- PoméeNiveau 9
NLM76 a écrit:Bon ; en fait, en préparant cette explication, je me rends compte de ceci : la langue de Prévost, pour un grand nombre de mes élèves est beaucoup trop distante. Nous ne les avons pas assez fait travaillé jusque-là pour qu'ils aient un niveau suffisant pour comprendre suffisamment un tel texte. En annotant le texte pour tous les problèmes qu'ils peuvent rencontrer, je vois bien qu'au moins une bonne moitié d'entre eux, de fait, ne comprend pas le sens littéral du texte que nous étudions. C'est pourquoi je me suis dit que j'allais proposer, pour les élèves les moins forts (pardonnez l'euphémisme : j'ai 30 ans d'éducation nationale dans les pattes), une version en français facile. Dites-moi ce que vous pensez de ma "traduction".Prévost a écrit:1Par quelle fatalité, disais-je, suis-je devenu si criminel ? 2L’amour est une passion innocente ; comment s’est-il changé pour moi en une source de misères et de désordres ? 3Qui m’empêchait de vivre tranquille et vertueux avec Manon ? 4Pourquoi ne l’épousai-je point avant que d’obtenir rien de son amour ? 5Mon père, qui m’aimait si tendrement, n’y aurait-il pas consenti si je l’en eusse pressé avec des instances légitimes ? 6Ah ! mon père l’aurait chérie lui-même comme une fille charmante, trop digne d’être la femme de son fils ; je serais heureux avec l’amour de Manon, avec l’affection de mon père, avec l’estime des honnêtes gens, avec les biens de la fortune et la tranquillité de la vertu. 7Revers funeste ! 8Quel est l’infâme personnage qu’on vient ici me proposer ? 9Quoi ! j’irai partager… 10Mais y a-t-il à balancer, si c’est Manon qui l’a réglé et si je la perds sans cette complaisance ? 11« Monsieur Lescaut, m’écriai-je en fermant les yeux comme pour écarter de si chagrinantes réflexions, si vous avez eu dessein de me servir, je vous rends grâces. 12Vous auriez pu prendre une voie plus honnête ; mais c’est une chose finie, n’est-ce pas ? 13Ne pensons donc plus qu’à profiter de vos soins et à remplir votre promesse. »NLM76 a écrit:1« Par quelle terrible malchance terrible, pensais-je en moi-même, suis-je devenu si criminel ? 2L’amour est une émotion innocente ; comment a-t-il pu devenir pour moi l’origine de tant de misères, d’un tel bazar dans ma vie ? 3Qu’est-ce qui m’empêchait de vivre tranquillement, de façon conforme à la morale, avec Manon ? 4Pourquoi est-ce que je ne l’ai pas épousée avant d’obtenir d’elle qu’elle me donne son cœur et son corps ? 5Mon père, qui m’aimait si tendrement, aurait sans doute accepté de nous marier, si je l’avais supplié – et ç’aurait été juste que je le fisse ! 6Ah ! mon père l’aurait aimée lui-même comme une fille charmante, trop digne d’être la femme de son fils ; si je l’avais épousée, je serais heureux, j’aurais l’amour de Manon, j’aurais l’affection de mon père ; les honnêtes gens me respecteraient, je serais suffisamment riche, et je serais tranquille, en vivant de façon honnête. 7Quelle catastrophe terrible ! 8Quel ignoble personnage on vient ici me proposer de jouer ! 9Quoi ! Je vais partager… 10Mais est-ce qu’il faut hésiter, puisque c’est Manon qui a tout organisé, puisque je risque de la perdre si je n’accepte pas qu’elle ait un amant ?
11— Monsieur Lescaut, m’écriai-je en fermant les yeux, comme si c’était pour me débarrasser de toutes ces réflexions déprimantes, puisque vous avez eu l’intention de m’être utile, je vous remercie vivement. 12Vous auriez pu choisir un chemin plus honnête ; mais la chose est décidée, définitivement, n’est-ce pas ? 13D’accord : je ne vais plus penser qu’à profiter de votre aide, et je vais faire ce que vous avez promis à Manon et à G… M... »
Il y a la répétition de "terrible" dans la 1re phrase.
Sinon, je pense que je leur demanderais d'adapter le texte de Prévost en "français d'aujourd'hui" par groupe de 3 ou 4. Je ne leur donnerais pas tout de suite la "translation".
Avec les notes et un dictionnaire, ils doivent tout de même y arriver.
Les miens aussi sont très vite perdus mais j'estime que le texte n'est pas si difficile que cela, ils doivent faire des efforts à la fin !
- NLM76Grand Maître
Merci Pomée.
En fait, j'ai vraiment des élèves qui ont d'énormes lacunes. Et ce que je constate, pour un bon nombre d'entre eux (pas tous !), c'est que les textes littéraires, surtout si l'on remonte au-delà du XIXe siècle, leur sont parfaitement étrangers ; mais, pour certains, quand ils comprennent dès l'abord, une fine sensibilité.
Les groupes de 3 ou 4, je crois que je ne ferai plus jamais ça : de façon générale, c'est une escroquerie. Mais j'ai le sentiment que le demander aux élèves, de quelque manière que ce soit, sera chronophage, laborieux, et produira plus d'effets délétères que d'effets positifs : contresens divers, fautes d'orthographe et de syntaxe multiples et variées... Non. Mon idée est de le donner à lire en complément uniquement pour les élèves les moins forts, qui, de fait, n'auront pas lu ce qu'en théorie, ils devraient avoir lu, de sorte que dès l'abord, ils aient accès directement au sens de cet extrait. Les élèves qui ont lu, qui sont capables de comprendre le texte tel quel, à mon avis minoritaires dans mes classes, seront invités à lire le texte original dès l'abord.
En fait, j'ai vraiment des élèves qui ont d'énormes lacunes. Et ce que je constate, pour un bon nombre d'entre eux (pas tous !), c'est que les textes littéraires, surtout si l'on remonte au-delà du XIXe siècle, leur sont parfaitement étrangers ; mais, pour certains, quand ils comprennent dès l'abord, une fine sensibilité.
Les groupes de 3 ou 4, je crois que je ne ferai plus jamais ça : de façon générale, c'est une escroquerie. Mais j'ai le sentiment que le demander aux élèves, de quelque manière que ce soit, sera chronophage, laborieux, et produira plus d'effets délétères que d'effets positifs : contresens divers, fautes d'orthographe et de syntaxe multiples et variées... Non. Mon idée est de le donner à lire en complément uniquement pour les élèves les moins forts, qui, de fait, n'auront pas lu ce qu'en théorie, ils devraient avoir lu, de sorte que dès l'abord, ils aient accès directement au sens de cet extrait. Les élèves qui ont lu, qui sont capables de comprendre le texte tel quel, à mon avis minoritaires dans mes classes, seront invités à lire le texte original dès l'abord.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- PoméeNiveau 9
Je comprends, il faut s'adapter à nos classes.
En tout cas, ça me donne une idée d'exercice... dommage que nous ayons si peu de temps !
En tout cas, ça me donne une idée d'exercice... dommage que nous ayons si peu de temps !
- Mélusine2Niveau 10
Je l'ai retrouvé dans les instructions régionales pour la réforme : il était noté "temps indicatif, 2 mn maximum", puis 8, 2 ! ( pour la grammaire ), 8, c'était assez comique. Je suis d'accord pour la nécessité de d'abord ralentir la lecture, c'est un combat : entends et écoute, petit-e !NLM76 a écrit:Il y a eu ça ? Je ne me souviens pas. Qu'est-ce que c'était ? Pour la lecture expressive, ce que je constate, c'est que l'immense majorité des élèves lit beaucoup trop vite, et que pour vingt lignes de prose, deux minutes, ça me semble beaucoup mieux que les 45 secondes habituelles. En fait, le passage par la contrainte technique du temps en l'espèce me paraît plutôt une bonne chose: une fois qu'on a réussi à obtenir qu'ils ralentissent leur lecture, on peut commencer à travailler.Mélusine2 a écrit:
Je ne crois pas qu'il y ait eu du neuf depuis la grille stupide à un point la minute et l'injonction de "2 minutes de lecture expressive" .
du "courant" même pas alternatif.
Oui : outre la grande confusion des dénominations, des mouvement/mouvements/ problématique (du texte ! mon dieu !)/ projet de lecture, mes élèves continuent, les malheureux, de tenter à toute force de coller une étiquette sur les auteurs : c'est ainsi que j'ai pu lire qu'Ernaux était surréaliste, ou bien (même classe) relevait du nouveau roman, puisque le texte était daté du XXe : c'est éclairant, l'étiquetage, vraiment !NLM76 a écrit:Est-ce que tu fais allusion à quelque chose de précis ? C'est le nouveau terme à la mode pour ce que naguère ils appelaient les "mouvements littéraires", jetés à la poubelle depuis que la mode est aux "mouvements du texte" ?
NLM76 a écrit: Tu vois qu'à ce stade de l'année, je parle en fait beaucoup du chronomètre — peut-être à tort. Je vais essayer d'expliquer pourquoi je fais ainsi; si tu veux bien formuler comment tu t'y prends pour éviter d'en parler, cela me permettrait sans doute d'améliorer mon affaire.
D'abord, l'essentiel, c'est que chez nous, lors du bac blanc, la plupart des prestations sont beaucoup trop courtes. Ils n'arrivent pas à s'imaginer qu'il faut vraiment parler 10 minutes sur le texte. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles ils suivent fort distraitement le cours, et s'imaginent que c'est bon s'ils ont le sentiment d'avoir compris quel est le thème général du texte. D'autre part la question du format est en soi vraiment importante : on peut faire, sur le même texte, une très bonne explication de deux minutes, de cinq minutes, de dix minutes, d'une demi-heure, de six heures.
En somme, le minutage me permet d'aller vers l'exigence sur le fond de la façon suivante : pour tenir les 7 à 9 minutes du corps de l'explication, il faut avoir en gros sept à douze remarques pertinentes en magasin, ET il faut savoir développer, articuler, expliquer clairement ces remarques pour qu'elles soient convaincantes. Certes la seule exigence de "tenir le temps" ne permet, le plus souvent, d'obtenir, à la place du vide, du gloubi-boulga. Donc, il faut que je dise encore plus clairement qu'il faut "tenir" les dix minutes, mais que les tenir avec du vent revient au même que de ne rien dire, et que les points seront obtenus par les remarques pertinentes. Disons quelque chose comme "une remarque pertinente = un point". Et là on arrive au point crucial : qu'est-ce qu'une remarque pertinente? Mais peut-être devrais-je commencer par l'essentiel : "On attend de vous une explication qui contient une dizaine de remarques littéraires pertinentes et convaincantes".
Ça, je ne te promets rien ! Ta démarche est peut-être plus efficace... je dis à ce stade de l'année que le temps n'a pas d'importance, qu'il faut avoir des choses intéressantes à dire, bien s'appuyer sur le texte : ça me semble assez voisin de ce que tu expliques, mais pris en sens inverse. J'insiste beaucoup sur ce que j'ai graissé, me déclare satisfaite avec 4/5 mn d'EL (sans la lecture) qui se tiennent, je ne compte le temps qu'au printemps, c'est moins déprimant : mais alors te dire que ça marche forcément mieux, ce serait franchement malhonnête.
- HS : translation:
- Vu par ailleurs ta tentative de translation : je ne sais pas si ça peut consoler ou aider quiconque, mais j'ai choisi Colette et les difficultés sont plus grandes que prévu. Ce n'est pas le lexique botanique qui coince spécialement, ils glissent dessus, c'est la syntaxe et ce sont les saynètes successives : les élèves se perdent, il faut du temps pour admettre qu'un paragraphe parle du brave toutou sur la plage, et le suivant du soleil sur la plage, et que non il n'y a nulle incohérence. Accéder à la vision d'ensemble prend un temps fou.
- NLM76Grand Maître
Oui, au fond nous avons la même idée ; mais à te lire, j'ai le sentiment que tu as davantage "raison" que moi. En tout cas, pas besoin d'insister sur le coup des 10 minutes; une fois que c'est dit, c'est dit. En fait, je crois que je tiens à la question du temps parce que je voudrais leur montrer qu'une remarque bien développée ne dure pas cinq secondes, mais plutôt pas loin d'une minute.
Cependant, encore une fois, comme tu le dis, il faut que cette minute ne soit pas remplie de vide, mais d'un véritable discours.
Cependant, encore une fois, comme tu le dis, il faut que cette minute ne soit pas remplie de vide, mais d'un véritable discours.
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- NLM76Grand Maître
Et hop, une explication de texte. Je ne croyais pas, en me lançant, que ce serait aussi passionnant !
- https://www.lettresclassiques.fr/2022/12/03/grieux-se-fait-greluchon/
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- IphigénieProphète
une info peu utile sans doute mais curieuse, lue ce matin (au départ, on discutait de Liszt, ne me demandez pas pourquoi j'ai atterri sur Sand ): Sand a fait une réécriture de Manon, en inversant les rôles masculins et féminins, faisant de l'homme le séducteur peu fidèle, on se demande bien pourquoi...: Leone Leoni
Perso j'ignorais totalement ce titre, donc je partage, si ça intéresse quelqu'un
Perso j'ignorais totalement ce titre, donc je partage, si ça intéresse quelqu'un
- NLM76Grand Maître
Intéressant !
J'irai voir.
Au fait : heureusement que @The Paper me signale que j'avais oublié de placer le fichier joint contenant l'explication de "Grieux se fait greluchon". C'est fait maintenant.
J'irai voir.
Au fait : heureusement que @The Paper me signale que j'avais oublié de placer le fichier joint contenant l'explication de "Grieux se fait greluchon". C'est fait maintenant.
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- DeliaEsprit éclairé
Remarques en passant :
1) non, Manon ne sort pas du ruisseau, elle y est tombée. Sa naissance est commune, dit-elle. On voit en filigrane que ses parents sont soucieux d'honorabilité puisqu'ils l'envoient au couvent pour canaliser son appétit de vivre.
2) Grieux est bel et bien chevalier : l’ordre de Malte, auquel mes parents me destinaient. Ils me faisaient déjà porter la croix, avec le nom de chevalier des Grieux.
1) non, Manon ne sort pas du ruisseau, elle y est tombée. Sa naissance est commune, dit-elle. On voit en filigrane que ses parents sont soucieux d'honorabilité puisqu'ils l'envoient au couvent pour canaliser son appétit de vivre.
2) Grieux est bel et bien chevalier : l’ordre de Malte, auquel mes parents me destinaient. Ils me faisaient déjà porter la croix, avec le nom de chevalier des Grieux.
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Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampaté Ba
- NLM76Grand Maître
1) oui, c'est tout à fait vrai. Mon affirmation est bien trop rapide. Mais je croyais avoir indiqué une nuance quand je l'ai comparée à Jeanne Poisson. En tout cas c'est un point à améliorer, tu as bien raison.Delia a écrit:Remarques en passant :
1) non, Manon ne sort pas du ruisseau, elle y est tombée. Sa naissance est commune, dit-elle. On voit en filigrane que ses parents sont soucieux d'honorabilité puisqu'ils l'envoient au couvent pour canaliser son appétit de vivre.
2) Grieux est bel et bien chevalier : l’ordre de Malte, auquel mes parents me destinaient. Ils me faisaient déjà porter la croix, avec le nom de chevalier des Grieux.
2) Oui, bien sûr. Je dis qq chose de contraire ?
- DeliaEsprit éclairé
Tu indiques, dans ton vocabulaire :
Ce n'est pas un titre, c'est un nom, le nom que sa famille lui a choisi.le titre de « chevalier » indique seulement que Grieux appartient à une famille noble, mais n’a
pas de véritable titre.
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Amadou Hampaté Ba
- NLM76Grand Maître
Oui, je vois qu'il y a là une inexactitude de ma part à corriger. Mais je ne comprends pas ce que tu veux dire ci-dessus. Puisqu'il est fait chevalier de l'ordre de Malte, il a acquis le titre de chevalier, non ? Tu parles peut-être du nom de "Grieux" qui est le nom que sa famille lui a choisi, et non le nom de sa famille ?Delia a écrit: Tu indiques, dans ton vocabulaire :
Ce n'est pas un titre, c'est un nom, le nom que sa famille lui a choisi.le titre de « chevalier » indique seulement que Grieux appartient à une famille noble, mais n’a
pas de véritable titre.
En fait, j'avais dans un premier temps cru à tort que cela fonctionnait comme "le chevalier de Guise", qui, dans La princesse de Clèves, désigne un cadet de Guise.
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- NLM76Grand Maître
En fait, est-ce que je ne commets pas une erreur en considérant qu'il appartient à une famille de grande noblesse ? Famille de notables sans doute, mais peut-être qqch comme une noblesse de robe ? "Une des meilleures familles de P..." C'est bien maigre comme indication.
Edition : J'ai vérifié rapidement dans le livre. Le fait qu'il appartienne à une famille de grande noblesse, en dehors de son mépris général pour le bas peuple, est assez bien attesté :
Edition : J'ai vérifié rapidement dans le livre. Le fait qu'il appartienne à une famille de grande noblesse, en dehors de son mépris général pour le bas peuple, est assez bien attesté :
- La bonne grâce et la vive reconnaissance avec laquelle ce jeune inconnu me remercia achevèrent de me persuader qu’il était né quelque chose, et qu’il méritait ma libéralité. (I, §2)
- J’avais dix-sept ans, et j’achevais mes études de philosophie à Amiens, où mes parents, qui sont d’une des meilleures maisons de P… , m’avaient envoyé.(I, §5)
- Ma naissance, le succès de mes études et quelques agréments extérieurs m’avaient fait connaître et estimer de tous les honnêtes gens de la ville.5
- Ils me faisaient déjà porter la croix, avec le nom de chevalier des Grieux. (I, §5) [Ça, c'est pour bien montrer que son nom de famille n'est pas Grieux, qu'il s'agit d'un surnom, un peu comme Boileau se fait appeler Despréaux, et Prévost, d'Exiles. D'autre part, je crois comprendre que si le titre de chevalier était courant chez les cadets de grandes familles, c'est parce que l'ordre de Malte était l'une des carrières qu'on leur faisait emprunter.]
- Elle voulut savoir qui j’étais, et cette connaissance augmenta son affection, parce qu’étant d’une naissance commune, elle se trouva flattée d’avoir fait la conquête d’un amant tel que moi. (I, §5)
- Il me dit que je ne devais pas me livrer trop au chagrin, et qu’il se sentait disposé à me rendre service, en faveur de ma naissance et de ma jeunesse. [II, §60] (Il s’agit du lieutenant général).
- Le vent étant favorable pour Calais, je me suis embarqué aussitôt, dans le dessein de me rendre à quelques lieues de cette ville, chez un gentilhomme de mes parents, où mon frère m’écrit qu’il doit attendre mon arrivée. (II, §111)
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- PoméeNiveau 9
NLM76 a écrit:
[*]Ils me faisaient déjà porter la croix, avec le nom de chevalier des Grieux. (I, §5) [Ça, c'est pour bien montrer que son nom de famille n'est pas Grieux, qu'il s'agit d'un surnom, un peu comme Boileau se fait appeler Despréaux, et Prévost, d'Exiles. D'autre part, je crois comprendre que si le titre de chevalier était courant chez les cadets de grandes familles, c'est parce que l'ordre de Malte était l'une des carrières qu'on leur faisait emprunter.]
Oui pour éviter qu'ils aient des enfants. Bien pratique pour la famille...
- The PaperHabitué du forum
Il y a aussi le passage où il vient d'agresser le vieux G...M... à la prison :NLM76 a écrit:Le fait qu'il appartienne à une famille de grande noblesse, en dehors de son mépris général pour le bas peuple, est assez bien attesté
"M. de G... M... rajustait pendant ce temps-là sa perruque et sa cravate ; et dans le dépit d'avoir été si maltraité, il ordonnait au Supérieur de me resserrer plus étroitement que jamais, et de me punir par tous les châtiments qu'on sait être propres à Saint-Lazare. Non, Monsieur, lui dit le Supérieur ; ce n'est point avec une personne de la naissance de M. le Chevalier, que nous en usons de cette manière."
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- Etude de "Manon Lescaut" https://www.amazon.fr/dp/B0B8BM227F
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Etude du Menteur de Corneille : https://www.amazon.fr/dp/B0DG31W66J
Etude du "Malade imaginaire" https://www.amazon.fr/dp/B08D54RDYF
Etude de la "Déclaration des droits de la femme" : https://www.amazon.fr/dp/B09B7DHTXP
Etude de "La princesse de Clèves" : https://www.amazon.fr/dp/B07VWGR4L4
"Bataille de dames" + étude https://www.amazon.fr/dp/B09FC7XCW4
"Les Romanesques" + étude : https://www.amazon.fr/dp/B0DC78GZR9
"Bisclavret" et "Le laüstic" + dossier sur le loup https://www.amazon.fr/dp/B0CGL84111
- NLM76Grand Maître
Voici maintenant un élément pour une étude d'ensemble. Pas eu le temps de veiller à la formulation à destination des lycéens. N'hésitez pas si vous avez des suggestions, ou bien des critiques sur le fond !
https://www.lettresclassiques.fr/2022/12/08/structure-de-manon-lescaut-1/
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- clo74Niveau 9
Je dois avouer que je me trouve un peu bête car je peine à m'expliquer cette phrase, tirée de la lettre que Manon laisse au Chevalier quand elle le quitte pour M. de G... M... : ""La faim me causerait quelque méprise fatale ; je rendrais quelque jour le dernier soupir, en croyant en pousser un d'amour."
Merci d'avance pour vos avis éclairés!
Merci d'avance pour vos avis éclairés!
- IllianeExpert
Elle dit le quitter car, en restant avec lui, elle mourrait de faim (en croyant mourir d'amour) : Manon montre ici tout son prosaïsme et son côté "pratique".
- clo74Niveau 9
Merci Illiane, mais pourquoi "la faim me causerait quelque méprise fatale", puisque justement elle ne veut pas rester avec lui de peur de mourir de faim? C'est peut-être mon cerveau qui me joue un mauvais tour, mais je bloque! J'aurais compris si elle avait écrit "l'amour me causerait quelque méprise fatale..."
- NLM76Grand Maître
Ah ! j'ai compris ce que tu veux dire. Oui, on peut comprendre qu'elle mourrait sans s'en rendre compte : elle croirait pousser un soupir d'amour et de plaisir, et en fait elle serait en train d'expirer. En somme, elle se laisserait abuser par la ressemblance entre la petite mort et la grande mort. Elle pousserait un dernier soupir à cause de la faim, et à cause de la faim qui fait pousser des soupirs qui ressemblent aux soupirs d'amour, etc. Enfin voilà, c'est bien tordu à souhait pour prétendre que l'amour lui importe, alors qu'elle largue son "amoureux" comme une vieille chaussette. C'est tordu et c'est tordant.clo74 a écrit:Merci Illiane, mais pourquoi "la faim me causerait quelque méprise fatale", puisque justement elle ne veut pas rester avec lui de peur de mourir de faim? C'est peut-être mon cerveau qui me joue un mauvais tour, mais je bloque! J'aurais compris si elle avait écrit "l'amour me causerait quelque méprise fatale..."
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- clo74Niveau 9
Merci pour ta réponse, NLM76, je crois que tu as compris ce que j'ai dans ma pauvre tête embrouillée. Mais peux-tu me dire comment les autres comprennent cette phrase? Je voudrais donner cet extrait en lecture linéaire, mais je vais y renoncer si moi-même je ne comprends pas cette phrase!NLM76 a écrit:Ah ! j'ai compris ce que tu veux dire. Oui, on peut comprendre qu'elle mourrait sans s'en rendre compte : elle croirait pousser un soupir d'amour et de plaisir, et en fait elle serait en train d'expirer. En somme, elle se laisserait abuser par la ressemblance entre la petite mort et la grande mort. Elle pousserait un dernier soupir à cause de la faim, et à cause de la faim qui fait pousser des soupirs qui ressemblent aux soupirs d'amour, etc. Enfin voilà, c'est bien tordu à souhait pour prétendre que l'amour lui importe, alors qu'elle largue son "amoureux" comme une vieille chaussette. C'est tordu et c'est tordant.clo74 a écrit:Merci Illiane, mais pourquoi "la faim me causerait quelque méprise fatale", puisque justement elle ne veut pas rester avec lui de peur de mourir de faim? C'est peut-être mon cerveau qui me joue un mauvais tour, mais je bloque! J'aurais compris si elle avait écrit "l'amour me causerait quelque méprise fatale..."
- NLM76Grand Maître
Si elle était "vraiment" amoureuse, elle dirait "l'amour provoquerait quelque méprise fatale". Mais comme elle sait bien que ce qui fait crever, c'est la faim, pas l'amour, elle dit les choses réellement. D'autre part, elle sait bien que la faim est plus puissante que l'amour pour susciter des hallucinations : c'est la faim elle-même qui lui ferait croire que la faim n'est pas la faim, mais l'amour. Ça ne peut pas être l'amour, parce que l'amour, ça n'existe pas quand on a faim. Ce n'est pas l'amour qui lui ferait croire qu'elle n'a pas faim. C'est la faim. Comme elle dit que l'idée qu'on pourrait mourir d'amour est une fadaise, ça ne peut être à cause de l'amour qu'elle aurait faim. Elle aurait faim à cause de la faim.
Le raisonnement est à la fois parfaitement inattaquable et parfaitement bancal.
Ce qui se cache peut-être sous "la faim", c'est aussi "la sottise qui consiste à croire que l'Amour mérite qu'on lui sacrifie sa vie". D'une certaine façon, pour Manon, seul le plaisir existe, pas l'Amour. Autrement dit, c'est très intéressant, ce que tu as remarqué : le fait que Manon ne dise pas, comme on l'eût attendu "L'amour provoquerait quelque méprise fatale".
Le raisonnement est à la fois parfaitement inattaquable et parfaitement bancal.
Ce qui se cache peut-être sous "la faim", c'est aussi "la sottise qui consiste à croire que l'Amour mérite qu'on lui sacrifie sa vie". D'une certaine façon, pour Manon, seul le plaisir existe, pas l'Amour. Autrement dit, c'est très intéressant, ce que tu as remarqué : le fait que Manon ne dise pas, comme on l'eût attendu "L'amour provoquerait quelque méprise fatale".
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- clo74Niveau 9
Merci mille fois NLM76! C'est plus clair maintenant!NLM76 a écrit:Si elle était "vraiment" amoureuse, elle dirait "l'amour provoquerait quelque méprise fatale". Mais comme elle sait bien que ce qui fait crever, c'est la faim, pas l'amour, elle dit les choses réellement. D'autre part, elle sait bien que la faim est plus puissante que l'amour pour susciter des hallucinations : c'est la faim elle-même qui lui ferait croire que la faim n'est pas la faim, mais l'amour. Ça ne peut pas être l'amour, parce que l'amour, ça n'existe pas quand on a faim. Ce n'est pas l'amour qui lui ferait croire qu'elle n'a pas faim. C'est la faim. Comme elle dit que l'idée qu'on pourrait mourir d'amour est une fadaise, ça ne peut être à cause de l'amour qu'elle aurait faim. Elle aurait faim à cause de la faim.
Le raisonnement est à la fois parfaitement inattaquable et parfaitement bancal.
Ce qui se cache peut-être sous "la faim", c'est aussi "la sottise qui consiste à croire que l'Amour mérite qu'on lui sacrifie sa vie". D'une certaine façon, pour Manon, seul le plaisir existe, pas l'Amour. Autrement dit, c'est très intéressant, ce que tu as remarqué : le fait que Manon ne dise pas, comme on l'eût attendu "L'amour provoquerait quelque méprise fatale".
- NLM76Grand Maître
C'est intéressant notre discussion, au plan de la méthode. Nous avons expliqué le texte, sans aucun technicisme, sans aucune figure de style, sans "procédé d'écriture" répertorié. C'est ce qui arrive très fréquemment dans une véritable explication de texte.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
- clo74Niveau 9
Effectivement ! Je le dis souvent aux élèves : les mots ont un sens. Et c'est cela qu'il faut regarder. Peut-être est-ce dû à notre formation classique, et à l'habitude de la traduction?NLM76 a écrit:C'est intéressant notre discussion, au plan de la méthode. Nous avons expliqué le texte, sans aucun technicisme, sans aucune figure de style, sans "procédé d'écriture" répertorié. C'est ce qui arrive très fréquemment dans une véritable explication de texte.
- NLM76Grand Maître
Peut-être. Mais de mon côté, je fus d'abord un "moderne", pendant la moitié de ma carrière, et ne suis aussi un "classique" que depuis une petite quinzaine d'années. Il faut reconnaître cependant que la version anglaise et la traduction de l'ancien français furent à l'origine des points essentiels de ma formation.
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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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