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User17706
Bon génie

Aristote - Proposition vraie et sujet inexistant - Page 2 Empty Re: Aristote - Proposition vraie et sujet inexistant

par User17706 Mer 28 Sep 2016, 14:07
verdurin a écrit:Un peu de lecture sur la logique intuitionniste , le tiers exclus etc.
Les structures de Kripke me semblent bien convenir à la discussion.
Oui, j'ai regardé vite fait et tout semble juste ici. Le terme de «bivalence» n'apparaît pas (peu importe en vérité), mais le développement sur le tiers exclu est correct (et ils font bien de préciser, par exemple, qu'il s'agit bien en logique classique d'un théorème et non d'un principe, ce que l'anglais dit plus clairement que le français en parlant couramment de law of excluded middle).
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InvitéSn
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par InvitéSn Mer 28 Sep 2016, 17:55
Solal des Solal a écrit:... "Socrate n'est pas malade" se paraphrase, respectivement, en "non-[Socrate est malade]" (= "il n'y a pas de Socrate qui soit malade") ou "Socrate est non-malade" (= "Socrate est en bonne santé"), propositions dont les conditions de vérité sont totalement différentes ...
La traduction de Russell est bien faite, qui sait introduire une distinction dans le point d'application de la négation. Mais ça reste une traduction de la logique d'Aristote en une logique qui est différente de la sienne. Pour le Stagirite, il me semble, la négation de la proposition "Socrate est malade" n'est pas "il n'y a pas de Socrate qui soit malade", mais bien strictement "on ne peut attribuer être malade à Socrate". Comme la discussion partait d'une question concernant Aristote, j'aurais presque envie de faire le pinailleur et de maintenir la formulation non propositionnelle. Les tenants et aboutissants ne coïncident pas tous d'un bout à l'autre du processus de traduction.
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Solal des Solal
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par Solal des Solal Jeu 29 Sep 2016, 08:51
snitch a écrit:Pour le Stagirite, il me semble, la négation de la proposition "Socrate est malade" n'est pas "il n'y a pas de Socrate qui soit malade", mais bien strictement "on ne peut attribuer être malade à Socrate". Comme la discussion partait d'une question concernant Aristote, j'aurais presque envie de faire le pinailleur et de maintenir la formulation non propositionnelle. Les tenants et aboutissants ne coïncident pas tous d'un bout à l'autre du processus de traduction.
On est bien d'accord. Pour Aristote, la substance est la condition ontologique d'existence de ses accidents, raison pour laquelle l'existence d'un sujet est la condition logique de la possibilité de toute attribution. De sorte que, si cette condition n'est pas satisfaite, alors l'attribution est logiquement fausse, ce qui revient à dire que, la substance n'existant pas, l'accident est ontologiquement inexistant. La bivalence aristotélicienne (de deux propositions contradictoires, nécessairement l'une est vraie et l'autre fausse) découle de ce que sa logique est le reflet de son ontologie.

Sauf que, pour comprendre le passage des Catégories que vous avez cité ("que le sujet existe ou n’existe pas, de toute façon l’une sera fausse et l’autre vraie. Soit, en effet, Socrate est malade et Socrate n’est pas malade ; si Socrate lui-même existe, il est clair que l’une de ces deux propositions est vraie et l’autre fausse ; et s’il n’existe pas, il en est de même, car s’il n’existe pas, dire qu’il est malade est faux, et dire qu’il n’est pas malade est vrai. – Ainsi, les choses qui sont opposées comme l’affirmation et la négation ont seules la propriété d’être toujours, l’une vraie et l’autre fausse") il faut distinguer
- le cas où Socrate n'existe pas comme substance : alors "Socrate" n'existe pas non plus comme sujet, de sorte que ce qui sera en question dans la négation de l'attribution d'un prédicat p à Socrate, ce ne sera pas seulement l'attribution mais la proposition tout entière en tant qu'elle mentionne un sujet vide en quelque sorte
- le cas où Socrate existe comme substance : alors "Socrate" existe aussi comme sujet, mais ce qui sera en question dans la négation de l'attribution d'un prédicat p à Socrate, ce peut tout aussi bien être l'attribution et rien d'autre (auquel cas "Socrate est malade" se paraphrase en "Socrate possède la propriété d'être malade" par opposition à "Socrate ne possède pas la propriété d'être malade"), ou bien, conjointement, l'attribution et l'existence (auquel cas, "Socrate est malade" se paraphrase en "il existe un Socrate qui possède la propriété d'être malade", par opposition à "il n'existe pas un Socrate qui possède la propriété d'être malade").

Dans tous les cas, la bivalence est respectée, mais pour la même raison : dans le premier cas, c'est parce que la négation à nécessairement une portée large, dans le second cas, c'est au prix d'une ambiguïté entre portée large et portée étroite. C'est en ce sens que Russell nous aide, me semble-t-il, à y voir plus clair.

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Giacomo
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par Giacomo Jeu 29 Sep 2016, 12:39
Je vais tâcher de résumer ce que je comprends :

Principe de bivalence

Toute proposition a une valeur de vérité déterminée (elle est soit vraie soit fausse mais ne peut pas être les deux en même temps). Ce principe pose au moins deux problèmes :
• Cas des propositions portant sur des futurs (querelle des futurs contingents : opposition DIODORE/ARISTOTE, et analyses de BERGSON pour qui une proposition n’est pas vraie ou fausse, mais deviendra vraie ou fausse).
• Cas des propositions portant sur des sujets inexistants (pour FREGE une proposition portant sur un sujet inexistant est dénué de dénotation, c'est-à-dire de valeur de vérité. Au contraire, des auteurs comme MEINONG ou RUSSELL montrent chacun à leur manière en quel sens de telles propositions peuvent recevoir une valeur de vérité)

Principe de non-contradiction

Le principe de non-contradiction peut s'entendre en deux sens
• Sens ontologique (Aristote : une chose ne peut pas à la fois être et ne pas être)
• Sens logique : le principe de non contradiction est un théorème (qui découle du principe de bivalence et de la table de la négation) plutôt qu'un principe (?)

Principe du tiers-exclu

• Comme y a insisté PauvreYorick il s'agit d'un théorème de la logique classique (la disjonction d’une proposition et de sa négation est une tautologie). En ce sens le principe de bivalence fait partie de la sémantique, alors que le tiers-exclu est un théorème formel.
• Le principe de bivalence implique le tiers-exclu, mais la réciproque n'est pas nécessaire.

Concernant les sujets inexistants

Chez Aristote, le jugement consiste à attribuer un prédicat à un sujet, et la structure logique sujet-prédicat répond à la structure ontologique substance-accident. Dès lors, pour attribuer un prédicat à un sujet, il faut que le sujet (compris comme individu) existe. En ce sens, si un sujet S n’existe pas, il est vrai d’affirmer que « S n’est pas P », puisque P ne peut être attribué à S, et faux d’affirmer que « S est P » pour la raison inverse.

D’autre part, la négation porte, pour Aristote, sur l’attribution et non sur le prédicat :

La négation de « S est P » est « S n’est pas P » et non pas « S est non-P ». La négation est une modalité assertive et non un opérateur portant sur un prédicat.  

Aristote accepte le principe de bivalence et le principe de contradiction, mais rejette le tiers-exclu dans le cas des propositions portant sur des futurs contingents (ce qui est nécessaire est l'alternative entre une proposition et sa négation, sans qu'il soit possible d'attribuer une valeur de vérité à chaque disjoint).

Désolé pour le caractère brouillon de ces réflexions.
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Solal des Solal
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par Solal des Solal Jeu 29 Sep 2016, 15:14
Giacomo a écrit:
Je vais tâcher de résumer ce que je comprends :

Principe de bivalence

Toute proposition a une valeur de vérité déterminée (elle est soit vraie soit fausse mais ne peut pas être les deux en même temps). Ce principe pose au moins deux problèmes :
• Cas des propositions portant sur des futurs (querelle des futurs contingents : opposition DIODORE/ARISTOTE, et analyses de BERGSON pour qui une proposition n’est pas vraie ou fausse, mais deviendra vraie ou fausse).
• Cas des propositions portant sur des sujets inexistants (pour FREGE une proposition portant sur un sujet inexistant est dénué de dénotation, c'est-à-dire de valeur de vérité. Au contraire, des auteurs comme MEINONG ou RUSSELL montrent chacun à leur manière en quel sens de telles propositions peuvent recevoir une valeur de vérité)

Principe de non-contradiction

Le principe de non-contradiction peut s'entendre en deux sens
• Sens ontologique (Aristote : une chose ne peut pas à la fois être et ne pas être)
• Sens logique : le principe de non contradiction est un théorème (qui découle du principe de bivalence et de la table de la négation) plutôt qu'un principe (?)

Principe du tiers-exclu

• Comme y a insisté PauvreYorick il s'agit d'un théorème de la logique classique (la disjonction d’une proposition et de sa négation est une tautologie). En ce sens le principe de bivalence fait partie de la sémantique, alors que le tiers-exclu est un théorème formel.
• Le principe de bivalence implique le tiers-exclu, mais la réciproque n'est pas nécessaire.

Concernant les sujets inexistants

Chez Aristote, le jugement consiste à attribuer un prédicat à un sujet, et la structure logique sujet-prédicat répond à la structure ontologique substance-accident. Dès lors, pour attribuer un prédicat à un sujet, il faut que le sujet (compris comme individu) existe. En ce sens, si un sujet S n’existe pas, il est vrai d’affirmer que « S n’est pas P », puisque P ne peut être attribué à S, et faux d’affirmer que « S est P » pour la raison inverse.

D’autre part, la négation porte, pour Aristote, sur l’attribution et non sur le prédicat :

La négation de « S est P » est « S n’est pas P » et non pas « S est non-P ». La négation est une modalité assertive et non un opérateur portant sur un prédicat.  

Aristote accepte le principe de bivalence et le principe de contradiction, mais rejette le tiers-exclu dans le cas des propositions portant sur des futurs contingents (ce qui est nécessaire est l'alternative entre une proposition et sa négation, sans qu'il soit possible d'attribuer une valeur de vérité à chaque disjoint).

Désolé pour le caractère brouillon de ces réflexions.
Non. C'est intéressant et, de toute façon, dès qu'on aborde les problèmes de logique, il faut avoir le courage d'assumer des tautologies découlant de parti-pris en matière d'axiomatiques. Juste deux remarques en passant :
- le terme "principe" est à prendre ici dans son sens non-technique, il est justement synonyme de parti-pris et non pas d'axiome, de sorte que le principe de bivalence est le seul des trois "principes" qui soit en même temps un axiome, les deux autres sont, effectivement, des conséquences logiques du principe du bivalence
- le problème des logiques temporelles ne se pose pas de la même manière chez Aristote pour qui dire que ce qui est vrai en acte en tn était déjà contenu en puissance en tn-1 et chez Bergson pour qui une telle formulation est "une illusion rétrospective" (les présupposés ontologiques sont déterminants dans la conception de la logique : ce n'est pas pour rien que Frege, Russell ou Wittgenstein vont tenter, sans y réussir, de purger la logique de toute métaphysique).

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par User17706 Ven 30 Sep 2016, 18:25
Giacomo a écrit: Principe de non-contradiction

Le principe de non-contradiction peut s'entendre en deux sens
[...]
• Sens logique : le principe de non contradiction est un théorème (qui découle du principe de bivalence et de la table de la négation) plutôt qu'un principe (?)
Je vois un « (?) » alors je réponds : oui, le « principe » de (non) contradiction est dans le même cas que le « principe » du tiers-exclu, au sens où dans un calcul ordinaire (à commencer par le plus simple, le calcul propositionnel) c'est un théorème (d'où, pareil, en anglais l'expression law qui concurrence celle, plus traditionnelle, de principle). Après, comme ça a été noté, je crois, plus haut dans la discussion, ce n'est évidemment pas un hasard si les systèmes formels le respectent habituellement: dans toute logique non-paraconsistante, si l'on peut démontrer une contradiction on peut démontrer n'importe quoi, ce qui vide le système de tout intérêt. Il n'en reste pas moins qu'à partir du moment où l'on a [1] bivalence et vérifonctionnalité et [2] tables de vérité usuelles de la négation et de la conjonction, le « principe » de (non) contradiction apparaît comme une conséquence forcée (autrement dit, « non-[p et non-p] » est une tautologie). De même, dans les axiomatiques formelles les plus courantes, comme celle de Kleene, c'est un théorème formel (mais on pourrait bien sûr en faire un axiome, rien ne s'y oppose; tout comme on pourrait faire un axiome de « p ou non-p », càd du « principe » ou plutôt de la loi du tiers-exclu, vu que rien ne force à être économe d'axiomes).

Il n'existe aucune manipulation de cette sorte pour le principe de bivalence, ça n'aurait tout simplement aucun sens. C'est pourquoi l'on ne met pas sur le même plan, d'un côté, le principe de bivalence, et, de l'autre, les lois de non-contradiction ou du tiers-exclu (lesquelles peuvent être représentées par des tautologies, contrairement au premier). Et c'est pourquoi les mettre en concurrence risque d'occasionner des confusions.

Mais comme l'a souligné Snitch, ça nous entraîne tout de même assez loin d'Aristote : il y faut de la précaution et ne pas oublier que ces traductions sont des traductions.
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par verdurin Lun 10 Oct 2016, 23:25
Pour dire les choses de façon formelle, P étant une propriété quelconque dépendant d'une variable :

est une proposition vraie en logique classique.
Mais pas en logique intuitionniste.

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par Giacomo Mar 11 Oct 2016, 12:13
verdurin a écrit:Pour dire les choses de façon formelle, P étant une propriété quelconque dépendant d'une variable :

est une proposition vraie en logique classique.
Mais pas en logique intuitionniste.

Comment une variable peut-elle appartenir à l'ensemble vide ?
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par verdurin Mar 11 Oct 2016, 23:30
C'est juste une façon formelle pour dire que d'une proposition fausse implique n'importe quoi.
On peut aussi voir ça comme une définition de l'ensemble vide.
En logique du deuxième ordre on peut définir l'ensemble vide par

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par Giacomo Mer 12 Oct 2016, 09:50
Je ne vois toujours pas l'utilité de mobiliser l'ensemble vide pour définir le principe de contradiction.

Par ailleurs, puisque par définition x ne peut pas être un élément de l'ensemble vide, je ne vois pas comment on pourrait lui attribuer une propriété quelconque ?
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par verdurin Jeu 13 Oct 2016, 23:39
Disons qu'écrire est une façon de dire « faux ».

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par Giacomo Ven 14 Oct 2016, 10:51
Pour moi la "proposition"


n'a pas de sens. En tout cas je ne vois pas l'utilité de recourir à l'ensemble vide pour expliciter le principe de contradiction
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