- PhilomèleNiveau 9
V.Marchais a écrit:Philomèle a écrit:@Tannat : je n'avais pas vu que la GMF citait le fragment d'Apollinaire ! Et qu'elle le fait dans la rubrique "périphrases verbales optatives", et non pas "subordination implicite". Tu as raison de signaler l'absence de ponctuation, qui rend bien sûr l'articulation syntaxique plus lâche. Je continue à préférer nettement l'analyse en "subordination implicite" à cause de la solidarité sémantique entre "Vienne la nuit sonne l'heure" et ce qui suit, "les jours s'en vont". Mais ces incertitudes sur le découpage syntaxique font partie de ce que cherche Apollinaire en levant la ponctuation : peut-être faut-il lire seulement deux fragments exprimant le souhait.
Mais les liens logiques ne sont pas réservés à la subordination.
On l'attendait à huit heures, il arriva après minuit.
On a évidemment un rapport d'opposition entre les deux propositions. Faut-il y voir une subordination implicite ? Et pourquoi pas, dans ce cas, une coordination implicite ? Parmi tous les choix possibles, l'auteur a fait celui de la juxtaposition, qui peut aussi renforcer l'opposition par effet de contraste.
L'analyse en subordination implicite permet de rendre raison de l'usage de l'inversion sujet / verbe, laquelle s'accompagne d'une nuance concessive (ou conditionnelle : GMF cite "La tempête menace-t-elle, les voiliers se hâtent de regagner le port.", paraphrasable par la sub. "si, pour peu que..."). Dans le nouvel exemple que tu cites "On l'attendait...", il n'y a pas d'inversion donc je ne vois pas de raison de chercher midi à quatorze heure : c'est en effet un cas de juxtaposition. La juxtaposition elle-même peut avoir une valeur adversative. L'un n'empêche pas l'autre.
(En fait, je saisis mal ce qui te gênes avec cette idée que l'inversion peut dans certains contextes précis, avec d'autres paramètres, signaler un décrochage syntaxique. Cela ne signifie pas que toutes les inversions doivent être rejetées aux marges de l'analyse syntaxique : je pense à l'inversion canonique de la phrase interrogative, par exemple.)
- barègesÉrudit
Pour les inversions en incise, si on pense à d'anciens états de langue, il peut y avoir une composante accentuelle/prosodique, une question de rythme de la phrase. Il a eu historiquement un goût pour les verbes en seconde position dans les indépendantes, précédés par un élément dit "prédicatif" par certains - des adverbes, le COD, quelques autres compléments... D'où les "ainsi soit-il", ou les inversions du sujet en incise.
Dans Bidule dit : "blablabla", on a à peu près cette cadence.
Dans "blablabla", dit Bidule, aussi.
Si on avait "Blablabla", Bidule dit, on la perdrait...
Je ne sais pas si cette "conscience rythmique" existe encore autant dans la langue d'aujourd'hui, et beaucoup d'autres éléments se sont ajoutés à cet usage ancien et qui à aucune époque n'a été totalement systématisé. Avec l'imprégnation, c'est cependant la première "raison" que je perçois devant certains cas d'inversion, mais j'ai conscience que c'est très personnel
Dans Bidule dit : "blablabla", on a à peu près cette cadence.
Dans "blablabla", dit Bidule, aussi.
Si on avait "Blablabla", Bidule dit, on la perdrait...
Je ne sais pas si cette "conscience rythmique" existe encore autant dans la langue d'aujourd'hui, et beaucoup d'autres éléments se sont ajoutés à cet usage ancien et qui à aucune époque n'a été totalement systématisé. Avec l'imprégnation, c'est cependant la première "raison" que je perçois devant certains cas d'inversion, mais j'ai conscience que c'est très personnel
- IphigénieProphète
Il y a aussi à la Queneau:
Blablabla, qu'il me dit.....
Oui, je sais, c'est pour faire avancer le schmilblic :lol: :jesors:
Blablabla, qu'il me dit.....
Oui, je sais, c'est pour faire avancer le schmilblic :lol: :jesors:
- PhilomèleNiveau 9
12.05.201814:18:1212.05.2018
Pas de panique, tout est prévu. La GMF analyse cette structure (exemple de Céline à l'appui) comme l'équivalent structurel populaire de l'inversion : "le parler populaire introduit l'incise au moyen de que ce qui permet d'éviter l'inversion du sujet."
Iphigénie a écrit:Il y a aussi à la Queneau:
Blablabla, qu'il me dit.....
Oui, je sais, c'est pour faire avancer le schmilblic :lol: :jesors:
Pas de panique, tout est prévu. La GMF analyse cette structure (exemple de Céline à l'appui) comme l'équivalent structurel populaire de l'inversion : "le parler populaire introduit l'incise au moyen de que ce qui permet d'éviter l'inversion du sujet."
- IphigénieProphète
Voui, j'ai lu ça aussi
C'est quand même une curieuse inversion de la subordination par rapport à un discours indirect: la langue est très amusante dansses inventions...
C'est quand même une curieuse inversion de la subordination par rapport à un discours indirect: la langue est très amusante dansses inventions...
- PhilomèleNiveau 9
Iphigénie a écrit:Voui, j'ai lu ça aussi
C'est quand même une curieuse inversion de la subordination par rapport à un discours indirect: la langue est très amusante dansses inventions...
Elle est vraiment intéressante, cette construction. L'usage du que, marque, s'il en est, de subordination, indique une analyse pratique non pas en incise mais bien en subordonnée... dans laquelle la principale serait le propos rapporté et la subordonnée, la proposition rapportante.... Il n'y a bien que les savants pour essayer de grammaticaliser à toute force, inventer une norme syntaxique (avec l'inversion) et dire que c'est un truc nouveau, une incise.
- tannatHabitué du forum
Mais, pour moi, le choix du lien logique qui unit les deux propositions de l'exemple que tu donnes "On l'attendait à huit heures, il arriva après minuit." et "Vienne la nuit sonne l'heure/ les jours s'en vont et je demeure" ne me semble pas être le même que celui qui unit les vers d'Apollinaire.V.Marchais a écrit:Philomèle a écrit:@Tannat : je n'avais pas vu que la GMF citait le fragment d'Apollinaire ! Et qu'elle le fait dans la rubrique "périphrases verbales optatives", et non pas "subordination implicite". Tu as raison de signaler l'absence de ponctuation, qui rend bien sûr l'articulation syntaxique plus lâche. Je continue à préférer nettement l'analyse en "subordination implicite" à cause de la solidarité sémantique entre "Vienne la nuit sonne l'heure" et ce qui suit, "les jours s'en vont". Mais ces incertitudes sur le découpage syntaxique font partie de ce que cherche Apollinaire en levant la ponctuation : peut-être faut-il lire seulement deux fragments exprimant le souhait.
Mais les liens logiques ne sont pas réservés à la subordination.
On l'attendait à huit heures, il arriva après minuit.
On a évidemment un rapport d'opposition entre les deux propositions. Faut-il y voir une subordination implicite ? Et pourquoi pas, dans ce cas, une coordination implicite ? Parmi tous les choix possibles, l'auteur a fait celui de la juxtaposition, qui peut aussi renforcer l'opposition par effet de contraste.
Ainsi dans :
"On l'attendait à huit heures, il arriva après minuit." Ici, le lien logique implicite tient plus, comme tu le soulignes d'ailleurs, de la coordination "mais" que de la subordination "quoique", car le choix engendre à mon sens une différence dans l'effet.
Autant entre la juxtaposition et la coordination, l'effet me semble presque identique bien qu'il retire au lecteur la possibilité d'une autre interprétation lorsque "mais" est posé ; autant l'opération de subordination engendre une relation plus forte entre les deux propositions (propre à la subordination, évidemment). Sur le plan du sens et donc de l'interprétation, qui me semble en découler, ça n'a pas la même répercussion.
Tandis que dans :
"Vienne la nuit sonne l'heure/ les jours s'en vont et je demeure", les deux premières "Vienne la nuit sonne l'heure" me semblent clairement indépendantes l'une de l'autre (ce qui confirme ce que tu disais dans la première apparition de ce vers) mais elles entretiennent, à mon avis, un lien implicite de subordination avec le vers suivant que l'on pourrait gloser ainsi "Les jours s'en vont et je demeure (bien) que (quoique) la nuit vienne et/ ou que l'heure sonne ".
Pour moi dans "Vienne la nuit sonne l'heure", ce vers interprété seul devient deux propositions que la GMF nomme des périphrases verbales optatives (des injonctions au subjonctif sans que), et Apollinaire joue autant de l'absence de ponctuation que de l'emploi du subjonctif sans que pour de multiples raisons.
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« Nous naissons tous fous. Quelques-uns le demeurent. » Samuel Beckett
« C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.» Vauvenargues
- SlinkyNiveau 10
Faut-il écrire : porte-elle une robe ou porte-t-elle une robe ? Merci pour la réponse.
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Her steps--slow, deliberate, and challenging, the set of her sleek head and her slender shoulders, the swing of her straight body, the slight swaying of her hips, are more deadly than all the leopard skins and languors of the old-time vampire. Here is Slinky!
- slynopHabitué du forum
La seconde proposition, le "t" est juste ajouté pour éviter un problème de prononciation, il n'a aucune fonction dans la phrase.
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"C'est pas moi qu'explique mal, c'est les autres qui sont cons !", Perceval dans Kaamelot.
- Thalia de GMédiateur
C'est ce qu'on appelle un t euphonique qui permet d'éviter le hiatus dans ta 1re proposition.
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- slynopHabitué du forum
Un "t" épenthétique, non ?
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"C'est pas moi qu'explique mal, c'est les autres qui sont cons !", Perceval dans Kaamelot.
- Thalia de GMédiateur
Oui, mais je me demande si on ne peut dire les deux.
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- HocamSage
On peut dire les deux : épenthétique concerne plus spécifiquement l'intercalation d'un son, euphonique renvoie plus généralement à tout ce qui facilite ou enjolive la prononciation.
- IphigénieProphète
Et éphelcistique alors?
Moins c'est utile plus il y a de termes en grammaire
Moins c'est utile plus il y a de termes en grammaire
- IphigénieProphète
Nan! Tout au plus les fonds de tiroirs de ma mémoire :lol:
- SlinkyNiveau 10
Merci à tous pour votre rapidité . C'est très technique apparemment.
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Her steps--slow, deliberate, and challenging, the set of her sleek head and her slender shoulders, the swing of her straight body, the slight swaying of her hips, are more deadly than all the leopard skins and languors of the old-time vampire. Here is Slinky!
- OudemiaBon génie
Le "nu" éphelcistique !
Iphigénie, j'avais complètement oublié le terme
Iphigénie, j'avais complètement oublié le terme
- IphigénieProphète
9Oudemia a écrit:Le "nu" éphelcistique !
Iphigénie, j'avais complètement oublié le terme
Va-t'en voir maintenant ce que les non-hellenistes vont comprendre par ton message! :lol:
- V.MarchaisEmpereur
Ben ça cause d'éphèbes nus, c'est vachement intéressant. Développez, svp.
- IphigénieProphète
Et d'appendices peu utiles sauf pour l'esthétique : ah ces grecs,franchement..... :lol:V.Marchais a écrit:Ben ça cause d'éphèbes nus, c'est vachement intéressant. Développez, svp.
- bernardoFidèle du forum
salut !
"l'homme est ainsi fait qu'il peut souffrir longtemps et beaucoup, moralement et physiquement, sans mourir"
est-ce que vous me confirmez que la subordonnée exprime la conséquence (annoncée par "ainsi" dans la principale)
et, pour le plaisir, devinez qui est l'auteur... (et l'oeuvre)
"l'homme est ainsi fait qu'il peut souffrir longtemps et beaucoup, moralement et physiquement, sans mourir"
est-ce que vous me confirmez que la subordonnée exprime la conséquence (annoncée par "ainsi" dans la principale)
et, pour le plaisir, devinez qui est l'auteur... (et l'oeuvre)
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Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
- OudemiaBon génie
C'est pourtant pour eux que j'avais mis les guillemetsIphigénie a écrit:9Oudemia a écrit:Le "nu" éphelcistique !
Iphigénie, j'avais complètement oublié le terme
Va-t'en voir maintenant ce que les non-hellenistes vont comprendre par ton message! :lol:
- V.MarchaisEmpereur
bernardo a écrit:salut !
"l'homme est ainsi fait qu'il peut souffrir longtemps et beaucoup, moralement et physiquement, sans mourir"
est-ce que vous me confirmez que la subordonnée exprime la conséquence (annoncée par "ainsi" dans la principale)
et, pour le plaisir, devinez qui est l'auteur... (et l'oeuvre)
Oui, Bernardo, d'accord avec ton analyse. Pour l'oeuvre, je reconnais le passage, je ne dis rien (mais c'est facile).
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