Prépas : on ne vous dit pas tout

La prépa reste encore un sujet à polémique. Si pour certains, elle n'est qu'un lieu de reproduction des élites sans intérêt, pour d'autres elle permet une aventure intellectuelle stimulante. Peut-être avez-vous vu un épisode d'Envoyé Spécial il y a quelques années sur France 2, décrivant "l'enfer des prépas" en nous plongeant dans la vie de jeunes étudiants qui avaient choisi d'étudier dans une des plus grandes parisiennes. Peut-être ainsi vous rappelez-vous de cet enfer composé en outre d'un colleur de maths antipathique ou encore d'une professeur qui avait refusé les équivalences à un élève de façon très sèche.

A l'époque, ce reportage avait fait polémique : pour beaucoup d'étudiants en classe prépa, il ne dévoilait qu'un côté des classes prépa : le côté sombre c'est-à-dire l'acharnement de travail nécessaire pour obtenir une école, le stress omniprésent... mais oubliait de mentionner des aspects plus agréables : sorties, loisirs...

Et c'est vrai. Je suis étudiant en classe prépa, et je ne suis pas cloîtré, je sors occasionnellement, je m'accorde des pauses - parfois confortables - pour me détendre. Bien entendu, personne n'est dupe : le travail demandé est intense, et hautement exigeant. D'ailleurs, je culpabilise de ne pas travailler au moment même où j'écris. Mais là n'est pas le mal, c'est un choix, que je supporte très bien (et heureusement).

Rassurez-vous je ne compte pas faire un état des lieux de la situation éternellement. Je viens ici pour rendre compte d'une situation que les caméras ne peuvent transcrire. Car si les caméras oublient des aspects comme la vie sociale des étudiants en prépa (peut-être volontairement...), elles ne peuvent pas non plus apprécier une réalité plus tragique : la terreur que certains profs prennent plaisir à instaurer dans leur classe. Car, en effet, aucun prof n'est assez idiot pour avoir une attitude de terrible devant une caméra.

La terreur s'installe

Je tiens à la fois à rassurer le commun des mortels, et à dissuader la fronde d'étudiants en prépa que je vois déjà arriver, m'accusant de caricaturer la réalité. Les événements qui se sont produits sont rares, et heureusement. Toutefois, je crois bon de les dévoiler car ils n'ont pas leur place dans notre système éducatif à mon sens.

Nous l'appellerons Caroline. Caroline a une quarantaine d'années. Elle est agrégée d'anglais. Dès le premier jour, j'ai senti que sa méthode n'était pas la méthode douce. Après une courte présentation, premier thème grammatical (=traduction) avec des élèves allant corriger les phrases au tableau. A la sortie du lycée, le niveau en langues n'est généralement pas très bon. Nous l'avons très vite compris avec ses remarques déplaisantes. La boule au ventre s'installait, la peur de passer au tableau et comme nous disions dans notre langage, de se faire "défoncer" car c'est le terme rendant le mieux compte de la situation ici. L'air dédaigneux et pédant de Caroline était omniprésent et insupportable. Les remarques fusaient sans cesse, rendant l'ambiance électrique durant ces cours. Car entendons-nous bien, si passer au tableau n'est pas un drame en soi, je défie quiconque de me soutenir que se faire humilier au tableau devant une classe inconnue est judicieux

Et puis vint ce fameux 5 novembre ...

La prépa c'est éprouvant, ce n'est un secret pour personne. Les vacances de la Toussaint furent pour moi autant un moment pour décompresser que de me remettre à jour. Ce fameux 5 novembre, Caroline m'interrogea afin que je fasse un récapitulatif du dernier thème vu en cours. Apeuré, j'obtempéra. Je l'avoue : je n'avais pas revu ce thème, mais j'ai quand même ressorti des éléments vus en classe.

Heureusement (ou pas) je ne fus pas le seul

La série noire commença avec des méthodes douteuses. Faire passer au tableau des élèves, parfois pendant 1h30, sur un coup de tête pour leur faire comprendre qu'ils n'ont rien à faire ici. Se plaindre à posteriori du retard dans le planning. Pratiquer l'évaluation la plus négative possible, éviter tout encouragement, privilégier les remarques péjoratives. Crier sans cesse que ces points auraient du être vus en 6ème, 5ème.. (au fait, si des élèves au collège me lisent, le passif on le fait en 6ème ...?). Ecrire des mots avec des abréviations que personne ne comprend.

La boule au ventre s'installe avant d'aller en cours avec la peur de se faire interroger, la peur d'entendre encore une fois qu'on ne vaut rien, que nous n'avons rien à faire ici. Car même les entrées en classe sont stressantes avec par exemple une remarque du type : "Le dernier qui rentre passe au tableau aujourd'hui". Imaginez-vous instant à la place de ces étudiants brûlant d'angoisse à l'idée de devoir essuyer des remarques toujours plus désagréables, peu importe le travail fourni. Car une fois les premiers mots prononcés par le pauvre étudiant désigné, Caroline prend la parole, critique le manque de précision, se désole, et pose une question impossible.

Mais pourquoi ?

J'ai failli abandonner à cause de ce professeur. Je me suis interrogé à plusieurs reprises sur ce comportement. Peut-être la volonté de se sentir qu'on possède un pouvoir qu'on peut exercer librement.
Jusqu'à quand ?

Celadon a écrit:"Apeuré, j'obtempéra." "à posteriori."
" Peut-être la volonté de se sentir qu'on possède un pouvoir qu'on peut exercer librement."
Ca c'est du style. Espérons que le chérimoncoeur n'est pas en Khâgne...

Marcel Khrouchtchev a écrit:

Celadon a écrit:"Apeuré, j'obtempéra." "à posteriori."
" Peut-être la volonté de se sentir qu'on possède un pouvoir qu'on peut exercer librement."
Ca c'est du style. Espérons que le chérimoncoeur n'est pas en Khâgne...

Ouch.

Thalia de G a écrit:

Marcel Khrouchtchev a écrit:

Celadon a écrit:"Apeuré, j'obtempéra." "à posteriori."
" Peut-être la volonté de se sentir qu'on possède un pouvoir qu'on peut exercer librement."
Ca c'est du style. Espérons que le chérimoncoeur n'est pas en Khâgne...

Ouch.

que nous ne passeront pas tous
Bien que j'ai répondu à certaines questions...

alpha75 a écrit:Effectivement, je n'avais pas lu l'article avant de le publier ici...peut-on supprimer le sujet?

victor44 a écrit:
La prépa apprend avant tout la soumission

Cincinnata a écrit:gnagnagna ne gâchez pas mon lyrisme nocturne !

PauvreYorick a écrit:

Cincinnata a écrit:gnagnagna ne gâchez pas mon lyrisme nocturne !

De tous les lyrismes, le nocturne est le plus drôle à gâcher