"Ce texte est ennuyeux": comment réagissez-vous?

Bonjour à tous,

J'aimerais savoir s'il vous arrive d'avoir des remarques négatives sur les textes que vous étudiez en classe. En effet, en début d'année un élève avait levé la main pour dire d'un conte qu'il était peu original, que c'était une histoire qu'on avait déjà entendue plein de fois, que ça ne l'intéressait pas. J'avais rebondi sur le conte qui touche aux problématiques essentielles de l'humanité et j'avais relié le conte étudié à Roméo et Juliette (le conte  étudié parlait d'une histoire d'amour impossible).

Et maintenant, sur un texte de mythologie, un autre élève lève la main pour dire "moi je trouve que ce texte est ennuyeux". J'ai essayé de rebondir sur l'idée qu'à l'école on est obligé de choisir un texte pour trente élèves, que ce texte doit de plus faire partie du programme officiel et qu'on ne peut jamais trouver un texte qui plaise à tout le monde à chaque fois...

Comme je débute dans l'enseignement, je m'interroge un peu sur ces remarques. Je me dis que j'ai su ouvrir un espace de dialogue franc avec les élèves mais je me demande aussi quelle est la part de provocation dans ces remarques. Je venais justement de lire le texte avec application et emphase (une colère de Jupiter!), de sorte que cette remarque m'a déçue et même un peu blessée, et je me demande si cela pouvait être le but de l'élève? A moins que ce ne soit qu'un effet collatéral de sa franchise... Ou bien il teste les limites, veut voir comment je vais réagir...

A noter que ces remarques viennent d'élèves qui ont du mal à faire des interventions pertinentes (souvent ils sont un peu hors-sujet dans leurs interventions orales et auraient une tendance à parler de leur cas particulier plutôt que du cours).

Bref, comment réagissez-vous quand vous avez de telles remarques?

Pourquoi ?

Qu'est-ce qui rend ce texte ennuyeux selon-vous ? Appuyez-vous sur l'analyse de procédés littéraires que vous interpréterez. C'est pour après-demain.

Ça m'est arrivé, mais pas dans le même contexte, de suggérer aux élèves de méditer sur la forme réfléchie, en français, de «s'ennuyer».

Ce texte n'est pas ennuyeux. C'est toi qui t'ennuies. Il y a une nuance. Pour ne pas s'ennuyer, il faut être actif : soit s'amuser, soit travailler. Sommes-nous en classe pour nous amuser ? Nooon, bien sûr. Donc, qu'en déduis-tu ?

libelia2 a écrit: En effet, en début d'année un élève avait levé la main pour dire d'un conte qu'il était peu original, que c'était une histoire qu'on avait déjà entendue plein de fois, que ça ne l'intéressait pas.

Et maintenant, sur un texte de mythologie, un autre élève lève la main pour dire "moi je trouve que ce texte est ennuyeux".

Ils sont bien nombrilistes, ces petits. Si c'est pour dire ça, ce n'est pas la peine de lever la main.

Je me dis que j'ai su ouvrir un espace de dialogue franc avec les élèves mais je me demande aussi quelle est la part de provocation dans ces remarques.

Ce n'est plus de la franchise, c'est de l'égocentrisme teinté d'impolitesse. J'y vois plus une attitude de consommateur qu'une véritable provocation.

Je trouve intéressant que l'élève exprime son avis sur l'oeuvre étudiée, mais il y a un temps pour tout: si tu leur demandes leur avis, il est normal qu'ils te le donnent. Mais si c'est hors-sujet, tu peux tout à fait te permettre une remarque. C'est de toute façon ue attitude négative de la part de l'élève: il est plus simple pour lui de rejeter ce qu'on lui donne à étudier plutôt que de faire l'effort de s'y intéresser.

En bref, ils ont le droit de détester, mais en silence!

"Ennuyeux", c'est le degré zéro du jugement. Il faut préciser, comme le dit Céléborn, faire pointer les passages les plus "ennuyeux", faire dire pourquoi, bref, faire bosser l'élève comme il ne l'a jamais fait. Et tu peux en profiter pour montrer la nécessité ou l'intérêt des passages dits "ennuyeux".
Mais ça, c'est une fois. La fois d'après, il faut exiger une attitude active pour ne pas s'ennuyer, comme dit PauvreYorick.

En fait, je ne comprends pas le problème.
Soit le texte t'ennuies aussi, et autant ne pas le faire. Soit tu es convaincu de son intérêt et l'avis de l'élève, et bien... comment dire...
Autre solution, tu lui expliques les objectifs à atteindre, et les contraintes possibles (pas de photocopie par exemple, ou autre) et tu lui demandes de choisir un texte permettant la réalisation de ces contraintes. Gare à lui si d'autres élèves trouvent son texte ennuyeux !  

Beaucoup d'élèves trouvent ennuyeux les textes qu'ils ne comprennent pas.

Qu'ils travaillent d'abord, on verra ensuite si la motivation vient.

Celeborn a écrit:Pourquoi ?

Qu'est-ce qui rend ce texte ennuyeux selon-vous ? Appuyez-vous sur l'analyse de procédés littéraires que vous interpréterez. C'est pour après-demain.

Voilà. Une réaction se présente, s'explique, se justifie. Ensuite, on peut éventuellement partir sur quelques remarques à propos de la valeur formatrice de l'ennui
Et sur son caractère personnel et non objectif.
Edit. je trouve évidemment excellente la remarque de PauvreYorick. Toutefois, que ce dernier sache que nos professeurs Nimbus de la grammaire ont, semble-t-il, réussi à bouter la forme pronominale hors de la conjugaison, ce qui rend votre "révision" encore plus nécessaire.

Je fais écrire à l'élève 100 fois :
« Cette punition n'est ni ennuyeuse ni inutile. »

Paratge a écrit:Je fais écrire à l'élève 100 fois :
« Cette punition n'est ni ennuyeuse ni inutile. »

Mais un peu illégale ! 

D'accord avec Celeborn!  

Merci pour vos réponses.

L'élève en question est un élève de 6ème, pas très bon lecteur (il m'a dit à plusieurs reprises qu'il n'aimait pas lire). Je crains donc qu'il ne soit pas en mesure de porter un regard critique sur les procédés littéraires qui conduisent à son ennui... ou en tout cas je ne suis pas encore en mesure de l'amener à cette analyse avec mes maigres outils de professeur débutant!

Ce serait peut-être à moi de réfléchir à cette analyse, pour moi-même, pour conduire mes explications de texte... Je n'y avais pas pensé mais effectivement, il est probable qu'il ne comprenne pas bien le sens du texte, et peut-être que son "ennui" est une sorte de manière de déclarer forfait quand, après s'être bien concentré, il commence à fatiguer et constate que le texte lui résiste toujours...? Peut-être serait-ce alors un signal d'alerte qu'il m'adresse, une sorte de "au secours, je ne comprends plus"?! (et dans ce cas-là, ce ne serait pas du tout une provocation mais au contraire une ultime tentative de dialoguer avec le professeur pour accéder au sens du texte?)

(Ce qui ne dédouanerait pas l'élève du début de l'année qui lui, avait très bien compris le texte, et semblait au contraire se plaindre de la simplicité du conte.)

Tu étudies des contes et de la mythologie en anglais?

Ah non, j'avais rempli "anglais" parce que je n'aime pas les questionnaires! J'enseigne le français, désolée pour la confusion!

"Sta mère qu'est ennuyeuse."

Comment ça on a pas le droit ?

Ah! si j'aurions su, j'aurions répondu (quelque peu) différemment

libelia2 a écrit:J'aimerais savoir s'il vous arrive d'avoir des remarques négatives sur les textes que vous étudiez en classe.

Bien sûr ! Tout ne peut pas plaire à tout le monde, surtout quand les élèves ne sont d'office pas très intéressés par le cours et/ou la lecture.

libelia2 a écrit:Bref, comment réagissez-vous quand vous avez de telles remarques?

A priori, je rebondis sur la remarque, même si elle est négative et peu développée : pourquoi est-ce ennuyeux ? Je demande à l'élève de développer son avis afin qu'on discute. J'explique l'intérêt du texte et si l'élève n'est toujours pas convaincu, je lui dis qu'il a le droit d'avoir son avis et la discussion s'arrête là. Je ne fais pas des textes pour leur plaire, je fais des textes pour leur montrer des choses. Si ça leur plaît tant mieux, sinon tant pis.
Si la remarque est une provocation ou si l'élève ne cesse de faire des interventions non pertinentes, je ne réponds pas à sa remarque en lui signifiant qu'il ne participe pas de façon constructive. Ne prends pas les remarques pour toi en tout cas.
J'ai déjà eu, cette année, des élèves qui me demandent d'un air dédaigneux "Pourquoi vous nous faites lire ça ?" Je réponds sereinement pour quelle raison j'ai choisi le texte/le livre, de sorte à leur montrer que leur opinion sur le sujet ne m'intéresse pas : je ne leur demande pas leur avis pour faire mes choix.

Si la beauté est dans l’œil de celui qui regarde, l'ennui peut bien être dans l'esprit de celui qui s'ennuie.

libelia2 a écrit:Ah non, j'avais rempli "anglais" parce que je n'aime pas les questionnaires! J'enseigne le français, désolée pour la confusion!

:shock: 

Moi je mettrais un bonus car il a évité de dire "ennuyant" !

Provence a écrit:Ce n'est plus de la franchise, c'est de l'égocentrisme teinté d'impolitesse. J'y vois plus une attitude de consommateur qu'une véritable provocation.

Totalement. L'idée sous-jacente est que n'est digne d'intérêt que ce qui est amusant.

En ce qui me concerne, face à ce genre de remarques qui ont généralement un côté provocateur, la réponse est de l'ordre du "T'es ici pour apprendre, pas pour t'amuser. À la prochaine remarque hors sujet, tu me le recopieras 5 fois". Et on continue.

mathmax a écrit:Moi je mettrais un bonus car il a évité de dire "ennuyant" !

"ennuyant" pour "ennuyeux", si j'en crois le Robert, n'est pas incorrect : c'est un régionalisme.

Pour ma part je me contrefiche de l'avis des élèves.
Si je leur donne un texte à lire, c'est qu'il sublime, incroyable, exceptionnel, etc.
Et je vais vous montrer pourquoi.
Et en plus, vous allez devoir, le jour du bac montrer pourquoi à l'examinateur.
Mais la situation est un peu différente au collège.

Je lui donnerais le sujet du texte comme sujet de rédaction. Et il a intérêt à faire un texte bien plus intéressant et moins ennuyeux que le texte étudié.  

Le tout, sans faire intervenir de mitraillettes ni de bombes, bien sûr.