- LDRNiveau 6
fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Est-ce qu'on peut dire que Du Bellay pioche chez Virgile mais modifie le texte initial ( chant VI) pour placer la grandeur de Rome au-dessus de celle de Troie ?
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
La comparaison à Troie me semble évidente, comme elle l'est déjà présente chez Virgile ; je ne vois donc pas en quoi il y a modification.
Du Bellay traducteur de Virgile emprunte à Virgile les éléments surtout citadins de Rome. Et j'ai plutôt le souvenir d'un éloge de Rome dans L'Enéide, tant la Rome actuelle que celle à venir (cf. les propos d'Anchise à Enée) qui est ici repris comme motif par Du Bellay. L'idée d'une grandeur à venir de Rome s'oppose à son état actuel réduit en ruines - dichotomie entre projection de puissance (motifs de la cité idéale, de l'âge d'or recherché davantage qu'éprouvé) et réalité décevante.
- fame59Niveau 9
LDR a écrit:fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Est-ce qu'on peut dire que Du Bellay pioche chez Virgile mais modifie le texte initial ( chant VI) pour placer la grandeur de Rome au-dessus de celle de Troie ?
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
La comparaison à Troie me semble évidente, comme elle l'est déjà présente chez Virgile ; je ne vois donc pas en quoi il y a modification.
Du Bellay traducteur de Virgile emprunte à Virgile les éléments surtout citadins de Rome. Et j'ai plutôt le souvenir d'un éloge de Rome dans L'Enéide, tant la Rome actuelle que celle à venir (cf. les propos d'Anchise à Enée) qui est ici repris comme motif par Du Bellay. L'idée d'une grandeur à venir de Rome s'oppose à son état actuel réduit en ruines - dichotomie entre projection de puissance (motifs de la cité idéale, de l'âge d'or recherché davantage qu'éprouvé) et réalité décevante.
Quand je parle de modification, j'évoque la structure de phrase, pas le fond. ( la phrase de l'Enéide que reprend DB est plus "plate" syntaxiquement, n'est-ce pas une volonté de du Bellay, de réaliser une "chute" à son sonnet, cf le derniers vers ? )
- HannibalHabitué du forum
fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
C'est "l'ordonnance fatale", qui ne permit pas qu'aucun autre pouvoir humain, si audacieux fût-il, pût prétendre égaler Rome.
_________________
"Quand la pierre tombe sur l'oeuf, malheur à l'oeuf.
Quand l'oeuf tombe sur la pierre, malheur à l'oeuf." (proverbe)
- PonocratesExpert spécialisé
Je peux me tromper mais il me semble que c'est" l'ordonnance fatale (qui) n'a pas permis qu'un autre pouvoir humain, si audacieux fût-il, se vantât d'égaler celle qui fit égale..." Là je bugue en raison d'égale au féminin.... Mais peut-être l'accord se fait-il comme pour le nom dans "à l'égal de", "n'avoir d'égal" où l'on accorde indifféremment avec l'un ou l'autre nom, et du coup égal s'accorde avec puissance ?fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
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"If you think education is too expensive, try ignorance ! "
"As-tu donc oublié que ton libérateur,
C'est le livre ? "
- fame59Niveau 9
Ponocrates a écrit:Je peux me tromper mais il me semble que c'est" l'ordonnance fatale (qui) n'a pas permis qu'un autre pouvoir humain, si audacieux fût-il, se vantât d'égaler celle qui fit égale..." Là je bugue en raison d'égale au féminin.... Mais peut-être l'accord se fait-il comme pour le nom dans "à l'égal de", "n'avoir d'égal" où l'on accorde indifféremment avec l'un ou l'autre nom, et du coup égal s'accorde avec puissance ?fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
Est-ce qu'on peut parler d'un accord de proximité , bien utile ici pour la rime ?
Merci de vos retours ... je me rends compte que j'avais besoin d'une bonne pause pour y voir plus clair !
- HannibalHabitué du forum
"égale" s'accorde avec puissance, oui.
La puissance de Rome a égalé la terre (elle a conquis le monde) et son courage a égalé les cieux.
C'est juste "et son courage aux cieux" qui est elliptique, cela en fait une sorte de pointe en hyperbate.
La puissance de Rome a égalé la terre (elle a conquis le monde) et son courage a égalé les cieux.
C'est juste "et son courage aux cieux" qui est elliptique, cela en fait une sorte de pointe en hyperbate.
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"Quand la pierre tombe sur l'oeuf, malheur à l'oeuf.
Quand l'oeuf tombe sur la pierre, malheur à l'oeuf." (proverbe)
- Astolphe33Niveau 5
fame59 a écrit:Ponocrates a écrit:Je peux me tromper mais il me semble que c'est" l'ordonnance fatale (qui) n'a pas permis qu'un autre pouvoir humain, si audacieux fût-il, se vantât d'égaler celle qui fit égale..." Là je bugue en raison d'égale au féminin.... Mais peut-être l'accord se fait-il comme pour le nom dans "à l'égal de", "n'avoir d'égal" où l'on accorde indifféremment avec l'un ou l'autre nom, et du coup égal s'accorde avec puissance ?fame59 a écrit:
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
Est-ce qu'on peut parler d'un accord de proximité , bien utile ici pour la rime ?
Bonjour à tous. Oui, c'est "l'ordonnance fatale" qui est le sujet de "n'avoit permis". Inversion ordinaire de l'ordre du sujet et du verbe en poésie, de toute façon syntaxiquement on n'a guère le choix.
Quant à "égale", on fait l'accord avec le plus proche des deux compléments : l'écriture en vers favorise cet accord avec le plus proche, voir l'exemple de La Fontaine plus loin (par ailleurs, même en faisant abstraction des rimes, si vous lisez les vers à haute voix en marquant bien la césure du dernier, c'est de toute façon plus parlant ainsi, "et son courage aux cieux" s'ajoutant en quelque sorte, un peu comme si on avait une hyperbate).
Mais on trouve encore couramment ce type d'accord du verbe dans la prose au XVIIe siècle soit avec le complément le plus proche soit avec un seul de plusieurs coordonnés. Exemples dans la Syntaxe de Haase : 1) Pensées de Pascal : "Bérénice et son fils fut tuée", "C'est ce qu'a fait JC et les apôtres", etc. ; 2) Mme de Sévigné : "Le Roi et toute sa cour est à Marly", "La Reine et tout le monde la reçut fort bien ; 3) Bossuet : "Il n'y a pas un seul moment où Moïse et sa loi n'ait été vivante" ; 4) et en vers chez La Fontaine : "Ane, cheval et mule aux forêts habitait"
- LDRNiveau 6
fame59 a écrit:LDR a écrit:fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Est-ce qu'on peut dire que Du Bellay pioche chez Virgile mais modifie le texte initial ( chant VI) pour placer la grandeur de Rome au-dessus de celle de Troie ?
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
La comparaison à Troie me semble évidente, comme elle l'est déjà présente chez Virgile ; je ne vois donc pas en quoi il y a modification.
Du Bellay traducteur de Virgile emprunte à Virgile les éléments surtout citadins de Rome. Et j'ai plutôt le souvenir d'un éloge de Rome dans L'Enéide, tant la Rome actuelle que celle à venir (cf. les propos d'Anchise à Enée) qui est ici repris comme motif par Du Bellay. L'idée d'une grandeur à venir de Rome s'oppose à son état actuel réduit en ruines - dichotomie entre projection de puissance (motifs de la cité idéale, de l'âge d'or recherché davantage qu'éprouvé) et réalité décevante.
Quand je parle de modification, j'évoque la structure de phrase, pas le fond. ( la phrase de l'Enéide que reprend DB est plus "plate" syntaxiquement, n'est-ce pas une volonté de du Bellay, de réaliser une "chute" à son sonnet, cf le derniers vers ? )
Ca me semble aventureux que de comparer syntaxiquement une écriture versifiée en moyen-français contrainte par la métrique du sonnet et une possible (mais pas prouvée) référence à une épopée latine... D'autant que la reprise n'est pas annoncée comme telle par Du Bellay, ce qui revient, je crains, à sur-interpréter le passage. Mais j'ai une tendance naturelle à l'exploitation infinie des mots, en analyse de textes et me contrains de plus à plus à éviter d'amener les textes là où ils ne veulent pas aller.
Le risque, bien parodié par Rabelais, de la surenchère de (fausse-)érudition nous attend souvent au détour de la ruelle interprétative.
- fame59Niveau 9
LDR a écrit:fame59 a écrit:LDR a écrit:fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvoit à Rome ressembler,
Rome seule pouvoit Rome faire trembler :
Aussi n’avoit permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fust audacieux,
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Est-ce qu'on peut dire que Du Bellay pioche chez Virgile mais modifie le texte initial ( chant VI) pour placer la grandeur de Rome au-dessus de celle de Troie ?
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
La comparaison à Troie me semble évidente, comme elle l'est déjà présente chez Virgile ; je ne vois donc pas en quoi il y a modification.
Du Bellay traducteur de Virgile emprunte à Virgile les éléments surtout citadins de Rome. Et j'ai plutôt le souvenir d'un éloge de Rome dans L'Enéide, tant la Rome actuelle que celle à venir (cf. les propos d'Anchise à Enée) qui est ici repris comme motif par Du Bellay. L'idée d'une grandeur à venir de Rome s'oppose à son état actuel réduit en ruines - dichotomie entre projection de puissance (motifs de la cité idéale, de l'âge d'or recherché davantage qu'éprouvé) et réalité décevante.
Quand je parle de modification, j'évoque la structure de phrase, pas le fond. ( la phrase de l'Enéide que reprend DB est plus "plate" syntaxiquement, n'est-ce pas une volonté de du Bellay, de réaliser une "chute" à son sonnet, cf le derniers vers ? )
Ca me semble aventureux que de comparer syntaxiquement une écriture versifiée en moyen-français contrainte par la métrique du sonnet et une possible (mais pas prouvée) référence à une épopée latine... D'autant que la reprise n'est pas annoncée comme telle par Du Bellay, ce qui revient, je crains, à sur-interpréter le passage. Mais j'ai une tendance naturelle à l'exploitation infinie des mots, en analyse de textes et me contrains de plus à plus à éviter d'amener les textes là où ils ne veulent pas aller.
Le risque, bien parodié par Rabelais, de la surenchère de (fausse-)érudition nous attend souvent au détour de la ruelle interprétative.
Oui, c'est le piège dans lequel je suis tombée, je crois...
Merci de vos partages.
Je retiens l'hyperbate, de manière simple , sans chercher des poux à Virgile !
- tannatHabitué du forum
Cette référence au saint Empire elle est dans le sonnet XVII.Auz a écrit:Je ne sais plus où j'ai lu cette histoire de satire du St Empire... je ne le retrouve pas.
Rome est aussi et surtout un exemple: son destin est celui de toute civilisation qui se laisse fatalement aller à la corruption et provoque, par là, sa propre chute.
Tant que l'oiseau de Jupiter vola,
Portant le feu dont le ciel nous menace,
Le ciel n'eut peur de l'effroyable audace
Qui des Géants le courage affola :
Mais aussitôt que le Soleil brûla
L'aile qui trop se fit la terre basse,
La terre mit hors de sa lourde masse
L'antique horreur qui le droit viola.
Alors on vit la corneille germaine
Se déguisant feindre l'aigle romaine,
Et vers le ciel s'élever derechef
Ces braves monts autrefois mis en poudre,
Ne voyant plus voler dessus leur chef
Ce grand oiseau ministre de la foudre.
_________________
« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- tannatHabitué du forum
Je crois qu'il faut aussi regarder la place de ce sonnet dans le recueil. Le sonnet V se termine par :fame59 a écrit:Bonjour, Je suis en train de lire Les Antiquités et les derniers vers du sonnet VI m'interpellent
Rome seule pouvait à Rome ressembler,
Rome seule pouvait Rome faire trembler :
Aussi n’avait permis l’ordonnance fatale
Qu’autre pouvoir humain, tant fût audacieux,
Se vantât d’égaler celle qui fit égale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Est-ce qu'on peut dire que Du Bellay pioche chez Virgile mais modifie le texte initial ( chant VI) pour placer la grandeur de Rome au-dessus de celle de Troie ?
J'ai du mal à comprendre la construction des 4 derniers vers.
Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci de vos éclairages ... !
"Mais ses écrits, qui son los le plus beau
Malgré le temps arrachent du tombeau,
Font son idole errer parmi le monde."
Ce que l'on sait de Rome, sa puissance, sa grandeur tient dans les écrits qui ont chanté sa gloire.
Si Rome est inégalable, c'est qu'elle a été (tout le sonnet VI est au passé) la plus puissante des nations mais aussi celle qui a causé sa propre perte par des luttes intestines.
"Rome seule pouvait à Rome ressembler,
Rome seule pouvait Rome faire trembler :
Aussi n'avait permis l'ordonnance fatale
Qu'autre pouvoir humain, tant fût audacieux,
Se vantât d'égaler celle qui fit égale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux."
L'orgueil l'a détruite, et c'était son destin, et peut-être même le destin de tout empire trop orgueilleux...
Ce à quoi elle est réduite on le lit dans le sonnet suivant :
"Sacrés coteaux, et vous saintes ruines,
Qui le seul nom de Rome retenez,
Vieux monuments, qui encor soutenez
L'honneur poudreux de tant d'âmes divines :
Arcs triomphaux, pointes du ciel voisines,
Qui de vous voir le ciel même étonnez,
Las, peu à peu cendre vous devenez,
Fable du peuple et publiques rapines!"
Enfin, il me semble qu'on peut le lire ainsi...
Connaître l'hypotexte permettrait sans doute de mieux étayer ce point...
_________________
« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- AuzNiveau 6
tannat a écrit:Cette référence au saint Empire elle est dans le sonnet XVII.Auz a écrit:Je ne sais plus où j'ai lu cette histoire de satire du St Empire... je ne le retrouve pas.
Rome est aussi et surtout un exemple: son destin est celui de toute civilisation qui se laisse fatalement aller à la corruption et provoque, par là, sa propre chute.
Tant que l'oiseau de Jupiter vola,
Portant le feu dont le ciel nous menace,
Le ciel n'eut peur de l'effroyable audace
Qui des Géants le courage affola :
Mais aussitôt que le Soleil brûla
L'aile qui trop se fit la terre basse,
La terre mit hors de sa lourde masse
L'antique horreur qui le droit viola.
Alors on vit la corneille germaine
Se déguisant feindre l'aigle romaine,
Et vers le ciel s'élever derechef
Ces braves monts autrefois mis en poudre,
Ne voyant plus voler dessus leur chef
Ce grand oiseau ministre de la foudre.
Merci! Oui, c'est ça! Mais visiblement cela n'avait pas trait au sonnet concerné par la question...
_________________
Boulet un jour, boulet toujours.
- Astolphe33Niveau 5
fame59 a écrit:Je retiens l'hyperbate, de manière simpleLDR a écrit:( la phrase de l'Enéide que reprend DB est plus "plate" syntaxiquement, n'est-ce pas une volonté de du Bellay, de réaliser une "chute" à son sonnet, cf le derniers vers ? )fame59 a écrit:
Se vantast d’esgaler celle qui fit esgale
Sa puissance à la terre et son courage aux cieux.
Hyperbate évidente avec la virgule (qui a été omise dans la citation au départ de la discussion). Mon explication sur l'accord avec le plus proche n'a plus lieu d'être si on respecte le texte fidèlement donné dans l'édition au programme, avec virgule après "la terre" : l'hyperbate s'impose.
- IphigénieProphète
Pour répondre simplement à la question de fame59
Le sujet est « l’ordonnance fatale »Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
- fame59Niveau 9
Iphigénie a écrit:Pour répondre simplement à la question de fame59
Le sujet est « l’ordonnance fatale »Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci ! A tête reposée, je vois toute la bêtise de ma question .... !! Moralité, faire des pauses !
J'ai encore une question ... concernant le sonnet XVIII
XVIII
Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois
Furent premièrement le clos d'un lieu champêtre :
Et ces braves palais, dont le temps s'est fait maître,
Cassines de pasteurs ont été quelquefois.
Lors prirent les bergers les ornements des rois,
Et le dur laboureur de fer arma sa dextre :
Puis l'annuel pouvoir le plus grand se vit être,
Et fut encor plus grand le pouvoir de six mois :
Qui, fait perpétuel, crut en telle puissance,
Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :
Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,
Mit ce pouvoir ès mains du successeur de Pierre,
Qui sous nom de pasteur, fatal à cette terre,
Montre que tout retourne à son commencement.
Qui est désigné par Le Ciel ? l'Eglise elle-même ?
Peut-on dire que la Rome papale et orgueilleuse elle aussi est sous l'autorité d'un simple "berger" ( référence au Christ, le Bon Pasteur ?), qui renvoie aux origines de Rome ?
- OudemiaBon génie
Le Ciel, c'est la volonté divine, Dieu.
Je suis ce fil avec grand intérêt, cela va nettement améliorer ma lecture de Du Bellay !
Je suis ce fil avec grand intérêt, cela va nettement améliorer ma lecture de Du Bellay !
- AuzNiveau 6
Oudemia a écrit:Le Ciel, c'est la volonté divine, Dieu.
A distinguer de celle du Pape que DB attaque par ailleurs ( Paul IV le belliqueux et son cher neveu)
_________________
Boulet un jour, boulet toujours.
- tannatHabitué du forum
Le Ciel désigne Dieu (comme l'a dit Oudemia). Et je dirais qu'il y a une forme de pointe contre l'Eglise. Il établit un parallèle entre les "pasteurs" actuels et celui des origines (cf. notes)fame59 a écrit:Iphigénie a écrit:Pour répondre simplement à la question de fame59
Le sujet est « l’ordonnance fatale »Quel est le sujet du verbe permettre ? Rome ?
Merci ! A tête reposée, je vois toute la bêtise de ma question .... !! Moralité, faire des pauses !
J'ai encore une question ... concernant le sonnet XVIII
XVIII
Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois
Furent premièrement le clos d'un lieu champêtre :
Et ces braves palais, dont le temps s'est fait maître,
Cassines de pasteurs ont été quelquefois.
Lors prirent les bergers les ornements des rois,
Et le dur laboureur de fer arma sa dextre :
Puis l'annuel pouvoir le plus grand se vit être,
Et fut encor plus grand le pouvoir de six mois :
Qui, fait perpétuel, crut en telle puissance,
Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :
Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,
Mit ce pouvoir ès mains du successeur de Pierre,
Qui sous nom de pasteur, fatal à cette terre,
Montre que tout retourne à son commencement.
Qui est désigné par Le Ciel ? l'Eglise elle-même ?
Peut-on dire que la Rome papale et orgueilleuse elle aussi est sous l'autorité d'un simple "berger" ( référence au Christ, le Bon Pasteur ?), qui renvoie aux origines de Rome ?
Il me semble qu'il prétend aussi que tout est voué à disparaître et que le pouvoir temporel ne dure pas... mais je vais sans doute un peu loin...
_________________
« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- manutin08Niveau 1
Bonjour à toutes et à tous,
Question qui peut paraître bête: les sonnets 105 à 112 sont marqués d'une astérisque, savez-vous pourquoi?
J'ai cherché une réponse dans les notes mais je n'ai rien trouvé ...
Bon courage dans cette lecture ô combien fastidieuse!
Question qui peut paraître bête: les sonnets 105 à 112 sont marqués d'une astérisque, savez-vous pourquoi?
J'ai cherché une réponse dans les notes mais je n'ai rien trouvé ...
Bon courage dans cette lecture ô combien fastidieuse!
- MalicouNiveau 8
manutin08 a écrit:Bonjour à toutes et à tous,
Question qui peut paraître bête: les sonnets 105 à 112 sont marqués d'une astérisque, savez-vous pourquoi?
J'ai cherché une réponse dans les notes mais je n'ai rien trouvé ...
Bon courage dans cette lecture ô combien fastidieuse!
Réponse p. 46 de notre édition.
Il s'agit de sonnets se trouvant dans une édition mais pas dans les autres.
- HannibalHabitué du forum
tannat a écrit:Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois
Furent premièrement le clos d'un lieu champêtre :
Et ces braves palais, dont le temps s'est fait maître,
Cassines de pasteurs ont été quelquefois.
Lors prirent les bergers les ornements des rois,
Et le dur laboureur de fer arma sa dextre :
Puis l'annuel pouvoir le plus grand se vit être,
Et fut encor plus grand le pouvoir de six mois :
Qui, fait perpétuel, crut en telle puissance,
Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :
Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,
Mit ce pouvoir ès mains du successeur de Pierre,
Qui sous nom de pasteur, fatal à cette terre,
Montre que tout retourne à son commencement.
Le Ciel désigne Dieu (comme l'a dit Oudemia). Et je dirais qu'il y a une forme de pointe contre l'Eglise. Il établit un parallèle entre les "pasteurs" actuels et celui des origines (cf. notes)
Il me semble qu'il prétend aussi que tout est voué à disparaître et que le pouvoir temporel ne dure pas... mais je vais sans doute un peu loin...
Je ne vois pas de pointe contre l’Église ici. Les papes ramènent Rome à son destin pastoral après que le Ciel eut mis fin à l'aventure des Empereurs dont l'ambition était excessive. Bref, les bergers sont devenus rois, se voulurent même empereurs... et redevinrent bergers.
_________________
"Quand la pierre tombe sur l'oeuf, malheur à l'oeuf.
Quand l'oeuf tombe sur la pierre, malheur à l'oeuf." (proverbe)
- tannatHabitué du forum
Mais les Bergers (certains papes) sont devenus des seigneurs de guerre... Ainsi, Jules III est un "seigneur de guerre" un peu dans la lignée des Borgia... Le suivant n'est guère mieux : Paul IV choisit son neveu pour "bras droit" ce dernière était une brute épaisse, un condottiere (voir les cours du Collège de France d'Antoine Compagnon sur ce point). Bref, ils ont clairement joué sur le pouvoir temporel et souvent armé des troupes... Mais je peux me tromper.Hannibal a écrit:tannat a écrit:Ces grands monceaux pierreux, ces vieux murs que tu vois
Furent premièrement le clos d'un lieu champêtre :
Et ces braves palais, dont le temps s'est fait maître,
Cassines de pasteurs ont été quelquefois.
Lors prirent les bergers les ornements des rois,
Et le dur laboureur de fer arma sa dextre :
Puis l'annuel pouvoir le plus grand se vit être,
Et fut encor plus grand le pouvoir de six mois :
Qui, fait perpétuel, crut en telle puissance,
Que l'aigle impérial de lui prit sa naissance :
Mais le Ciel, s'opposant à tel accroissement,
Mit ce pouvoir ès mains du successeur de Pierre,
Qui sous nom de pasteur, fatal à cette terre,
Montre que tout retourne à son commencement.
Le Ciel désigne Dieu (comme l'a dit Oudemia). Et je dirais qu'il y a une forme de pointe contre l'Eglise. Il établit un parallèle entre les "pasteurs" actuels et celui des origines (cf. notes)
Il me semble qu'il prétend aussi que tout est voué à disparaître et que le pouvoir temporel ne dure pas... mais je vais sans doute un peu loin...
Je ne vois pas de pointe contre l’Église ici. Les papes ramènent Rome à son destin pastoral après que le Ciel eut mis fin à l'aventure des Empereurs dont l'ambition était excessive. Bref, les bergers sont devenus rois, se voulurent même empereurs... et redevinrent bergers.
J'ajoute qu'en dehors du Pape qui n'a siégé que quelques jours ce qui les caractérise le plus souvent c'est la corruption, le népotisme, les intrigues. L'ensemble du haut clergé est loin d'être exemplaire, c'est aussi ce qui va engendrer les volontés de réforme chez les catholiques. Mais encore une fois, je le lis de cette façon parce que je le lie au contexte historique et il se peut que je fasse mal ou que j'ai mal digéré ce que j'ai lu, vu ou entendu.
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« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- HannibalHabitué du forum
C'est vrai historiquement, mais je ne crois pas que Du Bellay fasse allusion à cet aspect des choses dans ce sonnet-ci, qui brosse à grands traits l'évolution politique de Rome.
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"Quand la pierre tombe sur l'oeuf, malheur à l'oeuf.
Quand l'oeuf tombe sur la pierre, malheur à l'oeuf." (proverbe)
- tannatHabitué du forum
Il est effectivement difficile de savoir exactement ce à quoi Du Bellay fait exactement allusion. Mais quel serait l'intérêt d'introduire la Rome chrétienne presque absente (par ailleurs) des Antiquités et d'effacer le thème des circonstances et des causes de la décadence romaine (qui vient généralement en contre-point des développements sur la puissance) ? Suis-je seulement compréhensible ? Je me demande ce que je fais là et comment j'ose juste ouvrir la bouche... pardonHannibal a écrit:C'est vrai historiquement, mais je ne crois pas que Du Bellay fasse allusion à cet aspect des choses dans ce sonnet-ci, qui brosse à grands traits l'évolution politique de Rome.
Bon je cesse de vous importuner avec mes divagations.
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« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- HannibalHabitué du forum
C'est juste que dans le sonnet, il semble plutôt que la volonté du Ciel ait châtié l'orgueil des empereurs, en transférant leur pouvoir au 1er pape, reconduisant ainsi Rome (symboliquement) à ses origines pastorales. En fait le parcours historique s'arrête au 1er pape, au seul principe de la papauté, sans trop s'intéresser à ce qu'est devenu par la suite le pouvoir papal. Le lecteur doit-il aller au-delà ? Peut-être, mais on ne peut pas dire que le texte y invite très clairement.
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"Quand la pierre tombe sur l'oeuf, malheur à l'oeuf.
Quand l'oeuf tombe sur la pierre, malheur à l'oeuf." (proverbe)
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