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Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 11:23
[modéré]
***

PauvreYorick a écrit:
Et nous ne parlons, ici, pas du texte en entier, mais seulement de ce passage :
Descartes a écrit:Considérant, après cela, ce que c'est quod beatam vitam efficiat, c'est-à-dire quelles sont les choses qui nous peuvent donner ce souverain contentement, je remarque qu'il y en a de deux sortes : à savoir, de celles qui dépendent de nous, comme la vertu et la sagesse, et de celles qui n'en dépendent point, comme les honneurs, les richesses et la santé. Car il est certain qu'un homme bien né, qui n'est point malade, qui ne manque de rien, et qui avec cela est aussi sage et aussi vertueux qu'un autre qui est pauvre, malsain et contrefait, peut jouir d'un plus parfait contentement que lui.
Comme je disais hier, Descartes expose ici la façon d'accéder au bonheur : cela passe par la distinction stoïcienne entre ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas. Et le bonheur est défini par le "souverain contentement", relevant, comme on peut s'en douter, uniquement de ce qui dépend de nous.
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 11:28
Et à ce stade, c'est-à-dire en se limitant au morceau cité de ce second alinéa (avant « toutefois » donc), comment cette distinction stoïcienne est-elle traitée / utilisée ? quelle conclusion autorise-t-elle sous la plume de Descartes ?
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 11:45
PauvreYorick a écrit:Et à ce stade, c'est-à-dire en se limitant au morceau cité de ce second alinéa (avant « toutefois » donc), comment cette distinction stoïcienne est-elle traitée / utilisée ? quelle conclusion autorise-t-elle sous la plume de Descartes ?

Il y a des choses qui dépendent de nous, notamment la vertu et la sagesse. Elles permettront à l'âme de connaitre le "contentement" définissant le bonheur véritable, et non le bon-heur, relevant, lui, de l'indétermination et du hasard relatif à ce qui ne dépend pas de nous.

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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 11:49
Mais ça, ce n'est pas marqué dans l'extrait cité, si ? Voyons :
Descartes a écrit:Considérant, après cela, ce que c'est quod beatam vitam efficiat, c'est-à-dire quelles sont les choses qui nous peuvent donner ce souverain contentement, je remarque qu'il y en a de deux sortes : à savoir, de celles qui dépendent de nous, comme la vertu et la sagesse, et de celles qui n'en dépendent point, comme les honneurs, les richesses et la santé.
Là, Descartes lit Sénèque, et rappelle ce qu'on peut y trouver (et qu'il approuve visiblement puisqu'il ne prend aucun soin de marquer la différence entre ce qu'il lit et ce qu'il expose en son nom propre). Effectivement il y a cette différence canonique entre « ce qui dépend de nous » et « ce qui n'en dépend pas », assortie d'exemples, mais le lien entre cela et le bonheur ou le contentement n'est pas encore fait. Ou plutôt, aucune différence, à ce stade, n'est marquée entre les deux sortes de choses, vu qu'il est dit globalement d'elles qu'elles nous peuvent donner ce souverain contentement.
Descartes a écrit: Car il est certain qu'un homme bien né, qui n'est point malade, qui ne manque de rien, et qui avec cela est aussi sage et aussi vertueux qu'un autre qui est pauvre, malsain et contrefait, peut jouir d'un plus parfait contentement que lui.
Si je paraphrase et si je caricature un peu (mais très peu), j'obtiens : mieux vaut, toutes choses égales par ailleurs, être beau, riche et en bonne santé que moche, pauvre et malade.

C'est assez différent de ce que tu viens de dire.
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 11:57
Je ne comprends pas en quoi mon analyse s'écarte du texte.

On pourrait en fait, il me semble, diviser à nouveau en deux le passage qui nous occupe : de "Considérant" jusqu'à "santé", il y a distinction canonique stoïcienne permettant d'en déduire l'importance de la vertu dont on sait qu'elle est la cause du bonheur.

Et de "Car il est certain" jusqu'à "Toutefois", Descartes reconnait que ce qui ne dépend pas de nous (richesse, bonne santé...) peut constituer une valeur ajoutée au bonheur réellement conçu , c'est à dire celui relevant de notre propre psychologie et non pas de facteurs extérieurs.

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:07
Parménide a écrit: de "Considérant" jusqu'à "santé", il y a distinction canonique stoïcienne permettant d'en déduire l'importance de la vertu dont on sait qu'elle est la cause du bonheur.
Voilà exactement où le bât blesse et où tu peux améliorer. Ton « dont on sait que... » est ce que tu tiens pour acquis sans t'être demandé si ça correspondait bien à ce que tu avais sous les yeux. Que Descartes reconnaisse qu'on puisse faire la distinction que fait Sénèque n'implique pas qu'il s'en serve exactement de la même façon que lui. Dans l'extrait auquel nous nous limitons maintenant, rien n'est déduit du tout concernant « l'importance de la vertu », et il n'est pas suggéré qu'elle soit « la » cause du bonheur (en tout cas pas davantage que, par exemple, la richesse).
Parménide a écrit: Et de "Car il est certain" jusqu'à "Toutefois", Descartes reconnait que ce qui ne dépend pas de nous (richesse, bonne santé...) peut constituer une valeur ajoutée au bonheur réellement conçu [...]
Du coup, en cohérence avec ta lecture, tu requalifies (ou sous-qualifies) comme « valeur ajoutée » ce qui se lit en toutes lettres dans cette phrase, à savoir qu'on est plus heureux (« plus parfait contentement ») quand, toutes choses égales par ailleurs, on est beau, riche et bien portant, que quand on est moche, pauvre et malade.

Je ne dis pas, ici, que tu te trompes sur les intentions de Descartes. Je dis que pour rendre compte comme tu le fais de ce bout de texte, tu as besoin de prendre en compte ce qui se trouve après « toutefois ». C'est ça qui m'importe ici.
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 12:17
Pourtant Descartes écrit quasiment mot pour mot que la vertu engendre le bonheur... Certes ce n'est pas la seule chose, mais on comprend avec le reste du texte que c'est l'élément essentiel.


Dernière édition par Parménide le Mar 17 Mar 2015 - 12:18, édité 1 fois

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par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:18
Parménide a écrit:Pourtant Descartes écrit quasiment mot pour mot que la vertu engendre le bonheur...
Dans le bout de texte considéré ?
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par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:26
Parménide a écrit: Certes ce n'est pas la seule chose, mais on comprend avec le reste du texte que c'est l'élément essentiel.
C'est bien ce que je dis. Si c'est le reste du texte qui permet de dire ça, pourquoi en faire la description de ce petit bout-là ?

Autre remarque : Descartes commente un auteur stoïcien pour qui la vertu est le seul élément pertinent relativement au bonheur. Il est donc naturel de s'intéresser à ce qui distingue sa propre position de celle de l'auteur qu'il commente ici de loin.
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par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 12:30
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit: Certes ce n'est pas la seule chose, mais on comprend avec le reste du texte que c'est l'élément essentiel.
C'est bien ce que je dis. Si c'est le reste du texte qui permet de dire ça, pourquoi en faire la description de ce petit bout-là ?

Autre remarque : Descartes commente un auteur stoïcien pour qui  la vertu est le seul élément pertinent relativement au bonheur. Il est donc naturel de s'intéresser à ce qui distingue sa propre position de celle de l'auteur qu'il commente ici de loin.

Et on retombe toujours sur le même problème : celui des connaissances à acquérir durant la préparation. Là, il est possible qu'on ne puisse pas réussir l'épreuve (enfin, il faudrait s'entendre sur ce qu'est réussir, est ce que c'est avoir 10-12 ou avoir 15?) si on ne connait pas Sénèque...

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par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:33
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit: Certes ce n'est pas la seule chose, mais on comprend avec le reste du texte que c'est l'élément essentiel.
C'est bien ce que je dis. Si c'est le reste du texte qui permet de dire ça, pourquoi en faire la description de ce petit bout-là ?

Autre remarque : Descartes commente un auteur stoïcien pour qui  la vertu est le seul élément pertinent relativement au bonheur. Il est donc naturel de s'intéresser à ce qui distingue sa propre position de celle de l'auteur qu'il commente ici de loin.

Et on retombe toujours sur le même problème : celui des connaissances à acquérir durant la préparation.
Non. Chaque chose en son temps. En plus, les connaissances nécessaires sur Sénèque, de toute façon, tu les as, la preuve : ce sont elles qui font écran à ta lecture.

Le problème important, c'est le suivant : tu as une phrase qui tient un propos complètement anti-stoïcien (grossièrement : « on est plus heureux riche que pauvre ») et tu sembles glisser dessus et ne pas la prendre en compte dans ta caractérisation du propos. Alors qu'elle n'offre pas de difficulté d'interprétation à proprement parler, elle dit très clairement ce qu'elle dit.

L'autre problème, c'est que tu considères (au vu de ton découpage) le bout du second alinéa qu'on a cité comme tenant un propos complet pour ensuite passer à autre chose. J'essaie de montrer que ce qui, dans ce second alinéa, précède « toutefois », ne forme pas un propos complet. On est en attente de quelque chose : si on s'y limite, on ne sait pas, on ne peut pas savoir quel usage sera fait de la fameuse distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas. Tout ce qu'on peut dire à l'aide de ce seul extrait, c'est que ça ne sera pas identique à l'usage stoïcien, à cause de la phrase que je viens de rappeler.
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par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 12:48
PauvreYorick a écrit:

L'autre problème, c'est que tu considères (au vu de ton découpage) le bout du second alinéa qu'on a cité comme tenant un propos complet pour ensuite passer à autre chose. J'essaie de montrer que ce qui, dans ce second alinéa, précède « toutefois », ne forme pas un propos complet. On est en attente de quelque chose : si on s'y limite, on ne sait pas, on ne peut pas savoir quel usage sera fait de la fameuse distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas. Tout ce qu'on peut dire à l'aide de ce seul extrait, c'est que ça ne sera pas identique à l'usage stoïcien, à cause de la phrase que je viens de rappeler.

Ce qui est sur c'est que je n'aurais jamais expliqué le texte de cette manière. Et se pose dès lors le problème de savoir si plusieurs façons d'expliquer un texte sont possibles, avec plusieurs plans possibles, etc, bref, le pendant de ce sur quoi je m'interroge beaucoup pour la dissertation.

Il me semble que ce long deuxième paragraphe forme deux parties distinctes de l'explication. Parce qu'il me semble qu'à partir de "Toutefois" on a la thématique de l'universalité de l'accès au bonheur. Alors qu'auparavant on a la méthode d'accès, procédant de la distinction stoïcienne. Mais là où Descartes se sépare du Stoïcisme c'est qu'il réhabilite quand même, en un certain sens, ce qui ne dépend pas de nous. Parce que ce qui ne dépend pas de nous augmente notre contentement, mais sans pour autant en constituer l'essence. Mais je ne suis pas sur que Sénèque serait formellement en désaccord avec ça... Pourquoi le stoïcisme condamnerait-il la santé et la richesse si on a la capacité d'être heureux en les ayant comme en ne les ayant pas? C'est ce qu'ils appellent les indifférents.


Dernière édition par Parménide le Mar 17 Mar 2015 - 12:53, édité 1 fois

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:53
Parménide a écrit: Mais là où Descartes se sépare du Stoïcisme c'est qu'il réhabilite quand même, en un certain sens, ce qui ne dépend pas de nous.
Ça, oui.
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Qu'il y ait plusieurs explications possibles d'un texte et parfois plusieurs découpages possibles, c'est vrai.
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Parménide a écrit: Il me semble que ce long deuxième paragraphe forme deux parties distinctes de l'explication. Parce qu'il me semble qu'à partir de "Toutefois" on a la thématique de l'universalité de l'accès au bonheur. Alors qu'auparavant on a la méthode d'accès, procédant de la distinction stoïcienne.
Pourtant :
Descartes a écrit:Toutefois, comme un petit vaisseau (3) peut être aussi plein qu'un plus grand, encore qu'il contienne moins de liqueur, ainsi, prenant le contentement d'un chacun pour la plénitude et l'accomplissement de ses désirs réglés selon la raison, je ne doute point que les plus pauvres et les plus disgraciés de la fortune ou de la nature ne puissent être entièrement contents et satisfaits, aussi bien que les autres, encore qu'ils ne jouissent pas de tant de biens. Et ce n'est que de cette sorte de contentement, de laquelle il est ici question ; car puisque l'autre n'est aucunement en notre pouvoir, la recherche en serait superflue.
C'est bien dans la dernière phrase de ce paragraphe que se trouve la phrase qui te permet de dire ce que tu disais à propos de son début.
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 12:55
Parménide a écrit: Parce que ce qui ne dépend pas de nous augmente notre contentement [...] Mais je ne suis pas sur que Sénèque serait formellement en désaccord avec ça...
Effectivement la question se pose, c'est un point délicat à l'intérieur du Stoïcisme de savoir quoi faire des biens extérieurs qui sont supposés ne pas pouvoir augmenter le bonheur, mais qui néanmoins seront choisis plutôt que leur absence. Mais ça, on peut le laisser de côté, ce n'est pas central vu que c'est bien Descartes qu'il faut expliquer ici. On ne joue pas l'explication de texte là-dessus, du tout.
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(Précision : sur cette question de découper ou non le deuxième alinéa en deux parties distinctes, l'argument principal reste à venir.)
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par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 13:11
PauvreYorick a écrit:
(Précision : sur cette question de découper ou non le deuxième alinéa en deux parties distinctes, l'argument principal reste à venir.)

ça me choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à "Toutefois". De toute façon, étant donné que je ne sais pas découper un texte, c'est malheureusement un débat tournant un peu à vide...

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par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 13:15
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:
(Précision : sur cette question de découper ou non le deuxième alinéa en deux parties distinctes, l'argument principal reste à venir.)
ça me choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à "Toutefois". De toute façon, étant donné que je ne sais pas découper un texte, c'est malheureusement un débat tournant un peu à vide...
Tu te poses la question à l'envers. À supposer que tu ne saches pas découper un texte, tu es en train en ce moment même d'apprendre à le faire dans cette discussion.

Pourquoi ça te choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à « toutefois » ? est-ce que c'est seulement à cause de ce que tu as expliqué, à savoir l'irruption d'un nouveau thème (de l'« universalité », disais-tu), ou pour d'autres raisons également ?
DesolationRow
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Empereur

Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par DesolationRow Mar 17 Mar 2015 - 13:15
Laisse tomber la discussion sur le "découpage" (sic) du texte. Tu as l'occasion (enfin !) de parler de philosophie avec PY. Saisis-là, discute du texte, des idées, de leur enchaînement.
[modéré]
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 13:17
[Modéré]

PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit:
(Précision : sur cette question de découper ou non le deuxième alinéa en deux parties distinctes, l'argument principal reste à venir.)
ça me choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à "Toutefois". De toute façon, étant donné que je ne sais pas découper un texte, c'est malheureusement un débat tournant un peu à vide...
Tu te poses la question à l'envers. À supposer que tu ne saches pas découper un texte, tu es en train en ce moment même d'apprendre à le faire dans cette discussion.

Pourquoi ça te choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à « toutefois » ? est-ce que c'est seulement à cause de ce que tu as expliqué, à savoir l'irruption d'un nouveau thème (de l'« universalité », disais-tu), ou pour d'autres raisons également ?

Je dirais que ce deuxième paragraphe est trop riche conceptuellement pour qu'on ne lui attribue qu'un seule rôle, qu'une seule fonction... Et puis on sent bien qu'on passe à un autre point de vue à partir de "Toutefois".


Dernière édition par Parménide le Mar 17 Mar 2015 - 13:19, édité 1 fois

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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Aspasie Mar 17 Mar 2015 - 13:18
Parménide, tu devrais relire cet extrait de l'échange...
PauvreYorick a écrit:
Parménide a écrit: Et dans la deuxième, à partir de "Toutefois", il pointe le caractère universel de la possibilité d'accès au bonheur.  Après, on peut toujours regrouper ces deux moments en un seul, mais ça me générait un peu de le faire , personnellement.
Est-ce que ça sous-entend qu'avant le « toutefois », le caractère universel de la possibilité d'accéder au bonheur est explicitement ou implicitement tu ou nié ? Et rend-on compte de ce qui suit « toutefois » si l'on se contente de dire cela ? pourquoi laisser tomber le terme cartésien de « contentement » pour celui de « bonheur », en dépit des remarques du début du texte ?

Bon, ça ne répond pas exactement à la question que je posais.
PauvreYorick a écrit: Avec quoi, selon toi, ce qu'introduit ce « toutefois » est-il mis en balance ?
Je m'attendais à la (bonne) réponse suivante : « toutefois... » répond à « il est certain que... » phrase précédente.
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par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 13:19
Ma suggestion (et mon argument principal) : essayer de considérer comme une unité les deux phrases que voici.
Descartes a écrit: [...] il est certain qu'un homme bien né, qui n'est point malade, qui ne manque de rien, et qui avec cela est aussi sage et aussi vertueux qu'un autre qui est pauvre, malsain et contrefait, peut jouir d'un plus parfait contentement que lui. Toutefois, comme un petit vaisseau peut être aussi plein qu'un plus grand, encore qu'il contienne moins de liqueur, ainsi, prenant le contentement d'un chacun pour la plénitude et l'accomplissement de ses désirs réglés selon la raison, je ne doute point que les plus pauvres et les plus disgraciés de la fortune ou de la nature ne puissent être entièrement contents et satisfaits, aussi bien que les autres, encore qu'ils ne jouissent pas de tant de biens.
Considérer que la célèbre image des deux vaisseaux vient précisément répondre à l'idée du « plus parfait contentement » que donneraient les biens extérieurs (toutes choses par ailleurs égales).

(À plus tard, j'ai des trucs urgents à faire.)

((Je vois qu'Aspasie semble d'accord Wink ))
Levincent
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Levincent Mar 17 Mar 2015 - 13:30
PauvreYorick a écrit:
Effectivement la question se pose, c'est un point délicat à l'intérieur du Stoïcisme de savoir quoi faire des biens extérieurs qui sont supposés ne pas pouvoir augmenter le bonheur, mais qui néanmoins seront choisis plutôt que leur absence.


Je me demandais si on pouvait également parler de l'ascétisme chrétien, qui a un autre avis là-dessus (par exemple, le vœu de pauvreté des franciscains ou "les trois classes d'hommes" d'Ignace de Loyola, dans la quatrième journée des Exercices Spirituels). Même s'il n'en est nullement question dans la lettre, on ne peut non plus ignorer que Descartes était contemporain de telles pratiques. Du coup, je ne sais pas s'il est pertinent de montrer en quoi Descartes se démarque de cette conception, ou bien si on frise le hors-sujet.
De plus, son argument final sur le témoignage de la conscience, qui ne nécessite pas "que la raison ne se trompe point", rejoint assez la casuistique. Qu'est-ce que vous en pensez ?
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Tonio Kröger
Niveau 8

Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Tonio Kröger Mar 17 Mar 2015 - 14:03
Levincent a écrit:

De plus, son argument final sur le témoignage de la conscience, qui ne nécessite pas "que la raison ne se trompe point", rejoint assez la casuistique. Qu'est-ce que vous en pensez ?

C'est vrai qu'on en vient à penser aux Provinciales. Mais je pencherais plutôt (cf. les commentaires de P. Guénancia) pour une prise en compte du domaine moral et pratique comme domaine du probable, où règne une autre forme de certitude, à savoir la certitude morale qui émerge lorsqu'on a produit le plus grand effort de soi sur soi (rectitude et constance, ou : vertu) et où dès lors la volonté doit savoir se décider et ne pas se perdre dans les méandres de la ratiocination. Le monde de Descartes n'est pas vraiment un monde imprégné par un Dieu moral, par conséquent je l'imagine mal chercher à justifier artificieusement les faiblesses de la volonté.
Parménide
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par Parménide Mar 17 Mar 2015 - 14:04
Si on ne peut pas se fier aux connecteurs logiques pour établir le plan du texte, à quoi faut il se fier?

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"Les paroles essentielles sont des actions qui se produisent en ces instants décisifs où l'éclair d'une illumination splendide traverse la totalité d'un monde", Martin Heidegger, "Schelling", (semestre d'été 1936)

"Et d'une brûlure d'ail naitra peut-être un soir l'étincelle du génie", Saint-John Perse, "Sécheresse" (1974)

"Il avait dit cela d'un air fatigué et royal", Franz-Olivier Giesbert, "Le vieil homme et la mort" (1996)

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User17706
Bon génie

Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 15:34
Parménide a écrit:
PauvreYorick a écrit: Pourquoi ça te choque de ne pas faire commencer une nouvelle partie à « toutefois » ? est-ce que c'est seulement à cause de ce que tu as expliqué, à savoir l'irruption d'un nouveau thème (de l'« universalité », disais-tu), ou pour d'autres raisons également ?
Je dirais que ce deuxième paragraphe est trop riche conceptuellement pour qu'on ne lui attribue qu'un seule rôle, qu'une seule fonction... Et puis on sent bien qu'on passe à un autre point de vue à partir de "Toutefois".
Le premier argument n'a rien de décisif : un paragraphe peut être conceptuellement riche tout en manifestant une unité difficile à saucissonner. Le deuxième argument n'en est pas un du tout : « on sent bien que » ne ressemble ni de près ni de loin à une justification.
Parménide a écrit:Si on ne peut pas se fier aux connecteurs logiques pour établir le plan du texte, à quoi faut il se fier?
Mais on peut s'y fier. La question est de savoir ce qu'ils connectent.


Dernière édition par PauvreYorick le Mar 17 Mar 2015 - 15:48, édité 1 fois
DesolationRow
DesolationRow
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Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par DesolationRow Mar 17 Mar 2015 - 15:44
Tonio Kröger a écrit:
Levincent a écrit:

De plus, son argument final sur le témoignage de la conscience, qui ne nécessite pas "que la raison ne se trompe point", rejoint assez la casuistique. Qu'est-ce que vous en pensez ?

C'est vrai qu'on en vient à penser aux Provinciales. Mais je pencherais plutôt (cf. les commentaires de P. Guénancia) pour une prise en compte du domaine moral et pratique comme domaine du probable, où règne une autre forme de certitude, à savoir la certitude morale qui émerge lorsqu'on a produit le plus grand effort de soi sur soi (rectitude et constance, ou : vertu) et où dès lors la volonté doit savoir se décider et ne pas se perdre dans les méandres de la ratiocination. Le monde de Descartes n'est pas vraiment un monde imprégné par un Dieu moral, par conséquent je l'imagine mal chercher à justifier artificieusement les faiblesses de la volonté.

Je songerais d'autant plus aux Provinciales que le témoignage de la conscience, c'est une expression de la lettre aux Corinthiens qui a pas mal fait réfléchir saint Augustin.
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User17706
Bon génie

Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645. - Page 4 Empty Re: Descartes, Lettre à Elisabeth du 4 août 1645.

par User17706 Mar 17 Mar 2015 - 15:45
Levincent a écrit:
PauvreYorick a écrit: Effectivement la question se pose, c'est un point délicat à l'intérieur du Stoïcisme de savoir quoi faire des biens extérieurs qui sont supposés ne pas pouvoir augmenter le bonheur, mais qui néanmoins seront choisis plutôt que leur absence.
Je me demandais si on pouvait également parler de l'ascétisme chrétien, qui a un autre avis là-dessus (par exemple, le vœu de pauvreté des franciscains ou "les trois classes d'hommes" d'Ignace de Loyola, dans la quatrième journée des Exercices Spirituels). Même s'il n'en est nullement question dans la lettre, on ne peut non plus ignorer que Descartes était contemporain de telles pratiques. Du coup, je ne sais pas s'il est pertinent de montrer en quoi Descartes se démarque de cette conception, ou bien si on frise le hors-sujet.
Il n'y a pas de mal à faire la remarque mais je n'en ferais pas des tartines.
Levincent a écrit: De plus, son argument final sur le témoignage de la conscience, qui ne nécessite pas "que la raison ne se trompe point", rejoint assez la casuistique. Qu'est-ce que vous en pensez ?
Je crois que je n'identifie pas très bien en quel sens ça rejoindrait la casuistique. Tu peux développer ?
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