Enseignant Uberisé

Bonjour à tous,

Je voulais vous faire part d'une expérience récente - liée à ce que certains d'entre nous vivent sûrement : la recherche de complément d'activité pour des compléments de revenus. Le réflexe consiste à faire des HSA/HSE, mais j'avoue que mes conditions d'exercice du métier (Lycée de Marseille ; en maths) deviennent plus que pénibles. Je voulais donc voir d'autres horizons.

J'ai fait l'expérience de Kartable : ils proposent des missions pour créer du contenu. Ils demandent expressément de devenir auto-entrepreneur, ce que j'ai fait. La première mission est assez simple, et est proposé pour une modique somme, mais le flou est total sur les cotisations et autres taxes. Au final, je pense m'en tirer pour 25/30 euros pour environs 2h30 de boulot. Je n'arrive pas à m'enlever de la tête que pendant ce temps, cette start-up s'en met plein les poches... Je ne sais ce que vous en pensez...

En parallèle, je viens d'avoir une proposition pour travailler dans une école d'ingénieur : faire 3 heures de TD par semaine. Et là... le tarif proposé est de 35 euros de l'heure.

Je ne sais que penser de cela, si ce n'est ce que j'évoque dans le titre : notre uberisation d'un côté, et un profond mépris de la part de nos administratifs qui nous "remplissent" des classes totalement délirante du point de vue du niveau des élèves (par ex. des élèves de TS qui ne savent pas dériver "x^2+1").

Je ne sais la perception que vous avez de tout cela...

Marc

A la fac, le taux de rémunération des heures de TD (heures supplémentaires d'un titulaire ou confiées à un vacataire) est de 40, 91 €.
http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article4360

En BTS par alternance, le tarif horaire est de 54.93 euros brut pour un certifié.

Un plombier chez moi, c'est 75€ de l'heure (Mais il ne compte pas de déplacement. Ca tombe bien il ne m'a jamais répondu.)

La différence c'est que le prof de maths va te calculer en combien de temps ton tuyau obstrué va déborder, pendant que le plombier va te le déboucher. Voilà voilà.

Est ce que la solution serait de supprimer ce besoin d'avoir un complément de salaire ? Autrement dit, de changer de métier ?

Pour ma part, c'est ce qui a été fait, notamment en passant le concours de la DGFIP (et clairement, le salaire est meilleur). Mais on peut aussi penser à la reconversion dans le privé (pour un enseignant de maths, la banque, l'actuariat, ...). Voire, si l'idée de la micro entreprise ne te rebute pas, de donner toi même les cours en fixant ton tarif. Quand on voit ce que facture Acadomia et consort, ça peut être sympa aussi.

Tout à fait d'accord avec Whypee (information à relayer aux élèves de 3ème).

Ici, en cumulant 6 heures de cours particuliers le mercredi et samedi après-midi, j'arrive à gagner 190 € par semaine. Je trouve ces interventions plus stimulantes et enrichissantes que des HSA. (public varié et motivé).

Les rémunérations disent bien en quelle estime nous sommes tenus.

Le problème, c'est que certains acceptent de travailler à des tarifs de misère : nous n'avons collectivement qu'à nous en prendre en nous-même...
Kartable aussi m'a proposé des tarifs de misère, eh bien j'ai refusé de travailler pour eux : il n'y a pas d'enseignant uberisés, il n'y a que des enseignants qui veulent bien se laisser ubériser. Tant pis pour eux !

Cela faisait 5 ans que je n'avais pas réparé de matériel informatique pour cause de mépris. Du coup la famille, amis et collègues allaient chez les professionnels. Bizarrement, tous reviennent et me proposent de me rémunérer pour que je jette un œil sur leur matériel défectueux...

Un ami, sans le concours (simple AVS à l'époque) gagnait 20E l'heure pour un cours particulier, il y a presque une dizaine d'année. Il passait par une entreprise privée de cours particuliers.
Une connaissance "enseigne" à Toulouse dans une boite privée d'esthétique, payée une misère, obligée de devenir elle-aussi auto-entrepreneur pour que ladite boite s'en mette plus encore dans les poches, je suppose.
Pour comparer avec Panta Rhei, le maximum qu'elle a déclaré, un mois, une fois, est 700E.
Arnaque pure et dure.

Modulo a écrit:Est ce que la solution serait de supprimer ce besoin d'avoir un complément de salaire ? Autrement dit, de changer de métier ?

Pour ma part, c'est ce qui a été fait, notamment en passant le concours de la DGFIP (et clairement, le salaire est meilleur). Mais on peut aussi penser à la reconversion dans le privé (pour un enseignant de maths, la banque, l'actuariat, ...). Voire, si l'idée de la micro entreprise ne te rebute pas, de donner toi même les cours en fixant ton tarif. Quand on voit ce que facture Acadomia et consort, ça peut être sympa aussi.

Mais nous n'avons pas tous envie de changer de métier.

Sinon, pour un prof d'histoire-géographie j'imagine que c'est plus compliqué de trouver un petit complément de revenu à côté que pour un prof de maths, de français ou d'anglais, non ?

En RP, il y'a une demande en HG au 3e trimestre pour préparer le DNB et le bac, il peut y avoir aussi des élèves du cned (notamment des triplants de terminale qui n'ont pas eu de place en lycée). Il est aussi possible de donner des cours en primaire et dans les petites classes du collège, mais il faut être polyvalent. Quand je passais le capes, j'avais 15/20h par semaine sans problème.

Jenny a écrit:En RP, il y'a une demande en HG au 3e trimestre pour préparer le DNB et le bac, il peut y avoir aussi des élèves du cned (notamment des triplants de terminale qui n'ont pas eu de place en lycée). Il est aussi possible de donner des cours en primaire et dans les petites classes du collège, mais il faut être polyvalent. Quand je passais le capes, j'avais 15/20h par semaine sans problème.

C'est bien rémunéré ?

C'est variable : ça dépend de la zone dans laquelle tu travailles, de ton expérience, si tu passes par une agence ou pas...

Jenny a écrit:C'est variable : ça dépend de la zone dans laquelle tu travailles, de ton expérience, si tu passes par une agence ou pas...

Ok, merci; je vais me renseigner

J'avoue que quelque part j'admire les collègues qui peuvent simplement envisager des activités régulières annexes. Entre les cours, les préparations et les copies je n'en aurais tout simplement pas le temps si je veux avoir une vie personnelle à côté. Certes j'ai moi même une autre activité mais qui n'est pas soumise à des horaires fixes, donc essentiellement réalisée pendant les vacances.
Si vous pouvez me donner la recette pour dégager du temps la semaine je suis preneur, mais si tel est le cas j'ai peur que cela n'apporte de l'eau au moulin de deux qui estimenpourrait enseigner plus de 20 heures par semaine avec la même qualité de préparation.

Je ne suis pas sûr que ce que propose Kartable soit légal:

Cf: http://www.lemonde.fr/campus/article/2017/05/30/enquete-sur-les-conditions-d-emploi-d-etudiants-a-l-ecole-d-informatique-epitech_5136197_4401467.html

Le monde a écrit:

« Un contrôle de l’Urssaf a eu lieu en 2012-2013 sur un éventuel travail dissimulé d’étudiants qui étaient animateurs dans le cadre de projets de l’école. Plusieurs dizaines de ces jeunes avaient le statut d’autoentrepreneur, y compris ceux travaillant uniquement pour l’école. Ce contrôle n’a finalement conduit à aucun redressement, ni à aucune poursuite. Et cette question est juridiquement close, depuis la fin de l’année 2013, par un courrier de l’Urssaf », explique Fabrice Bardèche, vice-président exécutif du groupe Ionis.

Depuis, les pratiques de l’école ont changé, assure aussi M. Bardèche, certain de la régularité de la situation : « L’Urssaf ayant émis toutes ses réserves sur l’utilisation du statut d’autoentrepreneur, il a été abandonné. Aujourd’hui, nos étudiants sont en CDD ou en CDI, et nous évitons vraiment ce statut d’autoentrepreneur, sauf pour des étudiants qui ont déjà d’autres clients par ailleurs, comme cela arrive en informatique. »

LordSteven : J'ai arrêté depuis que j'ai eu le concours.
Je n'ai pas le temps non plus.

Whypee a écrit:Un plombier chez moi, c'est 75€ de l'heure (Mais il ne compte pas de déplacement. Ca tombe bien il ne m'a jamais répondu.)

Nous sommes allée un WE chez ma fille à Strasbourg le mois dernier, le robinet de sa cuisine ne fonctionnait plus, elle demande à son père très bon bricoleur de la dépanner. Pas de problème, on va chez Casto et on achète un nouveau robinet que monsieur va poser tranquille dans l'après-midi : il coupe l'eau et se met au travail, mais il n'a pas ses outils sous la main, juste une mallette - bien garnie quand même- de dépannage dans la voiture, mais voilà elle habite un meublé et le robinet est vraiment très très rouillé à l'intérieur, vieillot et difficile à enlever. De peur de ne pas pouvoir y arriver et pour ne pas la laisser sans eau pendant tout le WE lequel est long avec le lundi, vers 17h on se décide à appeler SOS dépannage pour faire changer ce robinet : ils peuvent venir le faire un samedi après-midi pour la somme de, tenez-vous bien,

Spoiler:

Totalement ahuris par le montant, on contacte une autre société qui nous demande,

Spoiler:

Monsieur se retrousse donc encore les manches et finit par y arriver : 7h pour enlever ce fichu robinet et 1h pour en remonter un neuf.
Voilà, tout ça avec un robinet acheté 50 euros. Bon il en a bavé mais y est arrivé.

C'est là qu'on se rend compte qu'on est vraiment mal payés et surtout que nos salaires retraites sont bloqués depuis très longtemps...

Personne ne nous empêchait de faire un CAP plomberie...

Perso je préfère mon salaire inférieur à l'heure que celui d'un plombier plutôt que de gagner plus mais de passer des heures les mains dans les déjections des autres...

skindiver a écrit:Personne ne nous empêchait de faire un CAP plomberie...

Perso je préfère mon salaire inférieur à l'heure que celui d'un plombier plutôt que de gagner plus mais de passer des heures les mains dans les déjections des autres...

C'est vrai
Mais quand j'ai commencé mes études, il y a 50 ans, oui un demi siècle, les choses étaient totalement différentes...
Le temps que je les finisse les choses avaient déjà bien changé dans l'EN... et ça ne s'est pas arrangé depuis, pour toute la fonction publique d'ailleurs.

Artysia a écrit:

Modulo a écrit:Est ce que la solution serait de supprimer ce besoin d'avoir un complément de salaire ? Autrement dit, de changer de métier ?

Pour ma part, c'est ce qui a été fait, notamment en passant le concours de la DGFIP (et clairement, le salaire est meilleur). Mais on peut aussi penser à la reconversion dans le privé (pour un enseignant de maths, la banque, l'actuariat, ...). Voire, si l'idée de la micro entreprise ne te rebute pas, de donner toi même les cours en fixant ton tarif. Quand on voit ce que facture Acadomia et consort, ça peut être sympa aussi.

Mais nous n'avons pas tous envie de changer de métier.

Je comprends bien, et tu n'imagines pas à quel point ça a été une décision difficile pour ma part. Mais l'argument salarial, ainsi que tout un tas d'autres raisons comme la deconsideration intense, ont été plus forts que ma vocation.

Dans le cas où l'on ne souhaite pas abandonner l'enseignement, peut être est-il possible que cela devienne l'activité accessoire, en complément dune autre activité mieux rémunérée ? (Comme les fameuses heures en école supérieure par exemple)

skindiver a écrit:Personne ne nous empêchait de faire un CAP plomberie...

Perso je préfère mon salaire inférieur à l'heure que celui d'un plombier plutôt que de gagner plus mais de passer des heures les mains dans les déjections des autres...

Je ne voudrais pas paraître trop abrupte, mais c'est souvent ce que l'on fait et je me demande si la métaphore n'est pas pire que la réalité.
Devenir plombier me dérangerait moins en ce sens.
:blague: