- annNiveau 10
pour travailler un sujet de dissert , je cherche à constituer un corpus de bac sur le thème " la litt doit elle être utile à la société ?" avez-vous des idées ou connaissez vous un manuel ou ce sujet est traité ?
Merci
Merci
- narimaNiveau 3
il me semble qu'il y a une séquence sur weblettres...tu y trouveras peut-être des textes...
- henrietteMédiateur
A première vue comme ça, d'un côte la Préface de Mlle Maupin, de l'autre Sartre et les mots revolver, et au milieu Camus et le magnifique discours de Suède. Mais peut-être as-tu déjà abordé ces textes en cours ?
Sinon, je dois les avoir quelque part dans mon PC.
Sinon, je dois les avoir quelque part dans mon PC.
- HervéNiveau 5
Un thème proche est traité dans le manuel d'Hélène Sabbah - Littérature - Textes et séquences - 2nde - Hatier ... " A quoi sert la littérature?"
Textes proposés :
- Rousseau - Emile ou de l'Education : "Puisqu'il nous faut absolument des livres, il en existe un ..."
- Zola - Les Romanciers naturalistes : "Mais je veux être plus affirmatif encore. Seul un tel [Balzac] homme pouvait écrire l'épopée moderne ...
- Jules Lemaître - Les Contemporains : "L'érudition, comme nous la voyons pratiquée par les trois quarts des érudits ..."
- Proust - Sur la lecture : "Mais il est une autre cause à laquelle je préfère, pour finir attribuer cette prédilection des grands esprits pour les ouvrages anciens ..."
- Gracq - La Littérature à l'estomac : "Les autres dans le fouillis de ce qui s'imprime, cherchent à tâtons une nourriture faite à leur estomac ..."
- Jean Guéhenno - Article du Figaro (14 octobre 1966) : "Farenheit 451. C'est son titre et la température à laquelle le papier, les livres prennent feu ..."
- Nuno Judice - Lettre à la jeunesse (2003) - "D'un poème déjà ancien, j'ai écrit "la poésie, telle que je l'entends est inutile". Cette phrase peut devenir une limite au-delà de laquelle celui qui ne s'intéresse pas au problème de la poésie peut s'arrêter ..."
- Umberto Eco - De la littérature (2003) un texte dont la dernière phrase est in fine "ma" réponse : "Je crois que cette éducation au Destin et à la mort est une des fonctions principales de la littérature. Peut-être y en a-t-il d'autres, mais ce soir, elles ne me viennent pas à l'esprit."
Rapidement, j'y ajouterai quelques autres textes, Montaigne (Des Livres - Essais II), un extrait de "Les Mots" de Sartre, d'"Enfance" de Sarraute ... Et tant d'autres ... Ah, un extrait d'un auteur qui a peu écrit, deux petits livres et un peu de correspondance, et qui, quelque part , n'a survécu à l'horreur des camps que par la littérature, la lecture et l'écriture ... Je l'ai croisé à la fin de sa vie à l'Ecole normale de Paris, Georges Hyvernaud, à lire ou à relire ... Un extrait, il vaut le détour :
"Quand les écrivains feront des livres sur la captivité, c'est les cabinets qu'ils devront décrire et méditer. Rien que cela. Ça suffira. Décrire consciencieusement les cabinets et les hommes aux cabinets. Si les écrivains sont des types sérieux, ils s'en tiendront là. Parce que c'est l'essentiel, le rite majeur, le parfait symbole. Mais tels qu'on les connaît, les écrivains, ils auront peur de ne pas avoir l'air assez distingué. Pas assez viril. Pas assez décent. Ils ne parleront pas des cabinets. Ils parleront des leçons de l'épreuve, de la régénération par la souffrance. Ou bien de l'énergie spirituelle, comme ce couillon qui a envoyé une lettre à Monsieur Paul Valéry. Une drôle d'idée, d'ailleurs, qu'il a eue là. Quel secours espérer d'un vieillard sec, subtil et officiel si parfaitement étranger aux trivialités de la souffrance réelle? Le grand homme a répondu. J'ai vu sa réponse: vingt-cinq lignes dactylographiées, et sa signature autographe. Pour nous dire qu'il était heureux de savoir que l'énergie spirituelle nous soutient. Et en effet cela a dû lui faire bien plaisir. Le rassurer, le réconforter. Parce que c'est son affaire, l'énergie spirituelle. Et quand l'énergie spirituelle va, tout va ... Seulement, l'énergie spirituelle, c'est des choses qu'on met dans les livres. Ça n'existe pas. Pas moyen de les prononcer, ces deux mots, sans une grande envie de rigoler. Ici, dans les cabinets. Au milieu de ces types déculottés qui claquent de froid. Des hommes gélatineux, mous, pourris. Des limaces, des asticots. Ce qui les soutient, on ne sait pas trop ce que c'est. Sans doute cette obstination à durer, ce tenace attachement, cet accrochement des vivants à la vie qui empêche les syphilitiques, les tuberculeux et les cancéreux de se foutre à la rivière. Mais sûrement pas l'énergie spirituelle.
Curieux que, dès qu'on écrit, il nous vienne un besoin de mentir. C'est plus fort que vous. Un besoin de donner aux choses une apparence avantageuse. Et si vous y résistez, on vous trouvera immoral et subversif. Les gosses dans les écoles savent déjà cela. On les invite à décrire, mettons, une soirée en famille. Et, aussitôt, ils vous campent un grand-papa à barbe blanche, une sœur qui brode sous la lampe et un père qui lit le journal après sa journée de travail. C'est blanc, c'est rose, c'est doux, douillet, édifiant et attendrissant. Et pas un ne s'avisera de raconter les saouleries, les claques, la tambouille, la bouteille de rhum sur une chaise, la paillasse où l'on dort à six. Pas un ne dira les fois où il reste tapi dans le noir, plein de froid et de peur, assis sur une marche gluante de l'escalier, à écouter des bruits à travers la porte, et les grues qui ramènent un client lui demandent en passant ce qu'il fout là. Ils ont compris la règle du jeu, ces petits. Ils sont entrés spontanément dans la conspiration universelle contre la vérité. Dans la bonne vieille hypocrisie littéraire. Ils ont deviné tout de suite le grand secret de l'art d'écrire ...
On publiera de belles choses sur l'énergie spirituelle des captifs. Et on ne dira rien des cabinets. C'est pourtant ça l'important. Cette fosse à merde et ce méli-mélo de larves. Toute l'abjection de la captivité est là, et l'Histoire, et le destin. En voilà un bouquin que j'aurais aimé écrire. Bien simplement, bien honnêtement. Un bouquin désolant, qui aurait l'odeur des cabinets et il faudrait que chacun la sentît et y reconnût l'odeur insoutenable de sa vie, l'odeur de son époque. Et que toute l'époque lui apparût comme une mélasse d'êtres sans pensée, sans squelette, grouillant dans les cabinets, comme nous, s'emplissant et se vidant avec gravité, sans fin et sans but. Et que le sens, le non-sens de l'époque fût là-dedans, visible, lisible, incontestable. Mais pour écrire ça il faudrait un gars autrement costaud que moi. Un gars d'un génie féroce, naïf et généreux. Et moi, je ne suis qu'un pauvre type qui écrit pour tuer le temps. Et il a la vie dure, le salaud.
J'ai repoussé, pour mettre mes papiers sur un coin de table, des épluchures et des boîtes en fer-blanc. … " (Georges Hyvernaud - La Peau et les os – Pocket)
Et cela me fait, bien sûr, penser à Flaubert ...
Flaubert, parlant de la nouvelle "cavalière" de Bouilhet :
"Elle connaît le monde, elle pourra ouvrir à Bouilhet des horizons nouveaux. Piètres horizons ! il est vrai, mais enfin ne faut-il pas connaître tous les appartements du coeur et du corps social, depuis la cave jusqu'au grenier. - Et même ne pas oublier les latrines ! Il s'y élabore une chimie merveilleuse, il s'y fait des décompositions fécondantes. - Qui sait à quels sucs d'excréments nous devons le parfum des roses et la saveur des melons ? A-t-on compté tout ce qu'il faut de bassesses contemplées pour constituer une grandeur d'âme ? tout ce qu'il faut avoir avalé de miasmes écoeurants , subi de chagrins , enduré de supplices , pour écrire une bonne page ? Nous sommes cela , nous autres, des vidangeurs et des jardiniers. Nous tirons des putréfactions de l'humanité des délectations pour elle-même. Nous faisons pousser des bannettes de fleurs sur ses misères étalées. Le Fait se distille dans la Forme et monte en haut , comme un pur encens de l'Esprit vers l'Eternel, l'immuable, l'absolu, l'idéal. "
Bien sûr, je me suis un peu écarté du sujet initial ... Vraiment, dans le fond ?
Textes proposés :
- Rousseau - Emile ou de l'Education : "Puisqu'il nous faut absolument des livres, il en existe un ..."
- Zola - Les Romanciers naturalistes : "Mais je veux être plus affirmatif encore. Seul un tel [Balzac] homme pouvait écrire l'épopée moderne ...
- Jules Lemaître - Les Contemporains : "L'érudition, comme nous la voyons pratiquée par les trois quarts des érudits ..."
- Proust - Sur la lecture : "Mais il est une autre cause à laquelle je préfère, pour finir attribuer cette prédilection des grands esprits pour les ouvrages anciens ..."
- Gracq - La Littérature à l'estomac : "Les autres dans le fouillis de ce qui s'imprime, cherchent à tâtons une nourriture faite à leur estomac ..."
- Jean Guéhenno - Article du Figaro (14 octobre 1966) : "Farenheit 451. C'est son titre et la température à laquelle le papier, les livres prennent feu ..."
- Nuno Judice - Lettre à la jeunesse (2003) - "D'un poème déjà ancien, j'ai écrit "la poésie, telle que je l'entends est inutile". Cette phrase peut devenir une limite au-delà de laquelle celui qui ne s'intéresse pas au problème de la poésie peut s'arrêter ..."
- Umberto Eco - De la littérature (2003) un texte dont la dernière phrase est in fine "ma" réponse : "Je crois que cette éducation au Destin et à la mort est une des fonctions principales de la littérature. Peut-être y en a-t-il d'autres, mais ce soir, elles ne me viennent pas à l'esprit."
Rapidement, j'y ajouterai quelques autres textes, Montaigne (Des Livres - Essais II), un extrait de "Les Mots" de Sartre, d'"Enfance" de Sarraute ... Et tant d'autres ... Ah, un extrait d'un auteur qui a peu écrit, deux petits livres et un peu de correspondance, et qui, quelque part , n'a survécu à l'horreur des camps que par la littérature, la lecture et l'écriture ... Je l'ai croisé à la fin de sa vie à l'Ecole normale de Paris, Georges Hyvernaud, à lire ou à relire ... Un extrait, il vaut le détour :
"Quand les écrivains feront des livres sur la captivité, c'est les cabinets qu'ils devront décrire et méditer. Rien que cela. Ça suffira. Décrire consciencieusement les cabinets et les hommes aux cabinets. Si les écrivains sont des types sérieux, ils s'en tiendront là. Parce que c'est l'essentiel, le rite majeur, le parfait symbole. Mais tels qu'on les connaît, les écrivains, ils auront peur de ne pas avoir l'air assez distingué. Pas assez viril. Pas assez décent. Ils ne parleront pas des cabinets. Ils parleront des leçons de l'épreuve, de la régénération par la souffrance. Ou bien de l'énergie spirituelle, comme ce couillon qui a envoyé une lettre à Monsieur Paul Valéry. Une drôle d'idée, d'ailleurs, qu'il a eue là. Quel secours espérer d'un vieillard sec, subtil et officiel si parfaitement étranger aux trivialités de la souffrance réelle? Le grand homme a répondu. J'ai vu sa réponse: vingt-cinq lignes dactylographiées, et sa signature autographe. Pour nous dire qu'il était heureux de savoir que l'énergie spirituelle nous soutient. Et en effet cela a dû lui faire bien plaisir. Le rassurer, le réconforter. Parce que c'est son affaire, l'énergie spirituelle. Et quand l'énergie spirituelle va, tout va ... Seulement, l'énergie spirituelle, c'est des choses qu'on met dans les livres. Ça n'existe pas. Pas moyen de les prononcer, ces deux mots, sans une grande envie de rigoler. Ici, dans les cabinets. Au milieu de ces types déculottés qui claquent de froid. Des hommes gélatineux, mous, pourris. Des limaces, des asticots. Ce qui les soutient, on ne sait pas trop ce que c'est. Sans doute cette obstination à durer, ce tenace attachement, cet accrochement des vivants à la vie qui empêche les syphilitiques, les tuberculeux et les cancéreux de se foutre à la rivière. Mais sûrement pas l'énergie spirituelle.
Curieux que, dès qu'on écrit, il nous vienne un besoin de mentir. C'est plus fort que vous. Un besoin de donner aux choses une apparence avantageuse. Et si vous y résistez, on vous trouvera immoral et subversif. Les gosses dans les écoles savent déjà cela. On les invite à décrire, mettons, une soirée en famille. Et, aussitôt, ils vous campent un grand-papa à barbe blanche, une sœur qui brode sous la lampe et un père qui lit le journal après sa journée de travail. C'est blanc, c'est rose, c'est doux, douillet, édifiant et attendrissant. Et pas un ne s'avisera de raconter les saouleries, les claques, la tambouille, la bouteille de rhum sur une chaise, la paillasse où l'on dort à six. Pas un ne dira les fois où il reste tapi dans le noir, plein de froid et de peur, assis sur une marche gluante de l'escalier, à écouter des bruits à travers la porte, et les grues qui ramènent un client lui demandent en passant ce qu'il fout là. Ils ont compris la règle du jeu, ces petits. Ils sont entrés spontanément dans la conspiration universelle contre la vérité. Dans la bonne vieille hypocrisie littéraire. Ils ont deviné tout de suite le grand secret de l'art d'écrire ...
On publiera de belles choses sur l'énergie spirituelle des captifs. Et on ne dira rien des cabinets. C'est pourtant ça l'important. Cette fosse à merde et ce méli-mélo de larves. Toute l'abjection de la captivité est là, et l'Histoire, et le destin. En voilà un bouquin que j'aurais aimé écrire. Bien simplement, bien honnêtement. Un bouquin désolant, qui aurait l'odeur des cabinets et il faudrait que chacun la sentît et y reconnût l'odeur insoutenable de sa vie, l'odeur de son époque. Et que toute l'époque lui apparût comme une mélasse d'êtres sans pensée, sans squelette, grouillant dans les cabinets, comme nous, s'emplissant et se vidant avec gravité, sans fin et sans but. Et que le sens, le non-sens de l'époque fût là-dedans, visible, lisible, incontestable. Mais pour écrire ça il faudrait un gars autrement costaud que moi. Un gars d'un génie féroce, naïf et généreux. Et moi, je ne suis qu'un pauvre type qui écrit pour tuer le temps. Et il a la vie dure, le salaud.
J'ai repoussé, pour mettre mes papiers sur un coin de table, des épluchures et des boîtes en fer-blanc. … " (Georges Hyvernaud - La Peau et les os – Pocket)
Et cela me fait, bien sûr, penser à Flaubert ...
Flaubert, parlant de la nouvelle "cavalière" de Bouilhet :
"Elle connaît le monde, elle pourra ouvrir à Bouilhet des horizons nouveaux. Piètres horizons ! il est vrai, mais enfin ne faut-il pas connaître tous les appartements du coeur et du corps social, depuis la cave jusqu'au grenier. - Et même ne pas oublier les latrines ! Il s'y élabore une chimie merveilleuse, il s'y fait des décompositions fécondantes. - Qui sait à quels sucs d'excréments nous devons le parfum des roses et la saveur des melons ? A-t-on compté tout ce qu'il faut de bassesses contemplées pour constituer une grandeur d'âme ? tout ce qu'il faut avoir avalé de miasmes écoeurants , subi de chagrins , enduré de supplices , pour écrire une bonne page ? Nous sommes cela , nous autres, des vidangeurs et des jardiniers. Nous tirons des putréfactions de l'humanité des délectations pour elle-même. Nous faisons pousser des bannettes de fleurs sur ses misères étalées. Le Fait se distille dans la Forme et monte en haut , comme un pur encens de l'Esprit vers l'Eternel, l'immuable, l'absolu, l'idéal. "
Bien sûr, je me suis un peu écarté du sujet initial ... Vraiment, dans le fond ?
- annNiveau 10
Merci beaucoup pour vos idées , je vais fouiller tout cela !!!
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