Grec au lycée : un proviseur cherche à faire disparaitre l'option. Comment riposter ?

trompettemarine a écrit:La casse dans les collèges, parce que, quand même, c'est dur à faire les emplois du temps quand on est principal adjoint

Je ne sais pas si c'est de l'ironie, mais oui, c'est dur à faire les emplois du temps, et naturellement les enseignements facultatifs se retrouvent aux extrémités parce qu'on ne veut pas la moitié du collège en permanence. C'est incontournable.

Oui, c'est difficile et les professeurs de Lettres classiques en paient les pots cassés.
Mais tout de même, la difficulté de l'emploi du temps ne justifie pas la disparition de l'option quand à côté se sont créées mille barrettes pour les langues vivantes, des options voile (et même la pétanque et le bridge : ils trouvent des heures pour ça chez nous!!!!), des esabac et abibac, des classes euro, de l'arabe, du russe, de l'euro italien et de l'esabac, de l'abibac, des EE, tout cela dans un même établissement.
Il n'ya aucune raison pour que ce soit le latin qui se pousse au profit de l'euro (alors que souvent les élèves veulent faire les deux) : et franchement l'apport du latin ou du grec n'est pas contestable, mais on s'en fout chez certains CDE (au grand plaisir des rectorats).

Alors, ne le prends pas pour toi Pogonophile, mais les lettres classiques en ont un peu assez qu'on leur serve la difficulté des edt, ou encore par exemple, la surcharge de travail des élèves,  sur leur dos, à eux seuls !
Il y a des choix qui ont été faits et je suis désolée : on veut faire disparaître les langues anciennes : tous les arguments sont bons (encore une fois : je parle en général et non pas de toi pogonophile)

Les professeurs (en tout cas chez nous) de russe, d'arabe, de musique d'arts plastiques, d'esabac, d'abibac n'ont pas à se battre ni ne voient disparaître leurs horaires, même quand ils n'ont plus qu'un élève dans un niveau. Alors j'en ai ma claque de cette hypocrisie.
Or , réforme après réforme, c'est bien notre discipline qu'on a voulu tuer... et ça marche.
Un jour, c'est moi qui me tuerai : l'EN applaudira des deux mains : encore un prof de lettres classiques en moins.

Il n'y a pas une semaine sans que j'y pense en ce moment ! Voir disparaître sa matière, voir un edt qui empêchera peut-être l'année prochaine d'élever son enfant, être dans l'impossibilité de muter depuis 15 ans parce qu'on est Lettres classiques, qu'on ne pourra jamais faire moins de 3 heures de route par jour pendant les 20 années à venir... ça me tue à petit feu.

sans compter le mépris de certains collègues (pas tous !) et de certains IPR pour notre discipline pour qui on n'est pas une bonne vitrine vivante...

Ce métier me tue et chez moi, ce n'est même pas à cause des élèves. Au contraire, même les pires me font tenir un peu.

Qu'ils suppriment notre discipline d'un coup, plutôt que de nous torturer année après année en nous enlevant un à un les ongles des doigts pour qu'on souffre bien...

Oui, j'en ai ma claque ce soir ! Vraiment !
(à nouveau, rien contre toi Pogonophile)

Un petit cachet et ça ira mieux demain.

trompettemarine :
Pensées pour toi.

Trompettemarine, je pense bien à toi.

Trompettemarine, je pense bien à toi aussi. C’est terrible quand même d’en arriver là et nous sommes nombreux.ses à ressentir ces périodes de découragement non pas à cause des élèves ou de notre métier, mais tout simplement de nos conditions d’exercice. Comme tu le dis, il faut souvent se battre contre le chef, l’IPR, certains collègues... en n’ayant l’impression, en plus, de ne pas être légitime.
Cette année, j’ai appris que les parents de 2nde avaient été reçus et qu’on leur avait présenté les options. En réalité, les profs d’anglais ont présenté la section euro et je n’ai même pas été prévenue de cette matinée d’accueil. Autant te dire que ça va être facile de recruter des grands débutants (pour les élèves qui suivent l’option depuis le collège, je vais me présenter en 3ème).
Sinon j’ai aussi entendu en conseil pédagogique : « si vous voulez des heures pour des dédoublements, le latin nous coûte 9h. On peut supprimer l’option »). Heureusement aucun collègue n’a réclamé ma peau 😱 alors que j’ai appris depuis que la dnl nous « coûte » plus d’heures.
Je ne vais pas établir ici toute la liste des difficultés auxquelles j’ai pu être confrontée et qui, j’imagine, font écho chez vous. Juste une dernière pour la route, dès ma 1re année de titulaire, la principale m’a reproché de couler l’option parce que les élèves de 5eme ne continuaient pas en 4ème et demandaient tous à arrêter. Je n’avais même pas les latinistes de 5ème puisqu’elle avait attribué les heures à un prof de lettres modernes qui lui léchait les bottes 😳

Bien d’accord avec ce que dit Trompettemarine: et surtout sur le fait que c’est le résultat d’un choix, et même d’une volonté, consciente des uns, inconsciente chez d’autres, le pire étant inconsciente, c’est-à-dire sans mesurer ce que l’effondrement de ces enseignements ( qui ne concernaient qu’une partie)a pour conséquence (pour tous) dans des des domaines variés ( pour résumer vite, de la formation en grammaire et langue à la compréhension et l’approche des textes , et sur l’humanisme en général). Mais ce n’est qu’un détail, bien facultatif, à traiter à égalité avec la pétanque ou l’option macramé , tellement plus «  démocratiques »...

Je vois bien que c'est un sujet compliqué mais les contraintes d'emploi du temps en collège et en lycée sont différentes, et les alignements entre cours obligatoires et optionnels ne fonctionnent pas de la même façon... mais ça tout le monde le sait déjà.

J'avoue ne rien comprendre à la politique globale sur les LCA.
Dans mon collège on a maintenu un EPI d'initiation pour tous les élèves en 5e, puis ils choisissent de poursuivre en enseignement de complément, comme à peu près partout. Ils sont nombreux à abandonner en 2nde, soit parce qu'ils renoncent à approfondir, soit parce qu'ils ne peuvent pas tout faire en même temps - et selon ton propos, c'est fréquemment parce que délibérément, on ne crée pas des conditions favorables, mais même avant ça le taux de perte au passage en seconde était important.
Dans le même temps, sort la circulaire de janvier 18, qui est censée remettre en avant les LCA, qui est tellement mal rédigée qu'elle en est inapplicable (j'ai déjà dit tout le mal que j'en pensais ailleurs), mais qui semblait témoigner d'une volonté forte, tout comme la création d'un enseignement de spécialité avec la réforme du lycée.
Par endroits, des recteurs cités plus haut s'impliquent pour un maintien ; ça implique que d'autres ne le fassent pas.
Où est la cohérence ? Quelle est la finalité ?

Iphigénie parlait plus haut d'humanisme. Soit on considère que les LCA sont incontournables pour, entre autres, appréhender les notions qui ont construit notre société - et dans ce cas, il faut au moins une initiation pour tous - soit on considère que c'est une option aussi formatrice et facultative que le bridge, auquel cas on cesse d'en proposer partout et on arrête le recrutement, mais il va bien falloir trouver une position cohérente. Cette succession de demies mesures fait du mal à tout le monde.

Tu as parfaitement raison de souligner ces incohérences. Pour ma part j’ai toujours trouvé qu’elles créaient en réalité du collège au lycée, un énorme gaspillage de moyens investis sans cohérence: par exemple l’abandon du latin pour faire du grec losqu’on a voulu réduire cet enseignement à la troisième et le fait de le proposer alors à des élèves qui n’avaient pas le niveau en latin mais qu’on gardait prisonniers d’une langue ancienne, pour ne pas perdre de postes ou d’heures et alors que ce même grec était supprimé dans le lycée du secteur, rendant impossible de continuer l’option. Ou lorsque le latin présent dans tous les collèges  n’existe que dans un des deux lycées du secteur mais n’est pas un motif suffisant de dérogation. Etc
J’ajoute toutefois que ces incohérences vues du terrain sont en réalité une tactique bien connue dans l’esthétique du «  puzzle »: qui veut noyer son chien l’accuse de la rage. Il fallait rendre les apprentissages incohérents pour démontrer l’inutilité d’un enseignement qu’une longue pratique avait au contraire rendu très efficace, ce n’était pas possible de les supprimer d’un coup et  frontalement, il fallait les détruire de l’intérieur: au début de ma carrière on a commencé à se battre pour demander à avoir, en logique, les mêmes élèves en français et latin ou grec, on nous a objecté « élitisme », « classes camif- c’est pas juste pour les autres »:c’était un bon argument, qui parlait aux collègues modernistes, et c’etait un début efficace puisqu’aujourd’hui certains pensent qu’un prof de LC ne saurait être un spécialiste de lettres...

@Pogonophile : Oui. Une initiation latin/grec pour tous, et un enseignement de spécialité optionnel pour les plus vaillants serait probablement la bonne solution. Ne serait-ce que pour permettre l'intelligibilité de votre pseudonyme, comme du mien d'ailleurs, et du mot "pseudonyme" lui-même en passant, et plus crucial peut-être, celle de mon enseignement... 

Je te remercie pour ton dévouement au service public trompettemarine.

pogonophile a écrit:

trompettemarine a écrit:La casse dans les collèges, parce que, quand même, c'est dur à faire les emplois du temps quand on est principal adjoint

Je ne sais pas si c'est de l'ironie, mais oui, c'est dur à faire les emplois du temps, et naturellement les enseignements facultatifs se retrouvent aux extrémités parce qu'on ne veut pas la moitié du collège en permanence. C'est incontournable.

Euh, en collège, si on veut bien faire les emplois du temps, ne pas avoir la moitié du collège en permanence et ne pas nuire aux LCA, on regroupe les latinistes dans une seule classe, déjà.
On peut aussi s'arranger pour faire les 1/2 groupes non par ordre alphabétique, mais latinistes d'un côté, autres élèves de l'autre. Ainsi les élèves ont un autre cours pendant le latin, ce qui permet de varier les matières en extrémités de journée.

Ce n'est pas très compliqué à mettre en place et tous les faiseurs d'emploi du temps que j'ai connus opéraient ainsi, sauf un, mais plus par ignorance (il commençait le métier et on lui a vite appris ces astuces qu'il a mises en place)

Trompettemarine :

C'est gentil de m'expliquer comment je devrais faire mon métier mais bon, la question des emplois du temps en collège est assez périphérique puisqu'on parle de l'option lycée, donc ne refaisons pas ce débat déjà conduit vingt fois ici.

Trompette, quel gâchis. Ton amertume est légitime.

pogonophile a écrit:C'est gentil de m'expliquer comment je devrais faire mon métier mais bon, la question des emplois du temps en collège est assez périphérique puisqu'on parle de l'option lycée, donc ne refaisons pas ce débat déjà conduit vingt fois ici.

Je parle du collège, parce qu'il était question de collège. Mais en lycée, les mêmes astuces fonctionnent bien évidemment.

pogonophile a écrit:C'est gentil de m'expliquer comment je devrais faire mon métier

Mais non, voyons : on t'accompagne. Il paraît que tous les CDE qui ont bénéficié d'un tel accompagnement s'en sont montrés ravis


Et puis, bon, en cherchant vraiment très loin, on peut finir par trouver un vague lien entre le sort fait aux langues anciennes au collège, et le sort fait aux langues anciennes au lycée.

Je n'aurai pas le temps de revenir sur le fil pendant un ou deux jours, mais je reviendrai poursuivre la discussion.
à bientôt
trompettemarine

trompettemarine a écrit:Je n'aurai pas le temps de revenir sur le fil pendant un ou deux jours, mais je reviendrai poursuivre la discussion.
à bientôt
trompettemarine

Depuis mon inspection PPCR au début du mois, je n'y crois plus du tout moi non plus. L'inspecteur m'a clairement fait comprendre qu'en lycée, c'était fini, et au collège aussi, sauf si ça devient vraiment attractif. Ca m'a assommée. Je n'ai plus envie d'y aller, je n'ai plus envie de faire d'efforts. Le CDE répète bêtement ce que dit l'inspecteur, quelques collègues se battent pour récupérer des heures, et hop, couic.
Non, franchement, je me demande depuis presque un mois maintenant si ça en vaut la peine.

Je ne peux pas dire que l'étonnement me bouleverse, quand on lit sur un autre fil que ça va, le trampoline c'est pas moins enrichissant que le latin ou le grec.

Ce n'est pas grave, ils sauront faire autre chose que penser. Et ensuite on ouvrira un fil pour s'esbaudir de la perte de culture générale élémentaire que l'on constate, et se demander si c'est la faute aux rallyes.

Tiens bon Trompettemarine!

Rendash a écrit:

pogonophile a écrit:C'est gentil de m'expliquer comment je devrais faire mon métier

Mais non, voyons : on t'accompagne. Il paraît que tous les CDE qui ont bénéficié d'un tel accompagnement s'en sont montrés ravis.

Toute cette pertinence me decoifferait si le temps n'avait pas fait ses ravages. Ah @Rendash, toujours là pour enrichir le débat !

Je pense bien à vous collègues de L.C.
Vous oeuvrez dans l'ombre mais tout ce que vous faites est essentiel.
Tout mon soutien

Tout mon soutien, Trompettemarune.
Suivant le cde, j’ai eu des cours de LC complètement intégrés dans l’edt avec une classe en français en parallèle. Ou bien, en dernière heure ou deux heures d’affilée le vendredi après-midi quand tous les camarades non-latinistes sortent. Et tout dépend de la volonté du cde.
En ce moment, mon cde arrive à combiner l’option euro ou aviron avec le latin. Mais il suffit qu’il parte pour que tout soit redistribué autrement.
Et comme Iphigénie, dès le début de ma carrière, il a fallu se battre, discuter, argumenter ...

@trompettemarine et tous les collègues de LC (de la part d'un ancien élève qui a fait option latin au lycée et qui a toujours regretté de ne pas avoir cumulé avec du grec... et de la part d'un professeur reconnaissant qui fait faire du latin aux élèves presque à chaque cours )

C'est effectivement une politique d'une très grande violence ou tout ce qui n'est pas utile et efficace pour le marché de l'emploi est considéré comme un coût inutile pour la société.A raboter sans ménagement
J'étais à la manif hier matin à Toulouse et on faisait le même constant avec un collègue : l'Etat a décidé de se délester du coût de l'Education pour ne garder que l'essentiel. On s'achemine vers une privatisation lente de l'Education, considérée comme institution non régalienne. Les options rares devront être payées par les parents. Et ça ne concerne pas la que la France: d'autres pays s'attaque aux Humanités : le Japon , le Brésil actuellement avec Bolsonaro:

Libération a écrit:le président d’extrême droite étudie la possibilité de couper les vivres à ces filières. Dans un tweet de vendredi, Jair Bolsonaro écrit que «le ministre de l’Education étudie la décentralisation de l’investissement dans les facultés de philosophie et de sociologie. Les étudiants déjà inscrits ne seront pas affectés. L’objectif est de se concentrer dans les domaines qui génèrent une retombée immédiate pour le contribuable : vétérinaire, ingénierie, médecine».

https://www.liberation.fr/checknews/2019/04/29/bresil-bolsonaro-va-t-il-vraiment-supprimer-les-facultes-de-sociologie-et-de-philosophie_1723842

Quand on voit un pays comme le Brésil suivre le même chemin, ça n'interpelle pas sur la nature du gouvernement ?

Celadon a écrit:Quand on voit un pays comme le Brésil suivre le même chemin, ça n'interpelle pas sur la nature du gouvernement ?

Trompettemarine, des pensées pour toi.
Je ne sais pas si ça te consolera ou si ça confirmera ton sentiment, mais chez nous, ce n'est pas que le latin et le grec qui morflent. Dans mon lycée, c'est la suppression amorcée du chinois (un des rares trucs qui nous rendaient un peu attractifs par rapport au privé...).