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- inviteeMNiveau 8
Bonjour à tous,
J'aurais besoin de vos lumières pour me rassurer et me permettre de produire le meilleur travail possible pour mes élèves, dont certains paraissent m'attendre au tournant.
Voici donc le premier texte sur lequel j'ai travaillé:
Texte A : Michel De Montaigne, Les Essais, Livre II, chap. 30, « Au sujet d'un enfant monstrueux » (1595), trad. d'André Lanly.
Montaigne consacre un court chapitre de ses Essais au phénomène des monstres et apporte ainsi une contribution importante à un débat en vogue au XVIe siècle.
Je vis avant-hier un enfant que deux hommes et une nourrice, qui disaient être le père, l'oncle et la tante, conduisaient pour le montrer à cause de son étrangeté et pour tirer de cela quelque sou. Il était pour tout le reste d'une forme ordinaire et il se soutenait sur ses pieds, marchait et gazouillait à peu près comme les autres enfants de même âge […] ; ses cris semblaient bien avoir quelque chose de particulier : il était âgé de quatorze mois tout juste. Au-dessous de ses tétins, il était attaché et collé à un autre enfant sans tête et qui avait le canal du dos bouché, le reste intact, car s'il avait un bras plus court que l'autre, c'est qu'il lui avait été cassé accidentellement à leur naissance ; ils étaient joints face à face et comme si un plus petit enfant voulait en embrasser un second […].
Les [êtres] que nous appelons monstres ne le sont pas pour Dieu, qui voit dans l'immensité de son ouvrage l'infinité des formes qu'il y a englobées ; et il est à croire que cette forme, qui nous frappe d'étonnement, se rapporte et se rattache à quelque autre forme d'un même genre, inconnu de l'homme. De sa parfaite sagesse1 il ne vient rien que de bon et d'ordinaire et de régulier ; mais nous n'en voyons pas l'arrangement2 et les rapports.
« Quod crebro videt, non miratur, etiam si cur fiat nescit. Quod ante non vidit, id, si evenerit, ostentum esse censet."3 » [Ce que (l'homme) voit fréquemment ne l'étonne pas, même s'il en ignore la cause. Mais si ce qu'il n'a jamais vu arrive, il pense que c'est un prodige.]
Nous appelons « contre nature» ce qui arrive contrairement à l'habitude : il n'y a rien, quoi que ce puisse être, qui ne soit pas selon la nature. Que cette raison universelle et naturelle chasse de nous l'erreur et l'étonnement que la nouveauté nous apporte.
J'ai mené avec eux toute l'analyse linéaire, parfois en frôlant la paraphrase pour être sûre qu'ils comprennent (classe faible), en tentant malgré tout de m'élever le plus souvent possible mais tout en ayant le sentiment d'être restée au ras des pâquerettes et de n'avoir pas été à la hauteur.
Je leur ai demandé de réfléchir pour demain à un plan et à une problématique.
Je suis moi-même en train de faire le travail, et je pensais proposer quelque chose comme ça:
Problématique: Dans quelle mesure l'évocation d'un "enfant monstrueux" devient-elle l'occasion d'une réflexion sur la notion même de monstre?
I. Le portrait d'un enfant "étrange"
1. La rencontre d'une bête de foire
2. Une description objective d'une "chose vue".
3. L'affirmation de son essence humaine
II. L'occasion d'une réflexion philosophique
1. Une pensée à l'essai (travail autour de la structure du texte, son organisation en deux temps, observation puis réflexion philosophique, travail sur les temps et les pronoms employés)
2. Une invitation à l'humilité (travail autour de l'ignorance affirmée de l'homme, en opposition constante avec Dieu)
3. Un hymne à la raison
III. Une défense humaniste de l'altérité
1. L'affirmation d'un ordre divin du monde
2. Le "contre-nature" en question
3. Pour une redéfinition de la notion même d'humanité.
Est-ce que cela vous semble cohérent? Voyez-vous des choses à reprendre?
Je ne voudrais pas faire mauvaise impression dès le début de l'année...
Merci d'avance à tous ceux qui accepteront de m'aider/de me rassurer!
J'aurais besoin de vos lumières pour me rassurer et me permettre de produire le meilleur travail possible pour mes élèves, dont certains paraissent m'attendre au tournant.
Voici donc le premier texte sur lequel j'ai travaillé:
Texte A : Michel De Montaigne, Les Essais, Livre II, chap. 30, « Au sujet d'un enfant monstrueux » (1595), trad. d'André Lanly.
Montaigne consacre un court chapitre de ses Essais au phénomène des monstres et apporte ainsi une contribution importante à un débat en vogue au XVIe siècle.
Je vis avant-hier un enfant que deux hommes et une nourrice, qui disaient être le père, l'oncle et la tante, conduisaient pour le montrer à cause de son étrangeté et pour tirer de cela quelque sou. Il était pour tout le reste d'une forme ordinaire et il se soutenait sur ses pieds, marchait et gazouillait à peu près comme les autres enfants de même âge […] ; ses cris semblaient bien avoir quelque chose de particulier : il était âgé de quatorze mois tout juste. Au-dessous de ses tétins, il était attaché et collé à un autre enfant sans tête et qui avait le canal du dos bouché, le reste intact, car s'il avait un bras plus court que l'autre, c'est qu'il lui avait été cassé accidentellement à leur naissance ; ils étaient joints face à face et comme si un plus petit enfant voulait en embrasser un second […].
Les [êtres] que nous appelons monstres ne le sont pas pour Dieu, qui voit dans l'immensité de son ouvrage l'infinité des formes qu'il y a englobées ; et il est à croire que cette forme, qui nous frappe d'étonnement, se rapporte et se rattache à quelque autre forme d'un même genre, inconnu de l'homme. De sa parfaite sagesse1 il ne vient rien que de bon et d'ordinaire et de régulier ; mais nous n'en voyons pas l'arrangement2 et les rapports.
« Quod crebro videt, non miratur, etiam si cur fiat nescit. Quod ante non vidit, id, si evenerit, ostentum esse censet."3 » [Ce que (l'homme) voit fréquemment ne l'étonne pas, même s'il en ignore la cause. Mais si ce qu'il n'a jamais vu arrive, il pense que c'est un prodige.]
Nous appelons « contre nature» ce qui arrive contrairement à l'habitude : il n'y a rien, quoi que ce puisse être, qui ne soit pas selon la nature. Que cette raison universelle et naturelle chasse de nous l'erreur et l'étonnement que la nouveauté nous apporte.
J'ai mené avec eux toute l'analyse linéaire, parfois en frôlant la paraphrase pour être sûre qu'ils comprennent (classe faible), en tentant malgré tout de m'élever le plus souvent possible mais tout en ayant le sentiment d'être restée au ras des pâquerettes et de n'avoir pas été à la hauteur.
Je leur ai demandé de réfléchir pour demain à un plan et à une problématique.
Je suis moi-même en train de faire le travail, et je pensais proposer quelque chose comme ça:
Problématique: Dans quelle mesure l'évocation d'un "enfant monstrueux" devient-elle l'occasion d'une réflexion sur la notion même de monstre?
I. Le portrait d'un enfant "étrange"
1. La rencontre d'une bête de foire
2. Une description objective d'une "chose vue".
3. L'affirmation de son essence humaine
II. L'occasion d'une réflexion philosophique
1. Une pensée à l'essai (travail autour de la structure du texte, son organisation en deux temps, observation puis réflexion philosophique, travail sur les temps et les pronoms employés)
2. Une invitation à l'humilité (travail autour de l'ignorance affirmée de l'homme, en opposition constante avec Dieu)
3. Un hymne à la raison
III. Une défense humaniste de l'altérité
1. L'affirmation d'un ordre divin du monde
2. Le "contre-nature" en question
3. Pour une redéfinition de la notion même d'humanité.
Est-ce que cela vous semble cohérent? Voyez-vous des choses à reprendre?
Je ne voudrais pas faire mauvaise impression dès le début de l'année...
Merci d'avance à tous ceux qui accepteront de m'aider/de me rassurer!
- cariboucGuide spirituel
On dirait moi (je me sens exactement comme ça aussi)maelia a écrit:J'ai mené avec eux toute l'analyse linéaire, parfois en frôlant la paraphrase pour être sûre qu'ils comprennent (classe faible), en tentant malgré tout de m'élever le plus souvent possible mais tout en ayant le sentiment d'être restée au ras des pâquerettes et de n'avoir pas été à la hauteur.
Je n'ai pas regardé ton texte, ni ton plan mais je le ferai... quand je serai moins sous l'eau (et pendant ce temps, les experts du lycée auront déjà donné leur avis )
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"J'adore parler de rien : c'est le seul domaine où j'ai de vagues connaissances" (O. Wilde)
- ysabelDevin
La paraphrase est une phase qu'on est obligé de faire pour être à peu près certain que les élèves comprennent le texte (ainsi que l'explication du lexique). Seulement ensuite nous pouvons passer à l'étude littéraire.
Je trouve ton plan sympa.
Comptes-tu faire une analyse linéaire au début ? Ainsi ils pourront eux-mêmes "remplir" le plan. Cela permet de les forcer à bosser.
Bon, rassure-moi, tu ne comptes pas apporter des siamois en classe ?
Je trouve ton plan sympa.
Comptes-tu faire une analyse linéaire au début ? Ainsi ils pourront eux-mêmes "remplir" le plan. Cela permet de les forcer à bosser.
Bon, rassure-moi, tu ne comptes pas apporter des siamois en classe ?
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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante
« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
- inviteeMNiveau 8
Non, vraiment, je ne compte pas recourir aux siamois!
J'ai fait l'analyse linéaire en premier. Nous y avons passé 2h (où c'est surtout moi qui ai parlé, la participation dans la classe se résumant à celle de trois élèves pour l'instant...je m'y sens atrocement seule!).
A l'issue de cette analyse linéaire, je leur ai demandé de réfléchir à une problématique et à un plan. Je travaillerai à partir de ce qu'ils proposent, pour pointer les défauts de méthode surtout.
Puis je leur proposerai mon plan, à eux de le remplir. Je vérifierai ensuite 1) que cela est fait; 2) que cela est bien fait. J'hésite à leur demander de m'en rédiger une partie, sachant qu'ils ont déjà la question de corpus pour lundi (ils m'ont gonflée dès le début de l'année avec leurs bavardages et leur manque de motivation, j'ai donc décidé de taper fort dès le début).
Est-ce que ce déroulé de "séance" est convenable?
J'y passe forcément du temps, ça me permet de mettre à plat les choses en ce début d'année, et de leur montrer comment procéder pour commenter un texte.
- totoroMonarque
Il me parait pas mal ce plan.
ET pour les élèves qui t'attendent au tournant, n'oublie pas que c'est censé être à eux de faire l'analyse du texte...
ET pour les élèves qui t'attendent au tournant, n'oublie pas que c'est censé être à eux de faire l'analyse du texte...
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- totoroMonarque
Passer du temps sur les 1ers textes est normal (j'ai passé une heure sur un quatrain aujourd'hui...)
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- ysabelDevin
maelia a écrit:
Non, vraiment, je ne compte pas recourir aux siamois!
J'ai fait l'analyse linéaire en premier. Nous y avons passé 2h (où c'est surtout moi qui ai parlé, la participation dans la classe se résumant à celle de trois élèves pour l'instant...je m'y sens atrocement seule!).
A l'issue de cette analyse linéaire, je leur ai demandé de réfléchir à une problématique et à un plan. Je travaillerai à partir de ce qu'ils proposent, pour pointer les défauts de méthode surtout.
Puis je leur proposerai mon plan, à eux de le remplir. Je vérifierai ensuite 1) que cela est fait; 2) que cela est bien fait. J'hésite à leur demander de m'en rédiger une partie, sachant qu'ils ont déjà la question de corpus pour lundi (ils m'ont gonflée dès le début de l'année avec leurs bavardages et leur manque de motivation, j'ai donc décidé de taper fort dès le début).
Est-ce que ce déroulé de "séance" est convenable?
J'y passe forcément du temps, ça me permet de mettre à plat les choses en ce début d'année, et de leur montrer comment procéder pour commenter un texte.
Ben c'est tout bon je trouve cela !
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« vous qui entrez, laissez toute espérance ». Dante
« Il vaut mieux n’avoir rien promis que promettre sans accomplir » (L’Ecclésiaste)
- ALEA69Niveau 1
bonjour,
je commence l'année avec des 1èreES avec la même séquence : j'ai commencé par un extrait de "l'homme qui rit" ( plus abordable que Montaigne pour débuter l'année) Je pense comparer le texte de Montaigne avec un texte d'Ambroise Paré extrait de "Des prodiges et des Monstres" ( texte proposé par le manuel dans lequel figure la séquence). Ton plan sur le texte de Montaigne me semble très pertinent.
Mes élèves ont à trouver un plan et une problématique suite aux nombreux relevés faits sur le texte de "l'homme qui rit" ( j'ai pris le portrait de Gwynplaine et non pas celui proposé par le manuel ) Voilà où j'en suis ... je pense faire lire "le rapport de Brodeck" en lecture cursive ... passer le film de Tod Browning "Freaks" ... et poursuivre par une étude de "ZOO , l'assassin philanthrope" en OI... c'est encore en projet ...
je commence l'année avec des 1èreES avec la même séquence : j'ai commencé par un extrait de "l'homme qui rit" ( plus abordable que Montaigne pour débuter l'année) Je pense comparer le texte de Montaigne avec un texte d'Ambroise Paré extrait de "Des prodiges et des Monstres" ( texte proposé par le manuel dans lequel figure la séquence). Ton plan sur le texte de Montaigne me semble très pertinent.
Mes élèves ont à trouver un plan et une problématique suite aux nombreux relevés faits sur le texte de "l'homme qui rit" ( j'ai pris le portrait de Gwynplaine et non pas celui proposé par le manuel ) Voilà où j'en suis ... je pense faire lire "le rapport de Brodeck" en lecture cursive ... passer le film de Tod Browning "Freaks" ... et poursuivre par une étude de "ZOO , l'assassin philanthrope" en OI... c'est encore en projet ...
- inviteeMNiveau 8
C'est marrant, j'ai aussi changé le texte de L'Homme qui rit proposé par le manuel pour étudier le portrait de Gwynplaine, tandis que je compte faire Le Rapport de Brodeck en OI ensuite!
- trompettemarineMonarque
mp
- inviteeMNiveau 8
Bonsoir à tous,
Je reviens vers vous car je doute...
J'ai donné Le HOrla en cursive, cela est moyennement passé auprès des élèves.
Surtout, je me suis mise à stresser, suite à une remarque de l'un d'eux qui m'a demandé quel rapport ce texte pouvait avoir avec la séquence. Je me suis aperçue que j'ai naturellement pensé au Horla du fait du thème que je traite. Mais, de fait, il n'y a pas grand rapport avec l'argumentation...Comment faire en sorte que cela paraisse cohérent, à la fois aux élèves et aux examinateurs en vue de l'oral?
Je me sens bête de ne pas y avoir réfléchi plus avant, mais je me sens en permanence débordée pour le moment...
Je reviens vers vous car je doute...
J'ai donné Le HOrla en cursive, cela est moyennement passé auprès des élèves.
Surtout, je me suis mise à stresser, suite à une remarque de l'un d'eux qui m'a demandé quel rapport ce texte pouvait avoir avec la séquence. Je me suis aperçue que j'ai naturellement pensé au Horla du fait du thème que je traite. Mais, de fait, il n'y a pas grand rapport avec l'argumentation...Comment faire en sorte que cela paraisse cohérent, à la fois aux élèves et aux examinateurs en vue de l'oral?
Je me sens bête de ne pas y avoir réfléchi plus avant, mais je me sens en permanence débordée pour le moment...
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