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John
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Médiateur

Lire, écrire, publier, ou Littérature et société : 1€ le mot de Beckett.  Empty Lire, écrire, publier, ou Littérature et société : 1€ le mot de Beckett.

par John Mer 21 Sep 2011 - 14:46
1 euro le mot de Beckett

[Lisons] la page de copyright de l'ouvrage Samuel Beckett - l’ascèse du sujet, paru il y a peu chez Minard à Caen, le genre de livre collectif passionnant pour les concernés, pas trop folichon pour les autres. On y trouve comme de juste un encadré intitulé « Crédit » signalant que les extraits des manuscrits de Molloy, d’En attendant Godot et d’autres œuvres ont été reproduits grâce à l’autorisation de "The Estate of Samuel Beckett", autrement dit Edward Beckett, neveu du dramaturge et son légataire, représenté par l’agence Rosica Colin sise à Londres, à qui il a confié la gestion des droits des lettres, archives et autres inédits. Mais, chose inhabituelle, on y découvre également un encadré subtilement intitulé « Débit », signé de l’éditeur Michel Minard : « Bien qu’il s’agisse de citation au sens de la Loi sur la propriété intellectuelle, c’est à dire de fragments de texte non autonomes venant à l’appui du développement d’une étude académique, l’Agent gérant les droits de Samuel Beckett nous a facturé £75 pour 46 mots (étude de Dirk Van Hulle), £75 pour 50 mots (étude de Myriam Jeantroux), £150 pour 300 mots (étude de Karine Germoni) + frais £20 soit environ 1 euro du mot cité ». On dira que c’est supportable en regard de la dette souveraine de la Grèce, mais là n’est pas le problème.

Question de principe : à ce train-là, il ne sera plus possible de citer les auteurs, donc de travailler sur leur œuvre. Tout cela pour 400 exemplaires et uniquement sur le territoire français ! « De telles contraintes sont problématiques, surtout au regard du
 développement considérable de la critique génétique, car elles pénalisent une petite maison d'édition à la
 production purement universitaire, et qui n'en tire
 aucun profit » souligne Llewellyn Brown, responsable de cette collection. Le cas est loin d’être isolé. On connait le cas de Stephen James Joyce, petit-fils de qui vous savez. Cela dit, n’allez pas croire que les représentants d’un auteur ne visent qu’à empêcher : ils défendent et protègent aussi, car les abus ne sont pas à sens unique. L’écrivain et agitateur politique russe Edouard Limonov, fort du récent regain de son oeuvre en France grâce au livre que lui a consacré Emmanuel Carrère, a demandé à l’agent François-Marie Samuelson de mettre de l’ordre dans ses comptes chaotiques ; quelle n’a pas été la surprise de celui-ci de constater que plusieurs de ses éditeurs (Albin Michel, Le Dilettante …) soit ne lui avaient pas versé de droits depuis dix-sept ans, soit publiaient ses livres sans le moindre contrat…

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