- User5899Demi-dieu
Oui, elle est au programme de CM1. Ce n'est pas une critique envers vous, hein C'est juste qu'on en est arrivé à un point tel que quand un gosse sait vaguement au niveau n ce qu'il devrait savoir depuis n-3, on est contents...Rell a écrit:Par exemple, à la mi-mars, nous avons étudié l'accord du participe passé en cinquième. Tout se passe bien, certains élèves connaissaient même déjà la règle.
- vivieloNiveau 1
J'ai mal expliqué ma façon de penser. Je ne suis pas une adepte du "mettre du sens" partout, ou alors je me trompe. Je dis juste que si je peux expliquer l'origine de telle conjugaison, ou l'histoire de tel mot, par exemple, je le fais. J'ai réagi de manière excessive, je le reconnais et en suis désolée.
- User5899Demi-dieu
Oui, j'ai d'ailleurs reformulé de mon côté avant de vous lire Ce que vous pratiquez, bien sûr, a de l'intérêt. C'est simplement qu'on ne peut pas laisser des élèves se débrouiller avec seulement ça. C'est mettre la totalité de la charrue avant les boeufs.vivielo a écrit:J'ai mal expliqué ma façon de penser. Je ne suis pas une adepte du "mettre du sens" partout, ou alors je me trompe. Je dis juste que si je peux expliquer l'origine de telle conjugaison, ou l'histoire de tel mot, par exemple, je le fais. J'ai réagi de manière excessive, je le reconnais et en suis désolée.
- vivieloNiveau 1
Je fais des cours de langue classiques en fait (cours, exercices, applications). Le fait que j'ajoute une explication est un plus. Je le fais maintenant après avoir eu des élèves qui m'ont demandé si les règles de grammaire étaient créées volontairement pour être si complexes et embêter les élèves.
- V.MarchaisEmpereur
Mais expliquer l'histoire des mots ou l'origine de telle règle, ça n'a rien à voir avec le fait de cloisonner ou non.
- vivieloNiveau 1
En effet, cela dérive.
- retraitéeDoyen
Mais enfin, vous croyez que nous ne le faisons pas ou ne l'avons pas fait ?
mettre en relation l'accord du pp conjugué avec avoir et celui de l'attribut du COD, par exemple; ou expliquer la formation du futur simple . ou l'origine des pluriels en x;
mettre en relation l'accord du pp conjugué avec avoir et celui de l'attribut du COD, par exemple; ou expliquer la formation du futur simple . ou l'origine des pluriels en x;
- vivieloNiveau 1
"Retraitée", est-ce à moi que votre message s'adresse ?
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
egomet a écrit:Oublie tes réflexes d'étudiant en lettres. Dis-toi que tu es d'abord un professeur de langue, et qu'au passage, tu en profites pour faire découvrir et aimer la littérature.
Egomet, ma réponse n'est pas le fruit d'un réflexe d'étudiant (merci...), je ne me suis pas offusqué contre l'idée d'accorder beaucoup de place à la grammaire, je m'interroge simplement sur les conséquences sur la mise en oeuvre du programme en littérature. J'en suis à ma première année et je ne connais que des collègues pour qui il y a énormément de choses qu'il faut absolument apprendre en littérature, alors c'est un peu surprenant pour moi de découvrir des pratiques qui me semblaient quasiment interdites quand je les imaginais pour moi. Enfin, quand même, me lancer que je suis victime de mes études, je pourrais m'en vexer :/
- AnacycliqueÉrudit
Nous ne parlons pas de la même chose. Je ne crois pas qu'un cours de grammaire décloisonné soit un mélange de grammaire et de lecture/compréhension de texte. Je ne pense pas que ce soit ce qui est attendu dans une séquence. Décloisonner n'empêche pas de faire de la grammaire, et d'en faire très bien, autant d'heures que l'on veut.V.Marchais a écrit:J'ai une analyse très différente. Avec mes élèves dont un grand nombre est en grande difficulté de lecture, c'est un réel soulagement pour eux que certaines leçons ne supposent pas sans cesse la compréhension de textes littéraires. Des élèves peu à l'aise avec l'écrit peuvent être très rationnels, doués en maths, et cet esprit logique est très efficace en grammaire. Libérés du désarroi que causent chez eux les textes, ils réussissent en grammaire et ce sont des heures qu'ils apprécient, qu'ils ne voient pas passer, alors que lecture et écriture restent un labeur pour eux. Ils se raccrochent à cette réussite pour reprendre confiance en leurs capacités en Français en général.
La mécanique froide, c'est bien, quand ça permet de montrer qu'il y a des règles finalement simples et récurrentes.
Et encore une fois, il ne faut pas tomber dans la caricature : cloisonner n'empêche ni de faire les liens nécessaires avec les textes - mais seulement les liens nécessaires - ni de lier grammaire et écriture.
La grammaire s'apprend nécessairement dans un premier temps comme une mécanique (le terme n'est aucunement péjoratif), comme les conjugaisons ou les tables de multiplication. Ensuite, elle doit prendre, au fur et à mesure, du sens. Au collège, elle prend justement tout son sens (encore que, tout dépende de la notion abordée) parce qu'on peut l'observer, en mesurer l'effet dans un texte ou qu'on l'utilise pour écrire, etc.
Au risque de me répéter, je crois que le problème n'est pas la séquence, mais la grammaire elle-même. Lorsqu'on est (très) mal à l'aise avec la grammaire ou certaines notions de grammaire, on n'hésite pas à saupoudrer ou à tronquer le programme. Moi la première lorsque j'ai débuté (j'ai d'ailleurs mis des années à être solide pour présenter certaines notions et je pense que nos approches évoluent, se perfectionnent au fil des ans).
En supprimant la vilaine séquence, je doute que l'on obtienne des progressions complètes, une augmentation des heures de grammaire ou une amélioration de leur qualité...
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"Faire ce que l'on dit et dire ce que l'on fait. Passer aux actes afin de faire sa part."
- egometDoyen
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:egomet a écrit:Oublie tes réflexes d'étudiant en lettres. Dis-toi que tu es d'abord un professeur de langue, et qu'au passage, tu en profites pour faire découvrir et aimer la littérature.
Egomet, ma réponse n'est pas le fruit d'un réflexe d'étudiant (merci...), je ne me suis pas offusqué contre l'idée d'accorder beaucoup de place à la grammaire, je m'interroge simplement sur les conséquences sur la mise en oeuvre du programme en littérature. J'en suis à ma première année et je ne connais que des collègues pour qui il y a énormément de choses qu'il faut absolument apprendre en littérature, alors c'est un peu surprenant pour moi de découvrir des pratiques qui me semblaient quasiment interdites quand je les imaginais pour moi. Enfin, quand même, me lancer que je suis victime de mes études, je pourrais m'en vexer :/
Je te présente mes excuses. Je ne voulais pas te vexer.
C'était juste pour souligner le décalage entre un CAPES de lettres et le métier de professeur de français. Il y a comme une tromperie dans le recrutement. Ça n'empêche pas, heureusement, de bien faire son travail. Mais l'institution a tendance à nous induire en erreur et à nous paralyser avec des consignes contradictoires. J'ai moi-même eu beaucoup de mal à me situer.
Alors, si tu dois faire des choix dans le programme, s'il faut que tu définisses tes priorités, n'aie pas trop de scrupules. Sois juste un peu prudent pour ta validation, mais ensuite, fais selon ta conscience et les besoins réels de tes élèves.
Au passage, quelles sont ces choses qu'il faut absolument apprendre en littérature? Et pourquoi? Ce sont de vraies questions.
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Primum non nocere.
Ubi bene, ibi patria.
Mes livres, mes poèmes, réflexions pédagogiques: http://egomet.sanqualis.com/
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
C'est une question qui me travaille. Je suis à l'aise en grammaire, mais en littérature, après huit mois de stage, je ne sais toujours pas vraiment comment l'aborder. Comme nous tous, j'adhère à l'idée qu'il faut que les élèves sortent du collège avec une sensibilité plus fine aux textes et à la langue en général, mais si je m'en tiens à cela les textes ne sont que des prétextes pour s'exercer. Je ne sais pas faire en sorte qu'un texte fasse sens pour les élèves, qu'il ait en lui-même un intérêt. Ma tutrice dit que les textes structurent les représentations des élèves, qu'ils deviennent pour eux des modèles pour comprendre leurs propres expériences. Mais qu'est-ce qui confirme cela ? Nous faut-il vraiment de la littérature pour comprendre ce qui nous arrive ? Elle parle aussi de la formation morale. Ovide, la Bible ou La Fontaine ont-ils jamais rendu les gens plus moraux ?... C'est peut-être de toute l'approche humaniste des textes dont je doute un peu. Quant à l'enseignement des codes génériques, j'avoue ne pas en comprendre l'intérêt, mais je le fais, au cas où la lumière me viendrait, pour ne rien regretter.
Si je m'intéresse beaucoup aux pratiques de l'expression écrite en ce moment, c'est parce qu'elles m'offrent peut-être une piste pour donner du sens au reste des cours : peut-être que ce qui me conviendrait, c'est d'étudier les textes comme moyen d'apprendre à s'exprimer soi-même, en observant la manière des autres. Approche sans doute banale et plus ou moins partagée par tout le monde, mais j'ai l'esprit bizarre et il me faut parfois du temps pour accéder à l'ABC des choses.
En tout cas, pour l'heure, je suis bien plus à l'aise en grammaire, et je me prends à me dire que, ah, si je pouvais ne faire que ça...
Si je m'intéresse beaucoup aux pratiques de l'expression écrite en ce moment, c'est parce qu'elles m'offrent peut-être une piste pour donner du sens au reste des cours : peut-être que ce qui me conviendrait, c'est d'étudier les textes comme moyen d'apprendre à s'exprimer soi-même, en observant la manière des autres. Approche sans doute banale et plus ou moins partagée par tout le monde, mais j'ai l'esprit bizarre et il me faut parfois du temps pour accéder à l'ABC des choses.
En tout cas, pour l'heure, je suis bien plus à l'aise en grammaire, et je me prends à me dire que, ah, si je pouvais ne faire que ça...
- doctor whoDoyen
1 - On a besoin d'histoires pour comprendre le monde. Pourquoi pas celles de la littérature ?
2 - Les collégiens apprennent la reproduction des oursins. Pourquoi pas la littérature ?
3 - Les élèves ont besoin d'affiner leur expression. Pourquoi pas sur le modèle de la littérature ?
4 - Un homme cultivé est censé s'y connaître un peu en littérature. Pourquoi pas en étudiant de la littérature ?
2 - Les collégiens apprennent la reproduction des oursins. Pourquoi pas la littérature ?
3 - Les élèves ont besoin d'affiner leur expression. Pourquoi pas sur le modèle de la littérature ?
4 - Un homme cultivé est censé s'y connaître un peu en littérature. Pourquoi pas en étudiant de la littérature ?
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Mon blog sur Tintin (entre autres) : http://popanalyse.over-blog.com/
Blog pédagogique : http://pedagoj.eklablog.com
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Je ne sais pas si nous avons besoin des histoires pour comprendre le monde. Le comprend-on moins bien sans histoires... Les histoires peuvent aussi faire écran à une bonne compréhension des choses. D'une manière ou d'une autre, le "pourquoi pas" est vraiment trop indigeste pour moi, il m'en faut plus. Je ne peux pas non plus répondre à mes propres questions en postulant que celles-ci sont valables pour d'autres matières : cela étend le domaine de mes doutes, voilà tout. La littérature pour se cultiver parce que la définition courante de l'individu cultivé comporte une part de littérature, cela ne me convient pas. Et je n'en suis pas sûr. Quant à l'expression, c'est effectivement ce qu'il me reste, comme je le dis à la fin de mon message, et la petite porte où j'aimerais mieux m'engouffrer l'an prochain.
Après je ne sais pas si cette discussion est le bon endroit pour déployer mes états d'âme : je me contenterais d'en témoigner. Mais il me faudrait sans doute une bonne discussion comme ça pour m'en soigner (j'ai essayé avec ma tutrice, elle avait l'air effrayée, elle se demandait si c'était vraiment ce qu'il me fallait être prof en collège ; j'ai pas vu le rapport).
Après je ne sais pas si cette discussion est le bon endroit pour déployer mes états d'âme : je me contenterais d'en témoigner. Mais il me faudrait sans doute une bonne discussion comme ça pour m'en soigner (j'ai essayé avec ma tutrice, elle avait l'air effrayée, elle se demandait si c'était vraiment ce qu'il me fallait être prof en collège ; j'ai pas vu le rapport).
- lilith888Grand sage
si ça peut te rassurer, l'approche humaniste des textes ne m'a jamais vraiment convaincue :lol:
Mais je ne suis pas un bon exemple à suivre : je ne fais que de l'étude de textes en collège et pas de grammaire, le tout en séquences bien entendu
Mais je ne suis pas un bon exemple à suivre : je ne fais que de l'étude de textes en collège et pas de grammaire, le tout en séquences bien entendu
- SeiGrand Maître
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Je ne sais pas si nous avons besoin des histoires pour comprendre le monde. Le comprend-t-on moins bien sans histoires...
Je ne crois pas que l'on puisse dire que l'on comprend mieux ou moins bien le monde avec ou sans histoires.
On peut comprendre le monde par la physique, la psychanalyse, la sociologie... autant d'approches différentes qui vont nous révéler une partie du monde, un petit bout du grand mystère. Je crois que chacun a une dominante, dans son approche de la vie.
Pour ma part, c'est principalement (mais pas que, bien sûr), par la littérature que j'aime envisager le monde. J'aime voir comment les auteurs s'emparent de petits ou grands mystères et quelle vision ils en proposent. Cela me passionne, et je trouve qu'il est magnifique d'aider de jeunes personnes à y avoir accès... parce que seuls, cela peut être difficile, il faut apprendre à lire.
Et dès la 6e, c'est possible. Les contes ont été, par exemple, l'occasion de discuter du fantasme d'abandon que tous les enfants expérimentent (ah tiens, presque tous les élèves de la classe ont un jour pensé que leurs parents n'étaient peut-être pas les leurs, c'est drôle !), et de découvrir que non, on n'était pas seul avec ces sentiments, parce que la littérature nous aidait à les traverser, en nous racontant des histoires, et en nous accompagnant pour grandir. La poésie a été l'occasion de voir le monde à travers une multitude d'images, plus ou moins étonnantes, de découvrir la multiplicité des points de vue sur un monde qui n'est pas aussi univoque que l'on pourrait le croire.
J'ai adoré faire cours à mes 6e cette année, et j'ai trouvé nos discussions plus riches, parce que plus propices à l'ouverture, que dans ma classe de 4e, où j'ai eu des difficultés à toucher les élèves (le rapport de confiance a été brisé, je crois, à un moment de l'année). Je n'ai pas estimé que nous allions moins loin, bien que, forcément, plus l'âge est jeune, moins l'explication de texte en elle-même est développée.
- lilith888Grand sage
mais ne risque-t-on pas, à aborder la littérature par ce biais, de tomber dans le psychologique ou le fantasme ? (qui peut ensuite conduire au fantasme interprétatif au lycée ?)
- doctor whoDoyen
Je précise : les enfants ont besoin d'histoire pour comprendre le monde. Les histoires sont le moyen privilégié de l'enfance pour cela. Adulte, il y a effectivement d'autres sources de compréhension.
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- egometDoyen
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:C'est une question qui me travaille. Je suis à l'aise en grammaire, mais en littérature, après huit mois de stage, je ne sais toujours pas vraiment comment l'aborder. Comme nous tous, j'adhère à l'idée qu'il faut que les élèves sortent du collège avec une sensibilité plus fine aux textes et à la langue en général, mais si je m'en tiens à cela les textes ne sont que des prétextes pour s'exercer. Je ne sais pas faire en sorte qu'un texte fasse sens pour les élèves, qu'il ait en lui-même un intérêt. Ma tutrice dit que les textes structurent les représentations des élèves, qu'ils deviennent pour eux des modèles pour comprendre leurs propres expériences. Mais qu'est-ce qui confirme cela ? Nous faut-il vraiment de la littérature pour comprendre ce qui nous arrive ? Elle parle aussi de la formation morale. Ovide, la Bible ou La Fontaine ont-ils jamais rendu les gens plus moraux ?... C'est peut-être de toute l'approche humaniste des textes dont je doute un peu. Quant à l'enseignement des codes génériques, j'avoue ne pas en comprendre l'intérêt, mais je le fais, au cas où la lumière me viendrait, pour ne rien regretter.
Si je m'intéresse beaucoup aux pratiques de l'expression écrite en ce moment, c'est parce qu'elles m'offrent peut-être une piste pour donner du sens au reste des cours : peut-être que ce qui me conviendrait, c'est d'étudier les textes comme moyen d'apprendre à s'exprimer soi-même, en observant la manière des autres. Approche sans doute banale et plus ou moins partagée par tout le monde, mais j'ai l'esprit bizarre et il me faut parfois du temps pour accéder à l'ABC des choses.
En tout cas, pour l'heure, je suis bien plus à l'aise en grammaire, et je me prends à me dire que, ah, si je pouvais ne faire que ça...
Cela fait beaucoup d'inquiétudes! Mais il est bon de se poser ces questions.
La littérature est le moyen le plus souple et le plus léger de s'imprégner des expériences humaines. Les sciences sociales ont le défaut majeur de généraliser à outrance et de disséquer ce qui devrait être vivant. Il y a un danger à faire de la psychanalyse ou de la sociologie avant l'heure, c'est à dire avant d'avoir accumulé une masse d'expériences et de faits qui permette d'aborder ces disciplines avec un minimum de bon sens. La littérature contribue fortement à familiariser le lecteur avec les idées et les aspirations des autres. C'est en cela qu'elle participe à l'éducation morale. Elle invite à se décentrer de soi et à comprendre la variété des esprits et des situations, peut-être encore mieux que l'histoire, qui touche moins à l'intime. Evidemment, si on espère trouver dans la littérature un manuel de bonne conduite, on fait fausse route.
Cela dit, ce qui importe le plus au collège, c'est de lire des textes variés, de s'habituer à cette rencontre, plus que de connaître des oeuvres réputées incontournables. C'était le sens de ma question. Il peut m'arriver de dire qu'il est nécessaire de connaître tel ou tel chef d'oeuvre, mais ce n'est qu'une posture professorale. Il n'est pas rigoureusement indispensable de connaître Molière ou Voltaire. Au pire, ce qu'on risque à les ignorer, c'est de passer pour un péquenot. Ce qui est important, c'est de toucher aux grandes questions de l'humanité.
Bien d'accord avec toi sur les codes génériques. Cette approche est généralement stérile, très souvent inutile pour comprendre les textes et parfois carrément trompeuse. On voit des floppées de candidats au bac, qui se précipitent sur des analyses très fouillées et techniques, et qui ne sont pas foutus de se rendre compte que le texte proposé est drôle. Les outils d'analyse littéraire doivent être utilisés pour comprendre les textes et non l'inverse. Il est très rare que le schéma narratif éclaire un conte. Il vaudrait mieux expliquer le vocabulaire et les symboles. Repérer un narrateur omniscient n'apporte presque jamais rien à la compréhension d'un roman, mais parfois répérer une focalisation interne permet d'éclairer certains passages. Si la scène du sauvetage d'Aouda est étrange, c'est parce qu'on la voit avec les yeux de Philéas Fogg. Il m'a été utile d'expliquer la focalisation à une classe de cinquième, précisément parce que ce passage leur posait problème. Mais on s'épuise souvent à expliquer le concept dans le vide, ou dans des cas où il ne présente pas d'intérêt. Je préfère aborder tout ça au fil des textes, selon les opportunités. Je choisis des beaux textes, abordables, qui puissent servir de références culturelles. J'essaie de montrer ce qui fait leur saveur. Les reste vient naturellement
A l'inverse, j'estime que la grammaire de phrase doit être étudiée méthodiquement. Malheureusement, les programmes ont beaucoup incité les professeurs à faire l'inverse (grammaire en passant, cours centré sur le discours). Je crois que c'est une grave erreur.
Bien sûr, les grandes oeuvres comme modèles d'écriture, c'est une approche parfaitement valable. C'est même le fondement de toute création littéraire. On sèche beaucoup moins sur sa feuille de rédaction, quand on a compris que c'est d'abord une question de culture, d'observation et de logique, et fort peu une question d'imagination.
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- egometDoyen
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Je ne sais pas si nous avons besoin des histoires pour comprendre le monde. Le comprend-on moins bien sans histoires... Les histoires peuvent aussi faire écran à une bonne compréhension des choses. D'une manière ou d'une autre, le "pourquoi pas" est vraiment trop indigeste pour moi, il m'en faut plus. Je ne peux pas non plus répondre à mes propres questions en postulant que celles-ci sont valables pour d'autres matières : cela étend le domaine de mes doutes, voilà tout. La littérature pour se cultiver parce que la définition courante de l'individu cultivé comporte une part de littérature, cela ne me convient pas. Et je n'en suis pas sûr. Quant à l'expression, c'est effectivement ce qu'il me reste, comme je le dis à la fin de mon message, et la petite porte où j'aimerais mieux m'engouffrer l'an prochain.
Après je ne sais pas si cette discussion est le bon endroit pour déployer mes états d'âme : je me contenterais d'en témoigner. Mais il me faudrait sans doute une bonne discussion comme ça pour m'en soigner (j'ai essayé avec ma tutrice, elle avait l'air effrayée, elle se demandait si c'était vraiment ce qu'il me fallait être prof en collège ; j'ai pas vu le rapport).
La fiction peut être un écran. C'est vrai. On pourrait reprendre les objections de Rousseau sur les fables ou sur le théâtre, mais la plupart d'entre elles tombent avec une bonne démarche pédagogique. Nous sommes là précisément pour lever les malentendus possibles et apprendre aux élèves à voir ces fictions avec du recul.
On n'est pas obligé d'approuver les oeuvres que l'on étudie. Bien au contraire. Ce n'est pas parce que j'explique à mes élèves l'ironie de Voltaire, que je me prive de leur dire ce que je pense de ses idées.
Quand j'étudie Germinal, ce n'est pas pour justifier la violence révolutionnaire.
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- V.MarchaisEmpereur
lilith888 a écrit:mais ne risque-t-on pas, à aborder la littérature par ce biais, de tomber dans le psychologique ou le fantasme ? (qui peut ensuite conduire au fantasme interprétatif au lycée ?)
Il ne s'agit pas de psychologiser mais d'interpréter.
D'ailleurs, pour avoir eu l'occasion de discuter avec toi sur le sujet et confronter concrètement des approches sur un ou deux cas précis, je pense que les revendications des uns ou des autres (moi, j'ai une approche humaniste, moi, j'ai une approche scientifique) cachent des réalités bien plus nuancées et moins dissemblables qu'il n'y paraît.
Une approche humaniste peut tourner au fantasme interprétatif si elle n'est pas solidement appuyée sur le texte.
Une approche scientifique peut tourner au catalogue qui ne mène nulle part si elle fait fi de toute approche sensible et du sens.
Il y a un juste milieu à trouver, qui part du texte, de sa compréhension littérale (j'ajoute pour Sylvain que cette compréhension littérale ne va pas toujours de soi, selon le public avec lequel tu travailles, et qu'il est parfois bon de la travailler et de montrer comment on y accède), et pour aller plus loin, s'appuie sur des analyse fines des procédés du texte, mais pas seulement. S'intéresser à l'histoire, à ses personnages, à ce qu'elle nous en dit, est non seulement bien plus intéressant pour un enfant que des relevés de figures et de champs lexicaux, mais c'est le seul moyen d'accéder à certaines interprétations : le rôle du destin dans la tragédie, celui des passions et de la démesure dans les mythes, le motif de la transgression dans les contes et leur portée morale, normative, n'émergent pas d'abord d'une série de tropes mais bien plus facilement de l'histoire, de ce qu'elle raconte.
Pour le reste, Sylvain, je suis d'accord avec Egomet. Je crois profondément que lire permet non seulement d'assimiler une langue écrite riche afin de mieux penser, avec davantage de clarté et de précision, mais aussi que cela nous nourrit profondément en nous parlant, dans un langage si riche qu'il est toujours à la fois pour partie explicite et pour partie obscur, mystérieux, de notre expérience d'homme.
Pour ma part, je reconnais que j'approfondis peu les textes avec mes élèves de ZEP niveau 1 (le plus défavorisé). J'en assure la compréhension, c'est déjà parfois beaucoup (et je fais beaucoup de vocabulaire, dont mes élèves sont dramatiquement dépourvus). Si je prétendais faire sans cesse de la technique sur les textes, je perdrais très vite leur attention - peut-être à juste titre, d'ailleurs. Pour aller plus loin, je m'efforce de partir d'une question qui va nous amener à parler des personnages et de l'histoire de façon vivante, mais aussi nous obliger à nous appuyer sur le texte. Par exemple, dans l'extrait du Rouge et le Noir où Julien reçoit la lettre de Mathilde, je peux demander seulement : "Alors, Julien est-il amoureux de Mathilde ?" Il y a toujours ceux qui disent oui, bien sûr, ça se voit, ceux qui disent mais non, regardez, il la manipule, et on est bien obligés d'aller chercher où ça se voit et où on peut regarder. Entretemps, on parle de la société du XIXe siècle, des classes sociales, de volonté de parvenir, de la passion de la revanche, d'émois imprévus, de desseins déjoués par les sentiments... Et les élèves ont toujours mille questions sur tous ces points, ils y projettent leur propre expérience. Finalement, on retient quoi ? Du vocabulaire, peut-être une figure observée dans le texte. Mais surtout, nous avons lu Stendhal - et c'était pas gagné - nous y avons même pris un certain plaisir ( même si "Madame, c'était duuuuuuur !"), nous en avons parlé de façon suffisamment vivante pour que l'année suivante, en évoquant Rastignac, l'un d'eux me sorte : "Ah ouais, Madame, c'est comme l'autre, là, qu'y voulait épouser la fille d'un bourgeois (sic), Lucien ou chépuki - Pas Lucien, Julien, t'es ouf, toi... Bref, ils comprennent, ils apprennent (du vocabulaire surtout), ils prennent plaisir à lire (même si ce ne sont que des extraits) et s'en souviennent, même vaguement. Avons-nous besoin de beaucoup plus ?
- CelebornEsprit sacré
Anacyclique a écrit:
Nous ne parlons pas de la même chose. Je ne crois pas qu'un cours de grammaire décloisonné soit un mélange de grammaire et de lecture/compréhension de texte. Je ne pense pas que ce soit ce qui est attendu dans une séquence. Décloisonner n'empêche pas de faire de la grammaire, et d'en faire très bien, autant d'heures que l'on veut.
La grammaire s'apprend nécessairement dans un premier temps comme une mécanique (le terme n'est aucunement péjoratif), comme les conjugaisons ou les tables de multiplication. Ensuite, elle doit prendre, au fur et à mesure, du sens. Au collège, elle prend justement tout son sens (encore que, tout dépende de la notion abordée) parce qu'on peut l'observer, en mesurer l'effet dans un texte ou qu'on l'utilise pour écrire, etc.
Au risque de me répéter, je crois que le problème n'est pas la séquence, mais la grammaire elle-même. Lorsqu'on est (très) mal à l'aise avec la grammaire ou certaines notions de grammaire, on n'hésite pas à saupoudrer ou à tronquer le programme. Moi la première lorsque j'ai débuté (j'ai d'ailleurs mis des années à être solide pour présenter certaines notions et je pense que nos approches évoluent, se perfectionnent au fil des ans).
En supprimant la vilaine séquence, je doute que l'on obtienne des progressions complètes, une augmentation des heures de grammaire ou une amélioration de leur qualité...
Ça, c'est l'idéal, et parfois, oui, il s'incarne. Mais d'après ce que j'ai constaté, la majeure partie du temps, la séquence déstructure la grammaire et l'atomise alors qu'elle serait censée lui "donner du sens". Aujourd'hui, en collège, dans un bahut pas du tout ZEP, je suis clairement dans la phase du mécanique, avec des élèves qui, pour la plupart, ne maîtrisent ni les natures, ni les fonctions de base, ni la conjugaison la plus élémentaire. Faire de la séquence à ces élèves-là est généralement le plus sûr moyen de les faire ne pas s'en sortir.
Autre point : si, dans les faits, la séquence a diminué le nombre d'heures consacrées à la grammaire, car la plupart des collègues (et ce n'est pas leur faute), pour tenir compte de l'ensemble des injonctions qui accompagnent la séquence, rognent sur la langue. Quand on voit certains modèles de séquences proposés en leur temps par nos inspecteurs, la grammaire y est traitée à une vitesse absolument sidérante (et hop, le passif en 1 heure et c'est bon !). Ce sont ces modèles qui ont servi à la formation, voire au "recadrage idéologique".
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- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
V. Marchais : apprendre à comprendre, enrichir son vocabulaire, son expression, développer une sensibilité toujours plus fine aux textes, ça, j'en comprends la nécessité, particulièrement dans notre société inondée de discours. Mais pour le reste... J'ai du mal à percevoir ce que la littérature m'a apporté. A la fac, j'ai suivi quelques cours de philo, on ressortait volontiers les références littéraires pour aborder tel ou tel problème, mais il me semblait que cela tenait davantage de la coquetterie qu'autre chose. De même, dans la vie courante, la littérature me permet de briller en société - malgré moi, j'ai tellement peur de paraître me la jouer -, j'ai régulièrement l'occasion de penser à tel mythe, telle histoire, telle analyse autrefois déployée, et je reste généralement sur ma faim. Je ne parviens pas à savoir si cela m'a réellement apporté une compréhension plus fine des choses, mais il est vrai que je peux ne pas m'en rendre compte. Je me demande même quelquefois si certains pans de cette culture ne m'ont pas desservi, en amour par exemple . Et je me demande s'il existe vraiment des gens chez qui le manque de culture littéraire a eu de mauvaises conséquences.
Bien sûr, partir de son expérience personnelle, et de la conscience certainement pas objective qu'on en a, pour penser ces questions, cette une démarche qui a ses limites. Peut-être profiterai-je de l'été pour me plonger dans des ouvrages sur les enfants, les adolescents, l'histoire de l'éducation. Evidemment je n'attendrai pas de me trouver plus en confort avec ces idées pour enseigner avec l'objectif d'offrir à mes élèves une culture littéraire aussi approfondie que possible, mais j'enseignerais mieux si je trouvais à ces idées des assises suffisamment solides à mes yeux, je pense. J'aimerais atteindre votre conviction, en somme.
(Et je suis d'accord aussi sur l'importance de travailler la compréhension. Tu penses peut-être à la discussion que j'avais lancée l'année dernière sur la nécessité des questions de compréhension, alors d'un ennui mortel pour moi. Mais je n'ai pas mis beaucoup de temps à m'apercevoir que les élèves ne comprenaient pas forcément les textes proposés, et souvent même pensaient comprendre sans comprendre réellement. Je m'en suis encore aperçu il y a peu : beaucoup d'élèves pensaient avoir compris la ruse inventée par Pathelin pour faire gagner à Agnelet son procès, mais la plupart n'avait saisi que d'une manière confuse - ou pas du tout - comment faire bêler ce personnage pouvait le mener à l'acquittement, en fait. De toute façon, ça va mieux, ça ne m'ennuie plus depuis que j'ai compris que c'était nécessaire.)
Bien sûr, partir de son expérience personnelle, et de la conscience certainement pas objective qu'on en a, pour penser ces questions, cette une démarche qui a ses limites. Peut-être profiterai-je de l'été pour me plonger dans des ouvrages sur les enfants, les adolescents, l'histoire de l'éducation. Evidemment je n'attendrai pas de me trouver plus en confort avec ces idées pour enseigner avec l'objectif d'offrir à mes élèves une culture littéraire aussi approfondie que possible, mais j'enseignerais mieux si je trouvais à ces idées des assises suffisamment solides à mes yeux, je pense. J'aimerais atteindre votre conviction, en somme.
(Et je suis d'accord aussi sur l'importance de travailler la compréhension. Tu penses peut-être à la discussion que j'avais lancée l'année dernière sur la nécessité des questions de compréhension, alors d'un ennui mortel pour moi. Mais je n'ai pas mis beaucoup de temps à m'apercevoir que les élèves ne comprenaient pas forcément les textes proposés, et souvent même pensaient comprendre sans comprendre réellement. Je m'en suis encore aperçu il y a peu : beaucoup d'élèves pensaient avoir compris la ruse inventée par Pathelin pour faire gagner à Agnelet son procès, mais la plupart n'avait saisi que d'une manière confuse - ou pas du tout - comment faire bêler ce personnage pouvait le mener à l'acquittement, en fait. De toute façon, ça va mieux, ça ne m'ennuie plus depuis que j'ai compris que c'était nécessaire.)
- User17706Bon génie
Alors c'est que c'était mal faitSylvain de Saint-Sylvain a écrit:À la fac, j'ai suivi quelques cours de philo, on ressortait volontiers les références littéraires pour aborder tel ou tel problème, mais il me semblait que cela tenait davantage de la coquetterie qu'autre chose.
Mmmh, sans blague, c'est très difficile. Il est à la fois à peu près impossible de nier que la littérature ou, du moins, la fiction, entre pour une part décisive dans le développement de notre vie morale, et extrêmement difficile de préciser en quoi et de quelle façon. C'est tout un champ de recherches, ça, qui ne pénètre en France que depuis peu, somme toute (aux States, notamment avec Martha Nussbaum, c'est plus ancien).
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
PauvreYorick a écrit:Mmmh, sans blague, c'est très difficile. Il est à la fois à peu près impossible de nier que la littérature ou, du moins, la fiction, entre pour une part décisive dans le développement de notre vie morale, et extrêmement difficile de préciser en quoi et de quelle façon. C'est tout un champ de recherches, ça, qui ne pénètre en France que depuis peu, somme toute (aux States, notamment avec Martha Nussbaum, c'est plus ancien).
Si tu as quelques références à feuilleter sur le transat entre un plongeon dans la piscine et un daïquiri à la mangue, je suis preneur.
- User17706Bon génie
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