l'attention sur de faux problèmes.
C'est fait pour
- William FosterExpert
Elyas a écrit:L'accent circonflexe, que j'aime et utilise, c'est vraiment dérisoire comme bataille sociétale. On rêve !
Ce n'est pas du rêve, c'est de la communication en contre-feu.
1. Tu ne sais pas comment combattre le terrorisme ? Tu lances un débat sur la déchéance de nationalité.
2. Tu ne sais pas comment mettre en place une réforme illogique de l'enseignement ? Tu lances un débat sur l'accent circonflexe.
3. Tu ne sais pas comment gérer des agriculteurs en colère ? Tu lances un débat sur l'utilité de l'Europe.
4. Tu ne sais pas comment enseigner une notion ? Tu lances un débat en classe pour que les élèves construisent eux-même le cours.
5. Tu ne sais pas comment râler après une dictature ? Tu lances un débat sur le prix des Rafales que tu lui vends.
6. Tu ne sais pas comment revenir au pouvoir ? Tu lances un débat sur pourquoi ceux qui ont fait comme toi, antan, ont faux.
7. Tu ne sais pas comment faire pour qu'un enfant arrête de pleurer ? Tu lui montres un avion qui passe dans le ciel.
8. Tu ne sais pas comment justifier l'injustifiable ? Tu fais comme l'autre, tu ne lis plus rien.
A part la 4 qui peut marcher ponctuellement, et encore faut que ce soit bien pensé et préparé, le reste n'est que poudre aux yeux, nourriture pour journalistes et malhonnêteté intellectuelle. On est plus dans le cauchemar que dans le rêve
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Tout le monde me dit que je ne peux pas faire l'unanimité.
"Opinions are like orgasms : mine matters most and I really don't care if you have one." Sylvia Plath
Vérificateur de miroir est un métier que je me verrais bien faire, un jour.
- ProvenceEnchanteur
Je ne sais pas qui sont les gens, mais je l'enseigne. Si on pouvait enfin se rendre compte qu'il est important que les élèves étudient de façon progressive et structurée leur propre langue, et avoir des horaires raisonnables pour cela, ça irait mieux aussi...Elyas a écrit:
Ensuite, si les gens pouvaient enfin réaffirmer l'importance de la concordance des temps et l'enseigner, merci !
Le problème est de vouloir autoritairement imposer des rectifications orthographiques que rien ne justifie véritablement. Le problème est aussi de faire coexister plusieurs orthographe et de brouiller les repères de tout le monde.Là, c'est un problème de logique et de sens qui appauvrit notre langue et donc la réflexion dans notre langue. L'accent circonflexe, que j'aime et utilise, c'est vraiment dérisoire comme bataille sociétale. On rêve !
- User5899Demi-dieu
Les temps surcomposés sont très cohérents en système, ils sont un témoin très intéressant du manque de tableaux officiels.Elyas a écrit:On est tout de même dans un débat insensé, du même type que le débat sur le sexe des anges alors que le monde meurt de faim.
Honnêtement, nous devons être le seul pays à imposer par le haut des changements institutionnels sur la langue que nous parlons et écrivons tout en méprisant les usages réels de la langue. Je prends pour acte la réapparition des temps surcomposés dans le langage de tous les jours par chez moi. Un truc ahurissant mais que j'adore. Si on arrêtait un peu les décrets, les ordres et les lois sur la langue pour la laisser vivre, ça irait mieux.
Ensuite, si les gens pouvaient enfin réaffirmer l'importance de la concordance des temps et l'enseigner, merci ! Là, c'est un problème de logique et de sens qui appauvrit notre langue et donc la réflexion dans notre langue. L'accent circonflexe, que j'aime et utilise, c'est vraiment dérisoire comme bataille sociétale. On rêve !
Je ne comprends pas vos remarques sur la concordance des temps, que voulez-vous dire ? Vous voulez qu'on utilise les quatre subjonctifs ? Oui, je n'ai jamais compris pourquoi on avait éliminé les quatre formes les plus simples de toute la conjugaison...
- CelebornEsprit sacré
Acte III : Le Point
Dans une lettre argumentée, et rendue publique, la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a exprimé à la secrétaire perpétuelle de l'Académie française son « étonnement ». Qu'a donc fait Hélène Carrère d'Encausse ? Simplement pris ses distances, dans un entretien au Figaro , avec la réforme de l'orthographe qui fait couler tant d'encre – et de tweets. Pour la ministre, l'Académie avait pourtant approuvé cette réforme dès 1990. Une explication s'imposait. Nous avons interrogé Hélène Carrère d'Encausse.
Le Point.fr : Najat Vallaud-Belkacem se dit « étonnée » de votre réaction hostile à cette réforme de l'orthographe… Elle vous a écrit une lettre à ce sujet. Qu'allez-vous lui répondre ?
Hélène Carrère d'Encausse : La courtoisie m'empêche de discuter de cela publiquement. Elle m'a fait porter une lettre, et je vais lui répondre aussi par une lettre, que je lui ferai porter.
Votre courtoisie est tout à votre honneur, mais ce que dit la ministre, c'est que le secrétaire perpétuel de l'époque, Maurice Druon, avait approuvé cette réforme de « rectification » de l'orthographe… Et qu'en 2008, les programmes de l'Éducation nationale, faisant référence à ces « rectifications » ont été « approuvées par l'Académie française »…
Nous avons publié une mise au point sur le site de l'Académie. Le texte est très clair. Dans sa séance du 16 novembre 1989, ce que l'Académie a adopté à l'unanimité, c'est une déclaration qui rappelait fermement son opposition à toute modification autoritaire de l'orthographe. L'orthographe n'a pas à être imposée par un pouvoir politique. C'est ce que l'Académie a réaffirmé, sans se montrer pour autant fermée à certaines évolutions ou tolérances ; nous ne sommes pas passéistes ! C'est vrai qu'il y a des incongruités dans la langue française, et l'exemple de « nénuphar » est intéressant, car le mot, précisément, s'écrivait « nénufar » au XVIIIe siècle, par exemple. Et c'est pourquoi quand Michel Rocard, qui était un esprit subtil, a lancé cette idée de simplification de l'orthographe, nous en avons accepté l'idée, tout en conseillant de « laisser au temps le soin de le modifier selon un processus naturel d'évolution » - ce sont les mots mêmes. La langue est un organisme vivant, et n'a pas à être soumise, de force, à une décision politique, venant d'en haut.
Mais quel est donc ce texte auquel la ministre fait référence et qui aurait été approuvé par l'Académie ?
L'Académie s'est exprimée le 3 mai 1990 sur les principes du projet porté par Michel Rocard. Mais il ne s'agissait que de principes, il n'y avait pas encore de texte et c'est donc sur les seuls principes qu'a porté le vote de l'Académie. Elle a accepté des modifications, mais je le redis, à la double condition que nulle norme graphique ne soit imposée de façon autoritaire, et que les rectifications proposées soient soumises à l'usage que les gens font de cette orthographe. Ni le pouvoir politique ni l'Académie ne sont maîtres de la langue : on peut faire des recommandations, comme cela s'est fait dans les siècles passés, mais on ne passe pas en force, et on regarde ce qui se passe... Qu'est-ce qu'on a vu ? Ces modifications, que nous indiquons d'ailleurs dans notre dictionnaire, par un petit losange, n'ont pas pris dans l'usage… Les gens n'ont pas envie que les mots changent d'orthographe, parce que cette orthographe, c'est aussi ce qui les rassemble. Je vous avoue que je ne comprends pas l'urgence de faire ressurgir, aujourd'hui, ce projet qui date d'il y a vingt-cinq ans…
N'est-il pas tout de même étrange, ce pays qui se déchire pour un accent circonflexe ?
Étrange, mais précieux ! Je crois que cela traduit quelque chose de noble. Dans un monde qui se défait, où l'être humain sent qu'il perd sa place, cette réaction traduit l'attachement à ce qui nous rassemble. Je le répète, je ne suis pas passéiste. Mais au nom de quoi faudrait-il, pour construire l'avenir, se couper de nos racines, et soumettre une langue de force ?
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Labyrinthe où l'admiration des ignorants et des idiots qui prennent pour savoir profond tout ce qu'ils n'entendent pas, les a retenus, bon gré malgré qu'ils en eussent. — John Locke
Je crois que je ne crois en rien. Mais j'ai des doutes. — Jacques Goimard
- JPhMMDemi-dieu
Nous sommes bien d'accord.Elyas a écrit:Honnêtement, nous devons être le seul pays à imposer par le haut des changements institutionnels sur la langue que nous parlons et écrivons tout en méprisant les usages réels de la langue.
Aucune des rénovations de 1990 ne correspondant à un usage réel de la langue, aucune ne devrait être appliquée.
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- HocamSage
JPhMM a écrit:Aucune des rénovations de 1990 ne correspondant à un usage réel de la langue, aucune ne devrait être appliquée.
Je suis tenté de faire au moins une exception pour certains mots de la « liste E », en particulier évènement et assèchement, qui ont en réalité été « oubliés » par les académiciens au XVIIIe lorsqu'ils ont corrigé avénement en avènement et collége (!) en collège, par exemple. J'avoue cependant que vènerie et crèneler me font tiquer.
- JPhMMDemi-dieu
Pourtant évènement est beaucoup moins usité que événement. Pourquoi l'imposer contre l'usage ?
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