Assassinat de notre collègue Samuel Paty

https://www.franceculture.fr/emissions/signes-des-temps/samuel-paty-un-an-apres-ou-en-sont-les-enseignants

Pour une partie, qui reste minoritaire heureusement, des professeurs de moins de 40 ans, on a l’impression, à la lecture du sondage, que la laïcité est une sorte de tolérance. Et en fait, tout ce qui fait la laïcité à la française et notamment par l’école c’est-à-dire tout ce qui fait l’émancipation disparaît, tout ce que porte l’école de la République disparaît. On est juste là pour être coexister, être les uns avec les autres, on va se tolérer. Et tout ce qui permet l’émancipation de la liberté n’existe plus. Iannis Roder

La parole des parents est un poids énorme dans l’école aujourd’hui et notamment auprès des chefs d’établissement. On peut comprendre cette présence qui est loin d’être toujours malveillante et qui s’explique par les craintes envers l’avenir, toujours est-il, qu’il y a une forte présence des parents qu’on peut qualifier d’entrisme et une peur des chefs d’établissement face aux réactions des familles. Béatrice Benabbes

Le référent laïcité est en train de valider la notion d’offense qui est évidemment une notion extrêmement critiquable parce que si le cours doit s’aligner sur le sentiment religieux des élèves, il n’y a plus d’enseignement de la laïcité possible, on est vraiment dans une aberration pédagogique. David di Nota

La vraie question n’est pas : "Comment doit-on former les professeurs pour qu’ils ne choquent pas ?". La vraie question, si on s’intéresse à Samuel Paty, est : "Comment fait-on lorsqu’un acte de prévenance est transformé après-coup par des islamistes en acte de discrimination islamophobe ?". Et ce n’est pas du tout la même question. David di Nota

Docteur OX a écrit:https://www.franceculture.fr/emissions/signes-des-temps/samuel-paty-un-an-apres-ou-en-sont-les-enseignants

La parole des parents est un poids énorme dans l’école aujourd’hui et notamment auprès des chefs d’établissement. On peut comprendre cette présence qui est loin d’être toujours malveillante et qui s’explique par les craintes envers l’avenir, toujours est-il, qu’il y a une forte présence des parents qu’on peut qualifier d’entrisme et une peur des chefs d’établissement face aux réactions des familles. Béatrice Benabbes

Une explication possible de la montée du poids des parents dans l'école - explication partielle bien entendu -, c'est la décrue démographique depuis l'enclenchement de la baisse de la natalité après le sursaut des bébés 2000 : des parents qui vont ailleurs, ce sont des classes qui ferment et des postes qui sautent ou des heures sups en moins pour ceux qui y tiennent (la paie de base étant ce qu'elle est, en baisse à échelon identique par rapport à la hausse des prix).
Dans des collèges de taille petite ou moyenne par exemple, il ne faut pas beaucoup de parents en moins pour perdre une classe. Et a contrario, la pression des chefs en faveur des projets, et l'étonnant investissement de collègues se disant pourtant surmenés pour y répondre favorablement, peut aussi constituer une réponse. L'élève devient un bien rare, le temps où la baisse des effectifs pouvait alléger le travail se termine, celui où cette baisse devient une menace arrive...
Pour les gestionnaires, une baisse du nombre d'élèves signifie une baisse probable de la dotation du département, mais parfois des charges fixes semblables : le chauffage par exemple ne baisse pas son coût avec deux élèves en moins par classe - on pourrait même en forçant le trait soutenir l'inverse (chaleur animale moindre!). Le chauffage est d'assez loin la première dépense...

Des chefs d'établissement peuvent se sentir en échec quand des familles s'en vont, pas seulement par souci de zèle hiérarchique, mais aussi parce qu'ils savent que certains enseignants risquent d'en faire les frais.

Ceci peut renforcer le pouvoir de négociation des parents, consciemment ou non d'ailleurs. Et éventuellement, dans les pires des cas, pousser à des réactions étonnamment atones devant des pressions parentales manifestement excessives.

Sujet : "Assassinat de notre collègue Samuel Paty"
Samuel Paty a été assassiné par l'"entrisme des parents" ???

F.Lemoine a écrit:Sujet : "Assassinat de notre collègue Samuel Paty"
Samuel Paty a été assassiné par l'"entrisme des parents" ???

Il a joué son rôle, et ça a bien été analysé dès les premiers jours suivant l'assassinat.

Le fait que beaucoup de CdE tendent un peu trop l'oreille en direction des parents (enfin, de certains parents, essentiellement les parents CSP+ et du CA, hein) est assez peu discutable.

Mais je ne suis pas sûr non plus que ce soit l'élément central dans le drame qui nous attriste.

En l'occurrence le père d'élève voulait, semble-t-il, (et c'est déjà un problème), que notre collègue soit licencié du collège (hum) ou de l'EN, pas qu'il soit tué - ce qui s'est produit.

L'intervention d'un parent réclamant à la direction/au rectorat le licenciement d'un enseignant ne se solde pas systématiquement par le meurtre d'un collègue par un terroriste islamiste. Outre que ce genre d'intervention de parents n'est à mon avis pas majoritairement en lien avec la religion musulmane (ni avec la religion tout court)

Par ailleurs si je compte bien, le père de l'élève, ça fait UN parent, pas des parents. Pour ce qu'on sait les autres parents ont pu demander des explications à la direction (suite aux rumeurs), et ce n'est pas répréhensible. Même si le plus logique serait de s'adresser directement au professeur plutôt qu'à la direction, et ma foi les parents le comprendront peut-être le jour où les chefs d'établissement auront la présence d'esprit de leur dire de prendre contact avec l'enseignant pour commencer.

En outre, sans ces demandes d'explication, le problème n'aurait sans doute pas été repéré aussi rapidement par la direction (même ainsi cela n'a pas suffi à éviter le drame, nous le savons).

F.Lemoine a écrit:Sujet : "Assassinat de notre collègue Samuel Paty"
Samuel Paty a été assassiné par l'"entrisme des parents" ???

Non,
assassiné par un terroriste islamiste suite à de fausses nouvelles diffusées sur les réseaux sociaux.

"L'entrisme" des parents se discute, peut se contester ou ne pas être compris mais cet entrisme n'assassine pas.

Pour ma part, j'attends le procès des différents protagonistes de l'affaire qui a mené à cette horreur. Il y a probablement des niveaux différents de responsabilité, mais j'espère bien qu'il y aura plus de lumière là-dessus, par exemple sur le comportement du père de l'adolescente, qui semble avoir été très virulent, et largement au-delà d'un "entrisme", dans ses dénonciations sur FB, ses vidéos, les insultes et autres appels de délation, etc.

C'est l'entrisme assorti d'une idéologie extrémiste qui assassine.
L'entrisme seul empêche( je veux dire: nous empêche d'exercer sereinement)et jette la suspicion. Celui qui s'exerce dans mon lycée se résume à "dégommer les profs" au sens figuré.
Je suis bien certaine que le jour où un élément du cours( ou autre prétexte saisi) déplaira à un/des parents intrusifs,  malveillants,  pressés d'en découdre et appuyés par des réseaux mortifères,  on en viendra à "dégommons les profs" au sens propre comme cela est arrivé.
Je l'ai déjà dit, je me répète : après l'assassinat de Samuel Paty il me semble qu'un décret ou une loi baptisée de son nom et redonnant ses lettres de noblesse à notre métier en remettant les parents à leur juste place, aurait été un signe fort de reconnaissance de cette barbarie envers l'école et ses valeurs , et aurait peut-être enclin certains parents à davantage de mesure envers nous.
Helas, ça continue : les parents se plaignent,  exigent, demandent des comptes.... et sont reçus par la direction, sont entendus,  écoutés. Les parents continuent de savoir mieux que nous ce qui se passe dans nos classes.

Nous attendons tous ce procès. Je reconnais que j'attends aussi qu'il mette à jour les responsabilités institutionnelles car la bonne conscience de l'EN après ce drame m'est violemment insupportable.

Pour ce qui est des parents, j'ai vu des choses tellement surréalistes en 15 ans de métier, que rien ne m'étonne sans même faire appel à d'autres ressorts que la mauvaise foi d'adolescent, et l'ignorance, la bêtise de bonne foi (sans jeu de mots) des parents et la lâcheté quotidienne des pères, toujours exploitables par les exploitants en crédulité islamistes (ou d'autres bords, voir les agressions par des anti vaccins dans d'autres secteurs).

Merci à Tang et Balthamos d'avoir remis les choses à leur place.

Balthamos a écrit:

F.Lemoine a écrit:Sujet : "Assassinat de notre collègue Samuel Paty"
Samuel Paty a été assassiné par l'"entrisme des parents" ???

Non,
assassiné par un terroriste islamiste suite à de fausses nouvelles diffusées sur les réseaux sociaux.

"L'entrisme" des parents se discute, peut se contester ou ne pas être compris mais cet entrisme n'assassine pas.

Le Monde avait fait une bonne enquête vidéo sur le cheminement qui avait mené à l'assassinat.


https://www.lemonde.fr/police-justice/video/2020/11/16/attentat-de-conflans-le-parcours-d-une-rumeur-l-itineraire-du-tueur_6059947_1653578.html

Le Monde a écrit:Le Monde a reconstitué la collision de deux trajectoires : celle d’une rumeur de collège devenue virale, et celle d’un jeune musulman radicalisé qui veut passer à l’acte et cherche une cible.

L'expression "collision de deux trajectoires" me semble particulièrement juste. Samuel Paty a été assassiné par un jeune djihadiste qui cherchait une cible (il en avait envisagé d'autres avant), mais il a été désigné par une entreprise de déstabilisation menée par des parents appuyés par un militant islamiste local.

Son assassinat est aussi la conséquence extrème, et tragique, de tendances actuellement très prégnantes : entrisme des parents dans l'école sur un mode conflictuel, affaiblissement de la parole de k'enseignant, manipulation des accusations d'islamophobie, recours de plus en plus automatique à la dénonciation et l'appel à l'opinion sur les réseaux sociaux pour des conflits au départ dérisoires, effet boule de neige de ces mêmes réseaux.

Je suis assez surpris de voir cet aspect des faits éludé ou contesté sur un forum de collègues alors que dans le même temps beaucoup tentent d'impliquer une institution dont la responsabilité ne me semble pas évidente quand on lit l'enquête réalisée par l'académie de Versailles (en particulier de celle de la CDE qui avait honnêtement défendue S. Paty, y compris en recadrant certains de ses collègues).

Sans doute faut-il y voir un signe du fait qu'une défiance profonde s'est installée entre la majeure partie des enseignants et leur hiérarchie.

Peut-être surtout parce que c'est à l'administration de protéger les enseignants et de leur permettre d'enseigner ?

Les parents prennent dans l'école la place que l'administration leur donne. Et les chefs d'établissement sont de mon point de vue les premiers responsables des excès que l'on observe trop souvent. Je parle du contexte général.

Comme c'est son rôle de prévenir les risques de harcèlement scolaire. Ad libitum.

Dans l'affaire dont il est question, c'était à l'administration de protéger Samuel Paty. Et elle a échoué.

Il n'y avait pas de fatalité. Les procédures mises en place n'ont pas été efficaces. Elles doivent être questionnées.

Les procédures mises en place n'ont pas été efficaces.

Sérieux euphémisme...

Interview de David Di Nota:

Reine Margot a écrit:Interview de David Di Nota:

Merci Reine Margot pour cette video.

Toujours aussi émouvant de penser à Samuel Paty.

Relayé par le Fbook de l'APHG.
Le mot "islamiste" a été blanchi. Je n'ose pas dire bombé...
La plaque a été remise en état très vite (changée, en fait).

https://www.liberation.fr/societe/police-justice/square-samuel-paty-a-paris-la-plaque-en-hommage-au-professeur-assassine-vandalisee-20211221_F5TZAOCJE5GJBGRXJVV5TEZZ54/?utm_medium=Social&xtor=CS7-50-&utm_source=Facebook#Echobox=1640100474

J'espère poster au bon endroit l'info selon laquelle le fils de Sefrioui a été placé hier en garde à vue pour les mêmes raisons que son père est mis en examen :
https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/droit-et-justice/assassinat-de-samuel-paty-le-fils-d-un-des-mis-en-examen-a-ete-place-en-garde-a-vue_5046736.html

Le fils d’Abdelhakim Sefrioui, un des hommes mis en examen dans l'affaire de l'assassinat du professeur Samuel Paty, a été placé en garde à vue samedi 26 mars en fin de matinée, a appris franceinfo de source proche du dossier.

Charmante famille.

Rire, pleurer, s'énerver? J'hésite...

gnafron2004 a écrit:Rire, pleurer, s'énerver? J'hésite...

Ne pas s'étonner : éducation + conditionnement , les deux liés à la famille principalement. Il n'est pas rare non plus de retrouver des fratries dans des actions terroristes.

La famille de Samuel Paty va déposer plainte contre le ministère de l'Intérieur et le ministère de l’Éducation Nationale. L'article dans son intégralité est malheureusement réservé aux abonnés :

Extrait :

Libération a écrit:Des failles dans le traitement d’au moins un signalement clé, des analyses erronées, et, in fine, une inaction fautive. C’est, en substance, l’analyse développée dans une plainte pour «non-assistance à personne en péril et non empêchement de crime», déposée ce mercredi par Virginie Le Roy, l’avocate représentant les parents et les sœurs de Samuel Paty. L’argumentaire, complétant certaines informations obtenues également par Libération, pointe des défaillances imputables aux agents de deux ministères : l’Intérieur, et à travers lui les services de renseignement, qui, malgré les informations dont ils disposaient, ne semblent jamais avoir envisagé sérieusement la piste d’un attentat. Et l’Éducation, dont la lourdeur administrative et la culture de règlement des conflits à bas-bruits n’ont pas contribué à l’obtention rapide d’une protection

https://www.liberation.fr/societe/police-justice/manquements-defaillances-inaction-la-famille-de-samuel-paty-porte-plainte-contre-les-pouvoirs-publics-20220406_7OCVICLJ45HQZHEFZGPQA2PLAI/

Ils ont raison.

Bravo à sa famille de se lancer dans ce combat. J'espère que leur lutte aboutira, mais quoi qu'il arrive, elle servira à d'autres, même si j'imagine bien que c'est une drôlement maigre consolation face à une telle tragédie. Pensées et courage !

De tout coeur avec cette courageuse famille.