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- CeladonDemi-dieu
Ouf, elles vont s'excuser. Quand on se représente la somme de stress et de maîtrise de soi qu'il a fallu à cette enseignante en la circonstance, c'est bien le moins.
Bien entendu il ne s'agit pas de troquer une injustice contre une autre, mais si la loi ne prévoit pas d'obligation d'éducation (visiblement ces deux personnes en manquent gravement), et de sanction avec réparation, cela revient, déplacement de la victime ou pas, à pénaliser la victime. C'est délicat je sais, mais ma conviction c'est que c'est la victime qui prime. Toujours. Et que l'injustice, c'est elle qui l'a subie.
Bien entendu il ne s'agit pas de troquer une injustice contre une autre, mais si la loi ne prévoit pas d'obligation d'éducation (visiblement ces deux personnes en manquent gravement), et de sanction avec réparation, cela revient, déplacement de la victime ou pas, à pénaliser la victime. C'est délicat je sais, mais ma conviction c'est que c'est la victime qui prime. Toujours. Et que l'injustice, c'est elle qui l'a subie.
- ZagaraGuide spirituel
Ben c'est un argument de la pente glissante. C'est sa fin annoncée, et son idée-même, qui est contraire aux principes du droit, pas d'autres fins supposées. Quant à "partager des sentiments" : on ne fait pas de bonne législation pénale à base de sentiments. Tout l'effondrement de la barrière entre exécutif et judiciaire depuis Sarko vient de lois d'exception ou de circonstances votées pour flatter les passions de gens qui ne connaissent rien au droit. Et on se retrouve aujourd'hui avec des administrations policières qui jugent et punissent, sans que le juge judiciaire ne soit jamais dans la boucle : bien ouèj on a restauré une forme de droit pré-moderne en matière disciplinaire (c'est ma spéc donc je ne dis pas ça à la légère), et ça n'a pris que 15 ans.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Zagara a écrit:Ben c'est un argument de la pente glissante. C'est sa fin annoncée, et son idée-même, qui est contraire aux principes du droit, pas d'autres fins supposées.
Dans la mesure où j'ai écrit exactement le contraire et où, donc, je suis en accord avec ta position (en l'exprimant autrement), je ne sais pas de quoi tu parles!
Quant à "partager des sentiments" : on ne fait pas de bonne législation pénale à base de sentiments.
Certes. Cela étant, on est sur un forum de profs: et il se trouve que lorsqu'une collègue est agressée et menacée de mort, beaucoup éprouvent une émotion et des sentiments. Ne pas en tenir compte, c'est passer à côté d'une partie de la réalité: c'est tout le problème de la victimation, qui ne peut que s'accroître lorsque les pouvoirs publics ne tiennent pas des discours fort et répétés, si possible assortis de mesures concrètes de protection, lorsque les agents des services publics sont agressés. Il se trouve que, concernant l'enseignement, il n'y a guère et au mieux que des discours locaux, mais pas de réaction sur le plan national. Ce qui démoralise le corps enseignant.
Tout l'effondrement de la barrière entre exécutif et judiciaire depuis Sarko vient de lois d'exception ou de circonstances votées pour flatter les passions de gens qui ne connaissent rien au droit. Et on se retrouve aujourd'hui avec des administrations policières qui jugent et punissent, sans que le juge judiciaire ne soit jamais dans la boucle : bien ouèj on a restauré une forme de droit pré-moderne en matière disciplinaire (c'est ma spéc donc je ne dis pas ça à la légère), et ça n'a pris que 15 ans.
Ça n'est pas faux et la demande de répression à outrance, en dépit du droit et des principes de justice est très forte dans l'opinion publique. Ça a d'ailleurs (re)commencé avant l'ère Sarkozy: sauf que, dans les années 80, les demandes de forte répression n'étaient pas encore majoritaires: mais Pasqua auparavant, et avant lui Poniatowski, et, encore avant lui, Marcellin, n'étaient pas précisément des enfants de choeur. Il se trouve que, durant une période qui va des environs de 1975 au milieu des années 90, la demande de répression policière et judiciaire avait un peu reflué: elle est redevenuz ce qu'elle était auparavant, à mon avis, et même un peu plus intense. Les responsables politiques qui prêchent la répression à outrance et en dépit du droit s'appuient sur une large partie de l'opinion publique, et ce, dans un grand nombre des partis politiques existant.
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Si tu vales valeo.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Celadon a écrit:Ouf, elles vont s'excuser. Quand on se représente la somme de stress et de maîtrise de soi qu'il a fallu à cette enseignante en la circonstance, c'est bien le moins.
Bien entendu il ne s'agit pas de troquer une injustice contre une autre, mais si la loi ne prévoit pas d'obligation d'éducation (visiblement ces deux personnes en manquent gravement), et de sanction avec réparation, cela revient, déplacement de la victime ou pas, à pénaliser la victime. C'est délicat je sais, mais ma conviction c'est que c'est la victime qui prime. Toujours.
Je ne pense pas que l'on puisse simplifier à ce point. Ainsi, par ex., il faudrait aussi, dans la logique que tu évoques, tenir compte de “l'intérêt supérieur de l'enfant”, non pas seulement de la forme et de la lettre de la loi et des codes, mais de son esprit et des principes qui les commandent.
Je t'avoue aussi que je ne me représente pas bien ce que tu appelles une obligation d'éducation: tu penserais à quoi?
Pour ma part, je pense plutôt à protéger la collègue victime d'agression par des mesures concrètes — y compris de réparation du préjudice subi passivement par le fait d'un “déplacement”, qu'il faudrait d'ailleurs nommer autrement: “protection du personnel”, “mesure négociée de protection”. Et il faudrait y réfléchir dans le détail, de façon à ne pas créer un outil de protection susceptible de se retrouver utilisé comme un outil de répression et de sanction. Là, je trouve fort de café qu'un outil de sanction puisse être envisagé comme outil de protection et que cela ne gêne en rien tel ou tel responsable hiérarchique, et que nul n'éprouve le besoin parmi eux d'expliquer publiquement de quoi il s'agit!.
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Si tu vales valeo.
- CeladonDemi-dieu
Le rappel à la loi sera-t-il suffisant dans ce cas précis ? L'a-t-il été lors d'autres agressions ?
D'où peut bien venir ce sentiment d'impunité qui laisse libre cours à toutes les violences verbales et autres (la mère frappe l'enseignante, tout de même !) ? Pourquoi se trouve-t-on confronté si souvent à ce genre de situation avec si peu de moyens de réaction à part déplacer la victime sans même préciser que c'est au titre de protection (illusoire d'ailleurs, le monde est petit et si l'agresseur veut la retrouver...) bref. Il convient tout de même d'examiner de près les moyens à disposition et s'ils sont insuffisants (on doit bien disposer de stats, on en a pour tout), de les réajuster, non ?
D'où peut bien venir ce sentiment d'impunité qui laisse libre cours à toutes les violences verbales et autres (la mère frappe l'enseignante, tout de même !) ? Pourquoi se trouve-t-on confronté si souvent à ce genre de situation avec si peu de moyens de réaction à part déplacer la victime sans même préciser que c'est au titre de protection (illusoire d'ailleurs, le monde est petit et si l'agresseur veut la retrouver...) bref. Il convient tout de même d'examiner de près les moyens à disposition et s'ils sont insuffisants (on doit bien disposer de stats, on en a pour tout), de les réajuster, non ?
- RandoschtroumfNiveau 10
Changer d'école un enfant est une décision du ressort de l'IEN, et qui ne nécessite absolument pas l'attribution d'un nouveau logement, ni un déménagement (en particulier en ville!).
D'après un mail syndical reçu ce jour, c'est d'ailleurs ce qui aurait été finalement décidé.
D'après un mail syndical reçu ce jour, c'est d'ailleurs ce qui aurait été finalement décidé.
- RandoschtroumfNiveau 10
Sur le fond, c'est ce que j'appelle : les enfants tyrans des parents rois, la nouvelle génération "j'ai le droit".
Ce qui m'inquiète particulièrement est que je trouve les agressions verbales, mises en cause systématiques de certains parents récurrentes.
Ce qui m'inquiète particulièrement est que je trouve les agressions verbales, mises en cause systématiques de certains parents récurrentes.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Celadon a écrit:Le rappel à la loi sera-t-il suffisant dans ce cas précis ? L'a-t-il été lors d'autres agressions ?
D'où peut bien venir ce sentiment d'impunité qui laisse libre cours à toutes les violences verbales et autres (la mère frappe l'enseignante, tout de même !) ? Pourquoi se trouve-t-on confronté si souvent à ce genre de situation avec si peu de moyens de réaction à part déplacer la victime sans même préciser que c'est au titre de protection (illusoire d'ailleurs, le monde est petit et si l'agresseur veut la retrouver...) bref. Il convient tout de même d'examiner de près les moyens à disposition et s'ils sont insuffisants (on doit bien disposer de stats, on en a pour tout), de les réajuster, non ?
Le désir de répression, dans une société, c'est un fait social, qui à mon avis se trouve intimement lié au désir d'agression et à la délinquance. Il s'agit, dirait Durkheim, d'une pathologie collective: l'absence de confiance (de croyance) dans les institutions entraîne une anomie consistant non pas dans le désir de transgresser les lois, mais dans le fait de les tenir pour nulles et non avenues, et donc de “régler ses comptes” en dehors de la loi: c'est pourquoi, si un durkheimien rappellera qu'il y a nécessairement un “taux de criminalité normal, dans toute société, il y a aussi des périodes de pathologie.
Beaucoup d'études semblent indiquer que si la délinquance, en particulier les agressions contre les personnes et les biens, connaissent une certaine hausse depuis 2 ou 3 décennies, même si le nombre et l'intensité des actes n'est pas ce qu'il y a de plus élevé dans l'histoire (en général, ni celle de France en particulier, ni sur la durée, ni sur une période courte, disons le dernier siècle), c'est surtout le type de cette délinquance (déprédation, agressions “gratuites”, etc.) qui est à prendre en compte.
Ne serait-ce que parce que ce type de délinquance inquiète énormément et renforce avec intensité le sentiment de victimisation: on peut “comprendre” que quelqu'un vole de l'argent dans la caisse d'un magasin, on voit bien quel est son mobile; en revanche, la grand-mère qui agresse et menace de mort une collègue qui s'est contentée de séparer deux gamins en train de s'empailler, puis de les tancer, sous prétexte qu'elle aurait “porté la main sur l'enfant”, c'est à la fois totalement irrationnel et incompréhensible. Du coup, chacun se sent potentiellement menacé: ça peut arriver à n'importe qui, n'importe quand — sans avoir “rien fait” pour le provoquer et sans pouvoir “rien faire” pour l'éviter. Et, évidemment, l'absence de mesures concrètes de protection engagées par la hiérarchie ne fait que renforcer ce cercle vicieux. Ce qui est comparable, ici, c'est l'aspect disproportionné ou irrationnel de cette délinquance: des pompiers soumis à attaques alors qu'ils viennent éteindre un incendie ou secourir un blessé; des médecins urgentistes agressés à 2h du matin alors qu'ils travaillent depuis une ou deux dizaines d'heures sans presque aucune coupure; des services municipaux d'entretien pris pour cible alors qu'ils vont s'occuper des espaces verts et de l'éclairage public — ce sont des agressions sans “mobile” autre que d'exprimer une violence forte et primaire.
Les gendarmes et les policiers le savent fort bien, car ça fait des années qu'ils sont victimes d'agressions à plus ou moins “basse intensité” (disons plutôt: “plus”). C'est pourquoi leurs enfants évitent de mentionner la profession de leurs parents (le phénomène se constate maintenant dès l'élémentaire), c'est pourquoi ils ne vont pas faire leurs courses n'importe quand ni n'importe où, c'est pourquoi ils se font mettre sur listes protégées, ne sortent pas dans n'importe quelle condition, voire les épouses et les enfants de policiers ou gendarmes ne sortent pas seuls, pas le soir, etc. Et la situation est d'autant plus difficile qu'il est strictement impossible d'y remédier ni rapidement, ni par des mesures de simple répression pénale: si les peines de prison, même fermes, ou d'amendes, mêmes élevées, avaient un effet dissuasif, on s'en serait aperçu. Que la violence sociale soit un vrai problème, ou qu'en tout cas elle devrait l'être pour les responsables politiques, j'en suis persuadé. Mais en attendant, je trouverais légitime de penser au moins à des mesures de protection et à un renforcement du discours — au niveau national — sur ce genre de phénomènes (sans me faire aucune illusion sur la possibilité que ça ne soit que du vent).
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Si tu vales valeo.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Randoschtroumf a écrit:Changer d'école un enfant est une décision du ressort de l'IEN, et qui ne nécessite absolument pas l'attribution d'un nouveau logement, ni un déménagement (en particulier en ville!).
D'après un mail syndical reçu ce jour, c'est d'ailleurs ce qui aurait été finalement décidé.
J'entends bien: mais ça ne règle absolument pas le problème de la sécurité de la collègue — ça ne change pas le fait que tel ou tel membre de la famille concernée peut toujours entreprendre de se “venger”…
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- CeladonDemi-dieu
Décision a minima, as usual. L'agresseur à peine pénalisé, la victime toujours exposée.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Celadon a écrit:Décision a minima, as usual. L'agresseur à peine pénalisé, la victime toujours exposée.
Je ne suis pas d'accord: l'agresseur presque toujours pénalisé (s'il y a enquête permettant d'établir la matière) — la victime entre parfois et souvent encore exposée… Mais c'est sans doute une question de “sensibilité” de ma part, en même temps que de principes.
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Si tu vales valeo.
- Ramanujan974Érudit
epekeina.tes.ousias a écrit:Et la situation est d'autant plus difficile qu'il est strictement impossible d'y remédier ni rapidement, ni par des mesures de simple répression pénale: si les peines de prison, même fermes, ou d'amendes, mêmes élevées, avaient un effet dissuasif, on s'en serait aperçu.
Cette phrase me semble douteuse, parce cela n'a jamais été appliqué.
Ni la prison, ni les amendes.
On juge avec mansuétude les primo-délinquants alors que c'est là qu'on devrait frapper le plus fort : supprimons le permis de conduire pendant 10 ans à une personne se faisant contrôler avec 1g d'alcool (en le prévenant que la peine se transformera en 10 ans de prison s'il récidive), c'est la garantie que cette personne ne recommencera pas pendant 10 ans.
- ZagaraGuide spirituel
La rhétorique du "laxisme" est aussi vieille que l'exercice de la justice. On la trouve déjà dans des centaines de documents médiévaux.... pour les bonnes gens, les criminels ne sont jamais "assez" punis, même quand on les éventre, leur montre leurs entrailles et les pend ensuite.
Réfléchir en terme de sévérité VS clémence est la pire manière de poser la question judiciaire ; c'est un bel exemple de faux débat, totalement soumis à l'appréciation personnelle.
Réfléchir en terme de sévérité VS clémence est la pire manière de poser la question judiciaire ; c'est un bel exemple de faux débat, totalement soumis à l'appréciation personnelle.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Ramanujan974 a écrit:epekeina.tes.ousias a écrit:Et la situation est d'autant plus difficile qu'il est strictement impossible d'y remédier ni rapidement, ni par des mesures de simple répression pénale: si les peines de prison, même fermes, ou d'amendes, mêmes élevées, avaient un effet dissuasif, on s'en serait aperçu.
Cette phrase me semble douteuse, parce cela n'a jamais été appliqué.
Ni la prison, ni les amendes.
On juge avec mansuétude les primo-délinquants alors que c'est là qu'on devrait frapper le plus fort : supprimons le permis de conduire pendant 10 ans à une personne se faisant contrôler avec 1g d'alcool (en le prévenant que la peine se transformera en 10 ans de prison s'il récidive), c'est la garantie que cette personne ne recommencera pas pendant 10 ans.
Les prisons débordent, comme on sait, et les juges d'application des peines ne parviennent plus à travailler correctement — sans compter les magistrats des cours correctionnelles et des autres, qui ont affaire à une marée croissante d'affaires, sans que les durcissements continus des lois et des peines parviennent à endiguer le phénomène…
Donc, je maintiens mon propos: on sait très bien que le durcissement indéfini de la répression et des peines n'élimine pas le phénomène. En revanche, il contribue directement à l'augmentation de la carcéralisation d'une partie croissante de la population: et ne t'en fais pas, je suis parfaitement conscient qu'une bonne partie de l'opinion publique rétorquera que “et alors, où est le problème”, et sera prête à voir monter le pourcentage de la population carcérale, éventuellement même à places constantes, sans moyen et peu importe les conséquences (“ils n'avaient qu'à pas…”)… Ça n'est pas la première fois que ça se produit, la France n'est pas le seul pays où ce genre de phénomène se produit: on devrait prendre la peine et la précaution d'aller regarder de plus près les conséquences… Mais ça, ça serait le cas si les êtres humains étaient collectivement capables de raisonner et de se raisonner — ce qui n'est pas toujours le cas.
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Si tu vales valeo.
- Ramanujan974Érudit
epekeina.tes.ousias a écrit:Ramanujan974 a écrit:epekeina.tes.ousias a écrit:Et la situation est d'autant plus difficile qu'il est strictement impossible d'y remédier ni rapidement, ni par des mesures de simple répression pénale: si les peines de prison, même fermes, ou d'amendes, mêmes élevées, avaient un effet dissuasif, on s'en serait aperçu.
Cette phrase me semble douteuse, parce cela n'a jamais été appliqué.
Ni la prison, ni les amendes.
On juge avec mansuétude les primo-délinquants alors que c'est là qu'on devrait frapper le plus fort : supprimons le permis de conduire pendant 10 ans à une personne se faisant contrôler avec 1g d'alcool (en le prévenant que la peine se transformera en 10 ans de prison s'il récidive), c'est la garantie que cette personne ne recommencera pas pendant 10 ans.
Les prisons débordent, comme on sait, et les juges d'application des peines ne parviennent plus à travailler correctement — sans compter les magistrats des cours correctionnelles et des autres, qui ont affaire à une marée croissante d'affaires, sans que les durcissements continus des lois et des peines parviennent à endiguer le phénomène…
Donc, je maintiens mon propos: on sait très bien que le durcissement indéfini de la répression et des peines n'élimine pas le phénomène. En revanche, il contribue directement à l'augmentation de la carcéralisation d'une partie croissante de la population: et ne t'en fais pas, je suis parfaitement conscient qu'une bonne partie de l'opinion publique rétorquera que “et alors, où est le problème”, et sera prête à voir monter le pourcentage de la population carcérale, éventuellement même à places constantes, sans moyen et peu importe les conséquences (“ils n'avaient qu'à pas…”)… Ça n'est pas la première fois que ça se produit, la France n'est pas le seul pays où ce genre de phénomène se produit: on devrait prendre la peine et la précaution d'aller regarder de plus près les conséquences… Mais ça, ça serait le cas si les êtres humains étaient collectivement capables de raisonner et de se raisonner — ce qui n'est pas toujours le cas.
Tu maintiens ton propos, je maintiens le mien : il n'y a ni durcissement de la répression, ni des peines (sauf cas particulier en ce moment avec les gilets jaunes et autres manifestants, je te l'accorde)
Peut-être que les magistrats des cours correctionnelles ne seraient pas débordés s'ils n'étaient pas confrontés aux mêmes personnes jugées pour la 15e fois. Qu'on ne me dise pas que la répression est féroce quand une personne arrive à avoir plus de 20 mentions à son casier judiciaire.
Je suis d'accord avec toi sur le fait que les prisons sont surchargées, mais uniquement parce qu'on y envoie des gens qui n'ont rien à y faire. Deux exemples :
- ceux qui relèvent de l'hôpital psy
- les types comme Balkany, pour qui une amende colossale est la seule peine valable.
- ZagaraGuide spirituel
il y a un durcissement continu du code pénal depuis 20 ans, faut arrêter de raconter n'importe quoi.
La surcharge des prisons est l'effet mécanique de ce durcissement, tu cherches midi à quatorze heure pour trouver d'autres (fausses) causes.
La surcharge des prisons est l'effet mécanique de ce durcissement, tu cherches midi à quatorze heure pour trouver d'autres (fausses) causes.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Ramanujan974 a écrit:
Tu maintiens ton propos, je maintiens le mien : il n'y a ni durcissement de la répression, ni des peines (sauf cas particulier en ce moment avec les gilets jaunes et autres manifestants, je te l'accorde)
Peut-être que les magistrats des cours correctionnelles ne seraient pas débordés s'ils n'étaient pas confrontés aux mêmes personnes jugées pour la 15e fois. Qu'on ne me dise pas que la répression est féroce quand une personne arrive à avoir plus de 20 mentions à son casier judiciaire.
Je suis d'accord avec toi sur le fait que les prisons sont surchargées, mais uniquement parce qu'on y envoie des gens qui n'ont rien à y faire. Deux exemples :
- ceux qui relèvent de l'hôpital psy
- les types comme Balkany, pour qui une amende colossale est la seule peine valable.
C'est objectivement faux — selon les données mêmes du ministère de la justice:
http://www.justice.gouv.fr/art_pix/Statistique_juillet_2019_trim.pdf => p.7
en 20 ans, les incarcérés sont passés de ~58000 à ~72000 soit ~14000 incarcérés de plus (je passe sur la baisse épisodique sur 3 années): soit une augmentation de ~25%
Et cela sans compter le système de la composition pénale (qui ne comprend qu'en partie des peines d'incarcération fermes et exécutées), qui touche un peu moins de 500000 cas/an, les peines de prison avec sursis, etc.
Donc, non, même en dehors des cas que tu signales à juste titre comme scandaleux (incarcération de malades mentaux pour trouble à l'ordre public), le taux de répression pénale, dans ses peines les plus sévères (privation de liberté) est en augmentation constante depuis 20 ans. À quoi j'ajoute, phénomène encore plus inquiétant, que le taux d'incarcération des prévenus (non encore condamnés) est, lui aussi, en augmentation constante. Et que la France n'est certainement pas un pays “laxiste”: sur les ~200 états recensés, les Etats-Unis occupent la première place et le plus fort taux d'incarcération du monde, avec un taux de plus 20% d'étrangers non nationaux incarcérés, ce qui est également élevé (la Chine fait 2°, le Brésil 3° et la Russie 4°): en Europe, la France n'est surpassée que par l'Angleterre et le Pays de Galles.
À quoi j'ajoute, pour finir que le taux de criminalité en France (comme dans pas mal de pays de niveau industriel et économique comparable), après être resté assez stable (de 10 à 14 pour 1000) de 45 au milieu des années 60, a brusquement augmenté pour atteindre environ 65 à 70 pour 1000 — jusque vers le début des années 2000, mais qu'entre 2003 et 2012, il a légèrement baissé (~55 pour 1000). Le phénomène qui, en revanche est fortement souligné par les études criminologiques, et qui est très difficile à traiter, c'est: 1) la statistique des délits de petite et moyenne délinquance (en particulier contre les personnes et le biens); 2) le caractère extrêmement hétérogène des statistiques de crimes et de délits selon les lieux, les villes etc.
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- epekeina.tes.ousiasModérateur
Zagara a écrit:il y a un durcissement continu du code pénal depuis 20 ans, faut arrêter de raconter n'importe quoi.
La surcharge des prisons est l'effet mécanique de ce durcissement, tu cherches midi à quatorze heure pour trouver d'autres (fausses) causes.
N.B. Oui, tout à fait: et du code pénal, et des procédures (comparution immédiate par ex.) et des peines de substitution et de la composition pénal, et du % de garde à vue, et de l'incarcération longue ou semi-longue des simples prévenus. Ce qui contraste avec l'analyse que j'ai évoquée précédemment.
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Si tu vales valeo.
- ZagaraGuide spirituel
Je reprends la formule d'un magistrat : on est passé dans la pratique judiciaire de l'idée : "je préfère voir 10 coupables dehors qu'un innocent en prison" à ; "je préfère risquer de mettre 10 innocents en prison que de rater un coupable". Cette peur des magistrats de laisser des coupables dehors vient du climat instigué depuis 20 ans dans l'opinion publique par Sarko et les autres (le PS avec Valls et Hollande a été l'égal de Sarko), et du traumatisme des attentats islamiques (qui par leur existence seule modifie les modes d'administration de la peine de délits et crimes n'ayant absolument rien à voir avec eux).
- William FosterExpert
Ramanujan974 a écrit:On juge avec mansuétude les primo-délinquants alors que c'est là qu'on devrait frapper le plus fort : supprimons le permis de conduire pendant 10 ans à une personne se faisant contrôler avec 1g d'alcool (en le prévenant que la peine se transformera en 10 ans de prison s'il récidive), c'est la garantie que cette personne ne recommencera pas pendant 10 ans.
Ta "garantie" est déjà mise en défaut par des récidivistes qui conduisent bourrés et sans permis car retiré.
Si quelqu'un en est déjà à conduire sans permis parce qu'on lui a retiré pour quelques temps, qu'est-ce que ça va changer pour lui qu'on le lui retire pour 10 ans ?
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Tout le monde me dit que je ne peux pas faire l'unanimité.
"Opinions are like orgasms : mine matters most and I really don't care if you have one." Sylvia Plath
Vérificateur de miroir est un métier que je me verrais bien faire, un jour.
- ZagaraGuide spirituel
L'argument de la dissuasion (exemplarité de la peine) est aussi vieille que la justice et a été prouvé inefficace il y a déjà cinquante ans.
- epekeina.tes.ousiasModérateur
C'est aussi pourquoi je considère le débat répression vs. douceur un leurre qui conduit à passer à côté. En particulier, en l'occurrence, pour notre collègue d'Agde, de la question des mesures de protection et d'accompagnement: car là, pas besoin de multiplier par N le nombre de places carcérales ni de réformer la procédure et les codes! Un peu de volonté politique permettrait de le faire.
Seulement non: il ne saurait en être question — on ne tout de même pas mettre un pognon de dingue à des trucs qui ne servent à rien, pour des profs qui se plaignent sans arrêt, sous prétexte qu'ils sont agressés, tabassés, menacés de mort, etc. Mieux vaut dire que c'est scandaleux, contraire aux valeurs de la République, allumer des bougies et déposer des nounours sur des mini-monuments servant d'objets transitionnels…
Seulement non: il ne saurait en être question — on ne tout de même pas mettre un pognon de dingue à des trucs qui ne servent à rien, pour des profs qui se plaignent sans arrêt, sous prétexte qu'ils sont agressés, tabassés, menacés de mort, etc. Mieux vaut dire que c'est scandaleux, contraire aux valeurs de la République, allumer des bougies et déposer des nounours sur des mini-monuments servant d'objets transitionnels…
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Si tu vales valeo.
- VerduretteModérateur
Le pompon, c'est que si l'enseignante n'était pas intervenue, et si un des gamins avait été blessé, on serait venu lui reprocher, ou à tout autre enseignant censé surveiller, de n'avoir rien fait...
Quoi qu'on fasse ou ne fasse pas, on est toujours en tort, ça finit par devenir fatigant.
J'aimerais savoir quel impact va avoir ce "déplacement" censé protéger la victime sur sa vie personnelle et professionnelle.
Et quel message envoyé aux autres élèves de l'école et à leur famille..
Quoi qu'on fasse ou ne fasse pas, on est toujours en tort, ça finit par devenir fatigant.
J'aimerais savoir quel impact va avoir ce "déplacement" censé protéger la victime sur sa vie personnelle et professionnelle.
Et quel message envoyé aux autres élèves de l'école et à leur famille..
- epekeina.tes.ousiasModérateur
Verdurette a écrit:J'aimerais savoir quel impact va avoir ce "déplacement" censé protéger la victime sur sa vie personnelle et professionnelle.
À ma connaissance, elle déménage ou se déplace sur un trajet à ses frais, sans compter les autres frais éventuels (de garde et d'acheminement de ses enfants scolarisés, si elle en a) — et, dans le présent cas, comme elle n'était pas directrice d'école, elle ne perd pas ce qui y est lié… Ça n'est pas retenu dans son dossier de fonctionnaire en tant que sanction (il ne manquerait plus que ça!), mais pour ce que j'en sais, c'est comme si elle avait, à titre privé, demandé sa mutation — la question du choix en moins, car, si on lui “propose” des postes, elle n'a pas trop le choix si rien ne lui convient.
Verdurette a écrit:Et quel message envoyé aux autres élèves de l'école et à leur famille..
C'est là qu'à mon avis, c'est le plus délétère — le message est: “on a puni les deux” (et même: “l'enseignant est moins puni, c'est dire si “ils” veulent étouffer le truc”, “faut pas demander ce qu'ils ont à se reprocher”).
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Si tu vales valeo.
- RendashBon génie
Zagara a écrit:Ben c'est un argument de la pente glissante. C'est sa fin annoncée, et son idée-même, qui est contraire aux principes du droit, pas d'autres fins supposées. Quant à "partager des sentiments" : on ne fait pas de bonne législation pénale à base de sentiments. Tout l'effondrement de la barrière entre exécutif et judiciaire depuis Sarko vient de lois d'exception ou de circonstances votées pour flatter les passions de gens qui ne connaissent rien au droit. Et on se retrouve aujourd'hui avec des administrations policières qui jugent et punissent, sans que le juge judiciaire ne soit jamais dans la boucle : bien ouèj on a restauré une forme de droit pré-moderne en matière disciplinaire (c'est ma spéc donc je ne dis pas ça à la légère), et ça n'a pris que 15 ans.
Ma raison me dit que tu as raison.
Mes tripes regrettent parfois le pilori et la charrettacaca que tu évoquais il y a peu.
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"Ce serait un bien bel homme s’il n’était pas laid ; il est grand, bâti en Hercule, mais a un teint africain ; des yeux vifs, pleins d’esprit à la vérité, mais qui annoncent toujours la susceptibilité, l’inquiétude ou la rancune, lui donnent un peu l’air féroce, plus facile à être mis en colère qu’en gaieté. Il rit peu, mais il fait rire. [...] Il est sensible et reconnaissant ; mais pour peu qu’on lui déplaise, il est méchant, hargneux et détestable."
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- "Une enseignante menacée après avoir diffusé une photo de Soprano" - Le Point (Le parisien)
- Collège Diderot (Besançon) : une enseignante agressée et menacée en plein cours par une mère d'élève.
- Agde (Hérault), quand la violence gangrène les écoles primaires.
- Albi : une enseignante poignardée à mort par la mère d'un élève
- Collège René Cassin (Agde) : les professeurs sont la cible de jets de pierres à la sortie de l'établissement.
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