- User17095Érudit
Catalunya a écrit:Les témoignages unanimes de mes collègues de lettres sur l'incapacité d'une majorité d'élèves de comprendre aisément un texte du XIXème siècle me fait penser que l'assertion "le vocabulaire des élèves français s'appauvrit" n'est certainement pas fausse. Assertion confirmée par moi-même, qui me rend compte quotidiennement des lacunes lexicales (et grammaticales) de nos chères têtes blondes. Enfin, le fait qu'un CDE tienne ce type de discours ne m'étonne guère, ce sont les mêmes personnes qui vantent l'intérêt des FIL ou autres projets grotesques. Ou alors qui s'appuient sur les résultats au baccalauréat pour nous expliquer que le niveau monte.
Je ne sais pas trop d'où te vient cette agressivité, à quel moment mon métier intervient dans ce fil ? C'est une détestation personnelle, ou du corps ? Je veux dire, je n'ai pas parlé des résultats du bac par exemple, ni ici ni ailleurs. J'ai juste souligné une faille potentielle dans la logique : il peut y avoir un affaiblissement du vocabulaire, mais la raréfaction d'expressions anciennes (au profit de nouvelles) ou l'observation individuelle ne permettent pas de le conclure. C'est tout. Le reste, c'est ton émotion à toi - et à quelques détracteurs systématiques, mais enfin, quand on prend le métro on a l'habitude des bouffées méphitiques.
Cela dit, je te remercie d'avoir employé l'expression FIL. @Celadon évoque Bentolila, j'avais été invité à sa conférence faisant le début, justement, d'une FIL dans le collège voisin. Quelques enseignants y étaient allés, j'en avais malheureusement été empêché ; ils n'avaient pas accroché donc je n'avais pas donné suite, mais dans le collège en question, apparemment, il y avait eu un certain engouement.
Parce que concrètement, s'il faut travailler sur le lexique, c'est collectivement, donc c'est en FIL qu'on va réfléchir aux outils pour le faire.
- AscagneGrand sage
Je vais utiliser un poncif de sociologie de comptoir, mais la richesse, linguistiquement parlant, c'est la possibilité de se repérer par rapport aux registres, de connaître les nuances de la langue, d'être en mesure d'utiliser dans les bonnes circonstances le type de pratiques et de références qui leur convient, et d'en tirer éventuellement soit des avantages, soit la possibilité d'échapper à des inconvénients (par exemple, le préjugé social), quelle que soit la catégorie socio-culturelle d'appartenance.
- IphigénieProphète
C’est vrai que ce n’est que le constat de tous les enseignants chargés de l’enseignement du français: ils n’ont pas ton expertise ni ta sagacité
La langue vit, évolue, des expressions disparaissent, d'autres apparaissent. On ne peut pas en conclure que le vocabulaire de nos élèves s'appauvrit.
Faisons une FIL pour en parler...:lol:
Faut pas déc , si j’ose le vieux françois.
- User17095Érudit
Relis plus attentivement.
C'est bien beau de fustiger l'affaiblissement de la maîtrise de la langue, encore faut-il éviter le contresens à la lecture d'un autre qui ne dit pas exactement la même chose que soi-même.
C'est bien beau de fustiger l'affaiblissement de la maîtrise de la langue, encore faut-il éviter le contresens à la lecture d'un autre qui ne dit pas exactement la même chose que soi-même.
- kiwiGuide spirituel
Plus que des expressions, dont certaines sont en effet complètement désuètes, c'est surtout du vocabulaire simple qui n'est plus maîtrisé aujourd'hui...
Il y a quelques semaines, j'ai été effarée par les 3/4 des élèves d'une classe de 5ème qui n'ont pas compris (et donc m'ont demandé bien 20 fois durant l'heure...) : "Je comprends pas "Hachure sur la carte une conquête arabe de ton choix." "Hachure" a posé problème. "Hachure" bon sang...
Et je ne vous parle pas des mots de vocabulaire pourtant simples qui gênent la compréhension des documents et que je suis de plus en plus obligée d'expliquer. Une fois sur deux, je leur explique, mais ils ne retiendront pas, car ils n'écoutent pas.
Il y a quelques semaines, j'ai été effarée par les 3/4 des élèves d'une classe de 5ème qui n'ont pas compris (et donc m'ont demandé bien 20 fois durant l'heure...) : "Je comprends pas "Hachure sur la carte une conquête arabe de ton choix." "Hachure" a posé problème. "Hachure" bon sang...
Et je ne vous parle pas des mots de vocabulaire pourtant simples qui gênent la compréhension des documents et que je suis de plus en plus obligée d'expliquer. Une fois sur deux, je leur explique, mais ils ne retiendront pas, car ils n'écoutent pas.
- ditaNeoprof expérimenté
Ce qui me hérisse, ce ne sont pas les collègues qui écrivent "balec" et autres, mais ceux qui font des fautes d'orthographe. Ce n'est pas pour toi, Marie Laetitia). Par exemple, une Néo qui intervient souvent, dont je lis les interventions avec plaisir, utilise le plus pur langage 15-18 pour parler souvent de sujets passionnants et complexes.
Je suis d'accord avec les Néos qui disent qu'il est important d'enseigner des expressions idiomatiques et des mots de langage soutenu aux élèves. Soit. Mais à ceux qui ignorent le sens du mot "réverbère", il faut parer au plus pressé, à mon avis. Sans quoi, on pourrait les entendre nous demander "nonobstant les obstacles que vous avez levés pour me prodiguer la quintessence de votre savoir, j'ignore le sens du mot "réverbère."
Je suis d'accord avec les Néos qui disent qu'il est important d'enseigner des expressions idiomatiques et des mots de langage soutenu aux élèves. Soit. Mais à ceux qui ignorent le sens du mot "réverbère", il faut parer au plus pressé, à mon avis. Sans quoi, on pourrait les entendre nous demander "nonobstant les obstacles que vous avez levés pour me prodiguer la quintessence de votre savoir, j'ignore le sens du mot "réverbère."
- IphigénieProphète
Il ne s’agit pas de fustiger mais déjà dans un premier temps de ne pas se voiler la face: évitons le contresens de logique. Car l’appauvrissement que nous constatons va bien au-delà des expressions idiomatiques : c’est le langage courant qui manque comme beaucoup l’ont dit. Et la syntaxe. Et l’orthographe, cette science des ânes qui ne garantit pas de ne pas en être un quand on ne la possède pas, même si on vous dit que vous avez toute la vie pour l’acquérir quand d’autres la possèdent avant vous . Et savoir lire l’heure, eh bien! ma foi!ce n’est pas encore totalement surfait en fait.pogonophile a écrit:Relis plus attentivement.
C'est bien beau de fustiger l'affaiblissement de la maîtrise de la langue, encore faut-il éviter le contresens à la lecture d'un autre qui ne dit pas exactement la même chose que soi-même.
Cela aussi j’ai dû mal le lire, en y voyant une sorte de légère mise en doute :
Y a-t-il une vraie étude à référencer, sur le volume de vocabulaire d'élèves de tel âge aujourd'hui, comparée à une autre époque ?
- RogerMartinBon génie
La langue des élèves leur rend difficile ou impossible la lecture de textes du XVIIe siècle, alors qu'une part plus grande des élèves en était capable dans les années 60 ou 80.
L'argot écolier et adolescent a toujours existé, avec sa part de rotation (et de rots), je pense qu'on peut en conclure qu'il manque du vocabulaire aujourd'hui à nos élèves et étudiants, en particulier ce vocabulaire passif, souvent acquis lors de lectures, et qui permet de lire d'autres choses.
Je me permets de citer une interview de Gilles Siouffi et François Gaudin, entre autre sur la difficulté à quantifier le vocabulaire connu/employé (pardon pour le site atlantico).
https://www.atlantico.fr/decryptage/2393521/la-vie-avec-500-mots-de-francais--un-emprisonnement-social-qui-menace-de-plus-en-plus-de-jeunes-gilles-siouffi-francois-gaudin
L'argot écolier et adolescent a toujours existé, avec sa part de rotation (et de rots), je pense qu'on peut en conclure qu'il manque du vocabulaire aujourd'hui à nos élèves et étudiants, en particulier ce vocabulaire passif, souvent acquis lors de lectures, et qui permet de lire d'autres choses.
Je me permets de citer une interview de Gilles Siouffi et François Gaudin, entre autre sur la difficulté à quantifier le vocabulaire connu/employé (pardon pour le site atlantico).
https://www.atlantico.fr/decryptage/2393521/la-vie-avec-500-mots-de-francais--un-emprisonnement-social-qui-menace-de-plus-en-plus-de-jeunes-gilles-siouffi-francois-gaudin
https://www.franceculture.fr/emissions/les-idees-claires/langue-appauvrie-pensee-pauvreQuand j’emploie un mot, dit Humpty Dumpty d’un ton méprisant, il signifie exactement ce qui me plaît de lui faire signifier. Rien de moins, rien de plus. – La question, répondit Alice, est de savoir s’il vous est possible de faire signifier à un mot des choses différentes. – La question, répliqua Humpty Dumpty, c’est de savoir qui va être le maître. Et c’est tout.
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- acsyleNiveau 10
J'ai employé "balec" il n'y a pas très longtemps sur ce forum (c’était même "balek" je crois, mais peu importe) du coup je me sens un peu visé par le propos de Marie Laetitia.
J'assume pleinement la pauvreté du mot, et non seulement je l'assume mais je continuerai à l'employer quand j'en aurais envie. Je suis tout à fait capable de m'exprimer dans un pur style littéraire tout comme j'aime me livrer de temps de temps à une sorte de soulagement mental et verbal lorsque je vais pouvoir me "lâcher" dans mon discours. L'importance est bien évidemment de ne pas le faire devant les élèves. Autant dans la classe je fais en sorte de les faire rectifier au mieux leur vocabulaire, autant dans la vie quotidienne je ne me gêne pas pour sortir des jurons les plus abominables les uns que les autres. C'est bien parce que je suis capable de dire aussi bien "balec" que "je m'en tartine les rouflaquettes" (déjà employé aussi ici) que je me plais à user tantôt de l'un, tantôt de l'autre. Contrairement à mes élèves, qui eux, en emploie seulement un par défaut.
Mais...je ne suis pas un élève. Donc merci de me laisser le choix de mes mots.
J'assume pleinement la pauvreté du mot, et non seulement je l'assume mais je continuerai à l'employer quand j'en aurais envie. Je suis tout à fait capable de m'exprimer dans un pur style littéraire tout comme j'aime me livrer de temps de temps à une sorte de soulagement mental et verbal lorsque je vais pouvoir me "lâcher" dans mon discours. L'importance est bien évidemment de ne pas le faire devant les élèves. Autant dans la classe je fais en sorte de les faire rectifier au mieux leur vocabulaire, autant dans la vie quotidienne je ne me gêne pas pour sortir des jurons les plus abominables les uns que les autres. C'est bien parce que je suis capable de dire aussi bien "balec" que "je m'en tartine les rouflaquettes" (déjà employé aussi ici) que je me plais à user tantôt de l'un, tantôt de l'autre. Contrairement à mes élèves, qui eux, en emploie seulement un par défaut.
Mais...je ne suis pas un élève. Donc merci de me laisser le choix de mes mots.
- tchanq'Neoprof expérimenté
acsyle a écrit:J'ai employé "balec" il n'y a pas très longtemps sur ce forum (c’était même "balek" je crois, mais peu importe) du coup je me sens un peu visé par le propos de Marie Laetitia.
J'assume pleinement la pauvreté du mot, et non seulement je l'assume mais je continuerai à l'employer quand j'en aurais envie. Je suis tout à fait capable de m'exprimer dans un pur style littéraire tout comme j'aime me livrer de temps de temps à une sorte de soulagement mental et verbal lorsque je vais pouvoir me "lâcher" dans mon discours. L'importance est bien évidemment de ne pas le faire devant les élèves. Autant dans la classe je fais en sorte de les faire rectifier au mieux leur vocabulaire, autant dans la vie quotidienne je ne me gêne pas pour sortir des jurons les plus abominables les uns que les autres. C'est bien parce que je suis capable de dire aussi bien "balec" que "je m'en tartine les rouflaquettes" (déjà employé aussi ici) que je me plais à user tantôt de l'un, tantôt de l'autre. Contrairement à mes élèves, qui eux, en emploie seulement un par défaut.
Mais...je ne suis pas un élève. Donc merci de me laisser le choix de mes mots.
Je crois qu'on parlait de moi tout à l'heure je pense, sur ce même fil où j'ai employé ce terme en me mettant dans la peau d'un de mes élèves, humour mal venu en fait.
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- acsyleNiveau 10
Oui tu étais sans doute la personne visée, mais en ayant aussi usé il y a peu dans un autre contexte, je me suis permis une petite intervention.
- pseudo-intelloSage
DesolationRow a écrit:Je pense que tout ramener à des questions de bourgeoisie, de racisme social, etc., c'est montrer à quel point on ne comprend rien à ce qu'est la langue. Ne pas comprendre une expression rigolote et familière en vogue sur un réseau social ou un forum de jeux vidéo et ignorer la signification d'expressions démodées, ce n'est pas du tout la même chose et ça n'a pas du tout les mêmes conséquences.
Cas de figure 1 : j'ignore ce que veut dire "ta gueule c'est magique" ; déjà c'est moche, donc c'est plutôt bien de l'ignorer. En plus, de quoi suis-je privé ? De conversations sur un forum de jeux vidéo. Je m'en remettrai.
Cas de figure 2 : j'ignore ce que veut dire "pas piqué des hannetons", "collet monté" et toute une ribambelle d'expressions imagées, surannées, désuètes (ou, ce qui est à peu près équivalent, je ne sais pas où chercher leur sens) : je me coupe immédiatement de tout un patrimoine de textes, de films, de bandes dessinées. Je ne pourrai jamais lire Balzac, Homère ; je ne comprendrai jamais rien à Tintin ou Astérix ; impossible de regarder un film de Godard (ah, finalement, si ça se trouve ignorance is bliss), de Truffaut. Je vais rester une moule toute ma vie, youpi ; parce que la langue, ce n'est pas seulement un truc qui sert à passer sa commande au Macdo, c'est aussi un lien entre des époques, des oeuvres d'art, etc.
Tout ramener à une opposition "langue de bourges" / "langue de prolo", c'est condamner lesdits fils de prolo à ne jamais accéder à une culture dont on peut penser que, si elle a passé les siècles, c'est pas (ou au moins pas seulement) parce que c'est un truc de bourges, mais aussi parce que, simplement, c'est beau. La grille de lecture bas du front "dominant" / "dominé", ça ce résout à cantonner la masse dans un monde moins beau. Moi je m'en fous, hein, mais après qu'on vienne pas me tartiner les oreilles avec des prétentions pseudo-émancipatrices.
Ensuite, je vais faire mon Elaïna (coucou si tu passes par là) : ils ont bon dos les professeurs, elle a bon dos l'école. Les parents ont une responsabilité, les gosses ont une responsabilité. On ne peut pas passer des fils entiers à dire que plein d'enfants sont fainéants et n'ont pas le moindre goût de l'effort, et que plein de parents sont des mollusques qui préfèrent coller leurs gamins devant Disney Channel et Gulli plutôt que de les mettre au travail, comme c'est leur responsabilité, et ensuite venir pleurnicher en disant ici que c'est la faute aux méchants professeurs qui ne font pas leur boulot. Les professeurs font ce qu'ils peuvent, mais ils ne peuvent pas lutter contre les dizaines d'heures d'écran, de vidéos débiles, de jeux ineptes et de réseaux sociaux abêtissants. Tu peux leur expliquer des tas de choses, leur dire qu'il faut lire, à la fin de la journée si à la maison ils ont une console, deux smartphones et une télé dans la chambre, et pas de livres, les enseignants n'y peuvent rien. La responsabilité des parents et des enfants, ça existe aussi. Si t'as trois cents mots de vocabulaire à dix-huit ans, c'est pas mal ta faute et celle de ta famille, je ne crois pas un instant que ce soit celle de l'école.
Enfin, dernier point, moi je veux un masque et un tuba académiques.
Je suis d'accord : n'en déplaise aux formateurs IUFM qui disaient que langue soutenue, langue "vernaculaire" (adjectif élégant pour désigner une langue qui 'lest en général nettement moins), non, l'un ne vaut pas l'autre. D'une aprt, parce que le propre du vernaculaire, c'est qu'il change tout le temps. Il se démode tout le temps. Les expressions d'ajourd'hui remplaceront celle de demain, et l'élève ou l'adulte qui ne parle que sa langue, à savoir le français familier de la décennie 2010, est coupé de tout le patrimoine, ne fût-il créé que 50 ans plus tôt. Il ne comprend plus non plus le français de l'africain francophone. Roggntidjjj, au XVIIe siècle, les gonzes se sont donnés la peine d'unifier la langue française, c'est pas pour que leur boulot soit détruit aujourd'hui par le renoncement d'une société qui ne sait plus instruire sa jeunesse.
Bref, mes élèves qui ne parlent que leur vocabulaire, pas étonnant qu'ils soient si nombrilistes (ce n'est pas la seule raison, certes) ; c'est parce que, faute de mots pour le dire et le comprendre, ils ne sont plus capable de s'ouvrir au reste.
Néanmoins, je pense que tu oublies des paramètres. Elyas a pointé les méthodes enseignées aux aspirants profs et les baisses homicidaires, il a raison. Tu pointes les familles, tu as raison. Mais il n'y a pas que ça.
Je ne sais pas si des sociologues ou linguistes ont déjà fait le boulot, mais comparez le nombre de mots employés dans des divertissements vraiment grand public, par exemple La Belle au Bois Dormant versus La Reine des Neiges. Dans Merlin l'enchanteur vs. les dessins animés Dragons (où les petits Vikings disent "trop cool", mais oui bien sûr).
Comparez les magazines pour les 3-5 ans d’aujourd’hui vs. ceux qui sont peut-être restés dans le grenier des parents.
Les clubs des 5 d’aujourd’hui vs. les premières éditions.
Meilleure lectrice de ma classe, je trouvais toujours mon bonheur dans les abonnements École des Loisirs quand j'étais élève. Quand mes mômes sont entrés à l'école, je les ai abonnés : ils s'en fichaient, ça faisait bébé pour eux, le niveau était trop bas. Alors je les ai abonnés au niveau supérieur : idem (dans une moindre mesure, mais quand même). A la bibliothèque de l'école, quand ils empruntaient un livre de l’École des loisirs, c'était toujours deux niveaux au-dessus de celui préconisé pour leur âge.
En réalité, un parent aujourd’hui qui veut bien faire mais qui n'a pas notre bagage de profs bobos :lol: en achetant des livres à ses enfants ou en l'abonnant au dispositif proposé dans l'école, lui fera découvrir beaucoup moins de vocabulaire que l'ont fait nos parents, en appliquant pourtant les mêmes recettes.
J'ai lu il y a quelques années une interview d'auteur star de J'Aime lire, qui expliquait que maintenant, ils devenaient relou, à limiter vachement le lexique autorisé, et à refuser le passé simple. Elle ajoutait qu'en tant qu'en auteur chouchou du magasine parce que la plus connue -> la plus vendeuse, elle parvenait encore à négocier un passé simple par ci, un mot pas trop lambda par là, mais que les auteurs moins connus devaient se plier à la simplification éhontée.
(moi, comme je suis une prof bobo, quand je fais mon shopping de livres pour enfants à la librairie, je fais attention au lexique en premier lieu - et si l'histoire est rédigée au passé simple, c'est encore mieux)
- pseudo-intelloSage
J'édite mon propos, avec la chanson du début de Robin des Bois de Walt Disney, donc vraiment, le truc qui touche toutes les classes sociales et tous les âges, mêmes les petiots de 3 ou 4 ans. Dans les années 70, la sortie familiale au cinéma permettait de mettre ces termes dans les oreilles des marmots :
Robin avec Petit Jean, au bois, se promènent
Ils s'en vont le cœur content et devisent gaiement
Des souvenirs du passé, heureux, ils se souviennent
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
Pourquoi redouter l'eau calme et bleue de la rivière
Qui paraît tant se complaire à leurs jeux ?
Qui peut se douter que l'ombre douce et familière
Cache un gros shérif au dessein belliqueux ?
Robin avec Petit Jean filent à toutes jambes
Écartant, tout en courant, les branches et les haies
Puis au tournant d'une allée disparaissent par enchantement
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
Robin avec Petit Jean, au bois, se promènent
Ils s'en vont le cœur content et devisent gaiement
Des souvenirs du passé, heureux, ils se souviennent
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
Pourquoi redouter l'eau calme et bleue de la rivière
Qui paraît tant se complaire à leurs jeux ?
Qui peut se douter que l'ombre douce et familière
Cache un gros shérif au dessein belliqueux ?
Robin avec Petit Jean filent à toutes jambes
Écartant, tout en courant, les branches et les haies
Puis au tournant d'une allée disparaissent par enchantement
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
O dilali, o dilali, quel beau jour vraiment !
- SphinxProphète
Constat : dans un collège de banlieue résidentielle avec une proportion non négligeable d'élèves habitant dans des HLM mais une proportion tout aussi non négligeable d'enfants de cadres et d'ingénieurs, nourris, éduqués, qui vont passer leur Noël à Disneyland et leurs vacances à New-York, je n'arrive pas à faire lire Molière parce que c'est trop compliqué et qu'y a trop de mots qu'on comprend rien (je précise que je ne donne que des éditions farcies de notes de bas de page), non seulement aux élèves en difficulté mais aussi aux autres. En fait, je suis contente quand j'en ai trois qui surnagent. Quand j'étais moi-même élève, j'étais dans une ZEP difficile, on faisait le Médecin malgré lui en 6e et je n'irai pas jusqu'à dire que ça passait crème, mais enfin presque tout le monde s'en tirait correctement (tiens, on a même été un certain nombre à jouer Molière au club théâtre, y compris mes petits camarades de la té-ci. J'étais la seule fille de prof de la classe.)
En club théâtre l'autre jour, j'ai donné un exercice qui jouait sur les émotions à exprimer. À chaque fois que je donnais une nouvelle émotion, j'ai dû l'expliquer : mélancolique, lunatique, radieux, peiné, indigné... Il n'y a que "joyeux", "en colère" et "triste" qui sont passés sans problèmes :| Un groupe de gentilles petites cinquièmes, bonnes élèves et motivées.
Je peux multiplier les exemples. Le problème, c'est qu'à huit ans ils lisaient Léa Passion cheval (ou je ne sais trop quoi) au lieu de la Comtesse de Ségur, qu'ils regardaient Gulli au lieu des Disney des années cinquante (quand je passe la fin de Merlin l'Enchanteur en 5e je dois expliquer à peu près un mot par phrase ; si je leur mettais Robin des Bois "Tudieu, je n'ai pas d'autre couvre-chef", "Billevesées, des bandits femelles à présent !", ils tomberaient à la renverse), et que maintenant ils lisent Naruto au lieu de lire Tintin. Forcément, le nourrissage n'y est plus. Et mes petits camarades de banlieue, qui ne lisaient sans doute pas non plus tous Tintin ou la Comtesse de Ségur, avaient au moins l'avantage de ne pas dire "j'veux pas savoir" quand le professeur avait l'audace de leur présenter un mot nouveau. Au risque de passer pour une vieille mégère en mode "c'était mieux avant", et de me voir renvoyer à la face que c'est uniquement mon expérience personnelle et que les jeunes ont beaucoup plus de vocabulaire qu'avant parce qu'ils savent dire "stylé" et "chanmé" (soit), il me semble quand même qu'il suffit d'ouvrir n'importe quel bouquin en librairie, ou d'allumer Disney Channel, pour constater empiriquement que l'instruction des jeunes n'est plus vraiment la priorité des éditeurs, et que ça a les conséquences que ça a.
(Je dois constater un grand progrès depuis que j'ai la collection complète des Astérix dans ma classe et qu'ils se ruent dessus pour le quart d'heure lecture, j'arrive beaucoup plus facilement à caser qu'"il ne faut jamais parler sèchement à un Numide" quand je parle de Jugurtha. J'attaque le chapitre sur César, je vais voir si je dois faire beaucoup d'explications sur "il affranchit le rubicond"... Comme quoi quand on leur donne des trucs à lire...)
Edit : on a pensé en même temps à Robin des Bois
En club théâtre l'autre jour, j'ai donné un exercice qui jouait sur les émotions à exprimer. À chaque fois que je donnais une nouvelle émotion, j'ai dû l'expliquer : mélancolique, lunatique, radieux, peiné, indigné... Il n'y a que "joyeux", "en colère" et "triste" qui sont passés sans problèmes :| Un groupe de gentilles petites cinquièmes, bonnes élèves et motivées.
Je peux multiplier les exemples. Le problème, c'est qu'à huit ans ils lisaient Léa Passion cheval (ou je ne sais trop quoi) au lieu de la Comtesse de Ségur, qu'ils regardaient Gulli au lieu des Disney des années cinquante (quand je passe la fin de Merlin l'Enchanteur en 5e je dois expliquer à peu près un mot par phrase ; si je leur mettais Robin des Bois "Tudieu, je n'ai pas d'autre couvre-chef", "Billevesées, des bandits femelles à présent !", ils tomberaient à la renverse), et que maintenant ils lisent Naruto au lieu de lire Tintin. Forcément, le nourrissage n'y est plus. Et mes petits camarades de banlieue, qui ne lisaient sans doute pas non plus tous Tintin ou la Comtesse de Ségur, avaient au moins l'avantage de ne pas dire "j'veux pas savoir" quand le professeur avait l'audace de leur présenter un mot nouveau. Au risque de passer pour une vieille mégère en mode "c'était mieux avant", et de me voir renvoyer à la face que c'est uniquement mon expérience personnelle et que les jeunes ont beaucoup plus de vocabulaire qu'avant parce qu'ils savent dire "stylé" et "chanmé" (soit), il me semble quand même qu'il suffit d'ouvrir n'importe quel bouquin en librairie, ou d'allumer Disney Channel, pour constater empiriquement que l'instruction des jeunes n'est plus vraiment la priorité des éditeurs, et que ça a les conséquences que ça a.
(Je dois constater un grand progrès depuis que j'ai la collection complète des Astérix dans ma classe et qu'ils se ruent dessus pour le quart d'heure lecture, j'arrive beaucoup plus facilement à caser qu'"il ne faut jamais parler sèchement à un Numide" quand je parle de Jugurtha. J'attaque le chapitre sur César, je vais voir si je dois faire beaucoup d'explications sur "il affranchit le rubicond"... Comme quoi quand on leur donne des trucs à lire...)
Edit : on a pensé en même temps à Robin des Bois
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An education was a bit like a communicable sexual disease. It made you unsuitable for a lot of jobs and then you had the urge to pass it on. - Terry Pratchett, Hogfather
"- Alors, Obélix, l'Helvétie c'est comment ? - Plat."
- AscagneGrand sage
@pseudo-intello : Et les Disney actuels ? Je pose d'autant plus la question que Disney fait des adaptations de ses propres classiques ces temps-ci, ce qui facilite la comparaison.
- DeliaEsprit éclairé
kiwi a écrit:Plus que des expressions, dont certaines sont en effet complètement désuètes, c'est surtout du vocabulaire simple qui n'est plus maîtrisé aujourd'hui...
Il y a quelques semaines, j'ai été effarée par les 3/4 des élèves d'une classe de 5ème qui n'ont pas compris (et donc m'ont demandé bien 20 fois durant l'heure...) : "Je comprends pas "Hachure sur la carte une conquête arabe de ton choix." "Hachure" a posé problème. "Hachure" bon sang...
Hachure : du fond de mon agrégation ès lettres Classiques, j'ai dû relire deux fois pour saisir qu'il s'agissait de l'impératif du verbe hachurer et non du substantif hachure. Hachure sur la carte, de prime abord, ne présentait aucun sens mon esprit.
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Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampaté Ba
- trompettemarineMonarque
La disparition de l'enseignement des langues latine et grecque joue aussi énormément.
- RogerMartinBon génie
Je propose à tout le monde d'aller regarder un JT des années 70, et une Une du Monde du début des années 80, puis de comparer avec un JT d'une chaîne publique et la première page du Monde en kiosque.
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Yo, salut ma bande ! disait toujours le Samouraï.
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- RendashBon génie
dita a écrit:Néoprofs en 2100 (si ça existe encore).
Tiens, c'est bizarre, les élèves ne comprennent pas ce que signifie "wech, gros", alors que c'est une expression des plus courantes qui était très souvent utilisée, autrefois. Evidemment, tout ce qui est en italique est traduit de la langue cyborg quisera sûrement utilisée à cette époque.
Qui sait, peut-être fera-t-on une thèse sur l'étymologie et l'orthographe de la locution : "gros", " 'gro" (pour negro) ou "kho" ?
Jenny a écrit:Je suis une adepte de « peu me chaut » en classe. (La tête des élèves vaut systématiquement le détour. :lol: )
"Peu me chaut", ou "je n'en ai cure".
Mais je confesse qu'un "si je courais aussi vite que je m'en fous" m'a échappé à une ou deux reprises.
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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
- gauvain31Empereur
trompettemarine a écrit:La disparition de l'enseignement des langues latine et grecque joue aussi énormément.
+10000 puisqu'elle permet (j'en parle au présent ) de comprendre l'origine des mots nouveau ou d'apparence compliqué, pour mieux les retenir ensuite. Je le fais systématiquement en SVT quand j'emploie un mot scientifique nouveau.Le latin appris au collège et au lycée m'a sauvé de pas mal de choses
On a donc des élèves effectivement qui baignent dans un univers de mots de plus en plus pauvre (mots censés être connus de tous ) qui rend la marche de plus en plus difficile dès lors qu'on veut s'attaquer à du Molière ou du Diderot. Ou qui paniquent en voyant un mot nouveau sans en essayait naturellement de connaître l'étymologie....
J'avais vu un reportage sur FT il y a quelques années où on voyait une jeune fille chez l'orthophoniste qui avait acquis un vocabulaire tellement spécifique de sa cité , que son langage en devenait incompréhensible pour la majorité. Alors oui elle a du vocabulaire, des mots , mais c'est SON vocabulaire et ce sont SES mots avec SA façon de s'exprimer (qui ne faisait rire qu'elle d'ailleurs, le reportage était flippant). Bref elle parlait un langage à elle.
Voilà ce qu'on fait quand on appauvrit le langage commun : pas seulement des exclus de la culture qui peut finir en exclusion tout court ( comment travailler si on n'est pas capable de comprendre les consignes du patron ou d'un client ): On en fait en réalité des "handicapés des mots "
- CeladonDemi-dieu
Dans un contexte où un élève qui connaît un mot de plus que l'ensemble de la classe passe pour un intello, un boloss, on peut raisonnablement se dire que l'autofreinage bat son plein, non ?
- SphinxProphète
Ça pour le coup, autant c'était le cas dans le collège où j'étais élève, autant ce n'est pas du tout le cas dans le collège où j'enseigne (en tout cas pas dans une majorité des classes.) Les cancres ont une espèce de respect pour les "intellos" qu'ils considèrent comme une espèce à part (du coup, l'avantage c'est qu'il n'y a pas besoin de faire des efforts, puisque par nature on ne peut pas arriver à être comme eux.)
- Spoiler:
- Entendu de la part d'un de mes "cancres" à propos d'un des trois bons de ma classe de 3e : "Lui, j'étais dans sa classe en CM1, c'est un professionnel."
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An education was a bit like a communicable sexual disease. It made you unsuitable for a lot of jobs and then you had the urge to pass it on. - Terry Pratchett, Hogfather
"- Alors, Obélix, l'Helvétie c'est comment ? - Plat."
- RosanetteEsprit éclairé
Sur les 500 mots de vocabulaire qu'auraient certains jeunes (regard appuyé), attention quand même :
(livre à mettre dans tous les CDI au passage)
(livre à mettre dans tous les CDI au passage)
- Fesseur ProGuide spirituel
Ça fonctionne aussi avec nos cours.RogerMartin a écrit:Je propose à tout le monde d'aller regarder un JT des années 70, et une Une du Monde du début des années 80, puis de comparer avec un JT d'une chaîne publique et la première page du Monde en kiosque.
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Pourvu que ça dure...
- JennyMédiateur
Rendash a écrit:Jenny a écrit:Je suis une adepte de « peu me chaut » en classe. (La tête des élèves vaut systématiquement le détour. :lol: )
"Peu me chaut", ou "je n'en ai cure".
Mais je confesse qu'un "si je courais aussi vite que je m'en fous" m'a échappé à une ou deux reprises.
J'aime bien ! :lol:
- CarabasVénérable
C'est en effet ce que je lui avais dit.ysabel a écrit:Carabas a écrit:Pareil. Ou ceux qui considèrent que, parce qu'ils ne connaissent pas, ça n'existe pas, ou c'est soutenu ou autre...Jenny a écrit:Ce qui m’énerve, c’est surtout, comme Sphinx et Lefteris, le refus d’apprendre de nouveaux mots.
Je me souviens d'une camarade en hypokhâgne qui ne connaissait pas "tomber des hallebardes" et qui trouvait comme excuse que c'était parce que c'était soutenu. Bah, non, désolée, c'est plutôt familier.
Beaucoup moins que "pleuvoir comme vache qui pisse" !
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Les chances uniques sur un million se réalisent neuf fois sur dix.
Terry Pratchett
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