- The PaperHabitué du forum
"Je suis si persuadée que l'Amour est une chose incommode que j'ai de la joie que mes amis et moi en soyons exempts", écrivait Mme de Lafayette (à Gilles Ménage, il me semble). C'est la Passion qui est condamnée, la princesse sait d'ailleurs qu'elle serait malheureuse parce que bientôt trompée dans un mariage d'amour avec Nemours. Néanmoins, sans pour autant croire au mariage d'amour, il y a bien une critique du mariage arrangé : c'est lui qui provoque le douloureux tiraillement entre Passion et Vertu. C'est lui qui force à dissimuler ses véritables sentiments parce qu'on appartient déjà à un autre. Dire qu'il y a une critique du mariage arrangé pour valoriser le mariage d'amour me semble être une erreur ; mais dire qu'il n'y a pas de critique du mariage arrangé me semble également en être une.
Pour ce qui est du tragique, je pense qu'il y a effectivement une dimension tragique, même si la fatalité ne repose pas ici sur des dieux grecs mais sur des concours de circonstances qui ne laissent jamais à la princesse la possibilité d'agir sereinement (elle ne maîtrise rien). Prenons la scène du bal. Si Nemours n'était pas arrivé en retard, si le roi n'avait pas imposé aux deux protagonistes de danser ensemble, ou si on leur avait laissé le temps de se présenter l'un à l'autre après la danse, le petit jeu de la dauphine pour embarrasser la princesse n'aurait pu avoir lieu. Si la princesse avait rencontré Nemours avant de se marier, elle ne se serait pas mariée avec le prince de Clèves (or elle rencontre Nemours peu après son mariage). L'agencement des événements pousse la princesse vers sa fin. La mort de sa mère la poussera à l'aveu au mari, aveu qui amènera la mort du mari, mort du mari qui empêche tout mariage d'amour avec Nemours tenu pour responsable, et qui ne peut donc mener qu'à se laisser mourir dans un couvent.
Pour ce qui est du tragique, je pense qu'il y a effectivement une dimension tragique, même si la fatalité ne repose pas ici sur des dieux grecs mais sur des concours de circonstances qui ne laissent jamais à la princesse la possibilité d'agir sereinement (elle ne maîtrise rien). Prenons la scène du bal. Si Nemours n'était pas arrivé en retard, si le roi n'avait pas imposé aux deux protagonistes de danser ensemble, ou si on leur avait laissé le temps de se présenter l'un à l'autre après la danse, le petit jeu de la dauphine pour embarrasser la princesse n'aurait pu avoir lieu. Si la princesse avait rencontré Nemours avant de se marier, elle ne se serait pas mariée avec le prince de Clèves (or elle rencontre Nemours peu après son mariage). L'agencement des événements pousse la princesse vers sa fin. La mort de sa mère la poussera à l'aveu au mari, aveu qui amènera la mort du mari, mort du mari qui empêche tout mariage d'amour avec Nemours tenu pour responsable, et qui ne peut donc mener qu'à se laisser mourir dans un couvent.
- NLM76Grand Maître
Merci The Paper pour ta réponse qui m'éclaire.
Je ne suis pas du tout convaincu par ton idée des "véritables sentiments". Cela ne me paraît pas du tout relever de l'univers psychologique de La princesse de Clèves. Quant à la dissimulation, elle ne m'apparaît pas dans ce livre présentée comme une conséquence, mais comme une cause : c'est par la dissimulation qu'on entretient le désir... Lequel n'est pas un véritable sentiment", mais tout ce qu'il y a de plus élaboré. Il est véritable bien sûr, mais pas au sens où il serait naturel, mais parce que dans l'humain, le seul sentiment véritable est celui qui civilisé, c'est-à-dire construit par l'homme : dans ce sens, c'est le fictif qui est vrai. Enfin, en l'espèce, si on veut vraiment évoquer la question du mariage arrangé, il me semble que le problème est justement qu'il est mal arrangé, et donc qu'il n'est pas arrangé, mais dérangé.
Pour ce qui est du tragique, je suis assez dubitatif quant à la réduction du tragique à l'idée de fatalité. Mais pourquoi pas. Ensuite, passer de la fatalité aux concours de circonstances, c'est un pas de plus qu'on pourrait concevoir, mais qui nous éloigne quand même considérablement de la tragédie.
Je reviens aussi sur le fait que la Princesse ne maîtriserait rien. On pourrait concevoir les choses ainsi. Mais il faudrait préciser ce qu'on entend par "elle" dans "elle ne maîtrise rien". Autrement dit, qu'est-ce que le sujet humain — ou qu'est-ce que le sujet humain du verbe "maîtriser" en matière de sentiments ? Et la réponse de Mme de Lafayette n'est pas pour moi qu'il s'agit d'un sujet ballotté par le destin, loin de là. Pour reprendre la scène du bal, je crois qu'on ne peut pas passer sur "Elle passa tout le jour des fiançailles à se parer." Il y a une part du sujet "elle" qui décide et maîtrise quand il s'agit de travailler au jeu de la séduction.
L'arrivée de la diva Nemours en retard n'est certes pas maîtrisée par l'héroïne; mais elle est — je ne vois pas comment en douter — parfaitement maîtrisée par le prince des séducteurs : il connaît toutes les techniques qui permettent d'être au centre des regards.
Que le roi leur "impose" de danser ensemble est effectivement essentiel ; mais le roi, je ne pense pas que ce soit la fatalité. Le roi, c'est bien davantage la société dans laquelle elle vit — c'est une société qui veut fabriquer du désir, une société qui veut faire jouer le désir.
Quant au jeu du roi et des reines pour s'amuser de l'embarras de la princesse, c'est bien un jeu, mais il me paraît bien plus relever de la comédie que de la tragédie. Ce jeu, Nemours, et il le montre à de nombreuses reprises plus tard, eût été très capable de le jouer à sa façon "en privé" — et notez bien que La Fayette ne dit pas qu'ils n'auraient pas eu le temps de se parler, mais qu'ils n'ont pas eu le temps de parler à d'autres : "sans leur donner le loisir de parler à personne", écrit-elle.
Enfin, si elle est embarrassée, c'est au moins pour moitié par sa propre faute — σφετέρῃ ἀτασθαλίῃ, par sa propre sottise, aurait dit Homère — celle qui tient à la vérité quand on est dans le monde du jeu. C'est cette naïveté qui en fait une proie plus désirable que les autres, une Tourvel pour l'espèce de Valmont qu'est Nemours. Mais c'est cette naïveté qui lui apporte les sommets d'extase qu'elle atteindra dans une espèce de perfection de la préciosité, de faire du désir sa demeure.
Oui, La Fayette montre bien que le sujet ne maîtrise pas, tout seul, le désir ; elle montre aux sujets qui lisent comment le jeu du désir s'articule, entre les manipulations de la société (pour faire vite) et le jeu que nous jouons avec ces manipulations.
Tu écris aussi : "Si la princesse avait rencontré Nemours avant de se marier, elle ne se serait pas mariée avec le prince de Clèves (or elle rencontre Nemours peu après son mariage). L'agencement des événements pousse la princesse vers sa fin. La mort de sa mère la poussera à l'aveu au mari, aveu qui amènera la mort du mari, mort du mari qui empêche tout mariage d'amour avec Nemours tenu pour responsable, et qui ne peut donc mener qu'à se laisser mourir dans un couvent." Pourquoi pas; mais en l'espèce, j'aurais envie d'appliquer l'adage "Avec des si, on met Paris en bouteille"... C'est que je ne suis pas certain qu'elle fût tombée amoureuse de Nemours si elle l'avait rencontré avant son mariage : la passion est d'autant plus forte qu'elle arrive à ce moment-là. D'autre part je suis encore plus dubitatif sur la passion qu'eût éprouvée Nemours pour une femme libre: s'il la désire, c'est d'abord parce qu'elle est une espèce de Tourvel inaccessible. Quant à l'enchaînement "mort de la mère" → "aveu au mari", il me paraît des moins inéluctables qu'on puisse imaginer !
Je ne suis pas du tout convaincu par ton idée des "véritables sentiments". Cela ne me paraît pas du tout relever de l'univers psychologique de La princesse de Clèves. Quant à la dissimulation, elle ne m'apparaît pas dans ce livre présentée comme une conséquence, mais comme une cause : c'est par la dissimulation qu'on entretient le désir... Lequel n'est pas un véritable sentiment", mais tout ce qu'il y a de plus élaboré. Il est véritable bien sûr, mais pas au sens où il serait naturel, mais parce que dans l'humain, le seul sentiment véritable est celui qui civilisé, c'est-à-dire construit par l'homme : dans ce sens, c'est le fictif qui est vrai. Enfin, en l'espèce, si on veut vraiment évoquer la question du mariage arrangé, il me semble que le problème est justement qu'il est mal arrangé, et donc qu'il n'est pas arrangé, mais dérangé.
Pour ce qui est du tragique, je suis assez dubitatif quant à la réduction du tragique à l'idée de fatalité. Mais pourquoi pas. Ensuite, passer de la fatalité aux concours de circonstances, c'est un pas de plus qu'on pourrait concevoir, mais qui nous éloigne quand même considérablement de la tragédie.
Je reviens aussi sur le fait que la Princesse ne maîtriserait rien. On pourrait concevoir les choses ainsi. Mais il faudrait préciser ce qu'on entend par "elle" dans "elle ne maîtrise rien". Autrement dit, qu'est-ce que le sujet humain — ou qu'est-ce que le sujet humain du verbe "maîtriser" en matière de sentiments ? Et la réponse de Mme de Lafayette n'est pas pour moi qu'il s'agit d'un sujet ballotté par le destin, loin de là. Pour reprendre la scène du bal, je crois qu'on ne peut pas passer sur "Elle passa tout le jour des fiançailles à se parer." Il y a une part du sujet "elle" qui décide et maîtrise quand il s'agit de travailler au jeu de la séduction.
L'arrivée de la diva Nemours en retard n'est certes pas maîtrisée par l'héroïne; mais elle est — je ne vois pas comment en douter — parfaitement maîtrisée par le prince des séducteurs : il connaît toutes les techniques qui permettent d'être au centre des regards.
Que le roi leur "impose" de danser ensemble est effectivement essentiel ; mais le roi, je ne pense pas que ce soit la fatalité. Le roi, c'est bien davantage la société dans laquelle elle vit — c'est une société qui veut fabriquer du désir, une société qui veut faire jouer le désir.
Quant au jeu du roi et des reines pour s'amuser de l'embarras de la princesse, c'est bien un jeu, mais il me paraît bien plus relever de la comédie que de la tragédie. Ce jeu, Nemours, et il le montre à de nombreuses reprises plus tard, eût été très capable de le jouer à sa façon "en privé" — et notez bien que La Fayette ne dit pas qu'ils n'auraient pas eu le temps de se parler, mais qu'ils n'ont pas eu le temps de parler à d'autres : "sans leur donner le loisir de parler à personne", écrit-elle.
Enfin, si elle est embarrassée, c'est au moins pour moitié par sa propre faute — σφετέρῃ ἀτασθαλίῃ, par sa propre sottise, aurait dit Homère — celle qui tient à la vérité quand on est dans le monde du jeu. C'est cette naïveté qui en fait une proie plus désirable que les autres, une Tourvel pour l'espèce de Valmont qu'est Nemours. Mais c'est cette naïveté qui lui apporte les sommets d'extase qu'elle atteindra dans une espèce de perfection de la préciosité, de faire du désir sa demeure.
Oui, La Fayette montre bien que le sujet ne maîtrise pas, tout seul, le désir ; elle montre aux sujets qui lisent comment le jeu du désir s'articule, entre les manipulations de la société (pour faire vite) et le jeu que nous jouons avec ces manipulations.
Tu écris aussi : "Si la princesse avait rencontré Nemours avant de se marier, elle ne se serait pas mariée avec le prince de Clèves (or elle rencontre Nemours peu après son mariage). L'agencement des événements pousse la princesse vers sa fin. La mort de sa mère la poussera à l'aveu au mari, aveu qui amènera la mort du mari, mort du mari qui empêche tout mariage d'amour avec Nemours tenu pour responsable, et qui ne peut donc mener qu'à se laisser mourir dans un couvent." Pourquoi pas; mais en l'espèce, j'aurais envie d'appliquer l'adage "Avec des si, on met Paris en bouteille"... C'est que je ne suis pas certain qu'elle fût tombée amoureuse de Nemours si elle l'avait rencontré avant son mariage : la passion est d'autant plus forte qu'elle arrive à ce moment-là. D'autre part je suis encore plus dubitatif sur la passion qu'eût éprouvée Nemours pour une femme libre: s'il la désire, c'est d'abord parce qu'elle est une espèce de Tourvel inaccessible. Quant à l'enchaînement "mort de la mère" → "aveu au mari", il me paraît des moins inéluctables qu'on puisse imaginer !
- Paris en bouteille:
- A mon tour de mettre Paris en bouteille : ce qui eût été véritablement tragique, c'est qu'il y eût une suite : ils se marient, il la trompe, la délaisse, elle tue ignominieusement sa rivale, ou elle se tue en emportant je ne sais quel innocent dans sa mort.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- IphigénieProphète
Il me semble au contraire que ce qui est extraordinaire voire « incompréhensible » dans la Princesse c’est sa décision de renoncer à l’amour au moment où tout autre l’aurait vu comme enfin possible: c’est elle qui décide et c’est ce qui est fascinant.The Paper a écrit:"Je suis si persuadée que l'Amour est une chose incommode que j'ai de la joie que mes amis et moi en soyons exempts", écrivait Mme de Lafayette (à Gilles Ménage, il me semble). C'est la Passion qui est condamnée, la princesse sait d'ailleurs qu'elle serait malheureuse parce que bientôt trompée dans un mariage d'amour avec Nemours. Néanmoins, sans pour autant croire au mariage d'amour, il y a bien une critique du mariage arrangé : c'est lui qui provoque le douloureux tiraillement entre Passion et Vertu. C'est lui qui force à dissimuler ses véritables sentiments parce qu'on appartient déjà à un autre. Dire qu'il y a une critique du mariage arrangé pour valoriser le mariage d'amour me semble être une erreur ; mais dire qu'il n'y a pas de critique du mariage arrangé me semble également en être une.
Pour ce qui est du tragique, je pense qu'il y a effectivement une dimension tragique, même si la fatalité ne repose pas ici sur des dieux grecs mais sur des concours de circonstances qui ne laissent jamais à la princesse la possibilité d'agir sereinement (elle ne maîtrise rien). Prenons la scène du bal. Si Nemours n'était pas arrivé en retard, si le roi n'avait pas imposé aux deux protagonistes de danser ensemble, ou si on leur avait laissé le temps de se présenter l'un à l'autre après la danse, le petit jeu de la dauphine pour embarrasser la princesse n'aurait pu avoir lieu. Si la princesse avait rencontré Nemours avant de se marier, elle ne se serait pas mariée avec le prince de Clèves (or elle rencontre Nemours peu après son mariage). L'agencement des événements pousse la princesse vers sa fin. La mort de sa mère la poussera à l'aveu au mari, aveu qui amènera la mort du mari, mort du mari qui empêche tout mariage d'amour avec Nemours tenu pour responsable
, et qui ne peut donc mener qu'à se laisser mourir dans un couvent.
Mais je ne l’ai pas relue récemment: il faudrait peut-être
Il me semble aussi que la nouveauté de madame de La Fayette est justement dans la « psychologisation » de la passion amoureuse ( ni filtre ni prédestination ), comme un mécanisme intérieur qui fait dérailler la machine si j’ose dire: je n’y vois aucune transcendance: rien de ce qui arrive à la princesse ne me paraît imposé de l’extérieur mais plutôt
comme résultant d’un choix : l’aveu comme le retrait . Non?
- NLM76Grand Maître
En somme, je comprends bien qu'on puisse proposer le sujet que donne Murielle Taïeb sur Weblettres : " L’art du romancier est-il de donner à une misérable aventure la dignité d’une tragédie ?" Mais il me paraît bien plus prudent que cet autre "Mme de Clèves est-elle une héroïne tragique ?", même s'il n'est pas inintéressant, à condition qu'on accepte une réponse qui montrerait qu'elle en est l'exact opposé.
- Liste de sujets passés par la tête d'un professeur de lettres un vendredi matin:
- Les amants de la princesse de Clèves.
- Le corps dans La princesse de Clèves.
- Le plaisir dans La princesse de Clèves.
- L’intimité dans La princesse de Clèves.
- La jalousie dans La princesse de Clèves.
- La solitude dans La princesse de Clèves.
- La surprise dans La princesse de Clèves.
- Qui ment, dans La princesse de Clèves ?
- Les images dans la princesse de Clèves ?
- Quelle est la morale du duc de Nemours ?
- La sensualité dans La princesse de Clèves.
- Le mensonge dans La princesse de Clèves.
- La souffrance dans La princesse de Clèves.
- La délicatesse dans La princesse de Clèves.
- La princesse de Clèves est-elle un modèle ?
- Peut-on s’identifier à la princesse de Clèves ?
- La dissimulation dans La princesse de Clèves.
- La princesse de Clèves a-t-elle de la volonté ?
- Les sous-entendus dans La princesse de Clèves.
- Dans La princesse de Clèves, qui manipule qui ?
- Dans La princesse de Clèves, qui agit, qui subit ?
- La princesse de Clèves voit-elle clair dans son âme ?
- La princesse de Clèves est-il roman sur une société ?
- Qu’est-ce que La princesse de Clèves dit sur la vérité ?
- Voilement et dévoilement dans La princesse de Clèves.
- Les personnages féminins dans La princesse de Clèves.
- Les personnages masculins dans La princesse de Clèves.
- La publicité des sentiments dans La princesse de Clèves.
- Qu’est-ce que dit La princesse de Clèves sur la passion ?
- La princesse de Clèves est-il un roman sur des individus ?
- Dans La princesse de Clèves, la cour aime-t-elle l’amour ?
- Quel pouvoir ont les femmes dans La princesse de Clèves ?
- Dans La princesse de Clèves, comment aiment les femmes ?
- Les personnages de La princesse de Clèves sont-ils ambigus ?
- Les personnages de La princesse de Clèves sont-ils admirables ?
- Le duc de Nemours et la princesse de Clèves se ressemblent-ils ?
- Y a-t-il des femmes exceptionnelles dans La princesse de Clèves ?
- Pourrait-on dire de la princesse de Clèves qu’elle est psychologue ?
- Quelles réflexions vous inspirent le personnage du prince de Clèves ?
- D’après La princesse de Clèves, la passion peut-elle rendre heureuse ?
- Pourquoi le roman de La princesse de Clèves n’a-t-il rien de tragique ?
- Peut-on dire de La princesse de Clèves que c’est un roman de l’esprit ?
- La princesse de Clèves cherche-t-elle vraiment à échapper à la passion ?
- Est-ce que les personnages de La princesse de Clèves sont des individus ?
- Le sujet de La princesse de Clèves, est-ce l’amour, le désir ou la passion ?
- Pourquoi peut-on dire que La princesse de Clèves est un roman déroutant ?
- Pourquoi peut-on dire que La princesse de Clèves est le roman des miroirs ?
- Dans La princesse de Clèves, Mme de Lafayette embrouille-t-elle le lecteur ?
- Comment la société qui entoure Mme de Clèves encourage-t-elle les passions ?
- Pourquoi, dans La princesse de Clèves, la vérité est-elle toujours une outrance ?
- Dans La princesse de Clèves, les histoires d’amour finissent-elles toujours mal ?
- Pourquoi peut-on dire de La princesse de Clèves que c’est le roman des regards ?
- Pourquoi les personnages de La princesse de Clèves se racontent-ils des histoires ?
- Pourquoi les personnages de La princesse de Clèves ont-ils besoin d’intermédiaires ?
- Dans quelle mesure peut-on dire que La princesse de Clèves est un roman de l’image ?
- Dans quelle mesure le roman de La princesse de Clèves peut être rapproché d’une comédie ?
- Dans La princesse de Clèves, comment ce qui est public se distingue-t-il de ce qui est privé ?
- Comment peut-on définir la morale qui règne dans la société décrite par La princesse de Clèves ?
- Le rôle de Mme de Chartres : dans quelle mesure peut-on dire qu’elle est un double de l’autrice ?
- Que pensez-vous du rôle joué par les différents rois et reines présents dans La princesse de Clèves ?
- Pourquoi peut-on dire que, dans La princesse de Clèves, la dissimulation est le sel de l’amour ?
- Est-ce que Mme de Clèves aurait pu aimer le duc de Nemours si elle n’avait pas épousé le prince de Clèves ?
- Dans La princesse de Clèves, l’amour et le désir sont-ils soumis à la politique, ou la politique au désir ?
- Ce qui compte dans La princesse de Clèves, est-ce qui se passe, les événements, ou ce qu’en pensent les personnages ?
- Dans La princesse de Clèves, pourquoi les obstacles dressés sur le chemin des passions en deviennent-ils les ferments ?
- Qu’est-ce que les mœurs viennent faire dans l’histoire d’amour entre le duc de Nemours et la princesse de Clèves ?
- Si l’on considère que les deux protagonistes en sont les seuls personnages principaux, pourquoi les personnages secondaires de La princesse de Clèves sont-ils si importants ?
- On dit de La princesse de Clèves que c’est un roman d’analyse psychologique. Or l’analyse cherche à découvrir les différents éléments qui composent un tout, pour l’expliquer et l’éclairer. Qu’est-ce que ce roman réussit à éclairer, à expliquer, dans le domaine de la psychologie, c’est-à-dire de l’âme humaine ?
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- gregforeverGrand sage
Je trouve la 65 et la 68 particulièrement difficiles pour un élève lambda.
- NLM76Grand Maître
Ouf ! S'il n'y avait que celles-là qui étaient particulièrement difficiles... Je pense qu'il faudrait les reprendre à peu près toutes pour les rendre accessibles ! En tout cas, je vais essayer de reformuler ces deux-là.
Et lesquelles trouves-tu relativement faisables ?
Et lesquelles trouves-tu relativement faisables ?
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- gregforeverGrand sage
les n° 1,5,10,13,15,18,22,23,29,35,36,37 (39 en reformulant)50,51, (53 si tu penses aux récits enchâssés)
la 62 serait intéressante en discussion de groupe/à l'oral.
Mais je pense aussi que ces items choisis correspondent à ce que j'ai étudié avec mes élèves.
Et pour la 41, désolée, j'ai traité la dimension tragique du livre et du personnage!
la 62 serait intéressante en discussion de groupe/à l'oral.
Mais je pense aussi que ces items choisis correspondent à ce que j'ai étudié avec mes élèves.
Et pour la 41, désolée, j'ai traité la dimension tragique du livre et du personnage!
- NLM76Grand Maître
Pour la 41, ils auraient donc des armes ! Même si ça me dépasse totalement...
Pour la 53, oui, je pense aux récits enchâssés; mais j'invite par la formulation à mettre cela en parallèle avec le fait qu'il se racontent des histoires, et surtout que l'héroïne n'arrête pas de se faire des films... Je me dis qu'il faut faire en sorte qu'un élève qui a travaillé, mais ne maîtrise pas trop les récits enchâssés puisse s'en sortir.
D'autre part, ne penses-tu pas qu'il vaut mieux que les élèves tombent sur un sujet très différent de ce qu'ils ont travaillé en classe, de sorte qu'ils puissent vraiment y réfléchir à partir de leur connaissance de l'œuvre, sans recracher un cours tout fait, qui sera bien souvent hors-sujet, parce que le sujet ressemblera à celui traité en classe... mais ne sera pas le même !
Pour la 53, oui, je pense aux récits enchâssés; mais j'invite par la formulation à mettre cela en parallèle avec le fait qu'il se racontent des histoires, et surtout que l'héroïne n'arrête pas de se faire des films... Je me dis qu'il faut faire en sorte qu'un élève qui a travaillé, mais ne maîtrise pas trop les récits enchâssés puisse s'en sortir.
D'autre part, ne penses-tu pas qu'il vaut mieux que les élèves tombent sur un sujet très différent de ce qu'ils ont travaillé en classe, de sorte qu'ils puissent vraiment y réfléchir à partir de leur connaissance de l'œuvre, sans recracher un cours tout fait, qui sera bien souvent hors-sujet, parce que le sujet ressemblera à celui traité en classe... mais ne sera pas le même !
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- glucheNiveau 10
D'accord sur le principe. Dans la réalité, si le sujet leur paraît difficile, ils prendront le commentaire certainement.NLM76 a écrit:
D'autre part, ne penses-tu pas qu'il vaut mieux que les élèves tombent sur un sujet très différent de ce qu'ils ont travaillé en classe, de sorte qu'ils puissent vraiment y réfléchir à partir de leur connaissance de l'œuvre, sans recracher un cours tout fait, qui sera bien souvent hors-sujet, parce que le sujet ressemblera à celui traité en classe... mais ne sera pas le même !
Bien peu de sujets proposés m'apparaissent faisables (dans le sens surtout où ils ne feraient pas fuir les élèves), je dirais 12,15, 23,30, 43, 49, 58. Bref, ceux qui se rattachent d'une manière ou d'une autre au parcours (tel que je l'ai compris en tout cas).
Je ne trouve pas que la princesse soit un personnage tragique: son renoncement à l'amour n'a rien à voir avec celui de Bérénice par exemple.
- The PaperHabitué du forum
Mme de Lafayette n'aurait certes pas utilisé les mots "vrais sentiments", elle aurait dit, ce qui revient au même tant ce chemin de la carte de Tendre est direct, "inclination" (qu'elle oppose, reprenant la classification de Madeleine de Scudéry, à l'Estime).NLM76 a écrit:Merci The Paper pour ta réponse qui m'éclaire.
Je ne suis pas du tout convaincu par ton idée des "véritables sentiments". Cela ne me paraît pas du tout relever de l'univers psychologique de La princesse de Clèves. Quant à la dissimulation, elle ne m'apparaît pas dans ce livre présentée comme une conséquence, mais comme une cause : c'est par la dissimulation qu'on entretient le désir... Lequel n'est pas un véritable sentiment", mais tout ce qu'il y a de plus élaboré.
Si mon souvenir est exact, les quatre histoires secondaires ont toutes pour thème central la dissimulation en tant que conséquence.
Il n'y a pas que la fatalité : la princesse meurt.NLM76 a écrit: Pour ce qui est du tragique, je suis assez dubitatif quant à la réduction du tragique à l'idée de fatalité. Mais pourquoi pas. Ensuite, passer de la fatalité aux concours de circonstances, c'est un pas de plus qu'on pourrait concevoir, mais qui nous éloigne quand même considérablement de la tragédie.
Oui, Nemours sait ce qu'il fait en arrivant en retard. Mais... il ignore que cela aura pour conséquence que la princesse n'aura pas son identité au moment où il dansera avec elle et l'embarras qu'elle éprouvera.NLM76 a écrit:Je reviens aussi sur le fait que la Princesse ne maîtriserait rien. On pourrait concevoir les choses ainsi. Mais il faudrait préciser ce qu'on entend par "elle" dans "elle ne maîtrise rien". Autrement dit, qu'est-ce que le sujet humain — ou qu'est-ce que le sujet humain du verbe "maîtriser" en matière de sentiments ? Et la réponse de Mme de Lafayette n'est pas pour moi qu'il s'agit d'un sujet ballotté par le destin, loin de là. Pour reprendre la scène du bal, je crois qu'on ne peut pas passer sur "Elle passa tout le jour des fiançailles à se parer." Il y a une part du sujet "elle" qui décide et maîtrise quand il s'agit de travailler au jeu de la séduction.
L'arrivée de la diva Nemours en retard n'est certes pas maîtrisée par l'héroïne; mais elle est — je ne vois pas comment en douter — parfaitement maîtrisée par le prince des séducteurs : il connaît toutes les techniques qui permettent d'être au centre des regards.
Que le roi leur "impose" de danser ensemble est effectivement essentiel ; mais le roi, je ne pense pas que ce soit la fatalité. Le roi, c'est bien davantage la société dans laquelle elle vit — c'est une société qui veut fabriquer du désir, une société qui veut faire jouer le désir.
Quant au jeu du roi et des reines pour s'amuser de l'embarras de la princesse, c'est bien un jeu, mais il me paraît bien plus relever de la comédie que de la tragédie. Ce jeu, Nemours, et il le montre à de nombreuses reprises plus tard, eût été très capable de le jouer à sa façon "en privé" — et notez bien que La Fayette ne dit pas qu'ils n'auraient pas eu le temps de se parler, mais qu'ils n'ont pas eu le temps de parler à d'autres : "sans leur donner le loisir de parler à personne", écrit-elle.
Enfin, si elle est embarrassée, c'est au moins pour moitié par sa propre faute — σφετέρῃ ἀτασθαλίῃ, par sa propre sottise, aurait dit Homère — celle qui tient à la vérité quand on est dans le monde du jeu. C'est cette naïveté qui en fait une proie plus désirable que les autres, une Tourvel pour l'espèce de Valmont qu'est Nemours. Mais c'est cette naïveté qui lui apporte les sommets d'extase qu'elle atteindra dans une espèce de perfection de la préciosité, de faire du désir sa demeure.
Oui, La Fayette montre bien que le sujet ne maîtrise pas, tout seul, le désir ; elle montre aux sujets qui lisent comment le jeu du désir s'articule, entre les manipulations de la société (pour faire vite) et le jeu que nous jouons avec ces manipulations.
Si la princesse passe tout le jour à se parer, c'est pour être à la hauteur de la beauté de Nemours dont la dauphine lui a parlé, mais il y a de l'inconscience chez la princesse : c'est quand même sa mère qui, sa fille lui racontant le bal, se rendra compte la première qu'elle est tombée amoureuse...
\"NLM76 a écrit: j'aurais envie d'appliquer l'adage "Avec des si, on met Paris en bouteille"... C'est que je ne suis pas certain qu'elle fût tombée amoureuse de Nemours si elle l'avait rencontré avant son mariage : la passion est d'autant plus forte qu'elle arrive à ce moment-là. D'autre part je suis encore plus dubitatif sur la passion qu'eût éprouvée Nemours pour une femme libre: s'il la désire, c'est d'abord parce qu'elle est une espèce de Tourvel inaccessible.
Tout à fait d'accord. Mais on peut tout de même voir là une ironie du sort (comme on trouve dans Phèdre : Phèdre tombe amoureuse d'Hippolyte juste après s'être mariée à Thésée). Ta comparaison à Mme de Tourvel m'intéresse, mais je continue à penser que ce qui attire Nemours, ça n'est pas qu'elle soit inaccessible, mais qu'elle soit différente (c'est la seule à la Cour à ne pas maîtriser l'art de la dissimulation).
Et pourtant, dans son aveu à son mari, la princesse dit elle-même qu'elle n'en vient à cet aveu que parce qu'elle n'a plus le soutien de sa mère et que c'est à son mari, à présent, de la soutenir. "Je n'ai jamais donné nulle marque de faiblesse, et je ne craindrais pas d'en laisser paraître, si vous me laissiez la liberté de me retirer de la cour, ou si j'avais encore madame de Chartres pour aider à me conduire. Quelque dangereux que soit le parti que je prends, je le prends avec joie pour me conserver digne d'être à vous. Je vous demande mille pardons, si j'ai des sentiments qui vous déplaisent, du moins je ne vous déplairai jamais par mes actions. Songez que pour faire ce que je fais, il faut avoir plus d'amitié et plus d'estime pour un mari que l'on en a jamais eu ; conduisez-moi, ayez pitié de moi, et aimez-moi encore, si vous pouvez."\"NLM76 a écrit:Quant à l'enchaînement "mort de la mère" → "aveu au mari", il me paraît des moins inéluctables qu'on puisse imaginer !
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- The PaperHabitué du forum
L'aveu n'est fait qu'à demi volontairement. C'est parce que son mari la presse de questions pendant longtemps qu'elle finit par se résoudre à accomplir un aveu qu'elle avait effectivement pensé faire (sans jamais le faire...)Iphigénie a écrit:rien de ce qui arrive à la princesse ne me paraît imposé de l’extérieur mais plutôt comme résultant d’un choix : l’aveu comme le retrait . Non?
Et le renoncement à Nemours est la seule solution pour elle car cette union n'est possible qu'aux yeux de la Société, mais pas à ses yeux à elle qui rend Nemours responsable de la mort de son mari. Elle aurait quand même pu choisir Nemours, (en pensant chaque jour "Mais qu'est-ce que je fais ?!"), mais de toute façon, alors, elle serait morte aussi : parce que le chagrin d'être trompée l'aurait tuée comme il tua la princesse de Montpensier. Sa fin ne pouvait qu'être tragique.
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- NLM76Grand Maître
La princesse meurt, la princesse meurt... c'est un peu vite dit. "Et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables." Soit, La Fayette abuse de la litote et de l'euphémisme; mais on voit bien à lire les dernières lignes qu'elle vit plusieurs années l'épisode Nemours, et il n'est pas invraisemblable que ce soit une vingtaine d'années, pour mourir à trente ou trente-cinq ans, voire un peu plus tard. On n'y voit pas qu'elle meurt d'un chagrin d'amour.
La Fayette a écrit:Néanmoins il ne se rebuta point encore, et il fit tout ce qu’il put imaginer de capable de la faire changer de dessein. Enfin, des années entières s’étant passées, le temps et l’absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. Madame de Clèves vécut d’une sorte qui ne laissa pas d’apparence qu’elle pût jamais revenir. Elle passait une partie de l’année dans cette maison religieuse, et l’autre chez elle ; mais dans une retraite et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères ; et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- NLM76Grand Maître
Je pense qu'il faut rebuter les élèves qui comptent refourguer un cours ou des fiches piquées ici et là. Mais je voudrais encourager des élèves qui connaissent bien les textes étudiés, qui ont lu l'œuvre, qui connaissent assez bien le personnel, le contenu du livre comme je le leur ai demandé (plan du livre, plan d'un passage au choix, première et dernière phrase), et qui sont prêts à se lancer dans ce qui est intéressant : réfléchir pour de vrai au texte, ce qui amène à être quelque peu ballotté.gluche a écrit:D'accord sur le principe. Dans la réalité, si le sujet leur paraît difficile, ils prendront le commentaire certainement.
Bien peu de sujets proposés m'apparaissent faisables (dans le sens surtout où ils ne feraient pas fuir les élèves), je dirais 12,15, 23,30, 43, 49, 58. Bref, ceux qui se rattachent d'une manière ou d'une autre au parcours (tel que je l'ai compris en tout cas).
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- The PaperHabitué du forum
Tu as raison de signaler qu'on parle tout de même en années (même si "une vingtaine" me semble un peu beaucoup pour l'adjectif "courte", mais c'est subjectif). Néanmoins, Madame de Lafayette pouvait s'arrêter à "les plus austères", elle termine sur la mort de la princesse ; ce seul fait, en dehors de toute considération de durée, donne un tour tragique aux événements. Alors bien sûr, la cause de la mort n'est pas donnée, mais on devine que la princesse n'a jamais trouvé la sérénité, même loin de Nemours (elle l'avait elle-même annoncé : "je crois que je ne vaincrai jamais mes scrupules, et je n’espère pas aussi de surmonter l’inclination que j’ai pour vous") et que c'est cela qui a fini par avoir raison d'elle. Hypothèse fortement suggérée par ses occupations "plus saintes que celles des couvents les plus austères" et ses "exemples de vertu inimitables" : ce plongeon absolu dans la religion laisse deviner une fuite éperdue et vaine.NLM76 a écrit:La Fayette a écrit:Enfin, des années entières s’étant passées, le temps et l’absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. Madame de Clèves vécut d’une sorte qui ne laissa pas d’apparence qu’elle pût jamais revenir. Elle passait une partie de l’année dans cette maison religieuse, et l’autre chez elle ; mais dans une retraite et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères ; et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables.
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Ou la sérénité dans la vertu...
Mais dis-moi, tu as donné un sujet de dissertation à tes élèves que tu as trouvé passable ?
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C'est moins probable : la sérénité ne pousse pas à l'excès.NLM76 a écrit:Ou la sérénité dans la vertu...
Je n'ai pas donné de sujet qui porte uniquement sur l'oeuvre, j'intègre le parcours. Comment les romanciers critiquent-ils l'hypocrisie de la Société ?
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- DeliaEsprit éclairé
HS probable, sur le processus créatif de Mme de La Fayette.
Le prince de Clèves de l'histoire, Jacques de Nevers, est mort à vingt ans. Il avait épousé une petite-fille de Diane de Poitiers qui se remaria deux fois après ce premier veuvage et eut quatre enfants de son troisième mari. Nous sommes loin de la recluse du roman !
Le prince de Clèves de l'histoire, Jacques de Nevers, est mort à vingt ans. Il avait épousé une petite-fille de Diane de Poitiers qui se remaria deux fois après ce premier veuvage et eut quatre enfants de son troisième mari. Nous sommes loin de la recluse du roman !
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Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampaté Ba
- IphigénieProphète
Je me demande en fait si on ne pourrait pas dire que la Princesse est cornélienne par le sens du devoir, racinienne par la souffrance de la passion et janséniste par la conclusion et le renoncement au monde aauquel cas si on parle de tragédie, c'est une tragedie avortée ?
Vous avez quatre heures :lol:
Une sorte de sœur Emmanuelle pessimiste, en somme :lol:
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- IphigénieProphète
Et je me demande aussi si, au XVIIe, on (Pascal, La Rochefoucauld?) parlerait d'excès dans la vertu? ( C'est une vraie question)The Paper a écrit:C'est moins probable : la sérénité ne pousse pas à l'excès.NLM76 a écrit:Ou la sérénité dans la vertu...
Je n'ai pas donné de sujet qui porte uniquement sur l'oeuvre, j'intègre le parcours. Comment les romanciers critiquent-ils l'hypocrisie de la Société ?
- DeliaEsprit éclairé
Intéressante clausule :
A rapprocher de la première phrase :
Bref, tout ça, c'est de la frime. Même dans son obscure retraite, la Princesse vit sous le regard d'autrui : il lui faut encore être exceptionnelle. Nous sommes loin de Tourvel sombrant dans la folie !et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables.
A rapprocher de la première phrase :
Paru, éclat, inimitable : tout pour le paraitre, rien pour l'être.La magnificence et la galanterie n’ont jamais paru en France avec tant d’éclat que dans les dernières années du règne de Henri II.
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- NLM76Grand Maître
Tout à fait, Delia !
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- The PaperHabitué du forum
Delia a écrit:Intéressante clausule :
Bref, tout ça, c'est de la frime. Même dans son obscure retraite, la Princesse vit sous le regard d'autrui : il lui faut encore être exceptionnelle. Nous sommes loin de Tourvel sombrant dans la folie !et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables.
A rapprocher de la première phrase :
Paru, éclat, inimitable : tout pour le paraitre, rien pour l'être.La magnificence et la galanterie n’ont jamais paru en France avec tant d’éclat que dans les dernières années du règne de Henri II.
Je ne le vois pas du tout comme ça. A mon avis, il faut plutôt rapprocher la fin à cette phrase prononcée par Mme de Chartres : "ne craignez point de prendre des partis trop rudes et trop difficiles, quelque affreux qu’ils vous paraissent d’abord : ils seront plus doux dans les suites que les malheurs d’une galanterie ".
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- DeliaEsprit éclairé
Oui, The Paper, mais ici je me livre à l'expérience consistant à mettre bout à bout la première phrase et la dernière phrase d'un roman, et voir ce qui en résulte.
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- The PaperHabitué du forum
Delia, ah d'accord !
Iphigenie, à propos de l'excès de vertu, il en est en tout cas question chez Molière : "Là, votre pruderie, et vos éclats de zèle,
Ne furent pas cités comme un fort bon modèle:
Cette affectation d'un grave extérieur,
Vos discours éternels de sagesse, et d'honneur,
Vos mines, et vos cris, aux ombres d'indécence,
Que d'un mot ambigu, peut avoir l'innocence;
Cette hauteur d'estime où vous êtes de vous,
Et ces yeux de pitié, que vous jetez sur tous;
Vos fréquentes leçons, et vos aigres censures,
Sur des choses qui sont innocentes, et pures;
Tout cela, si je puis vous parler franchement,
Madame, fut blâmé, d'un commun sentiment" dit Célimène à Arsinoe.
(Mais dans la suite de la tirade, c'est plutôt l'hypocrisie que l'excès qui est pointé).
La Rochefoucauld ne parle pas d'excès mais la Vertu lui a toujours paru suspecte : "Ce que nous prenons pour des vertus n'est souvent qu'un assemblage de diverses actions et de divers intérêts, que la fortune ou notre industrie savent arranger"
Iphigenie, à propos de l'excès de vertu, il en est en tout cas question chez Molière : "Là, votre pruderie, et vos éclats de zèle,
Ne furent pas cités comme un fort bon modèle:
Cette affectation d'un grave extérieur,
Vos discours éternels de sagesse, et d'honneur,
Vos mines, et vos cris, aux ombres d'indécence,
Que d'un mot ambigu, peut avoir l'innocence;
Cette hauteur d'estime où vous êtes de vous,
Et ces yeux de pitié, que vous jetez sur tous;
Vos fréquentes leçons, et vos aigres censures,
Sur des choses qui sont innocentes, et pures;
Tout cela, si je puis vous parler franchement,
Madame, fut blâmé, d'un commun sentiment" dit Célimène à Arsinoe.
(Mais dans la suite de la tirade, c'est plutôt l'hypocrisie que l'excès qui est pointé).
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- IphigénieProphète
Oui je sais cela, mais une « vertu inimitable » est-elle simple pruderie ou assemblage d’intérêts? Ou au-delà ?The Paper a écrit:Delia, ah d'accord !
Iphigenie, à propos de l'excès de vertu, il en est en tout cas question chez Molière : "Là, votre pruderie, et vos éclats de zèle,
Ne furent pas cités comme un fort bon modèle:
Cette affectation d'un grave extérieur,
Vos discours éternels de sagesse, et d'honneur,
Vos mines, et vos cris, aux ombres d'indécence,
Que d'un mot ambigu, peut avoir l'innocence;
Cette hauteur d'estime où vous êtes de vous,
Et ces yeux de pitié, que vous jetez sur tous;
Vos fréquentes leçons, et vos aigres censures,
Sur des choses qui sont innocentes, et pures;
Tout cela, si je puis vous parler franchement,
Madame, fut blâmé, d'un commun sentiment" dit Célimène à Arsinoe.
(Mais dans la suite de la tirade, c'est plutôt l'hypocrisie que l'excès qui est pointé).
La Rochefoucauld ne parle pas d'excès mais la Vertu lui a toujours paru suspecte : "Ce que nous prenons pour des vertus n'est souvent qu'un assemblage de diverses actions et de divers intérêts, que la fortune ou notre industrie savent arranger"
Et lles première et dernière phrases se répondent-elles ou au contraire s’opposent-elles ?
- NLM76Grand Maître
Ce qui me frappe aussi dans cette dernière phrase, c'est l'adjectif "inimitable" — qui qualifie aussi Nemours, dans le domaine où tous veulent l'imiter : celui de la parure.
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